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14/02/2019 | FRANCE | N°17VE00479

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 6ème chambre, 14 février 2019, 17VE00479


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D...A...et Mme B...C...épouse A...ont demandé au Tribunal administratif de Versailles de prononcer la décharge de l'obligation de payer une somme globale de 1 770 662,40 euros, correspondant aux cotisations supplémentaires à l'impôt sur le revenu, prélèvements sociaux et majorations auxquels ils ont été assujettis au titre des années 2000 et 2001, ainsi qu'aux frais de poursuite résultant des mises en demeure tenant lieu de commandement de payer du 24 décembre 2013, d'enjoindre à l'administration d

e les décharger de ces impositions sous astreinte journalière de 200 euros, ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D...A...et Mme B...C...épouse A...ont demandé au Tribunal administratif de Versailles de prononcer la décharge de l'obligation de payer une somme globale de 1 770 662,40 euros, correspondant aux cotisations supplémentaires à l'impôt sur le revenu, prélèvements sociaux et majorations auxquels ils ont été assujettis au titre des années 2000 et 2001, ainsi qu'aux frais de poursuite résultant des mises en demeure tenant lieu de commandement de payer du 24 décembre 2013, d'enjoindre à l'administration de les décharger de ces impositions sous astreinte journalière de 200 euros, de leur accorder des remises totales ou partielles de leurs dettes et de procéder à une transaction et à des sursis de paiement de ces dettes.

Par un jugement n° 1404200 du 13 décembre 2016, le Tribunal administratif de Versailles a rejeté leur demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 14 février 2017, M. et MmeA..., représentés par Me Garboni, avocat, doivent être regardés comme demandant à la Cour :

1° d'annuler ce jugement ;

2° de prononcer la décharge de l'obligation de payer la somme déjà mentionnée ;

3° d'annuler la décision rejetant leur demande de remise gracieuse des impositions auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2000 et 2001 ;

4° d'enjoindre à l'administration de les décharger de ces impositions sous astreinte journalière de 200 euros ;

5° et de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- les premiers juges ont entaché leur décision d'un défaut de réponse au moyen tiré de l'absence de délégation de signature de la décision du 20 mars 2014 ;

- le signataire de la décision rejetant leur réclamation préalable ne justifie pas d'une délégation régulière ;

- cette décision n'est pas suffisamment motivée et méconnaît le principe de loyauté ;

- les signataires des avis de mise en recouvrement et des commandements de payer ne justifient pas d'une délégation régulière ;

- l'agent qui a établi les avis de mise en recouvrement n'était pas territorialement compétent ;

- ils ne peuvent être tenus aux dettes fiscales de la SARL SBR dont M.A... n'était plus le dirigeant depuis le 31 décembre 2001 ;

- la vérification de comptabilité n'a pas donné lieu à un débat oral et contradictoire avec M. A... ;

- l'action en recouvrement est prescrite, faute pour l'administration d'avoir produit les actes interruptifs dont elle se prévaut ;

- sur ce point, les premiers juges ont inversé la charge de la preuve ;

- la décision rejetant implicitement leur demande de remise présentée sur le fondement de l'article L. 247 du livre des procédures fiscales n'est pas motivée ;

- elle est entachée d'erreur de droit et d'erreur manifeste d'appréciation.

...........................................................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier, notamment celles produites à la suite de la mesure supplémentaire d'instruction du 9 janvier 2019.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979, dont les dispositions ont été reprises à l'article L. 211-2 du code des relations entre le public et l'administration ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Soyez,

- et les conclusions de M. Errera, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. A la suite de la vérification de comptabilité de la SARL SBR dont M. A...était gérant et associé jusqu'à la fin de l'année 2001, l'administration a rehaussé le revenu imposable de M. et Mme A...dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers et les a assujettis à des suppléments d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux au titre des années 2000 et 2001. En l'absence de paiement de ces suppléments, elle a pris à leur encontre des mises en demeure tenant lieu de commandement de payer du 24 décembre 2013. Les requérants relèvent appel du jugement n° 1404200 du 13 décembre 2016, par lequel le Tribunal administratif de Versailles a rejeté leur demande tendant, d'une part, à la décharge de l'obligation de payer une somme globale de 1 770 662,40 euros, correspondant aux cotisations supplémentaires à l'impôt sur le revenu, prélèvements sociaux et majorations auxquels ils ont été assujettis au titre des années 2000 et 2001, ainsi qu'aux frais de poursuite, d'autre part, à la remise totale ou partielle de ces impositions.

