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06/11/2018 | FRANCE | N°17VE01501

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 3ème chambre, 06 novembre 2018, 17VE01501


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B...A...a demandé au Tribunal Administratif de Cergy-Pontoise de prononcer, d'une part, la décharge des intérêts de retard et de la majoration de 10 % prévue par l'article 1758 A du code général des impôts appliqués aux cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles il a été assujetti au titre de l'année 2007 et, d'autre part, la décharge, en droits et pénalités des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales mises

sa charge au titre de l'année 2009, à hauteur d'une somme d'un montant total de ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B...A...a demandé au Tribunal Administratif de Cergy-Pontoise de prononcer, d'une part, la décharge des intérêts de retard et de la majoration de 10 % prévue par l'article 1758 A du code général des impôts appliqués aux cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles il a été assujetti au titre de l'année 2007 et, d'autre part, la décharge, en droits et pénalités des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales mises à sa charge au titre de l'année 2009, à hauteur d'une somme d'un montant total de 523 451 euros.

Par un jugement n° 1507419 du 21 mars 2017, le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 12 mai 2017, M.A..., représenté par Me Delrieu, avocat, demande à la Cour :

1° d'annuler ce jugement ;

2° de prononcer la décharge sollicitée ;

3° de mettre à la charge de l'État le versement d'une somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- le fait générateur de la plus-value de cession des titres de la société Mapad par la société civile Norma, dont il est associé, est intervenu en l'espèce en 2009 et non en 2007 comme le fait valoir l'administration fiscale, dans la mesure où la détermination de l'identité exacte du propriétaire des titres ainsi cédés, qui est le préalable nécessaire à l'imposition de la plus-value en vertu des dispositions du 1 de l'article 150-0 A du code général des impôts, n'a été établie qu'à l'occasion de l'intervention d'un arrêt de la Cour d'appel de Versailles du 10 septembre 2009, qui a permis de mettre fin à la mesure de séquestre du fruit de la vente de ces titres à la société Domusvi, prononcée par une ordonnance du juge des référés du Tribunal de commerce de Paris du 12 décembre 2006 ; il ne pouvait donc déclarer le produit de cette cession au titre de ces revenus imposables qu'au cours de l'année 2009 ; c'est, par suite, à tort que l'administration fiscale a appliqué aux droits correspondants à l'imposition de la plus-value en cause l'intérêt de retard prévu par l'article 1727 du code général des impôts ainsi que la majoration de 10 % pour omission ou dépôt tardif de déclaration fiscale prévue par l'article 1758 A du même code ;

- les intérêts résultant du placement du prix de vente des titres de la société Mapad détenus par la société civile Norma à la société Domusvi par le séquestre doivent être qualifiés d'intérêts moratoires, dans la mesure où ils constituent l'accessoire de la somme séquestrée, qui a ainsi fait l'objet d'un paiement différé et dont le montant constituait, en outre, une créance détenue par la société civile Norma sur la société d'huissiers chargée du séquestre ; par suite, ils doivent être taxés comme le produit de la plus-value de cession et non, comme le fait valoir l'administration fiscale, dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers.

..........................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code civil ;

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Livenais,

- et les conclusions de M. Huon, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. M. A...est gérant et associé de la société civile Norma, dont l'activité consiste en la gestion d'un portefeuille de valeurs mobilières. A la suite de contrôles sur place opérés auprès de la société civile Norma, M. A...s'est vu notifier, d'une part, par une proposition de rectification en date du 22 décembre 2010, des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales au titre de l'année 2007, augmentées de l'application des intérêts de retard et de la majoration de 10 % prévue par l'article 1758 A du code général des impôts, correspondant à la réintégration dans son revenu imposable au titre de cette année de la fraction lui revenant du produit d'une plus-value de cession de titres cédés par la société civile Norma à la société Domusvi. D'autre part, l'administration fiscale a notifié à M.A..., par une proposition de rectification en date du 19 décembre 2011, des rehaussements, en droits et pénalités d'impôt sur le revenu et de contributions sociales au titre de l'année 2009, correspondant à l'imposition dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers des intérêts générés par le produit de la vente des titres précités à la société Domusvi, placé sous séquestre jusqu'au mois d'octobre 2009 en vertu d'une ordonnance du juge des référés du Tribunal de commerce de Paris du 12 décembre 2006. Par la présente requête, M. A...fait appel du jugement du 21 mars 2017 par lequel le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande tendant à la décharge des intérêts de retard et de la majoration de 10 % grevant le montant des impositions supplémentaires mises à sa charge au titre de l'année 2007, ainsi que celle des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles il a été assujetti au titre de l'année 2009 et des pénalités correspondantes.

