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02/10/2018 | FRANCE | N°16VE01398

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 4ème chambre, 02 octobre 2018, 16VE01398


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La SOCIETE MARGOT 2000 a demandé au Tribunal administratif de Montreuil d'annuler la décision du 23 février 2015 par laquelle le directeur général de l'Office français de l'immigration et de l'intégration (OFII) a mis à sa charge, d'une part, la contribution spéciale prévue à l'article L. 8253-1 du code du travail et, d'autre part, la contribution forfaitaire représentative des frais de réacheminement de l'étranger dans son pays d'origine prévue à l'article L. 626-1 du code de l'entrée et du séjou

r des étrangers et du droit d'asile, pour un montant total de 39 896 euros.

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Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La SOCIETE MARGOT 2000 a demandé au Tribunal administratif de Montreuil d'annuler la décision du 23 février 2015 par laquelle le directeur général de l'Office français de l'immigration et de l'intégration (OFII) a mis à sa charge, d'une part, la contribution spéciale prévue à l'article L. 8253-1 du code du travail et, d'autre part, la contribution forfaitaire représentative des frais de réacheminement de l'étranger dans son pays d'origine prévue à l'article L. 626-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, pour un montant total de 39 896 euros.

Par un jugement n° 1503662 du 2 mars 2016, le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté cette demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 6 mai 2016, la SOCIETE MARGOT 2000, représentée par Me Gardet, avocat, demande à la Cour :

1° d'annuler ce jugement et la décision du directeur général de l'OFII du 23 février 2015 ;

2° de mettre à la charge de l'OFII la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

La société requérante soutient que :

- la décision attaquée se fonde sur des faits matériellement inexacts ;

- elle est de bonne foi ;

- seule une infraction est constituée, et elle bénéficie à ce titre d'une réduction du montant des contributions mises à sa charge.

..................................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code du travail ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Besson-Ledey,

- et les conclusions de Mme Bruno-Salel, rapporteur public.

1. Considérant que lors d'un contrôle effectué le 29 juillet 2014 dans un atelier de confection à Bagnolet (Seine-Saint-Denis) exploité par la SARL MARGOT 2000, les services de police ont constaté la présence de deux employés en situation de travail, MM. C...A...et B...D..., ressortissants serbes, dépourvus de titre les autorisant à séjourner et à travailler en France ; que ces infractions ont été constatées par procès-verbal dressé le même jour ; que, par une décision du 23 février 2015, le directeur général de l'Office français de l'immigration et de l'intégration (OFII) a mis à la charge de la SOCIETE MARGOT 2000, d'une part, la contribution spéciale prévue à l'article L. 8253-1 du code du travail, pour un montant de 35 100 euros et, d'autre part, la contribution forfaitaire représentative des frais de réacheminement de l'étranger dans son pays d'origine prévue à l'article L. 626-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, pour un montant de 4 796 euros ; que la SOCIETE MARGOT 2000 relève appel du jugement du 2 mars 2016 par lequel le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cette décision ;

Sur les conclusions à fin d'annulation :

