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07/02/2017 | FRANCE | N°16VE03186

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 1ère chambre, 07 février 2017, 16VE03186


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C...D...a demandé au Tribunal administratif de Montreuil d'annuler l'arrêté du préfet de la Seine-Saint-Denis du 26 avril 2016 lui refusant la délivrance d'un titre de séjour, lui faisant obligation de quitter le territoire français sans délai, lui interdisant le retour sur le territoire français pendant une durée de 2 ans et fixant le pays de destination.

Par un jugement n° 1603980 du 16 septembre 2016, le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande.

Procédure devant la Co

ur :

Par une requête, enregistrée le 1er novembre 2016, M.D..., représenté par Me Abel...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C...D...a demandé au Tribunal administratif de Montreuil d'annuler l'arrêté du préfet de la Seine-Saint-Denis du 26 avril 2016 lui refusant la délivrance d'un titre de séjour, lui faisant obligation de quitter le territoire français sans délai, lui interdisant le retour sur le territoire français pendant une durée de 2 ans et fixant le pays de destination.

Par un jugement n° 1603980 du 16 septembre 2016, le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 1er novembre 2016, M.D..., représenté par Me Abel, avocat, demande à la Cour :

1° d'annuler ce jugement ;

2° d'annuler cet arrêté, pour excès de pouvoir ;

3° d'enjoindre au préfet de la Seine-Saint-Denis de lui délivrer un titre de séjour sous astreinte de 50 euros par jour de retard à compter de l'arrêt à intervenir ;

4° de mettre à la charge de l'État une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

M. D...soutient que :

En ce qui concerne le refus de titre de séjour :

- la décision préfectorale est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation sur le fondement de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la commission du titre de séjour aurait dû être réunie sur le fondement de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dès lors qu'il réside depuis plus de dix ans en France ;

- l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales a été méconnu ;

- l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant a été méconnu ;

En ce qui concerne l'obligation de quitter le territoire français :

- cette décision est illégale par voie d'exception ;

- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;

En ce qui concerne l'absence de délai de départ volontaire :

- cette décision est illégale par voie d'exception ;

En ce qui concerne le pays de renvoi :

- cette décision est illégale par voie d'exception ;

En ce qui concerne l'interdiction de retour sur le territoire français :

- le jugement est irrégulier dès lors que le tribunal administratif n'a pas statué sur le moyen tiré de l'incompétence de l'auteur de l'acte ;

- l'auteur de la décision attaquée n'avait pas délégation de compétence ;

- cette décision est illégale par voie d'exception.

La requête a été communiquée au préfet de la Seine-Saint-Denis qui n'a pas produit à l'instance.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. Pilven a été entendu au cours de l'audience publique.

1. Considérant que M.D..., ressortissant du Sri Lanka né le 16 septembre 1981, a demandé l'annulation de l'arrêté en date du 26 avril 2015 par lequel le préfet de la Seine-Saint-Denis a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter sans délai le territoire français en lui interdisant le retour sur le territoire français pendant une durée de 2 ans et en fixant le pays de destination ; que, par jugement du 16 septembre 2016, le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande d'annulation de cet arrêté préfectoral ;

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Considérant que, dans le jugement attaqué, les premiers juges ne se sont pas prononcés sur le moyen, figurant pourtant dans les visas du jugement, tiré de l'incompétence de l'auteur de la décision attaquée pour prendre la décision d'interdiction de retour sur le territoire français que le requérant avait soulevé devant le tribunal ; que, par suite, il y a lieu d'annuler le jugement attaqué en tant qu'il a omis de statuer sur un moyen soulevé à l'encontre de la décision d'interdiction de retour ;

3. Considérant qu'il y a lieu de se prononcer par la voie de l'évocation sur ces conclusions de la demande de M. D...portant sur la décision d'interdiction de retour et de statuer par l'effet dévolutif de l'appel sur les conclusions relatives aux décisions portant refus de titre de séjour, obligation de quitter le territoire français, refusant l'octroi d'un délai de départ et fixant le pays de renvoi ;

Sur le titre de séjour :

