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21/03/2019 | FRANCE | N°18VE02782

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 6ème chambre, 21 mars 2019, 18VE02782


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B...C...a demandé au Tribunal administratif de Montreuil d'annuler l'arrêté du 14 mars 2017 par lequel le préfet de la Seine-Saint-Denis a rejeté sa demande de titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français sans délai et a prononcé à son encontre une interdiction de retour sur le territoire français pendant une durée de deux ans.

Par un jugement n° 1802378 du 25 juin 2018, le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :



Par une requête et un nouveau mémoire, enregistrés les 5 août 2018 et 2 mars 2019, M. C...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B...C...a demandé au Tribunal administratif de Montreuil d'annuler l'arrêté du 14 mars 2017 par lequel le préfet de la Seine-Saint-Denis a rejeté sa demande de titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français sans délai et a prononcé à son encontre une interdiction de retour sur le territoire français pendant une durée de deux ans.

Par un jugement n° 1802378 du 25 juin 2018, le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un nouveau mémoire, enregistrés les 5 août 2018 et 2 mars 2019, M. C..., représenté par Me Cukier, avocat, demande à la Cour :

1° d'annuler ce jugement ;

2° de renvoyer l'affaire au Tribunal administratif de Montreuil ;

3° de mettre à la charge de l'Etat le versement d'une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

M. C...soutient que, contrairement à ce qu'ont retenu les premiers juges, sa demande n'était pas tardive dès lors que, l'arrêté contesté du 14 mars 2017 ne lui ayant pas été notifié par voie administrative, ainsi que l'impose le II de l'article L. 512-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, le délai de recours contentieux de quarante-huit heures prévu par ces dispositions ne lui était pas opposable.

.............................................................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Toutain,

- les conclusions de M. Errera, rapporteur public,

- et les observations de MeA..., substituant Me Cukier, pour M.C....

Considérant ce qui suit :

1. M.C..., ressortissant nigérian né le 26 décembre 1978, a sollicité, le 19 mai 2016, son admission exceptionnelle au séjour sur le fondement de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par arrêté du 14 mars 2017, le préfet de la Seine-Saint-Denis a rejeté sa demande, a fait obligation à l'intéressé de quitter le territoire français sans délai et a prononcé à son encontre une interdiction de retour sur le territoire français pendant une durée de deux ans. M. C...a demandé au Tribunal administratif de Montreuil d'annuler cet arrêté. Par un jugement n° 1802378 du 25 juin 2018, le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté cette demande, motif pris de ce qu'elle avait été introduite postérieurement à l'expiration du délai de recours contentieux de quarante-huit heures, tel que prévu au II de l'article L. 512-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, et était, par suite, irrecevable. M. C...relève appel de ce jugement.

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. D'une part, aux termes du II de l'article L. 512-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger qui fait l'objet d'une obligation de quitter le territoire sans délai peut, dans les quarante-huit heures suivant sa notification par voie administrative, demander au président du tribunal administratif l'annulation de cette décision, ainsi que l'annulation de la décision relative au séjour, de la décision refusant un délai de départ volontaire, de la décision mentionnant le pays de destination et de la décision d'interdiction de retour sur le territoire français ou d'interdiction de circulation sur le territoire français qui l'accompagnent le cas échéant (...) ". La notification par voie postale d'une obligation de quitter sans délai le territoire français, et non par voie administrative comme le prévoient les dispositions précitées du II de l'article L. 512-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, fait obstacle à ce que le délai de recours contentieux de quarante-huit heures que ces dispositions instituent soit opposable au destinataire.

3. D'autre part, aux termes de l'article R. 421-5 du code de justice administrative : " Les délais de recours contre une décision administrative ne sont opposables qu'à la condition d'avoir été mentionnés, ainsi que les voies de recours, dans la notification de la décision ".

4. Enfin, le principe de sécurité juridique, qui implique que ne puissent être remises en cause sans condition de délai des situations consolidées par l'effet du temps, fait obstacle à ce que puisse être contestée indéfiniment une décision administrative individuelle qui a été notifiée à son destinataire, ou dont il est établi, à défaut d'une telle notification, que celui-ci a eu connaissance. En une telle hypothèse, si le non-respect de l'obligation d'informer l'intéressé sur les voies et les délais de recours, ou l'absence de preuve qu'une telle information a bien été fournie, ne permet pas que lui soient opposés les délais de recours fixés par le code de justice administrative, le destinataire de la décision ne peut exercer de recours juridictionnel au-delà d'un délai raisonnable. En règle générale et sauf circonstances particulières dont se prévaudrait le requérant, ce délai ne saurait, sous réserve de l'exercice de recours administratifs pour lesquels les textes prévoient des délais particuliers, excéder un an à compter de la date à laquelle une décision expresse lui a été notifiée ou de la date à laquelle il est établi qu'il en a eu connaissance.

5. En l'espèce, il est constant que l'arrêté contesté du 14 mars 2017 a été notifié à M. C..., accompagné des voies et délais de recours ouverts à son encontre, par voie postale, et non par voie administrative comme le prévoient les dispositions rappelées au point 2. Aussi le délai de recours contentieux de quarante-huit heures que celles-ci instituent n'était-il pas opposable à l'intéressé. Par ailleurs, même à admettre que le requérant aurait reçu le pli contenant l'arrêté contesté du 14 mars 2017 le jour même de son envoi par l'administration, circonstance qui ne ressort pas des pièces du dossier, la demande de l'intéressé tendant à l'annulation de cet arrêté a été enregistrée au greffe du Tribunal administratif de Montreuil le 13 mars 2018, soit antérieurement à l'expiration du délai d'un an mentionné au point 4. M. C... est, dès lors, fondé à soutenir qu'en rejetant pour tardiveté sa demande, ce tribunal a entaché le jugement attaqué d'irrégularité. Par suite, ce jugement doit être annulé.

6. Enfin, en l'absence de conclusions sur le fond présentées par les parties, l'affaire ne peut qu'être renvoyée devant le Tribunal administratif de Montreuil pour qu'il soit à nouveau statué sur la demande de M.C....

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

7. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat le versement à M. C...d'une somme en remboursement de frais exposés et non compris dans les dépens.

DECIDE :

Article 1er : Le jugement rendu par le Tribunal administratif de Montreuil le 25 juin 2018 sous le n° 1802378 est annulé.

Article 2 : L'affaire est renvoyée au Tribunal administratif de Montreuil.

Article 3 : Les conclusions présentées par M. C...devant la Cour sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

2

N° 18VE02782


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 18VE02782
Date de la décision : 21/03/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-03-03 Étrangers. Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière. Règles de procédure contentieuse spéciales.


Composition du Tribunal
Président : Mme DOUMERGUE
Rapporteur ?: M. Eric TOUTAIN
Rapporteur public ?: M. ERRERA
Avocat(s) : CUKIER

Origine de la décision
Date de l'import : 02/04/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2019-03-21;18ve02782 ?
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