La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

14/05/2019 | FRANCE | N°17VE02610

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 1ère chambre, 14 mai 2019, 17VE02610


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société à responsabilité limitée (SARL) Externis a demandé au Tribunal administratif de Montreuil la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des années 2009 à 2011.

Par un jugement n° 1600540 du 10 avril 2017, le Tribunal administratif de Montreuil a fait droit à sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire enregistrés les 4 aout 2017 et 8 février 2018, le ministre de l'action

et des comptes publics demande à la cCour :

1° d'annuler le jugement attaqué ;

2° de remettre à la c...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société à responsabilité limitée (SARL) Externis a demandé au Tribunal administratif de Montreuil la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des années 2009 à 2011.

Par un jugement n° 1600540 du 10 avril 2017, le Tribunal administratif de Montreuil a fait droit à sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire enregistrés les 4 aout 2017 et 8 février 2018, le ministre de l'action et des comptes publics demande à la cCour :

1° d'annuler le jugement attaqué ;

2° de remettre à la charge de la SARL Externis les redressements d'impôts sur les sociétés litigieux.

Il soutient que :

- dès lors que le bénéfice du crédit impôt recherche relève d'un processus déclaratif, la procédure prévue au II de l'article R.45 B-1 du livre des procédures fiscales ne constitue qu'une modalité d'accès de l'administration à ces justificatifs et ne crée pas une garantie spécifique au profit de l'entreprise ; par suite, la question pertinente est se savoir si la société a été mise en mesure, avant la mise en recouvrement, de justifier de l'éligibilité des dépenses de recherche portées sur ses déclarations n° 2069 pour les trois exercices en cause ;

- en l'espèce, le montant des rectifications a été fixé à l'issue d'une procédure contradictoire au cours de laquelle la société a pu présenter les justificatifs et formuler des observations pour justifier de l'éligibilité de ses dépenses de recherche, et le défaut de mise en oeuvre de la procédure prévue au II de l'article R.45 B-1 du livre des procédures fiscales est sans incidence.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Munoz-Pauziès, président-assesseur,

- les conclusions de M. Chayvialle, rapporteur public,

- et les observations de MeA..., pour la SARL Externis.

Considérant ce qui suit :

1. La SARL Externis a fait l'objet d'une vérification de comptabilité à l'issue de laquelle le vérificateur a partiellement remis en cause les dépenses éligibles au crédit d'impôt en faveur de la recherche au titre des années 2009 à 2011. Elle a saisi le Tribunal administratif de Montreuil d'une demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés découlant de cette remise en cause. Le MINISTRE DE L'ACTION ET DES COMPTES PUBLICS relève appel du jugement du 10 avril 2017 par lequel le tribunal a fait droit à la demande de la SARL Externis.

2. Aux termes de l'article R.45 B-1 du livre des procédures fiscales : " I. - La réalité de l'affectation à la recherche des dépenses prises en compte pour la détermination du crédit d'impôt mentionné à l'article 244 quater B du code général des impôts est vérifiée soit par un agent dûment mandaté par le directeur général pour la recherche et l'innovation, soit par un délégué régional à la recherche et à la technologie ou un agent dûment mandaté par ce dernier. / L'intervention des agents du ministère chargé de la recherche peut résulter soit d'une initiative de ce ministère, soit d'une demande de l'administration des impôts dans le cadre d'un contrôle ou d'un contentieux fiscal. / II. - Dans le cadre de cette procédure, l'agent chargé du contrôle de la réalité de l'affectation à la recherche des dépenses déclarées envoie à l'entreprise contrôlée une demande d'éléments justificatifs. L'entreprise répond dans un délai de trente jours, éventuellement prorogé de la même durée à sa demande. L'entreprise joint à sa réponse les documents nécessaires à l'expertise de l'éligibilité des dépenses dont la liste est précisée dans la demande d'éléments justificatifs (...) / L'agent chargé du contrôle peut envoyer à l'entreprise contrôlée une demande d'informations complémentaires à laquelle celle-ci doit répondre dans un délai de trente jours. Si les éléments fournis par l'entreprise en réponse à cette demande ne permettent pas de mener l'expertise à bien, l'agent chargé du contrôle peut envoyer à l'entreprise contrôlée une seconde demande d'informations à laquelle celle-ci doit répondre dans un délai de trente jours. Dans ce délai, l'entreprise a la faculté de demander un entretien afin de clarifier les conditions d'éligibilité des dépenses (...) III. - L'avis sur la réalité de l'affectation des dépenses à la recherche est émis par les agents chargés du contrôle au vu de la réponse de l'entreprise à la demande d'éléments justificatifs qui lui a été adressée, des documents mentionnés au II, et, le cas échéant, des réponses aux demandes d'informations complémentaires et des éléments recueillis à l'occasion des échanges avec l'entreprise lors de l'entretien dans les locaux de l'administration ou de la visite sur place. "

