La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

31/12/2015 | FRANCE | N°15VE02511

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 1ère chambre, 31 décembre 2015, 15VE02511


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme D...B...a demandé au Tribunal administratif de Montreuil l'annulation de l'arrêté du 24 décembre 2013 par lequel le préfet de la Seine-Saint-Denis a refusé de lui délivrer le titre de séjour sollicité, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination.

Par jugement n° 1401722 du 3 novembre 2014, le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 29

juillet 2015, MmeB..., représentée par Me Audrain, avocat, demande à la Cour :

1° d'annuler ce jug...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme D...B...a demandé au Tribunal administratif de Montreuil l'annulation de l'arrêté du 24 décembre 2013 par lequel le préfet de la Seine-Saint-Denis a refusé de lui délivrer le titre de séjour sollicité, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination.

Par jugement n° 1401722 du 3 novembre 2014, le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 29 juillet 2015, MmeB..., représentée par Me Audrain, avocat, demande à la Cour :

1° d'annuler ce jugement ;

2° d'annuler cet arrêté ;

3° d'enjoindre au préfet de la Seine-Saint-Denis de lui délivrer une carte de séjour portant la mention " vie privée et familiale " dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 150 euros par jour de retard ;

4° à défaut, de procéder au réexamen de sa situation sous les mêmes conditions de délais et d'astreinte ;

5° de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros au titre des articles 37 de la loi du 10 juillet 1991 et L. 761-1 du code de justice administrative.

Mme B...soutient que :

S'agissant de la décision de refus de titre de séjour :

- le jugement est irrégulier dès lors que le tribunal administratif a omis de statuer sur le moyen tiré du défaut d'examen de sa situation personnelle, soulevé devant lui ;

- la décision est insuffisamment motivée ;

- elle méconnaît les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ainsi que les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation.

S'agissant de la décision portant obligation de quitter le territoire français :

- elle est dépourvue de base légale en raison de l'illégalité de la décision de refus de titre ;

- elle méconnaît les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ainsi que les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation.

S'agissant de la décision fixant le pays de destination :

- elle est insuffisamment motivée ;

- elle méconnaît les dispositions de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ainsi que les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

......................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 modifiée ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

A été entendu, au cours de l'audience publique, le rapport de M. Nicolet.

1. Considérant que MmeB..., ressortissante malienne née le 17 août 1986, a sollicité une carte de séjour au titre de l'asile par demande du 2 février 2012 ; que sa demande a été rejetée par décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA) en date du 30 juillet 2012, confirmée par décision de la Cour nationale du droit d'asile (CNDA) en date du 18 mars 2013 ; que, par arrêté du 24 décembre 2013, le préfet de la Seine-Saint-Denis a rejeté sa demande de carte de séjour au titre de d'asile, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel elle pourrait être éloignée ; que Mme B...demande l'annulation du jugement n° 1401722 du 3 novembre 2014 par lequel le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 24 décembre 2013, ainsi que l'annulation de cet arrêté ;

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que Mme B...a soulevé, dans sa requête introductive d'instance, le moyen tiré de ce que le préfet de la Seine-Saint-Denis n'aurait pas procédé à un examen de sa situation personnelle avant de lui refuser le titre de séjour litigieux ; que les premiers juges n'ayant pas répondu à ce moyen qui n'est pas inopérant, le jugement attaqué est irrégulier ; que dès lors, il y a lieu de l'annuler et de statuer par voie d'évocation sur la demande de Mme B...;

Sur la décision portant refus du titre de séjour :

3. Considérant que Mme A...C..., attachée d'administration de l'intérieur et de l'outre-mer, adjoint au chef de bureau, a reçu, par arrêté préfectoral du 4 novembre 2013, délégation de signature en matière d'asile, ainsi que pour les mesures d'éloignement et fixant le pays de destination ; que, par suite, le moyen tiré de l'incompétence du signataire de la décision portant refus de titre de séjour doit être écarté ;

4. Considérant qu'aux termes de l'article 1er de la loi du 11 juillet 1979 : " Les personnes physiques ou morales ont le droit d'être informées sans délai des motifs des décisions administratives individuelles qui les concernent (...) " ; qu'aux termes de l 'article 3 de la même loi : " La motivation exigée par la présente loi doit être écrite et comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui constituent le fondement de la décision " ; qu'aux termes du I de l 'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'autorité administrative peut obliger à quitter le territoire français un étranger non ressortissant d'un Etat membre de l'Union européenne, d'un autre Etat partie à l'accord sur l'Espace économique européen ou de la Confédération suisse et qui n'est pas membre de la famille d'un tel ressortissant au sens des 4° et 5° de l'article L. 121-1, lorsqu'il se trouve dans l'un des cas suivants : (...) 3° Si la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé à l'étranger ou si le titre de séjour qui lui avait été délivré lui a été retiré (...). La décision énonçant l'obligation de quitter le territoire français est motivée. Elle n'a pas à faire l'objet d'une motivation distincte de celle de la décision relative au séjour dans les cas prévus aux 3° et 5° du présent I (...) " ;

