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19/02/2019 | FRANCE | N°16VE00440

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 4ème chambre, 19 février 2019, 16VE00440


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Le Syndicat Fédération des syndicats CFTC Commerce Services et Force de vente (CFTC-CSFV) et l'Union départementale CFTC des Hauts-de-Seine ont demandé au Tribunal administratif de Cergy-Pontoise d'annuler l'arrêté n° 2010-002 du 1er septembre 2010 classant le quartier de la Défense en zone touristique d'affluence exceptionnelle et d'annuler la décision implicite de rejet, par le préfet des Hauts-de-Seine, de leur recours gracieux du 20 octobre 2010 tendant au retrait de cet arrêté.

Par un jugeme

nt n° 1101368 du 17 décembre 2015, le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Le Syndicat Fédération des syndicats CFTC Commerce Services et Force de vente (CFTC-CSFV) et l'Union départementale CFTC des Hauts-de-Seine ont demandé au Tribunal administratif de Cergy-Pontoise d'annuler l'arrêté n° 2010-002 du 1er septembre 2010 classant le quartier de la Défense en zone touristique d'affluence exceptionnelle et d'annuler la décision implicite de rejet, par le préfet des Hauts-de-Seine, de leur recours gracieux du 20 octobre 2010 tendant au retrait de cet arrêté.

Par un jugement n° 1101368 du 17 décembre 2015, le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté leur demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 15 février 2016, le Syndicat Fédération des syndicats CFTC Commerce Services et Force de vente (CFTC-CSFV) et l'Union départementale CFTC des Hauts-de-Seine, représentés par Me Douëb, avocat, demandent à la Cour :

1° d'annuler le jugement ;

2° d'annuler l'arrêté n° 2010-002 du 1er septembre 2010 et la décision implicite de rejet de leur recours gracieux ;

3° de mettre à la charge de l'Etat le versement à chacun de la somme de 4 250 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative dont 2 623,05 euros correspondant aux frais de constat d'huissier et de condamner l'Etat aux entiers dépens.

Ils soutiennent que :

- le jugement omet de répondre au moyen tiré du " défaut d'instruction " au regard de l'obsolescence de l'étude de fréquentation du parvis de la Défense sur laquelle est fondé l'arrêté attaqué ;

- l'arrêté attaqué est entaché d'un vice de procédure à défaut de la consultation des organisations d'employeurs et de salariés intéressées telle que prévue par l'article L. 3132-25 alinéa 2 du code du travail, auquel la seule consultation du MEDEF des Hauts-de-Seine, confédération syndicale patronale qui regroupe l'ensemble des secteurs d'activité économique et non spécifiquement les employeurs spécialisés dans la vente au détail, ne saurait suppléer ; de très nombreux magasins sont affiliés à la CGPME et non au MEDEF ; l'article 70 de la loi n° 2011-525 du 17 mai 2011 n'est pas applicable en matière de repos dominical ;

- l'arrêté attaqué est entaché d'un vice de procédure à défaut de consultation effective des organisations d'employeurs et de salariés intéressées, ces dernières n'ayant pas eu préalablement communication des circonstances de fait et de droit justifiant un tel classement, notamment s'agissant du jugement d'annulation rendu le 17 juin 2010 par le Tribunal administratif de Versailles et de l'inaccessibilité au public du toit de la Grande Arche ;

- le préfet n'a pas réellement instruit la demande de dérogation au repos dominical ;

- les dispositions d'interprétation stricte de la dérogation de l'article L. 3132-25 du code du travail ont été méconnues dès lors que le site touristique du toit de la Grande Arche a été fermé ce qui a nécessairement eu une influence sur la fréquentation touristique de la Défense ; l'étude de fréquentation est entachée de deux problèmes méthodologiques en l'absence de définition de la notion de touriste et de choix aléatoire des personnes interrogées et d'incohérences, surévaluation et distorsions statistiques ; l'arrêté est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation de l'affluence ; l'étude de fréquentation identifie les visiteurs et non les touristes définis notamment par l'article R. 3132-20 du code du travail ; les clients des centres commerciaux et les " touristes d'affaires " sont exclus de la dérogation de l'article L. 3132-25 du code du travail distincte de celle des périmètres d'usage de consommation exceptionnelle ;

- il n'est pas établi que l'intégralité du périmètre bénéficie d'une affluence exceptionnelle de touristes au sens de l'article L. 3132-25 du code du travail ; l'arrêté est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation sur ce point ;

- le classement est entaché d'un détournement de procédure en vue d'une application à une zone uniquement commerciale et non touristique et en vue d'une fraude aux droits des salariés et à la loi.

