La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

17/12/2019 | FRANCE | N°17VE02360

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 3ème chambre, 17 décembre 2019, 17VE02360


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. et Mme A... D... ont demandé au Tribunal administratif de Montreuil, d'une part, de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu, de contributions sociales et de contribution exceptionnelle sur les hauts revenus auxquelles ils ont été assujettis au titre de l'année 2011, ainsi que des intérêts de retard correspondants, et, d'autre part, de mettre à la charge de l'État la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par un

jugement n° 1510342 du 10 avril 2017, le Tribunal administratif de Montreuil a,...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. et Mme A... D... ont demandé au Tribunal administratif de Montreuil, d'une part, de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu, de contributions sociales et de contribution exceptionnelle sur les hauts revenus auxquelles ils ont été assujettis au titre de l'année 2011, ainsi que des intérêts de retard correspondants, et, d'autre part, de mettre à la charge de l'État la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par un jugement n° 1510342 du 10 avril 2017, le Tribunal administratif de Montreuil a, en premier lieu, déchargé M. et Mme D... des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu, de contributions sociales et de contribution exceptionnelle sur les hauts revenus auxquelles ils ont été assujettis au titre de l'année 2011, ainsi que des intérêts de retard correspondants, et, en second lieu, mis à la charge de l'État une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et des mémoires, enregistrés les 20 juillet et 17 novembre 2017 et

22 mai 2019, le MINISTRE DE L'ACTION ET DES COMPTES PUBLICS demande à la Cour :

1° d'annuler ce jugement ;

2° de remettre à la charge de M. et Mme D... les cotisations supplémentaires d'impôt déchargées par le tribunal au titre de l'année 2011.

Il soutient que :

- les premiers juges ont, à tort, estimé que la procédure suivie avait méconnu l'article L. 57 du livre des procédures fiscales au motif que la proposition de rectification du 7 novembre 2013 n'aurait pas été adressée au conseil de M. et Mme D... en qualité de représentant fiscal, alors que la désignation spontanée d'un représentant fiscal par les intéressés n'imposait aucune obligation quant au destinataire des pièces de procédure, que le courrier du 30 mai 2011, prématuré, ne pouvait être assimilé à une élection de domicile auprès du cabinet d'avocats et que la proposition de rectification a été notifiée à l'adresse à laquelle les requérants ont souscrit leurs déclarations ;

- la fin de non-recevoir opposée par M. et Mme D... n'est pas fondée ;

- les requérants ne sauraient obtenir restitution des contributions sociales mises à leur charge, hormis le prélèvement de solidarité de 2 %, qu'en apportant la preuve de leur affiliation au régime de sécurité sociale anglais.

..........................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme C...,

- les conclusions de M. Huon, rapporteur public,

- et les observations de Me E..., avocat de M. et Mme D....

Une note en délibéré présentée par Me E... a été enregistrée le 15 octobre 2019.

Considérant ce qui suit :

1. A la suite d'un contrôle sur pièces, l'administration fiscale a assujetti

M. et Mme D... à des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu, de contributions sociales et de contribution exceptionnelle sur les hauts revenus au titre de l'année 2011, à raison d'une plus-value d'apport en société réalisée cette même année dans le cadre d'une opération d'échange de titres et imposable au taux de 19 %. Le MINISTRE DE L'ACTION ET DES COMPTES PUBLICS fait appel du jugement du 10 avril 2017 par lequel le Tribunal administratif de Montreuil a fait droit à la demande de M. et Mme D... tendant à la décharge des impositions supplémentaires ainsi mises à leur charge, ainsi que des intérêts de retard correspondants.

2. Aux termes de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales : " l'administration adresse au contribuable une proposition de rectification qui doit être motivée de manière à lui permettre de formuler ses observations ou de faire connaître son acceptation (...). / Lorsque l'administration rejette les observations du contribuable sa réponse doit également être motivée ". Pour l'application de ces dispositions, il y a lieu de considérer que, sauf stipulation contraire, le mandat donné à un conseil ou à tout autre mandataire par un contribuable pour recevoir l'ensemble des actes de la procédure d'imposition et y répondre emporte élection de domicile auprès de ce mandataire. Par suite, lorsqu'un tel mandat a été porté à la connaissance de l'administration fiscale, celle-ci est en principe tenue d'adresser au mandataire l'ensemble des actes de la procédure d'imposition. Lorsque le mandataire du contribuable a la qualité d'avocat et que celui-ci déclare que son client a élu domicile à son cabinet, l'administration fiscale est tenue de lui adresser les actes de la procédure d'imposition sans qu'il soit besoin d'exiger la production d'un mandat exprès.