3. Pour prononcer la décharge des impositions litigieuses, le tribunal administratif a relevé que l'expert chargé du contrôle de la réalité de l'affectation à la recherche des dépenses déclarées, saisi le 7 mai 2013, n'avait pas, en méconnaissance du II de l'article R.45 B-1 du livre des procédures fiscales, envoyé à la SARL Externis de demande d'éléments justificatifs, qu'il avait ainsi rendu un avis, transmis à la société le 18 juin 2013, sans qu'elle ait eu connaissance des éléments sur la base desquels cet avis était fondé, et que cette irrégularité de procédure avait privé la SARL Externis d'une garantie.

4. Toutefois, s'il est vrai que l'avis transmis à la société le 18 juin 2013 n'a pas été précédé d'une demande de production d'éléments justificatifs, et que la proposition de rectification du 23 juillet 2013 notifie les redressements litigieux établis au vu de cet avis, il résulte de l'instruction que la SARL Externis a communiqué au service vérificateur des éléments justificatifs le 27 septembre 2013 et que, par courrier du 20 janvier 2014, la société a été informée de leur transmission à l'expert dans le cadre d'une deuxième expertise. Le deuxième rapport d'expertise a été joint à la réponse aux observations du contribuable du 4 avril 2014, réduisant le montant des rectifications initialement notifiées. Au stade de l'interlocution départementale, une troisième expertise a été diligentée, et le nouvel expert a adressé à la SARL Externis une demande de production d'éléments justificatifs, en application des dispositions du II de l'article R45 B-1 du livre des procédures fiscales, et rencontré son dirigeant le 17novembre 2014. Sur la base de cette nouvelle expertise, l'éligibilité de certaines dépenses a une fois encore été admise par le service. Ainsi, la SARL Externis n'ayant été privée d'aucune garantie, c'est à tort que le tribunal administratif s'est fondé sur ce motif pour prononcer la décharge des impositions en litige.

5. Il appartient toutefois à la cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par la SARL Externis.

6. Il résulte des dispositions des articles L. 13 et L. 52 du livre des procédures fiscales que la vérification de comptabilité doit se dérouler au siège de l'entreprise vérifiée, de façon à permettre au contribuable d'avoir un débat oral et contradictoire avec le vérificateur à partir des documents comptables. Contrairement à ce que soutient la SARL Externis, l'avis de l'expert dont l'intervention est prévue par les dispositions, rappelées au point 2, de l'article R45 B-1 du livre des procédures fiscales n'est pas un document comptable soumis au débat oral et contradictoire. Le moyen tiré par la société requérante de ce que, en l'absence de communication de l'avis pendant la vérification de comptabilité, elle aurait été privée d'un débat oral et contradictoire doit dès lors être écarté.

7. Il résulte de ce qui précède que le MINISTRE DE L'ACTION ET DES COMPTES PUBLICS est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif a déchargé la SARL Externis des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des années 2009 à 2011. Il y a lieu, par voie de conséquence, de rejeter les conclusions présentées par cette dernière au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

DECIDE :

Article 1er : Le jugement du Tribunal administratif de Montreuil du 10 avril 2017 est annulé.

Article 2 : Les cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles la SARL Externis a été assujettie au titre des années 2009 à 2011 sont remises à sa charge.

Article 3 : Les conclusions de la SARL Externis présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

N° 17VE02610 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 17VE02610
Date de la décision : 14/05/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

19-04-02-01-08-01-01 Contributions et taxes. Impôts sur les revenus et bénéfices. Revenus et bénéfices imposables - règles particulières. Bénéfices industriels et commerciaux. Calcul de l'impôt.


Composition du Tribunal
Président : M. BEAUJARD
Rapporteur ?: Mme Frédérique MUNOZ-PAUZIES
Rapporteur public ?: M. CHAYVIALLE
Avocat(s) : CABINET MELOT et BUCHET AVOCATS

Origine de la décision
Date de l'import : 21/05/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2019-05-14;17ve02610 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award