La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

27/05/2020 | FRANCE | N°18VE01853

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 7ème chambre, 27 mai 2020, 18VE01853


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Cergy-Pontoise d'annuler les décisions du 20 février 2014 par lesquelles le préfet des Hauts-de-Seine a refusé de lui délivrer un récépissé de déclaration d'acquisition d'une carabine et lui a ordonné de se dessaisir des armes des catégories B et C en sa possession.

Par un jugement n° 1403774 du 29 mars 2018, le tribunal administratif de Cergy-Pontoise a annulé la décision portant refus de délivrance d'un récépissé de déclaration d'acqui

sition d'une carabine et rejeté le surplus des conclusions de sa demande.

Procédure dev...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Cergy-Pontoise d'annuler les décisions du 20 février 2014 par lesquelles le préfet des Hauts-de-Seine a refusé de lui délivrer un récépissé de déclaration d'acquisition d'une carabine et lui a ordonné de se dessaisir des armes des catégories B et C en sa possession.

Par un jugement n° 1403774 du 29 mars 2018, le tribunal administratif de Cergy-Pontoise a annulé la décision portant refus de délivrance d'un récépissé de déclaration d'acquisition d'une carabine et rejeté le surplus des conclusions de sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire enregistrés le 29 mai 2018 et le 22 juin 2018, M. A..., représenté par Me Le Moigne, avocat, demande à la Cour :

1°) d'annuler l'article 2 de ce jugement rejetant le surplus des conclusions de sa demande, relative à l'obligation de se dessaisir des armes relevant des catégories B et C en sa possession ;

2°) d'annuler la décision du 20 février 2014 par laquelle le préfet des Hauts-de-Seine lui a ordonné de se dessaisir des armes relevant des catégories B et C en sa possession ;

3°) de mettre à la charge de l'État la somme de 6 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- sa requête d'appel est recevable ;

- le jugement attaqué est insuffisamment motivé ;

- ce jugement est entaché d'une contradiction dans ses motifs ;

- la décision lui ordonnant de se dessaisir de ses armes est insuffisamment motivée ;

- cette décision a été prise en méconnaissance des règles relatives à l'abrogation des actes administratifs individuels explicites créateurs de droits ;

- elle méconnait le principe d'espérance légitime protégé par les stipulations de l'article 1er du premier protocole additionnel à la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- elle méconnait le principe de non-rétroactivité de la loi au regard de la date de commission des faits sur lesquels le préfet s'est fondé pour l'adopter ;

- elle méconnait son droit de propriété protégé par l'article 17 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen ;

- elle est entachée d'une erreur d'appréciation de sa dangerosité ;

- elle est entachée d'un détournement de procédure.

Par un mémoire enregistré le 18 octobre 2018, le ministre de l'intérieur décline sa compétence pour représenter l'État dans la présente instance.

Il soutient que la représentation de l'État devant la cour incombe au préfet des Hauts-de-Seine en application des dispositions du 6° du I de l'article R. 811-10-1 du code de justice administrative.

......................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de la sécurité intérieure ;

- l'ordonnance n° 2020-305 du 25 mars 2020 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, d'exposer des conclusions à l'audience, en application de l'article 8 de l'ordonnance n° 2020-305 du 25 mars 2020 portant adaptation des règles applicables devant les juridictions de l'ordre administratif.

Le rapport de M. Illouz, conseiller, a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. A... a fait l'acquisition le 1er août 2013 d'une carabine, cette arme relevant de la catégorie C, dont il a déclaré l'acquisition auprès des services du préfet des Hauts-de-Seine le 23 août suivant. Par un courrier du 26 novembre 2013, le préfet l'a informé qu'il envisageait de lui interdire la détention de certaines armes dont celles relevant de cette catégorie et l'a invité à formuler des observations, faculté dont l'intéressé a fait usage par un courrier du 9 décembre suivant. Par deux décisions du 20 février 2014, le préfet des Hauts-de-Seine a refusé de lui délivrer le récépissé de déclaration de l'arme acquise le 1er août 2013 et lui a ordonné de se dessaisir de ses armes relevant des catégorie B et C. M. A... fait régulièrement appel du jugement du 29 mars 2018 en tant que, par ce jugement, le tribunal administratif de Cergy-Pontoise, après avoir annulé le refus de délivrance du récépissé de déclaration d'acquisition de sa carabine, a rejeté le surplus des conclusions de sa demande.