Sur le fait générateur de la plus-value de cession de valeurs mobilières :

2. Aux termes de l'article 150-0 A du code général des impôts, dans sa rédaction applicable au présent litige : "I.-1. Sous réserve des dispositions propres aux bénéfices industriels et commerciaux, aux bénéfices non commerciaux et aux bénéfices agricoles (...) les gains nets retirés des cessions à titre onéreux, effectuées directement ou par personne interposée, de valeurs mobilières, de droits sociaux, de titres mentionnés au 1° de l'article 118 et aux 6° et 7° de l'article 120, de droits portant sur ces valeurs, droits ou titres ou de titres représentatifs des mêmes valeurs, droits ou titres, sont soumis à l'impôt sur le revenu... ". Le fait générateur de l'imposition de la plus-value de cession de titres mentionnés par ces dispositions est constitué par le transfert de propriété des titres, qui intervient, conformément à l'article 1583 du code civil, à la date où un accord intervient sur la chose et le prix, indépendamment des modalités de paiement de ce prix.

3. Il résulte de l'instruction que la société civile Norma et la société Domusvi ont convenu du principe de la cession de titres de la société Mapad, réputés détenus par la société civile Norma, à la société Domusvi. En raison d'un litige opposant la société civile Norma à l'un de ses associés qui a revendiqué la propriété des titres de la société Mapad, le juge des référés du Tribunal de commerce de Paris, après avoir, dans un premier temps, interdit l'acquisition des titres litigieux par la société Domusvi, a prononcé, par ordonnance du 12 décembre 2006, la mise sous séquestre du montant convenu entre cette dernière et la société civile Norma, dans l'attente d'une décision au fond du juge judiciaire. A la suite de cette ordonnance, la société Domusvi a acquis, le 30 janvier 2007, les titres de la société Mapad à un prix convenu avec la société civile Norma, le prix de cette transaction étant placé sous séquestre le 31 janvier 2007 et ce jusqu'au mois d'octobre 2009.

4. La propriété des titres de la société Mapad ayant été transférée à la société Domusvi à l'occasion de l'acte du 30 janvier 2007, le fait générateur de l'imposition de la plus-value de cession correspondante est ainsi nécessairement intervenu au cours de l'année 2007, quoique le montant de cette transaction n'ait pas été immédiatement encaissé par le cédant du fait de l'existence d'un séquestre.

5. M. A...soutient, il est vrai, qu'en l'espèce, l'identité du propriétaire des titres de la société Mapad requise par les dispositions de l'article 150-0 A du code général des impôts, et, par suite, du bénéficiaire de la plus-value de cession en cause n'a été définitivement établie que par un arrêt de la Cour d'appel de Versailles du 10 septembre 2009 confirmant la qualité de propriétaire de la société civile Norma et qu'en conséquence, la plus-value de cession ne pouvait être constatée par la société civile Norma qu'au cours de l'année 2009 et qu'elle était, par suite, imposable au titre de cette dernière année.

6. Il résulte, toutefois, de l'instruction que, par un arrêt de la Cour d'appel de Versailles du 25 novembre 2004, devenu définitif et revêtu de l'autorité de la chose jugée, le juge judiciaire avait définitivement reconnu la qualité de propriétaire des titres de la société Mapad à la société civile Norma. Le Tribunal de grande instance de Nanterre, par jugement du 11 janvier 2008, et la Cour d'appel de Versailles, par son arrêt du 10 septembre 2009 précité, ont d'ailleurs opposé l'existence d'une telle autorité de la chose jugée par l'arrêt du 25 novembre 2004 pour débouter l'adversaire de la société civile Norma de ses demandes. Dans ces conditions, il n'existait, en l'espèce, aucun doute sérieux sur la propriété des titres cédés et donc le bénéficiaire de la plus-value de cession, l'arrêt de la Cour d'appel de Versailles de 2009 n'ayant eu pour effet que de confirmer rétroactivement la qualité de propriétaire de la société civile Norma lors de la transmission des titres à la société Domusvi. Par suite, l'existence de ce litige est sans incidence sur l'intervention du fait générateur de l'imposition de la plus-value de cession au cours de l'année 2007.

7. Par ailleurs, le fait que le prix de vente de l'immeuble ait été séquestré jusqu'en 2009, circonstance qui a trait aux modalités de paiement du prix de vente, est également sans incidence sur le fait générateur de la plus-value.