Sur la compétence matérielle de la Cour en matière de litiges relatifs aux refus de remise gracieuse des impositions :

2. En vertu des dispositions de l'article R. 811-1 du code de justice administrative, le tribunal administratif statue en premier et dernier ressort sur les requêtes contestant les décisions prises en matière fiscale sur des demandes de remise gracieuse. M. et Mme A...demandent l'annulation du jugement susvisé par lequel le Tribunal administratif de Versailles a rejeté leur recours en annulation de la décision par laquelle l'administration fiscale a refusé de leur accorder la remise gracieuse des cotisations supplémentaires à l'impôt sur le revenu et des prélèvements sociaux, en droits et pénalités, auxquels ils ont été assujettis au titre des années 2000 et 2001 ainsi que l'annulation de cette décision. En application des dispositions précitées de l'article R. 811-1 du code de justice administrative, le Tribunal administratif de Versailles a statué sur le recours de M. et Mme A...en premier et dernier ressort. Par suite, la Cour n'est pas compétente pour statuer par la voie de l'appel sur les conclusions des requérants tendant à l'annulation de ce jugement en tant qu'il rejette leurs conclusions à fin d'annulation du refus de remise gracieuse, d'autre part, de ce refus. Dès lors, il y a lieu pour la Cour de transmettre lesdites conclusions de la requête susvisée de M. et Mme A...au Conseil d'Etat.

Sur le surplus des conclusions :

En ce qui concerne la régularité du jugement attaqué :

3. Il ressort des termes mêmes du point 5 du jugement contesté par M. et Mme A...que les premiers juges se sont prononcés sur le moyen tiré de l'absence de délégation de signature du signataire de la décision du 20 mars 2014 rejetant leur réclamation formée non contre les avis de mise en recouvrement, comme l'écrivent M. et MmeA..., mais contre les mises en demeure de payer tenant lieu de commandement de payer du 24 décembre 2013. Ainsi, le moyen tiré de l'absence de réponse à ce moyen manque en fait.

En ce qui concerne le bien-fondé du jugement attaqué :

4. Aux termes de l'article L. 281 du livre des procédures fiscales : " Les contestations relatives au recouvrement des impôts, taxes, redevances et sommes quelconques dont la perception incombe aux comptables publics compétents mentionnés à l'article L. 252 doivent être adressées à l'administration dont dépend le comptable qui exerce les poursuites. / Les contestations ne peuvent porter que : / 1° Soit sur la régularité en la forme de l'acte ; / 2° Soit sur l'existence de l'obligation de payer, sur le montant de la dette compte tenu des paiements effectués, sur l'exigibilité de la somme réclamée, ou sur tout autre motif ne remettant pas en cause l'assiette et le calcul de l'impôt. / Les recours contre les décisions prises par l'administration sur ces contestations sont portés, dans le premier cas, devant le juge de l'exécution, dans le second cas, devant le juge de l'impôt tel qu'il est prévu à l'article L. 199. ".

5. En premier lieu, les dispositions précitées de l'article L. 281-1 du livre des procédures fiscales attribuent compétence au juge de l'exécution pour trancher les contestations relatives à la régularité en la forme des actes de poursuite, cause juridique dont relève l'absence de délégation de signature de la décision attaquée. Les moyens invoqués pour M. et Mme A... tirés de l'absence de délégation de signature de l'auteur des mises en demeure du 24 décembre 2013 valant commandement de payer et de l'incompétence territoriale du service des impôts des particuliers de Plaisir pour répondre à leur réclamation ont le caractère de contestations relatives à la régularité en la forme des actes de poursuite. En application des dispositions précitées de l'article L. 281-1 du livre des procédures fiscales ces moyens doivent donc être écartés comme portés devant une juridiction incompétente pour en connaître.

6. En deuxième lieu, les termes de la décision du 20 mars 2014 rejetant l'opposition formée par M. et Mme A...font apparaitre, contrairement à ce que prétendent ces derniers, une motivation précise en ce qui concerne l'obligation de payer. Si, comme le relèvent les requérants, cette décision n'évoque pas les raisons pour lesquelles M. A...a été regardé comme dirigeant effectif de la société SBR, cette question relève de l'assiette de l'impôt et l'auteur de la décision du 20 mars 2014, saisi d'une réclamation portant sur un litige en matière de recouvrement, n'avait pas à y répondre. Ainsi, et en tout état de cause, le moyen tiré du défaut de motivation de cette décision ne peut être qu'écarté.