5. Considérant que la décision attaquée vise notamment les articles 3 et 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ainsi que le livre VII du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile relatif au droit d'asile ; qu'elle précise que la demande d'asile de Mme B...a été rejetée par décision de l'OFPRA en date du 30 juillet 2012, confirmée par décision de la CNDA du 18 mars 2013, et que l'intéressée ne justifie pas en France d'une situation personnelle et familiale à laquelle la présente décision porterait une atteinte disproportionnée ; qu'ainsi, alors même qu'elle aurait été rédigée à l'aide d'une formule stéréotypée, la décision attaquée est suffisamment motivée ;

6. Considérant qu'il ne ressort pas des pièces du dossier, et notamment de la décision attaquée, que la demande de titre de séjour présentée par Mme B...n'aurait pas fait l'objet d'un examen particulier ;

7. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que Mme B...a sollicité la délivrance d'un titre de séjour en qualité de demandeur d'asile ; que le préfet de Seine-Saint-Denis n'était pas tenu de statuer sur le droit de l'intéressée à séjourner en France à un autre titre ; qu'il suit de là que Mme B...ne peut utilement soutenir que la décision attaquée méconnaîtrait les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

8. Considérant qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui " ;

9. Considérant que si Mme B...fait valoir que son père, sa mère et ses trois frères et soeurs résident régulièrement en France et qu'elle n'a plus d'attaches familiales au Mali en raison du décès de ses grands-parents, il ressort toutefois des pièces du dossier que l'intéressée, célibataire et sans charge de famille, ne réside en France que depuis février 2011 et n'établit pas être dépourvue de toute attache familiale dans son pays d'origine où elle a vécu jusqu'à l'âge de 24 ans ; que, par suite, Mme B...n'est pas fondée à soutenir que le préfet aurait porté au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des buts en vue desquels la décision attaquée a été prise, en méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que, pour les mêmes motifs, le préfet n'a pas entaché sa décision d'une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences sur la situation personnelle de MmeB... ;

Sur la décision portant obligation de quitter le territoire français :

10. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que les moyens tirés de l'incompétence de l'auteur de l'acte, de l'illégalité du refus de titre de séjour soulevée par voie d'exception, de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne des droits de l'homme et des libertés fondamentales et des dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, ainsi que de l'erreur manifeste d'appréciation, doivent être écartés ;

Sur la décision fixant le pays de destination :

11. Considérant que la décision vise notamment l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et les articles L. 513-1 à 4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile par ; qu'elle précise que Mme B... n'établit pas être exposée à des risques et à des peines ou traitements contraires à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales en cas de retour dans son pays d'origine ; que, par suite, le moyen tiré du défaut de motivation de la décision fixant le pays de destination doit être écarté ;

12. Considérant qu'aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants " ; qu'aux termes de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " (...) Un étranger ne peut être éloigné à destination d'un pays s'il établit que sa vie ou sa liberté y sont menacées ou qu'il y est exposé à des traitements contraires aux stipulations de l'article 3 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950. " ; qu'il appartient à l'autorité administrative chargée de prendre la décision fixant le pays de renvoi d'un étranger obligé de quitter le territoire français, de s'assurer, sous le contrôle du juge, que les mesures qu'elle prend n'exposent pas l'étranger à des risques sérieux pour sa liberté ou son intégrité physique, en violation des dispositions de l'article L. 513-2 précité du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, non plus qu'à des traitements contraires à l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

13. Considérant que si MmeB..., dont la demande d'asile a été rejetée par l'OFPRA et la CNDA, soutient qu'en cas de retour au Mali, elle craint d'être soumise à un mariage forcé, la production d'une attestation médicale établissant qu'elle a été excisée et d'un article de l'UNICEF de 2009 alertant de l'important taux de mortalité des jeunes filles de moins de 18 ans au Mali à la suite de mariages forcés ne permettent pas, à eux-seuls, d'établir les risques actuels et personnels qu'elle encourrait en cas de retour dans son pays d'origine ; que, par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et des dispositions de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doit être écarté ;

14. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mme B...n'est pas fondée à demander l'annulation de l'arrêté du préfet de la Seine-Saint-Denis du 24 décembre 2013 ; que, par voie de conséquence, ses conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte, ainsi que celles tendant à l'application des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 doivent être rejetées.

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement du Tribunal administratif de Montreuil est annulé.

Article 2 : La demande de Mme B...présentée devant le tribunal administratif est rejetée.

Article 3 : Les conclusions présentées en appel sur le fondement des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 sont rejetées.

''

''

''

''

2

N° 15VE02511


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 15VE02511
Date de la décision : 31/12/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03 Étrangers. Séjour des étrangers. Refus de séjour.


Composition du Tribunal
Président : M. BEAUJARD
Rapporteur ?: M. Philippe NICOLET
Rapporteur public ?: Mme RUDEAUX
Avocat(s) : CABINET D'AVOCATS MONTMARTRE

Origine de la décision
Date de l'import : 20/01/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2015-12-31;15ve02511 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award