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01/03/2018 | FRANCE | N°16VE00266

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 6ème chambre, 01 mars 2018, 16VE00266


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse en première instance :

Le SYNDICAT DES COPROPRIETAIRES DE L'IMMEUBLE SITUE 20 RUE PAUL DEROULEDE ET 23 AVENUE ALBERT A BOIS COLOMBES (ci-après le SYNDICAT) a demandé au Tribunal administratif de Cergy-Pontoise d'annuler la décision implicite par laquelle le maire de la commune de Bois-Colombes a rejeté son recours gracieux du 15 janvier 2010 tendant au retrait du permis de construire délivré le 16 novembre 2009 à M. et Mme B... autorisant la surélévation de leur maison, située 21 avenue Albert, dans la commune de Bois

-Colombes, ainsi que ce permis de construire.

Par un jugement n° 100410...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse en première instance :

Le SYNDICAT DES COPROPRIETAIRES DE L'IMMEUBLE SITUE 20 RUE PAUL DEROULEDE ET 23 AVENUE ALBERT A BOIS COLOMBES (ci-après le SYNDICAT) a demandé au Tribunal administratif de Cergy-Pontoise d'annuler la décision implicite par laquelle le maire de la commune de Bois-Colombes a rejeté son recours gracieux du 15 janvier 2010 tendant au retrait du permis de construire délivré le 16 novembre 2009 à M. et Mme B... autorisant la surélévation de leur maison, située 21 avenue Albert, dans la commune de Bois-Colombes, ainsi que ce permis de construire.

Par un jugement n° 1004107 en date du 23 mars 2012, le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés respectivement le 11 juin 2012 et le 11 février 2014, le SYNDICAT, représenté par la SCP Zurfluh-Lebatteux-Sizaire et Associés, demande à la Cour :

1° d'annuler ce jugement ;

2° d'annuler pour excès de pouvoir ces décisions ;

3° de mettre à la charge de la commune de Bois-Colombes la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- il a été habilité à solliciter l'annulation du permis de construire attaqué devant le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise, par résolution de l'assemblée générale en date du 20 mai 2010, confirmée le 23 juin 2011 ;

- il a intérêt à agir en sa qualité de voisin ;

- il a notifié le recours gracieux au bénéficiaire du permis de construire dans les 15 jours de la signification ;

- il s'est acquitté de la contribution pour l'aide juridique prévue par les dispositions de l'article 1635 bis Q du code général des impôts ;

- certains éléments de la construction ont été irrégulièrement bâtis sans que la demande de permis de construire porte spécifiquement sur leur régularisation ;

- les pièces du dossier corroborent l'absence de salle de bains en cause avant 2005 ;

- il convenait de régulariser les constructions édifiées sans autorisation avant d'autoriser la surélévation demandée ;

- la mention d'une largeur erronée de la rue a permis de dépasser la hauteur maximale autorisée par le plan local d'urbanisme ;

- les bâtiments existants ne sont pas conformes à l'article 7.3.3 du règlement du plan local d'urbanisme et leur surélévation aura pour effet d'aggraver cette irrégularité ;

- le maire de Bois-Colombes a commis une erreur manifeste d'appréciation quant à l'insertion du projet dans son environnement architectural.

.......................................................................................................

Par un arrêt n° 12VE02165 du 22 mai 2014, la cour administrative d'appel de Versailles a rejeté la requête du SYNDICAT DES COPROPRIETAIRES DE L'IMMEUBLE SITUE 20 RUE PAUL DEROULEDE ET 23 AVENUE ALBERT A BOIS-COLOMBES et mis à sa charge, sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, le versement d'une somme de 2 000 euros à la commune de Bois-Colombes, d'une part, et à la M. et MmeB..., d'autre part.

Procédure devant le Conseil d'Etat :

Par un pourvoi sommaire, un mémoire complémentaire et un mémoire en réplique, enregistrés les 21 août, 17 novembre 2014 et le 5 août 2015 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, le SYNDICAT demande au Conseil d'Etat d'annuler cet arrêt, de faire droit à sa demande et de mettre à la charge de la commune de Bois-Colombes la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par une décision n° 383867du 23 décembre 2015, le Conseil d'Etat a annulé l'arrêt du 22 mai 2014 et renvoyé l'affaire devant la Cour, où elle a été enregistrée sous le n° 16VE00266.