4. Considérant qu'aux termes de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée au 1° de l 'article L. 313-10 peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 311-7. (...) " ; (...) / L'autorité administrative est tenue de soumettre pour avis à la commission mentionnée à l'article L. 312-1 la demande d'admission exceptionnelle au séjour formée par l'étranger qui justifie par tout moyen résider en France habituellement depuis plus de dix ans. " ;

5. Considérant que si le requérant soutient que sa demande de titre de séjour aurait dû être soumise à la commission du titre de séjour dès lors qu'il justifierait résider en France habituellement depuis plus de dix ans, il se borne à produire, au titre de l'année 2009, la copie d'un courrier de l'OFPRA du 17 décembre 2009 et un avis d'imposition de 2012 relatif à ses revenus pour l'année 2009, au titre de l'année 2010, un courrier de l'OFPRA du 27 avril 2010, une décision de l'OFPRA du 14 mai 2010, et un avis d'imposition établi en 2012 au titre des revenus de 2010 et, au titre de l'année 2011, une ordonnance d'un président de section de la CNDA du 27 mai 2011, un avis d'imposition établi en 2012 au titre des revenus de 2011 et un courrier de " solidarité transport " du 16 décembre 2011 ; que ces pièces justificatives ne sont pas suffisantes pour établir que M. D...aurait résidé habituellement en France pendant ces années et par suite depuis plus de dix ans à la date de la décision attaquée ; qu'il suit de là que le moyen tiré du défaut de consultation de la commission du titre de séjour doit être écarté ;

6. Considérant que la circonstance que le requérant ait travaillé pendant vingt mois en qualité de vendeur polyvalent au sein de la société SAM de septembre 2014 à avril 2016, sous contrat à durée indéterminée, ou qu'il soit titulaire d'un contrat de location n'est pas en soi de nature à constituer un motif exceptionnel au sens des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile pour l'obtention d'un titre de séjour en qualité de " salarié " ou au titre de la vie privée et familiale ;

7. Considérant que les moyens tirés de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant ne comportent aucun élément de fait ou de droit nouveau par rapport à l'argumentation développée devant le tribunal administratif par M.D...; que, dès lors, il y a lieu de les écarter par adoption des motifs retenus par les premiers juges ;

Sur l'obligation de quitter le territoire français :

8. Considérant que la décision de refus de séjour n'étant pas entachée d'illégalité le requérant ne peut exciper de son illégalité pour contester la légalité de la décision d'éloignement qui en découle ;

Sur la décision refusant l'octroi d'un délai de départ volontaire :

9. Considérant que la décision portant obligation de quitter le territoire français n'étant pas entachée d'illégalité le requérant ne peut exciper de son illégalité pour contester la légalité de la décision refusant l'octroi d'un délai de départ volontaire qui en découle ;

Sur la décision fixant le pays de renvoi :

10. Considérant que la décision portant obligation de quitter le territoire français n'étant pas entachée d'illégalité le requérant ne peut exciper de son illégalité pour contester la légalité de la décision fixant le pays de renvoi qui en découle ;

Sur la décision portant interdiction de retour sur le territoire français :

11. Considérant que la décision portant obligation de quitter le territoire français n'étant pas entachée d'illégalité le requérant ne peut exciper de son illégalité pour contester la légalité de la décision portant interdiction de retour sur le territoire français qui en découle ;

12. Considérant que par arrêté du 17 décembre 2015, publié le même jour au bulletin d'informations administratives de la préfecture de la Seine-Saint-Denis, le préfet de

la Seine-Saint-Denis a donné délégation de signature à M. A...B..., sous-préfet du Raincy, pour signer les décisions de refus de séjour assorties d'une obligation de quitter le territoire français et les décisions d'interdiction de retour sur le territoire français ; que, par suite, le moyen tiré de ce que la décision préfectorale attaquée aurait été signé par une autorité ne disposant pas d'une délégation de compétence ne peut qu'être écarté ;

13. Considérant qu'aux termes des dispositions du III de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans leur version en vigueur à la date de la décision litigieuse : " L'autorité administrative peut, par une décision motivée, assortir l'obligation de quitter le territoire français d'une interdiction de retour sur le territoire français (...) L'interdiction de retour et sa durée sont décidées par l'autorité administrative en tenant compte de la durée de présence de l'étranger sur le territoire français, de la nature et de l'ancienneté de ses liens avec la France, de la circonstance qu'il a déjà fait l'objet ou non d'une mesure d'éloignement et de la menace pour l'ordre public que représente sa présence sur le territoire français (...) " ;

