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20/07/2017 | FRANCE | N°17VE01057

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 7ème chambre, 20 juillet 2017, 17VE01057


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B...A...a demandé au Tribunal administratif de Versailles, d'une part, d'annuler l'arrêté en date du 5 juillet 2016 par lequel le préfet des Yvelines a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel elle pourrait être éloignée à l'expiration de ce délai, d'autre part, d'enjoindre au préfet de lui délivrer un titre de séjour dans le délai de 15 jours suivant la notification du jugem

ent à intervenir sous astreinte de 100 euros par jour de retard ou, à défaut, de pro...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B...A...a demandé au Tribunal administratif de Versailles, d'une part, d'annuler l'arrêté en date du 5 juillet 2016 par lequel le préfet des Yvelines a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel elle pourrait être éloignée à l'expiration de ce délai, d'autre part, d'enjoindre au préfet de lui délivrer un titre de séjour dans le délai de 15 jours suivant la notification du jugement à intervenir sous astreinte de 100 euros par jour de retard ou, à défaut, de procéder sous les mêmes conditions, au réexamen de sa situation.

Par un jugement n°1607850 du 28 février 2017, le Tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire enregistrés le 31 mars 2017 et le 4 avril 2017, Mme A..., représentée par Me Kempf, avocat, demande à la Cour :

1° d'annuler ce jugement ;

2° d'annuler, pour excès de pouvoir, l'arrêté du préfet des Yvelines en date du 5 juillet 2016 ;

3° d'enjoindre au préfet des Yvelines de lui délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " ;

4° de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Mme A... soutient que :

- l'administration n'a pas procédé à un examen personnel et complet de sa demande ; le préfet a passé sous silence un élément essentiel de sa demande de titre de séjour, à savoir le décès de sa mère en Géorgie le 27 janvier 2016 ; la décision préfectorale énonce à tort qu'elle a résidé en Géorgie jusqu'à l'âge de 28 ans alors qu'elle a quitté son pays pour se rendre en Allemagne au mois de décembre 2000, qu'elle a ensuite quitté l'Allemagne pour regagner la Géorgie en août 2001, lors du décès de sa grande soeur et qu'elle est alors restée en Géorgie jusqu'en 2003, date à laquelle elle s'est installé en Autriche pendant un an avant d'arriver en France en avril 2004 avec un visa étudiant ;

- la procédure de refus de titre de séjour dont elle a fait l'objet est irrégulière faute pour le préfet d'avoir saisi de son cas la commission du titre de séjour ;

- le préfet s'est livré à une appréciation manifestement erronée des conséquences de l'arrêté attaqué sur sa situation personnelle ; elle établit son lien de parenté avec sa soeur et démontre qu'elle n'a plus de famille en Géorgie où ses parents, de même que sa grande soeur, sont décédés ; elle ne peut produire de livret de famille, document qui n'existe pas en tant que tel en Géorgie ; elle produit néanmoins l'acte de naissance de sa soeur Maka qui établit que cette dernière et elle-même ont bien les mêmes parents ; elle produit également son acte de naissance et l'acte de décès de sa mère ; elle apporte en outre la preuve de sa bonne intégration professionnelle sur le territoire national ; elle travaille depuis plusieurs années de façon continue comme garde d'enfants à domicile ; elle justifie à ce titre de bulletins de salaire pour les années 2008 à 2017 ;

- l'arrêté attaqué méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ainsi que les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; ses liens familiaux en France sont anciens et stables ; elle réside depuis treize ans sur le territoire national ; elle a toujours été proche de sa soeur de nationalité française et de son neveu né en France en 2009 ; la réalité de ces liens est confirmée par le fait qu'elle réside chez sa soeur dont elle partage ainsi l'existence ; elle travaille de façon stable et régulière comme garde d'enfants ; ses revenus, même modestes, lui permettent, avec l'aide de sa soeur, de subvenir à ses besoins ; elle est bien insérée dans la société française ; elle parle parfaitement le français et est très appréciée des familles auprès desquelles elle travaille au quotidien ; elle n'a plus aucun lien avec sa famille dans son pays d'origine qu'elle a quitté en 2000 alors qu'elle était âgée de seulement 21 ans et où son père, sa mère et sa grande soeur sont désormais décédés.