..........................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code du travail ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Geffroy,

- et les conclusions de Mme Bruno-Salel, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

Sur la régularité du jugement attaqué :

1. Aux termes de l'article L. 9 du code de justice administrative : " Les jugements sont motivés. ". Le tribunal a, par un jugement suffisamment motivé, écarté au point 8 du jugement le moyen tiré du défaut d'information des personnes consultées au regard notamment de l'absence invoquée de communication à ces personnes d'un jugement du Tribunal administratif de Versailles. Le tribunal a, par ailleurs, par un jugement suffisamment motivé, écarté aux points 9 et 10 du jugement le moyen tiré de l'erreur d'appréciation commise par le préfet des Hauts-de-Seine pour estimer l'importance de la fréquentation touristique de la zone concernée par l'arrêté litigieux, notamment l'argument tiré de ce que l'étude Mica research était devenue obsolète compte tenu de la fermeture du toit de la Grande arche depuis le 1er septembre 2010. Par suite, le moyen tiré de l'omission à statuer sur un moyen tiré du "défaut d'instruction " du dossier par le préfet invoqué, en raison de la fermeture au public de la Grande Arche, à l'appui du moyen tiré du défaut d'information des personnes consultées doit être écarté.

Sur le fond :

2. Aux termes de l'article L. 3132-25 du code du travail dans sa version applicable au litige : " Sans préjudice des dispositions de l'article L. 3132-20, les établissements de vente au détail situés dans les communes d'intérêt touristique ou thermales et dans les zones touristiques d'affluence exceptionnelle ou d'animation culturelle permanente peuvent, de droit, donner le repos hebdomadaire par roulement pour tout ou partie du personnel. / La liste des communes d'intérêt touristique ou thermales intéressées et le périmètre des zones touristiques d'affluence exceptionnelle ou d'animation culturelle permanente sont établis par le préfet sur proposition de l'autorité administrative visée au premier alinéa de l'article L. 3132-26, après avis du comité départemental du tourisme, des syndicats d'employeurs et de salariés intéressés, ainsi que des communautés de communes, des communautés d'agglomération et des communautés urbaines, lorsqu'elles existent. / Un décret en Conseil d'Etat détermine les modalités d'application du présent article. ".

3. En premier lieu, il ressort des pièces du dossier que le préfet des Hauts-de-Seine a consulté pour avis les 19 et 30 juillet 2010, les 2, 23 et 25 août 2010, l'union départementale CGT 92, l'union départementale CFE/CGC 92, l'union départementale CFTC 92, l'union départementale CFDT 92, l'union départementale FO 92, le MEDEF Suresnes Puteaux Saint-Cloud et le MEDEF Hauts de Seine Nord. Par une mesure d'instruction en date du 8 octobre 2015, le tribunal administratif a demandé aux parties de justifier de l'existence ou, au contraire, de l'absence, au niveau local, de " syndicats d'employeurs et de salariés intéressés " au sens de l'article L. 3132-25 du code du travail, " autres que ceux consultés par le préfet des Hauts-de-Seine au cours de la phase préparatoire de l'arrêté du 1er septembre 2010 attaqué ". Alors que les éléments de défense portés à la connaissance du tribunal à la suite de la mesure d'instruction précitée, montrent que la plupart des commerces étaient adhérents au MEDEF, les requérants se bornent à se prévaloir en appel des consultations d'autres syndicats visées par des arrêtés ministériels de septembre 2015 concernant des zones touristiques internationales, dépourvus de tout lien notamment temporel et spatial avec le présent litige. S'il est également soutenu, comme en première instance, que " de très nombreux magasins " seraient affiliés à la CGPME, ou, notamment, au syndicat des détaillants en chaussures de Paris Ile-de-France et Centre, les requérants n'apportent aucun élément de nature à établir, en l'espèce, l'insuffisance de la consultation préalable des organisations d'employeurs et de salariés. Par suite, le moyen tiré du vice de procédure en raison de l'absence d'avis de certains syndicats d'employeurs ne peut qu'être écarté.

4. En deuxième lieu, il y a lieu, par adoption des motifs retenus à bon droit par les premiers juges aux points 7 à 8 du jugement, d'écarter le moyen repris dans les mêmes termes en appel tiré de l'absence d'effectivité de la consultation des organismes employeurs et salariés intéressés.

5. En troisième lieu, il ressort de la décision attaquée que le préfet a fait état dans ses motifs de ce que " les touristes dits " d'agrément " se rendant dans le quartier de la Défense dans le but de le visiter se concentrent sur le parvis de La Défense, la Grande Arche et le parcours situé sur le parvis permettant de découvrir une soixantaine d'oeuvres d'art contemporaines ". La circonstance tenant à la fermeture au public de l'accès au toit de la Grande Arche qui ne remet pas en cause la qualité architecturale de la Grande Arche vue du parvis n'était pas de nature à imposer au préfet " un complément d'instruction " sur la fréquentation touristique. Par suite, le moyen tiré d'un vice de procédure dans l'instruction doit être écarté.