8. Ainsi, faute pour M. A...d'avoir déclaré au titre de l'année 2007 et de s'être acquitté, au titre de cette année du montant des impositions grevant le produit de la plus-value de cession lui revenant, l'administration fiscale a pu légalement assortir le montant des rehaussements d'impôt sur le revenu et de contributions sociales mis de ce chef à sa charge au titre de l'année 2007 des intérêts de retard prévus par l'article 1727 du code général des impôts ainsi que de la majoration de 10 % applicable en cas de défaut ou de retard de déclaration en vertu de l'article 1758 A du même code.

Sur l'imposition des intérêts produits par la somme placée sous séquestre :

9. Aux termes de l'article 124 du code général des impôts : " Sont considérés comme revenus au sens du présent article, lorsqu'ils ne figurent pas dans les recettes provenant de l'exercice d'une profession industrielle, commerciale, artisanale ou agricole, ou d'une exploitation minière, les intérêts, arrérages, primes de remboursement et tous autres produits : / (...) 2° Des dépôts de sommes d'argent à vue ou à échéance fixe, quel que soit le dépositaire et quelle que soit l'affectation du dépôt ".

10. En outre, aux termes de l'article 1961 du code civil : " La justice peut ordonner le séquestre : / (...) 3° Des choses qu'un débiteur offre pour sa libération. ". L'article 1153 du même code, dans sa rédaction alors applicable, dispose : " Dans les obligations qui se bornent au paiement d'une certaine somme, les dommages-intérêts résultant du retard dans l'exécution ne consistent jamais que dans la condamnation aux intérêts au taux légal, sauf les règles particulières au commerce et au cautionnement. / (...) Ils ne sont dus que du jour de la sommation de payer, ou d'un autre acte équivalent telle une lettre missive s'il en ressort une interpellation suffisante, excepté dans le cas où la loi les fait courir de plein droit. / (...). ".

11. Il résulte des dispositions précitées que ni l'acquéreur des titres, qui est, en vertu de l'article 1961 du code civil, libéré lorsqu'il remet au séquestre désigné par justice le prix de vente convenu, ni la personne à laquelle cette somme d'argent a été confiée en application de l'article 1963 du même code ne doivent au vendeur des intérêts au taux légal pendant la durée du séquestre. Les intérêts produits par le placement de la somme d'argent pendant la durée du séquestre judiciaire, remis au vendeur avec la somme elle-même à l'issue de la contestation, ne sont pas dus, en application de l'article 1153 du même code, à raison du versement différé des sommes par la personne à laquelle le séquestre judiciaire a été donné, mais en tant que fruits de la somme séquestrée. La somme correspondant aux intérêts du placement financier des fonds par le séquestre, entre les mois de janvier 2007 et septembre 2009, ne pouvait donc être qualifiée d'intérêts moratoires en raison de ce que le retard avec lequel la société civile Norma avait perçu le fruit de la vente des titres n'était pas imputable au séquestre.

12. En outre, il résulte de l'article 1153 du code civil que la créance d'une somme d'argent dont le principe et le montant résultent de la loi ou du contrat et non de l'appréciation du juge porte intérêt dès la sommation de payer. Or il ne résulte pas de l'instruction qu'une sommation de payer les sommes dues aurait été adressée par la société civile Norma à la société Duparc en qualité de séquestre, qui a d'ailleurs versé à la société civile Norma les fonds placés sous séquestre et les intérêts constitués le 20 octobre 2009 en exécution d'une ordonnance du président du Tribunal de commerce de Paris du 12 octobre 2009. M. A...ne peut donc pas davantage soutenir que la société civile Norma aurait détenu sur le séquestre une créance productive d'intérêts moratoires.

13. Il s'ensuit que les intérêts produits par la somme placée sous séquestre ont la nature de revenus au sens de l'article 124 du code général des impôts et non d'intérêts moratoires. M. A...n'est donc pas fondé à soutenir que c'est à tort que l'administration fiscale a imposé ces derniers dans ses mains au titre de l'année 2009 dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers et ne leur a pas appliqué le régime proportionnel d'imposition des plus-values de cession de valeurs mobilières.

14. Il résulte de tout ce qui précède et sans qu'il soit besoin de se prononcer sur la fin de non recevoir partielle opposée par le ministre au titre de l'année 2007, que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent également être rejetées.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. A...est rejetée.

4

N° 17VE01501


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 17VE01501
Date de la décision : 06/11/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

19-04-02-03 Contributions et taxes. Impôts sur les revenus et bénéfices. Revenus et bénéfices imposables - règles particulières. Revenus des capitaux mobiliers et assimilables.


Composition du Tribunal
Président : M. BRESSE
Rapporteur ?: M. Yann LIVENAIS
Rapporteur public ?: M. HUON
Avocat(s) : CABINET VEIL JOURDE

Origine de la décision
Date de l'import : 13/11/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2018-11-06;17ve01501 ?
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