..........................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Campoy,

- les observations de Me Kempf pour MmeA....

1. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que Mme B...A..., ressortissante géorgienne née le 18 juillet 1979, est entrée en France le 29 septembre 2006 ; qu'elle a bénéficié d'un titre de séjour en tant qu'étudiante du 18 décembre 2008 au 30 décembre 2009 puis de récépissés successifs de demande de carte de séjour en cette même qualité ; qu'elle a sollicité le 30 juillet 2010 le renouvellement de ce titre de séjour ; que, par un arrêté du 9 août 2013, le préfet des Yvelines a rejeté sa demande et lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours ; que la requérante qui s'est soustraite à cette mesure d'éloignement, a de nouveau sollicité le 14 décembre 2015 la délivrance d'un titre de séjour sur le fondement du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que, par un arrêté en date du 5 juillet 2016, le préfet des Yvelines a rejeté sa demande, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel elle pourrait être éloignée à l'expiration de ce délai ; que Mme A... relève appel du jugement du 28 février 2017 par lequel le Tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté ;

2. Considérant qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui " ;

3. Considérant que Mme A...fait valoir sans être contredite qu'elle a quitté son pays d'origine durant l'année 2003 au cours de laquelle elle s'est installée en Autriche pendant un an avant d'arriver en France en avril 2004 avec un visa étudiant ; qu'à l'exception d'un bref séjour en Géorgie en 2006, elle a séjourné depuis 2004 sur le territoire français où elle a occupé un emploi de garde d'enfants, d'abord de manière discontinue de 2006 à 2008, puis de manière plus régulière de 2009 à 2016 ; qu'il ressort des justificatifs fournis par l'intéressée qu'elle a perdu en Géorgie sa soeur le 8 août 2001, son père le 15 novembre 2012 et sa mère le 27 janvier 2016 ; qu'il n'est pas allégué par le préfet que Mme A...aurait encore de la famille dans son pays d'origine ; que la requérante justifie de la présence en France d'une soeur de nationalité française chez qui elle réside à tout le moins depuis l'année 2010 ; que, dans ces conditions, Mme A...qui serait isolée en cas de retour dans son pays d'origine qu'elle a quitté depuis 2003 et qui dispose en France d'attaches familiales stables ainsi que d'une vie sociale et professionnelle, est fondée à soutenir que c'est à tort que le Tribunal administratif de Versailles a écarté le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

4. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de sa requête, Mme A... est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté en date du 5 juillet 2016 par lequel le préfet des Yvelines a rejeté sa demande de titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel elle pourrait être éloignée à l'expiration de ce délai ;

Sur les conclusions à fin d'injonction :

5. Considérant qu'eu égard au motif d'annulation de l'arrêté attaqué ci-dessus retenu, l'exécution du présent arrêt implique que le préfet des Yvelines délivre à l'intéressée une carte de séjour " vie privée et familiale " ; que, par suite, il y a lieu d'enjoindre au préfet des Yvelines, en application de l'article L. 911-1 du code de justice administrative, de délivrer l'autorisation demandée par Mme A...dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt ;

Sur l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

6. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 2 000 euros au titre des frais exposés par Mme A... et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement n°1607850 du 28 février 2017 du Tribunal administratif de Versailles et l'arrêté en date du 5 juillet 2016 du préfet des Yvelines, sont annulés.

Article 2 : Il est enjoint au préfet des Yvelines de délivrer à Mme A...une carte temporaire de séjour portant la mention " vie privée et familiale " dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt.

Article 3 : L'Etat versera à Mme A...une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

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N° 17VE01057


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 7ème chambre
Numéro d'arrêt : 17VE01057
Date de la décision : 20/07/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01 Étrangers. Séjour des étrangers.


Composition du Tribunal
Président : M. CAMPOY
Rapporteur ?: M. Luc CAMPOY
Rapporteur public ?: Mme BELLE
Avocat(s) : KEMPF

Origine de la décision
Date de l'import : 01/08/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2017-07-20;17ve01057 ?
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