14. Considérant qu'il ressort des termes mêmes de ces dispositions que l'autorité compétente doit, pour décider de prononcer à l'encontre de l'étranger soumis à l'obligation de quitter le territoire français une interdiction de retour et en fixer la durée, tenir compte, dans le respect des principes constitutionnels, des principes généraux du droit et des règles résultant des engagements internationaux de la France, des quatre critères qu'elles énumèrent, sans pouvoir se limiter à ne prendre en compte que l'un ou plusieurs d'entre eux ; que la décision d'interdiction de retour doit comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement, de sorte que son destinataire puisse à sa seule lecture en connaître les motifs ; que si cette motivation doit attester de la prise en compte par l'autorité compétente, au vu de la situation de l'intéressé, de l'ensemble des critères prévus par la loi, aucune règle n'impose que le principe et la durée de l'interdiction de retour fassent l'objet de motivations distinctes, ni que soit indiquée l'importance accordée à chaque critère ;

15. Considérant qu'il incombe ainsi à l'autorité compétente qui prend une décision d'interdiction de retour d'indiquer dans quel cas susceptible de justifier une telle mesure se trouve l'étranger ; qu'elle doit par ailleurs faire état des éléments de la situation de l'intéressé au vu desquels elle a arrêté, dans son principe et dans sa durée, sa décision, eu égard notamment à la durée de la présence de l'étranger sur le territoire français, à la nature et à l'ancienneté de ses liens avec la France et, le cas échéant, aux précédentes mesures d'éloignement dont il a fait l'objet ; qu'elle doit aussi, si elle estime que figure au nombre des motifs qui justifient sa décision une menace pour l'ordre public, indiquer les raisons pour lesquelles la présence de l'intéressé sur le territoire français doit, selon elle, être regardée comme une telle menace ; qu'en revanche, si, après prise en compte de ce critère, elle ne retient pas cette circonstance au nombre des motifs de sa décision, elle n'est pas tenue, à peine d'irrégularité, de le préciser expressément ;

16. Considérant que la décision attaquée fait mention des conditions de l'entrée et du séjour de l'intéressé en France, de la circonstance qu'il a déjà fait l'objet en 2013 d'une obligation de quitter le territoire français, de la circonstance qu'il est marié à une ressortissante canadienne et enfin porte une appréciation sur la durée de sa résidence en France ; que l'arrêté attaqué fait ainsi état des éléments de la situation de l'intéressé au vu desquels la décision portant interdiction de retour sur le territoire français a été prise, tant dans son principe que dans sa durée ; que si elle ne mentionne pas si la présence de l'intéressé sur le territoire français constitue ou non une menace pour l'ordre public, cette circonstance, alors que le préfet n'a pas retenu l'existence d'une menace à l'ordre public pour prendre sa décision, n'est pas de nature à faire regarder celle-ci comme insuffisamment motivée ; que par suite, le moyen tiré de l'insuffisance de motivation de la décision doit également être écarté ;

17. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que

M. D...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande portant sur le refus de titre de séjour, l'obligation de quitter le territoire français, la décision lui refusant un délai de départ et la décision fixant le pays de renvoi ; que, par ailleurs, les conclusions de M. D...tendant à l'annulation de la décision portant interdiction de retour sur le territoire français pendant une durée de deux ans, doivent être rejetées ; que, par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction ainsi que celles présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées ;

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement du Tribunal administratif de Montreuil du 16 septembre 2016 est annulé en tant qu'il statue sur la décision portant interdiction de retour sur le territoire français pour une durée de deux ans.

Article 2 : Les conclusions de la demande à fin d'annulation de l'interdiction de retour sur le territoire français présentée par M. D...devant le Tribunal administratif sont rejetées.

Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.

N° 16VE03186 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 16VE03186
Date de la décision : 07/02/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01 Étrangers. Séjour des étrangers.


Composition du Tribunal
Président : M. BEAUJARD
Rapporteur ?: M. Jean-Edmond PILVEN
Rapporteur public ?: Mme RUDEAUX
Avocat(s) : ABEL

Origine de la décision
Date de l'import : 14/02/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2017-02-07;16ve03186 ?
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