La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

22/09/2016 | FRANCE | N°16VE00434

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 6ème chambre, 22 septembre 2016, 16VE00434


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société MG Recherches a demandé au Tribunal administratif de Cergy-Pontoise d'annuler la décision du ministre chargé du travail du 12 avril 2010 portant refus d'autorisation de licencier Mme A...pour motif économique.

Par un jugement n° 1005233 du 18 février 2013, le Tribunal administratif de

Cergy-Pontoise a annulé cette décision.

Première procédure devant la Cour :

Par un arrêt n° 13VE01203 du 7 octobre 2014, la Cour administrative d'appel de Versailles a annulé ce j

ugement et rejeté la demande présentée par la société MG Recherches devant le Tribunal administratif ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société MG Recherches a demandé au Tribunal administratif de Cergy-Pontoise d'annuler la décision du ministre chargé du travail du 12 avril 2010 portant refus d'autorisation de licencier Mme A...pour motif économique.

Par un jugement n° 1005233 du 18 février 2013, le Tribunal administratif de

Cergy-Pontoise a annulé cette décision.

Première procédure devant la Cour :

Par un arrêt n° 13VE01203 du 7 octobre 2014, la Cour administrative d'appel de Versailles a annulé ce jugement et rejeté la demande présentée par la société MG Recherches devant le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise.

Procédure devant le Conseil d'Etat :

Par une décision n° 386628 du 13 janvier 2016, le Conseil d'Etat, statuant au contentieux a, à la demande de la société MG Recherches, annulé cet arrêt et renvoyé l'affaire à la Cour administrative d'appel de Versailles.

Seconde procédure devant la Cour :

Par une requête et des mémoires, enregistrés les 15 avril 2013, 20 mai 2014 et 6 mai 2016, Mme A..., représentée par le cabinet d'avocats Brihi Koskas et Associés, demande à la Cour :

1° d'annuler ce jugement ;

2° de rejeter la demande présentée par la société MG Recherches devant le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise en confirmant la décision du ministre chargé du travail ;

3° de mettre à la charge de la société MG Recherches la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Mme A... soutient que :

- à titre principal, son employeur n'a pas satisfait à son obligation de reclassement dès lors qu'aucun des quatre postes proposés (dont deux entraînaient un déclassement) ne permettait le télétravail, et qu'il existait de nombreux emplois disponibles de son niveau au sein de la société-mère Quintilès Benefit France, qui ne lui ont pas été proposés ;

- à titre subsidiaire, le motif économique n'est pas établi dans la mesure où la cessation de l'activité de la société MG Recherches est imputable à cette dernière, démontrant l'existence d'une faute ou d'une légèreté blâmable de l'employeur, où la société Quintiles Benefit France devait être considérée comme co-employeur et où une partie de l'activité de la société MG Recherches a été reprise au niveau du groupe Quintiles ;

- son recours hiérarchique était recevable.

Par des mémoires, enregistrés les 19 septembre 2013 et 20 mai 2016, le ministre chargé du travail conclut à l'annulation du jugement attaqué et au rejet de la demande présentée par la société MG Recherches devant le tribunal administratif de Cergy-Pontoise. Le ministre soutient que si le motif économique est établi, les efforts de reclassement de la société MG Recherches étaient insuffisants.

Par un mémoire en défense, enregistré le 16 mai 2014, la société MG Recherches conclut au rejet de la requête et à ce que la somme de 3 000 euros soit mise à la charge de MmeA..., au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le ministre a omis de s'assurer que le recours hiérarchique dont il était saisi était recevable ;

- ce recours hiérarchique signé " pour ordre " par une personne non identifiable n'était pas recevable.

- les moyens soulevés par Mme A...ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code du travail ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Bigard,

- les conclusions de M. Delage, rapporteur public,

- et les observations de Me Koskas pour MmeA....

1. Considérant que par une décision en date du 12 avril 2010, le ministre chargé du travail a refusé l'autorisation de licenciement de MmeA..., détenant les mandats de délégué du personnel et de délégué syndical, présentée par la société MG Recherches pour motif économique ; que Mme A...relève appel du jugement du 18 février 2013 par lequel le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a annulé cette décision ;

Sur le bien fondé du jugement :

2. Considérant qu'en vertu des dispositions du code du travail, le licenciement des salariés légalement investis de fonctions représentatives, qui bénéficient d'une protection exceptionnelle dans l'intérêt de l'ensemble des travailleurs qu'ils représentent, ne peut intervenir que sur autorisation de l'inspecteur du travail ; que, lorsque le licenciement d'un de ces salariés est envisagé, il ne doit pas être en rapport avec les fonctions représentatives normalement exercées ou l'appartenance syndicale de l'intéressé ; que, dans le cas où la demande de licenciement est fondée sur un motif de caractère économique, il appartient à l'inspecteur du travail et, le cas échéant, au ministre, de rechercher, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, si la situation de l'entreprise justifie le licenciement du salarié, en tenant compte notamment de la nécessité des réductions envisagées d'effectifs et de la possibilité d'assurer le reclassement du salarié dans l'entreprise ou au sein du groupe auquel appartient cette dernière ;