.......................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'urbanisme, modifié notamment par la loi de 2006-872 du 13 juillet 2006 et par l'ordonnance n° 2013-638 du 19 juillet 2013 ;

- la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965 ;

- le décret°67-223 du 17 mars 1967 pris pour l'application de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965 fixant le statut de la copropriété des immeubles bâtis ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Soyez,

- les conclusions de M. Errera, rapporteur public,

- et les observations de Me E..., pour le SYNDICAT DES COPROPRIETAIRES DE L'IMMEUBLE SITUE 20 RUE PAUL DEROULEDE ET 23 AVENUE ALBERT A BOIS COLOMBES (ci-après le SYNDICAT), de Me A... pour la commune de Bois-Colombes et de Me C... pour M. et Mme B....

1. Considérant que, par arrêté du 16 novembre 2009, le maire de la commune de Bois-Colombes a accordé à M. et Mme B... un permis de construire tendant à la surélévation de leur maison, sise 21 rue Paul Déroulède, qui constituait le lot n°59 d'une copropriété dont la scission est intervenue le 30 juin 2006 ; que le SYNDICAT a formé un recours pour excès de pouvoir contre cet arrêté et contre le rejet de son recours gracieux présenté le 15 janvier 2010 contre cet arrêté ; que le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise, ayant rejeté ce recours, par un jugement en date du 23 mars 2012, confirmé le 22 mai 2014 par la Cour, le SYNDICAT s'est pourvu devant le Conseil d'Etat qui a annulé cet arrêt par décision du 23 décembre 2015 et renvoyé l'affaire à la Cour ;

Sur les fins de non-recevoir opposées par la commune de Bois-Colombes et par M. et Mme B... :

2. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article L. 600-1-2 du code de l'urbanisme : " Une personne autre que l'Etat, les collectivités territoriales ou leurs groupements ou une association n'est recevable à former un recours pour excès de pouvoir contre un permis de construire, de démolir ou d'aménager que si la construction, l'aménagement ou les travaux sont de nature à affecter directement les conditions d'occupation, d'utilisation ou de jouissance du bien qu'elle détient ou occupe régulièrement ou pour lequel elle bénéficie d'une promesse de vente, de bail, ou d'un contrat préliminaire mentionné à l'article L. 261-15 du code de la construction et de l'habitation. " ; que l'ordonnance du 19 juillet 2013 relative au contentieux de l'urbanisme qui a introduit les dispositions précitées dans le code de l'urbanisme, est entrée en vigueur, conformément à son article 5, un mois après sa publication au Journal officiel ; que, partant, cette disposition de procédure n'était pas en vigueur le 14 mai 2010, lorsque le SYNDICAT a formé un recours pour excès de pouvoir contre le permis de construire accordé à M. et Mme B... et contre la décision implicite de rejet de leur recours gracieux ; qu'en tout état de cause, le syndicat tirait de sa qualité de voisin et de la gêne que lui occasionnerait la surélévation projetée de l'habitation de M. et Mme B... un intérêt à agir contre cette décision ;

3. Considérant, en deuxième lieu, qu'il est constant que, par l'acte de scission intervenu le 30 juin 2006, le SYNDICAT abandonnait expressément tous droits, y compris de copropriété, sur le lot dont M. et Mme B... étaient propriétaires ; que, pour autant, cet acte ne saurait avoir pour objet, ni pour effet, de priver ce syndicat d'un intérêt à agir en justice contre le permis de construire en litige, s'il estimait qu'il portait atteinte aux droits de la copropriété et méconnaissait les servitudes stipulées lors de la scission ;