6. En quatrième lieu, il ressort des pièces du dossier, en particulier de l'avis émis le 8 juillet 2010 par le comité départemental du tourisme des Hauts-de-Seine que le quartier de La Défense est fréquenté par environ trois millions de touristes dits " d'agrément " par an, dont deux millions viennent de province ou de l'étranger, en raison des spécificités architecturales du quartier notamment La Grande Arche et son parvis, le musée de la Défense, la vue de l'axe historique de Paris vers le Louvre et un musée d'art contemporain à ciel ouvert comprenant " les personnages de Miro ", le " Pouce de César " et " l'Araignée de Calder " ainsi qu'une offre hôtelière située à proximité immédiate de la zone de classement. L'étude de janvier 2013 intitulée " analyse critique de l'étude de la fréquentation du Parvis de la Défense de septembre 2009 " produite par les requérants n'est pas de nature à remettre en cause les projections de fréquentation touristique issues des résultats d'un comptage sur site de 11 892 " sortants " des deux gares métro/RER montrant 24 % de touristes dits d'" agrément " alors même que les personnes interrogées n'auraient pas été sélectionnées de manière aléatoire et que la définition de touriste ne serait " pas conforme à la norme internationale ", l'application d'une telle norme n'étant pas requise pour l'application des dispositions précitées. Au demeurant, les constats d'huissier produits par les requérants sur la fréquentation du périmètre en août 2011, confirment une fréquentation importante du quartier même en période de congé des salariés des très nombreux sièges d'entreprises. Ainsi, eu égard à sa fréquentation, le quartier de La Défense constitue une zone touristique d'affluence exceptionnelle au sens des dispositions susvisées de l'article L. 3132-25 du code du travail.

7. En cinquième lieu, si les requérants allèguent que l'intégralité du périmètre de la zone touristique défini par " le quartier de La Défense situé sur les communes de Courbevoie et Puteaux, strictement délimité par le boulevard circulaire selon le plan annexé " ne bénéficierait pas d'une affluence exceptionnelle de touristes, il ressort des pièces du dossier, notamment du plan du musée à ciel ouvert, que le périmètre défini par l'arrêté litigieux, dans lequel se concentrent au demeurant les commerces, présente un intérêt suffisant d'un point de vue touristique tout en se limitant à une zone principalement piétonne desservant la Grande Arche à l'est et l'ensemble du parcours des oeuvres d'art contemporain vers l'ouest intéressant ainsi les touristes dits " d'agrément " se rendant dans le quartier de La Défense dans le but de le visiter. Par suite, l'arrêté attaqué n'a pas fait une inexacte application de l'article L. 3132-25 du code du travail en procédant à ce classement.

8. En sixième lieu, il y a lieu par adoption des motifs retenus à bon droit par les premiers juges aux points 11 et 12 du jugement d'écarter le moyen tiré du détournement de procédure par " fraude à la loi " soulevé en première instance par un mémoire en triplique présenté le 25 juillet 2014 repris dans les mêmes termes en appel.

9. Il résulte de tout ce qui précède, que le Syndicat Fédération des syndicats CFTC Commerce Services et Force de vente (CFTC-CSFV) et l'Union départementale CFTC des Hauts-de-Seine ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté leur demande.

Sur les frais liés au litige :

10. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que le Syndicat Fédération des syndicats CFTC Commerce Services et Force de vente (CFTC-CSFV) et l'Union départementale CFTC des Hauts-de-Seine demandent au titre des frais exposés par eux et non compris dans les dépens.

Sur les dépens :

11. Aux termes de l'article R. 761-1 du code de justice administrative : " Les dépens comprennent les frais d'expertise, d'enquête et de toute autre mesure d'instruction dont les frais ne sont pas à la charge de l'Etat. / Sous réserve de dispositions particulières, ils sont mis à la charge de toute partie perdante sauf si les circonstances particulières de l'affaire justifient qu'ils soient mis à la charge d'une autre partie ou partagés entre les parties (...) ". Les requérants ayant la qualité de partie perdante devant la Cour, ne justifient d'aucune circonstance particulière à l'appui de leur demande de remboursement des constats d'huissier. Par suite, il y a lieu de laisser ces frais à la charge des requérants.

D E C I D E :

Article 1er : La requête du Syndicat Fédération des syndicats CFTC Commerce Services et Force de vente (CFTC-CSFV) et de l'Union départementale CFTC des Hauts-de-Seine est rejetée.

5

N° 16VE00440


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 16VE00440
Date de la décision : 19/02/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

66-03-02 Travail et emploi. Conditions de travail. Repos hebdomadaire.


Composition du Tribunal
Président : M. BROTONS
Rapporteur ?: Mme Brigitte GEFFROY
Rapporteur public ?: Mme BRUNO-SALEL
Avocat(s) : DOUEB

Origine de la décision
Date de l'import : 05/03/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2019-02-19;16ve00440 ?
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