2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 8251-1 du code du travail : " Nul ne peut, directement ou indirectement, embaucher, conserver à son service ou employer pour quelque durée que ce soit un étranger non muni du titre l'autorisant à exercer une activité salariée en France (...) " ; qu'aux termes de l'article L. 8253-1 du même code, dans sa rédaction issue de la loi n° 2016-1917 du 29 décembre 2016 applicables au présent litige dès lors qu'il s'agit d'un litige de plein contentieux et que ces dispositions sont plus douces que celles antérieurement applicables : " Sans préjudice des poursuites judiciaires pouvant être intentées à son encontre, l'employeur qui a employé un travailleur étranger en méconnaissance des dispositions du premier alinéa de l'article L. 8251-1 acquitte, pour chaque travailleur étranger non autorisé à travailler, une contribution spéciale. Le montant de cette contribution spéciale est déterminé dans des conditions fixées par décret en Conseil d'Etat. Il est, au plus, égal à 5 000 fois le taux horaire du minimum garanti prévu à l'article L. 3231-12. Ce montant peut être minoré en cas de non-cumul d'infractions ou en cas de paiement spontané par l'employeur des salaires et indemnités dus au salarié étranger non autorisé à travailler mentionné à l'article R. 8252-6. Il est alors, au plus, égal à 2 000 fois ce même taux. Il peut être majoré en cas de réitération et est alors, au plus, égal à 15 000 fois ce même taux. (...) " ; qu'aux termes de l'article R. 8253-2 du même code, dans sa rédaction issue du décret n° 2013-467 du 4 juin 2013 : " I.-Le montant de la contribution spéciale prévue à l'article L. 8253-1 est égal à 5 000 fois le taux horaire, à la date de la constatation de l'infraction, du minimum garanti prévu à l'article L. 3231-12. / II.-Ce montant est réduit à 2 000 fois le taux horaire du minimum garanti dans l'un ou l'autre des cas suivants : 1° Lorsque le procès-verbal d'infraction ne mentionne pas d'autre infraction commise à l'occasion de l'emploi du salarié étranger en cause que la méconnaissance des dispositions du premier alinéa de l'article L. 8251-1 ; 2° Lorsque l'employeur s'est acquitté des salaires et indemnités mentionnés à l'article L. 8252-2 dans les conditions prévues par les articles R. 8252-6 et R. 8252-7 (...) " ; qu'aux termes de l'article L. 626-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dans leur rédaction issue de la loi n° 2016-274 du 7 mars 2016 applicables au présent litige dès lors qu'il s'agit d'un litige de plein contentieux et que ces dispositions sont plus douces que celles antérieurement applicables : " Sans préjudice des poursuites judiciaires qui pourront être engagées à son encontre et de la contribution spéciale prévue à l'article L. 8253-1 du code du travail, l'employeur qui aura occupé un travailleur étranger en situation de séjour irrégulier acquittera une contribution forfaitaire représentative des frais de réacheminement de l'étranger dans son pays d'origine. / Le montant total des sanctions pécuniaires prévues, pour l'emploi d'un étranger non autorisé à travailler, au premier alinéa du présent article et à l'article L. 8253-1 du code du travail ne peut excéder le montant des sanctions pénales prévues par les articles L. 8256-2, L. 8256-7 et L. 8256-8 du code du travail ou, si l'employeur entre dans le champ d'application de ces articles, le montant des sanctions pénales prévues par le chapitre II du présent titre. " ; qu'aux termes de l'article R. 626-1 du même code : " I.-La contribution forfaitaire représentative des frais de réacheminement de l'étranger dans son pays d'origine prévue à l'article L. 626-1 est due pour chaque employé en situation irrégulière au regard du droit au séjour. / Cette contribution est à la charge de l'employeur qui, en violation de l'article L. 8251-1 du code du travail, a embauché ou employé un travailleur étranger dépourvu de titre de séjour. / II.-Le montant de cette contribution forfaitaire est fixé par arrêté du ministre chargé de l'immigration et du ministre chargé du budget, en fonction du coût moyen des opérations d'éloignement vers la zone géographique de réacheminement du salarié, dans la limite prescrite à l'alinéa 2 de l'article L. 626-1. " ;

3. Considérant qu'il appartient au juge administratif, saisi d'un recours contre une décision mettant à la charge d'un employeur la contribution spéciale prévue par les dispositions précitées de l'article L. 8253-1 du code du travail, pour avoir méconnu les dispositions de l'article L. 8251-1 du même code, de vérifier la matérialité des faits reprochés à l'employeur et leur qualification juridique au regard de ces dispositions ; qu'il lui appartient, également, de décider, après avoir exercé son plein contrôle sur les faits invoqués et la qualification retenue par l'administration, soit de maintenir la sanction prononcée, soit d'en diminuer le montant jusqu'au minimum prévu par les dispositions applicables au litige, soit d'en décharger l'employeur ; que, par ailleurs, pour l'application des dispositions précitées de l'article L. 8251-1 du code du travail, il appartient à l'autorité administrative de relever, sous le contrôle du juge, les indices objectifs de subordination permettant d'établir la nature salariale des liens contractuels existant entre un employeur et le travailleur qu'il emploie ;