4. Considérant, en troisième lieu, qu'en vertu de l'article 18 de la loi du 10 juillet 1965 fixant le statut de la copropriété des immeubles bâtis, le syndic représente le syndicat des copropriétaires en justice ; qu'aux termes de l'article 55 du décret du 17 mars 1967 pris pour l'application de cette loi : " Le syndic ne peut agir en justice au nom du syndicat sans y avoir été autorisé par une décision de l'assemblée générale. (...) " ; qu'il résulte de ces dispositions que, dans les cas où une autorisation est requise, le syndic agissant au nom de la copropriété est tenu de disposer, sous peine d'irrecevabilité de sa demande, d'une autorisation formelle de l'assemblée générale des copropriétaires pour agir en justice, habilitation qui doit préciser l'objet et la finalité de l'action contentieuse ainsi engagée ; qu'en revanche, dès lors que le syndic dispose d'une telle autorisation pour engager une procédure contentieuse, ces dispositions n'exigent pas qu'il sollicite une nouvelle autorisation pour interjeter appel et, le cas échéant, pour se pourvoir en cassation ;

5. Considérant qu'il ressort de pièces du dossier que, par délibération n° 21 " affaire syndicat des copropriétaires contre le propriétaire de la maison sis 21 avenue Albert à Bois-Colombes / autorisation du syndic à agir en justice ", l'assemblée générale du SYNDICAT donnait mandat le 14 juin 2007 au syndic, " dans l'hypothèse d'un permis de construire déposé par le propriétaire de la maison sis 21 avenue Albert à Bois-Colombes (92270) et ne respectant pas les règles d'urbanisme ou les servitudes définies lors de la scission ", afin d'obtenir l'annulation ou la modification de ce permis de construire ; que, dans ces conditions, cette délibération qui spécifie l'objet et la nature du recours contentieux à former, le cas échéant, autorisait valablement le syndic pour contester le permis de construire délivré le 16 novembre 2009 à M. et Mme B..., et lui donnait qualité pour agir en justice, tant en première instance qu'en appel, contre ce permis, alors même qu'il lui était antérieur ;

6. Considérant, enfin, que le SYNDICAT établit, d'une part, qu'un timbre fiscal a été joint à sa requête d'appel enregistrée le 11 juin 2012, d'autre part, que le recours gracieux en date du 15 janvier 2010 contre le permis de construire litigieux a été notifié par voie d'huissier à M. et Mme B..., dans les 15 jours de sa signification, conformément aux prescriptions de R. 600-1 du code de l'urbanisme ;

7. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que les fins de non-recevoir opposées par la commune de Bois-Colombes et M. et Mme B... ne peuvent être accueillies ;

Sur les conclusions tendant à l'annulation des décisions attaquées :

8. Considérant qu'aux termes de l'article L. 111-12 du code de l'urbanisme, introduit par l'article 9 de la loi de 2006-872 du 13 juillet 2006 : " Lorsqu'une construction est achevée depuis plus de 10 ans, le refus de permis de construire ou de déclaration de travaux ne peut être fondé sur l'irrégularité de la construction initiale au regard du droit de l'urbanisme " ; et qu'en vertu des dispositions de l'article R. 421-17 du même code, sont soumis à déclaration préalable les travaux qui portent création d'une emprise au sol ou de surface de plancher compris entre 5 et 20 m² ;

9. Considérant que le maire d'une commune ne peut légalement accorder un permis de construire portant sur une surélévation prenant appui sur des éléments du bâtiment construits sans déclaration des travaux ; que, dans un tel cas, le permis de construire doit porter sur l'ensemble des éléments de construction qui ont eu ou qui auront pour effet de transformer le bâtiment tel qu'il avait été autorisé par le permis primitif ;