3. Considérant qu'aux termes de l'article L. 1233-4 du code du travail dans sa rédaction en vigueur à la date de la décision attaquée : " Le licenciement pour motif économique d'un salarié ne peut intervenir que lorsque tous les efforts de formation et d'adaptation ont été réalisés et que le reclassement de l'intéressé ne peut être opéré dans l'entreprise ou dans les entreprises du groupe auquel l'entreprise appartient ( ...) " ; qu'il résulte de ces dispositions que, pour apprécier si l'employeur a satisfait à son obligation en matière de reclassement, l'autorité administrative doit s'assurer, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, qu'il a procédé à la recherche des possibilités de reclassement du salarié dans les entreprises dont l'organisation, les activités ou le lieu d'exploitation permettent, en raison des relations qui existent avec elles, d'y effectuer la permutation de tout ou partie de son personnel ;

4. Considérant que l'annulation, par le jugement attaqué, de la décision de refus du ministre chargé du travail est fondée sur le fait que la société MG Recherches a satisfait à l'obligation de reclassement qui lui incombait ; que, toutefois, si, comme l'ont relevé les premiers juges, cette société a fait quatre offres de reclassement à MmeA..., il ressort des pièces du dossier que ces offres, qui précisaient que le recrutement devait être validé par le responsable recrutement pour la France du groupe Quintiles dont faisait partie la société

MG Recherches et le responsable du département concerné, n'étaient pas fermes et ne garantissaient pas le reclassement effectif de la salariée en cas d'emploi disponible dans le groupe ; que, dans ces conditions, la société MG Recherches ne peut être regardée comme ayant satisfait à son obligation de reclassement ; que, par suite, Mme A...est fondée à soutenir que c'est à tort que les premiers juges ont annulé la décision en date du 12 avril 2010 du ministre chargé du travail ;

5. Considérant, toutefois, qu'il appartient à la Cour saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel d'examiner les autres moyens soulevés par la société MG Recherches en première instance et en appel ;

6. Considérant, en premier lieu, que M. B...D..., directeur départemental du travail, de l'emploi et de la formation professionnelle, chef du département " soutien et appui au contrôle " de la direction générale du travail, bénéficiait, en vertu d'une décision du directeur général du travail du 8 décembre 2006, d'une délégation à l'effet de signer, au nom du ministre en charge de l'emploi, tous actes se rapportant aux attributions de son département ; qu'aux termes de l'article 5 de l'arrêté du 22 août 2006 relatif à l'organisation de la direction générale du travail : " Le département du soutien et de l'appui au contrôle (...) est également chargé : de l'instruction des recours hiérarchiques et contentieux relatifs aux licenciements des salariés protégés (...) " ; qu'il résulte de la combinaison de ces dispositions que M. D...était compétent pour signer, au nom du ministre chargé du travail, la décision du 12 avril 2010 ;

7. Considérant, en deuxième lieu, qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que le ministre chargé du travail aurait omis d'examiner la recevabilité du recours hiérarchique formé par Mme A...contre la décision du 1er septembre 2009 de l'inspectrice du travail de la

8ème section des Hauts-de-Seine autorisant son licenciement ;

8. Considérant, enfin, qu'aucune disposition législative ou réglementaire n'impose des formes particulières aux recours hiérarchiques ; que si la société MG Recherches soutient que le recours hiérarchique formé le 8 septembre 2009 contre la décision de l'inspectrice du travail était irrecevable en ce qu'il a été signé par une personne non identifiable pour ordre de Me Koskas, avocat, il ressort des pièces du dossier que le ministre chargé du travail ne pouvait avoir aucun doute sur l'identité de l'auteur du recours hiérarchique ; que, par suite, le ministre chargé du travail a été valablement saisi dudit recours hiérarchique ;

9. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mme A... est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a annulé la décision en date du 12 avril 2010 du ministre chargé du travail ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

10. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de MmeA..., qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, tout ou partie de la somme que la société MG Recherches demande ; qu'en revanche, il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la société MG Recherches le versement à Mme A...de la somme de 2 000 euros ;

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement en date du 18 février 2013 du Tribunal administratif de Cergy-Pontoise est annulé.

Article 2 : La demande de la société MG Recherches devant le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise et ses conclusions tendant en appel à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : La société MG Recherches versera à Mme A...la somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à Mme C...A..., à la société MG Recherches et au ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social.

Délibéré après l'audience du 8 septembre 2016, à laquelle siégeaient :

M. Demouveaux , président de chambre,

M. Soyez, président assesseur,

M. Bigard, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 22 septembre 2016.

Le rapporteur,

E. BIGARDLe président,

J.-P. DEMOUVEAUX Le greffier,

D. SOURBIER La République mande et ordonne au ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme

Le greffier,

''

''

''

''

2

N° 16VE00434


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 16VE00434
Date de la décision : 22/09/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

66-07-01-04-03-01 Travail et emploi. Licenciements. Autorisation administrative - Salariés protégés. Conditions de fond de l'autorisation ou du refus d'autorisation. Licenciement pour motif économique. Obligation de reclassement.


Composition du Tribunal
Président : M. DEMOUVEAUX
Rapporteur ?: M. Eric BIGARD
Rapporteur public ?: M. DELAGE
Avocat(s) : CABINET GRUMBACH et ASSOCIÉS

Origine de la décision
Date de l'import : 28/09/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2016-09-22;16ve00434 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award