3. Par ailleurs, aux termes de l'article 164 D du code général des impôts, dans sa version applicable en l'espèce : " Les personnes physiques exerçant des activités en France ou y possédant des biens, sans y avoir leur domicile fiscal, ainsi que les personnes mentionnées au 2 de l'article 4 B, peuvent être invitées, par le service des impôts, à désigner dans un délai de quatre-vingt-dix jours à compter de la réception de cette demande, un représentant en France autorisé à recevoir les communications relatives à l'assiette, au recouvrement et au contentieux de l'impôt ". Il résulte de ces dispositions que, dès lors qu'une personne physique imposable en France, mais sans y avoir son domicile fiscal, a déclaré à l'administration fiscale un représentant en France en application de l'article 164 D, le mandat ainsi donné à ce mandataire emporte élection de domicile auprès de lui pour l'ensemble des communications relatives à l'impôt sur le revenu. Par suite, ce mandataire doit, en principe, être destinataire de la proposition de rectification prévue à l'article L. 57 du livre des procédures fiscales.

4. Il résulte de l'instruction que, par courrier du 18 juillet 2011, adressé à l'administration fiscale et intitulé notamment " Transfert de leur résidence principale au Royaume-Uni ", Maître B... E... a rappelé le transfert de domicile de M. et Mme D... à Londres et indiqué être le " représentant fiscal " de ces derniers. D'une part, ainsi qu'il a été rappelé au point 2, un avocat est dispensé de justifier de l'existence d'une désignation expresse par son client en tant que mandataire et qu'il lui suffit de se déclarer comme tel. D'autre part, en l'espèce, le courrier adressé à l'administration fiscale par le conseil de M. et Mme D... faisant état tant de la qualité de non-résidents de ces derniers que de celle de représentant fiscal de Me E..., il constituait un mandat de représentation fiscale au sens de l'article 164 D du code général des impôts emportant élection de domicile des contribuables au cabinet de ce dernier pour les impositions en litige, sans que le ministre puisse utilement invoquer le fait que les contribuables n'auraient pas fait l'objet d'une invitation préalable en ce sens par le service des impôts, ni le fait que ce courrier aurait été adressé à ce service avant même l'engagement de la procédure d'imposition. Dans ces conditions, M. et Mme D... sont fondés à soutenir que la proposition de rectification du 7 novembre 2013, qui leur a été adressée et présentée à leur adresse personnelle à Londres, et retournée à l'expéditeur avec les mentions " non réclamé ", " not known " et " refused ", aurait dû l'être à leur représentant fiscal et que, par suite, elle ne peut être regardée comme leur ayant été régulièrement notifiée, les privant ainsi d'une garantie.

5. Il résulte de tout ce qui précède, et sans qu'il soit besoin de statuer sur les fins de

non-recevoir opposées par M. et Mme D..., que le MINISTRE DE L'ACTION ET DES COMPTES PUBLICS n'est pas fondé à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Montreuil a prononcé la décharge des impositions contestées ainsi que des intérêts de retard correspondants. Dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge de l'État le versement d'une somme de 2 000 euros à M. et Mme D... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête du MINISTRE DE L'ACTION ET DES COMPTES PUBLICS est rejetée.

Article 2 : L'État versera à M. et Mme D... la somme de 2 000 euros au titre de l'article

L. 761-1 du code de justice administrative.

2

N° 17VE02360


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 17VE02360
Date de la décision : 17/12/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

19-01-03-02-01 Contributions et taxes. Généralités. Règles générales d'établissement de l'impôt. Rectification (ou redressement). Généralités.


Composition du Tribunal
Président : M. BRESSE
Rapporteur ?: Mme Muriel DEROC
Rapporteur public ?: M. HUON
Avocat(s) : CABINET CHAINTRIER AVOCATS

Origine de la décision
Date de l'import : 24/12/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2019-12-17;17ve02360 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award