10. Considérant que s'il appert de la description du lot n° 59, dans l'acte de vente du 20 mars 1998 dressé par Me D..., reproduit dans le document établi par la BRED Banque Populaire du 20 juin 2006, et de l'acte de scission du 30 juin 2006 que la maison acquise par M. et Mme B... disposait au rez-de-chaussée d'une salle de bains et de toilettes, il ressort des autres pièces du dossier, notamment de l'étude du géomètre expert, M. F... et des plans joints à la demande du permis de construire litigieux, qu'existait sous le lot n° 59 une différence de niveau entre la façade sur rue et la cour, correspondant à un entresol, lequel comportait, avant scission de la copropriété, un appentis et des toilettes communes ; que cet entresol a été, comme acté dans l'acte de scission, incorporé au pavillon de M. et Mme B... ; que, par suite, c'est à tort que, pour écarter le moyen tiré de l'installation irrégulière de toilettes et d'une salle de bains au niveau de l'entresol, les premiers juges se sont fondés l'existence de pièces de même usage au rez-de-chaussée lors de l'acquisition du lot n° 59 ; qu'il s'ensuit que l'aménagement de ces pièces d'eau dans l'entresol réuni à la maison de M. et Mme B... a été entrepris après le 30 juin 2006 ; que, loin de consister en simples travaux d'entretien ou de réparation, les travaux effectués en entresol par M. et Mme B... ont augmenté de 8,10 m² la surface de leur maison ; qu'à supposer que ces pièces d'eau aient été aménagées dès le 1er juillet 2006, elles n'étaient, par suite, pas achevées depuis 10 ans à la date du permis de construire litigieux ; qu'elles entrent ainsi dans le champ d'application de l'article L. 111-12 précité du code de l'urbanisme ; qu'il appartenait donc aux propriétaires de présenter, conjointement à leur demande de permis de construire la surélévation de leur maison, une déclaration de travaux portant sur l'entresol ; que le maire était tenu de refuser un permis portant uniquement sur un élément de construction nouveau prenant appui sur une partie du bâtiment construit sans déclaration de travaux préalable ;

11. Considérant qu'aucun autre moyen ne justifiant l'annulation des décisions litigieuses, le SYNDICAT est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté leur recours pour excès de pouvoir contre ces décisions et à en obtenir l'annulation ;

Sur les conclusions de M. et Mme B... tendant à la mise en cause la responsabilité du SYNDICAT :

12. Considérant qu'aux termes de l'article L. 600-7 du code de justice administrative : " Lorsque le droit de former un recours pour excès de pouvoir contre un permis de construire, de démolir ou d'aménager est mis en oeuvre dans des conditions qui excèdent la défense des intérêts légitimes du requérant et qui causent un préjudice excessif au bénéficiaire du permis, celui-ci peut demander, par un mémoire distinct, au juge administratif saisi du recours de condamner l'auteur de celui-ci à lui allouer des dommages et intérêts. La demande peut être présentée pour la première fois en appel. " ;

13. Considérant qu'il résulte de ce qui a été dit plus haut, et sans qu'il soit besoin de se fonder sur le mémoire présenté le 9 février 2018 par le SYNDICAT, que le recours en annulation du permis de construire accordé à M. et Mme B... et de la décision confirmative n'a pas été mis en oeuvre dans des conditions qui excèdent la défense des intérêts légitimes de ce syndicat et s'avère fondé ; que, dans ces conditions, les conclusions de M. et Mme B... sur le fondement des dispositions de l'article L. 600-7 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

14. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'il soit mis à la charge du SYNDICAT, qui n'est pas, dans la présente instance, partie perdante, le versement à la commune de Bois-Colombes et à M. et Mme B... des sommes qu'ils demandent au titre des frais exposés par eux et non compris dans les dépens ;

DECIDE :

Article 1er : Le jugement n° 1004107 rendu par le Tribunal Administratif de Cergy-Pontoise le 23 mars 2012, l'arrêté du maire de Bois-Colombes date du 16 novembre 2009 accordant un permis de construire à M. et Mme B..., et la décision implicite, née 15 janvier 2000, rejetant le recours gracieux présenté par le SYNDICAT DES COPROPRIETAIRES DE L'IMMEUBLE SITUE 20 RUE PAUL DEROULEDE ET 23 AVENUE ALBERT A BOIS COLOMBES contre ce permis, sont annulés.

Article 2 : Les conclusions présentées par M. et Mme B... et par la commune de Bois-Colombes sont rejetées.

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N° 16VE00266


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 16VE00266
Date de la décision : 01/03/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

68-03-03-02 Urbanisme et aménagement du territoire. Permis de construire. Légalité interne du permis de construire. Légalité au regard de la réglementation locale.


Composition du Tribunal
Président : Mme DOUMERGUE
Rapporteur ?: M. Jean-Eric SOYEZ
Rapporteur public ?: M. ERRERA
Avocat(s) : PERRET

Origine de la décision
Date de l'import : 13/03/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2018-03-01;16ve00266 ?
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