7. En troisième lieu, M. et Mme A...invoquent le manque de loyauté de l'administration eu égard aux termes de la décision du 20 mars 2014 rejetant leur réclamation. Toutefois ce moyen est sans incidence sur le bien-fondé de l'obligation de payer qu'ils contestent et ne peut donc qu'être écarté.

8. En quatrième lieu, le moyen tiré de ce que M. A...n'aurait pas été associé à la vérification de comptabilité de la société SBR a trait à la régularité de la procédure d'imposition suivie à l'encontre de cette société et au caractère exagéré ou pas des impositions supplémentaires auxquelles cette même société a été assujettie. Il vise, par voie de conséquence, à remettre en cause l'assiette et le calcul des impositions restant en litige. Ce moyen est, comme le relève l'administration en défense, irrecevable, en application des dispositions précitées de l'article L. 281 du livre des procédures fiscales, dans un contentieux relatif au recouvrement, et doit être écarté comme tel.

9. En cinquième lieu, pareillement, le moyen tiré de ce que M. et Mme A...ne peuvent être tenus aux dettes fiscales de la SARL SBR dont M. A...n'était plus le dirigeant depuis le 31 décembre 2001, tend à remettre en cause l'assiette et le calcul des impositions. Comme le fait valoir l'administration, il est pour ce motif irrecevable en application des dispositions précitées du livre des procédures fiscales.

10. En sixième lieu, les comptables du Trésor puis les comptables publics des administrations fiscales qui n'ont fait aucune poursuite contre un redevable pendant quatre années consécutives à compter du jour de la mise en recouvrement du rôle ou de l'envoi de l'avis de mise en recouvrement sont, en vertu des dispositions de l'article L. 274 du livre des procédures fiscales, déchus de tous droits et de toute action contre ce redevable.

11. En réponse à la mesure supplémentaire d'instruction ordonnée par la Cour, l'administration a produit les avis de mise en recouvrement des 30 juin et 15 juillet 2004, les commandements de payer notifiés les 1er et 20 septembre et le 4 décembre 2004, les 6 avril et 18 novembre 2005, le 24 juillet 2007 et les 1er septembre et 8 octobre 2008. Après la réclamation suspensive de paiement, le 15 décembre 2008, le délai de prescription a été reporté au 21 octobre 2013, date de l'ordonnance du président de la 5ème chambre du Tribunal administratif de Versailles. Dès lors, le délai quadriennal de prescription prévu par les dispositions de l'article L. 274 du livre des procédures fiscales, rappelées au point 10, n'était pas expiré lorsqu'ont été émises, le 24 décembre 2013, les mises en demeure tenant lieu de commandement de payer litigieuses. Ainsi, le moyen tiré de ce que les créances de l'administration sur M. et Mme A... n'étaient plus exigibles, en raison de leur prescription, doit être écarté.

En ce qui concerne les conclusions à fin d'injonction :

12. Il ne résulte pas des motifs qui précèdent la nécessité pour le ministre de l'action et des comptes publics de prendre une mesure d'exécution dans un sens déterminé. Par suite, les conclusions à fin d'injonction présentées pour M. et Mme A...doivent être rejetées.

En ce qui concerne les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

13. Il résulte de ce qui précède que M. et Mme A...ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Versailles a rejeté leur demande tendant à la décharge de l'obligation de payer la somme de 1 770 662,40 euros. Par voie de conséquence, leurs conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent également être rejetées.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. et MmeA..., en tant qu'elle demande l'annulation du jugement n° 1404200 du Tribunal administratif de Versailles du 13 décembre 2016 statuant en premier et dernier ressort sur un recours en annulation d'une décision prise en matière fiscale sur leur demande de remise gracieuse et l'annulation de cette décision, est transmise à la section du contentieux du Conseil d'État.

Article 2 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.

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N° 17VE00479


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 17VE00479
Date de la décision : 14/02/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

Contributions et taxes - Généralités - Recouvrement.

Contributions et taxes - Règles de procédure contentieuse spéciales - Questions communes - Juridiction gracieuse.


Composition du Tribunal
Président : Mme DOUMERGUE
Rapporteur ?: M. Jean-Eric SOYEZ
Rapporteur public ?: M. ERRERA
Avocat(s) : GARBONI

Origine de la décision
Date de l'import : 26/02/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2019-02-14;17ve00479 ?
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