4. Considérant que pour mettre à la charge de la société requérante les contributions litigieuses, le directeur de l'OFII s'est fondé sur un procès-verbal établi le 29 juillet 2014 par un officier de police judiciaire ; qu'il résulte de ce procès-verbal, qui fait foi jusqu'à preuve du contraire, que lors du contrôle au sein de l'atelier exploité par la société requérante, il a été constaté la présence en situation de travail de MM. A...etD..., ressortissants serbes, dépourvus de titres les autorisant à séjourner et à travailler en France ; que si la SOCIETE MARGOT 2000 soutient qu'elle ne les aurait pas employé, il résulte des procès-verbaux d'audition des deux intéressés, effectuée le jour du contrôle, que MM. A...et D...ont déclaré travailler à l'atelier de manière discontinue, pour le premier depuis le 10 juillet 2014 et pour le second depuis l'année 1983 et que leur employeur ne s'est pas préoccupé de la régularité de leur situation administrative ; que, dans ces conditions, le moyen tiré de ce que la décision en litige reposerait sur des faits matériellement inexacts ne peut être que rejeté ;

5. Considérant que si la société requérante soutient qu'elle est de bonne foi, l'infraction aux dispositions de l'article L. 8251-1 du code du travail est constituée du seul fait de l'emploi d'un travailleur étranger démuni de titre l'autorisant à exercer une activité salariée sur le territoire français, l'élément intentionnel étant sans influence sur le bien-fondé de la contribution spéciale mise à la charge de l'employeur qui a contrevenu à ces dispositions ;

Sur les conclusions à fin de réduction :

6. Considérant que le procès-verbal dressé le 29 juillet 2015 mentionne, hormis la méconnaissance des dispositions du premier alinéa de l'article L. 8251-1 du code du travail, l'absence de déclaration à l'embauche de MM. A...et D...ainsi que l'absence de déclaration annuelle des données sociales pour ces deux salariés au titre de l'année 2013 ; qu'eu égard au cumul des infractions constatées la SOCIETE MARGOT 2000 n'entre pas dans le champ du 1° du II de l'article R. 8253-2 du code du travail précité ouvrant droit à une réduction de la contribution spéciale ; que ses conclusions à fin de réduction doivent, dès lors, être rejetées ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

7. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la SOCIETE MARGOT 2000 n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision 23 février 2015 ; que sa requête doit, par suite, être rejetée, y compris les conclusions qu'elle a présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; qu'il y a lieu, en revanche, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à sa charge une somme de 1 500 euros au bénéfice de l'Office français de l'immigration et de l'intégration au titre des frais qu'il a exposés, non compris dans les dépens ;

DECIDE :

Article 1er : La requête de la SOCIETE MARGOT 2000 est rejetée.

Article 2 : La SOCIETE MARGOT 2000 versera à l'Office français de l'immigration et de l'intégration la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

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N° 16VE01398


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 16VE01398
Date de la décision : 02/10/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-06-02-02 Étrangers. Emploi des étrangers. Mesures individuelles. Contribution spéciale due à raison de l'emploi irrégulier d'un travailleur étranger.


Composition du Tribunal
Président : Mme BESSON-LEDEY
Rapporteur ?: Mme Laurence BESSON-LEDEY
Rapporteur public ?: Mme BRUNO-SALEL
Avocat(s) : GARDET

Origine de la décision
Date de l'import : 09/10/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2018-10-02;16ve01398 ?
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