2. Aux termes de l'article L. 312-3 du code de la sécurité intérieure, dans sa version applicable au litige : " Nul ne peut acquérir et détenir légalement des matériels ou des armes des catégories B et C s'il ne remplit pas les conditions suivantes : (...) / 2° Ne pas se signaler par un comportement laissant objectivement craindre une utilisation de l'arme ou du matériel dangereuse pour soi-même ou pour autrui. ".

3. Il ressort des pièces du dossier que, pour ordonner à M. A... de se dessaisir de ses armes relevant des catégories B et C, le préfet des Hauts-de-Seine s'est fondé sur des faits de dégradation de biens privés commis en 2003, d'usage et de revente de stupéfiants commis en 2004 et de port illégal d'armes de 6ème catégorie commis en 2010. La circonstance, à la supposer établie, que M. A... aurait été condamné le 2 novembre 2007 au paiement d'une amende de 500 euros pour usage illicite de stupéfiants le 27 février 2007, est en tout état de cause sans influence sur la légalité de la décision en litige, dès lors que ses motifs ne font pas mention de ces condamnations. Il est constant que les faits commis en 2003 et 2004, anciens de onze et dix ans à la date de la décision attaquée, d'une faible gravité et commis alors que l'intéressé n'était âgé que de seize, puis de dix-sept ans, n'ont donné lieu à l'engagement d'aucune poursuite pénale. M. A... fait valoir en outre que les faits de dégradation de biens privés présentent un degré particulièrement faible de gravité et que ceux relatifs à la détention de stupéfiants ne traduisent qu'une consommation personnelle et la mise à disposition d'une quantité faible de cannabis à l'une de ses connaissances, en contrepartie d'une somme elle-même modique. S'agissant des faits de port illégal d'armes de 6ème catégorie, anciens quant à eux de quatre ans à la date de la décision en litige, M. A... expose, sans être contredit, que pris à parti par des délinquants en bande organisée en compagnie de son jeune frère, c'est ce dernier, et non lui-même, qui aurait fait usage d'une bombe lacrymogène en situation de légitime défense. La circonstance que ces faits aient donné lieu à un rappel à la loi ne saurait, à elle seule et en l'absence de tout autre élément versé aux débats par le préfet, permettre de regarder comme établi l'usage d'une telle bombe lacrymogène par M. A... lui-même. Dès lors, au regard de l'ancienneté de l'ensemble de ces faits, du contexte dans lequel ceux commis en 2010 se sont déroulés et de l'absence de tout élément permettant de caractériser l'usage direct d'une arme de 6ème catégorie par l'appelant lui-même, le préfet des Hauts-de-Seine, en estimant que ces seuls faits étaient constitutifs d'un comportement laissant objectivement craindre une utilisation des armes de M. A... dangereuse pour lui-même ou pour autrui, a entaché sa décision d'une inexacte application des dispositions précitées du 2° de l'article L. 312-3 du code de la sécurité intérieure.

4. Il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il soit besoin de se prononcer les autres moyens de la requête, que M. A... est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 20 février 2014 par laquelle le préfet des Hauts-de-Seine lui a ordonné de se dessaisir de ses armes relevant des catégories B et C.

5. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'État le versement de la somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par M. A... et non compris dans les dépens.

D É C I D E :

Article 1er : L'article 2 du jugement du tribunal administratif de Cergy-Pontoise n° 1403774 du 29 mars 2018 et la décision du 20 février 2014 par laquelle le préfet des Hauts-de-Seine a ordonné à M. A... de se dessaisir de ses armes relevant des catégories B et C sont annulés.

Article 2 : L'État versera à M. A... une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

2

N° 18VE01853


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 7ème chambre
Numéro d'arrêt : 18VE01853
Date de la décision : 27/05/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

49-05-05 Police. Polices spéciales. Police du port et de la détention d'armes.


Composition du Tribunal
Président : M. EVEN
Rapporteur ?: M. Julien ILLOUZ
Rapporteur public ?: Mme DANIELIAN
Avocat(s) : LE MOIGNE

Origine de la décision
Date de l'import : 11/06/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2020-05-27;18ve01853 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award