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02/06/2020 | FRANCE | N°17VE01150

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 4ème chambre, 02 juin 2020, 17VE01150


Vu la procédure suivante :

Procédure antérieure :

La société SXP Conseil a demandé au Tribunal administratif de Cergy-Pontoise, d'une part, d'annuler la décision n° 07/2014 du 30 janvier 2014 rejetant expressément le recours préalable à l'encontre de l'arrêté du 21 octobre 2013, ainsi que l'arrêté du 21 octobre 2013 par lequel le préfet de la région Ile-de-France a mis à sa charge l'obligation de rembourser la somme de 67 587,55 euros au titre des fonds de la formation professionnelle indûment perçus sur les années 2010, 2011 et 2012 ainsi que de payer la som

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Vu la procédure suivante :

Procédure antérieure :

La société SXP Conseil a demandé au Tribunal administratif de Cergy-Pontoise, d'une part, d'annuler la décision n° 07/2014 du 30 janvier 2014 rejetant expressément le recours préalable à l'encontre de l'arrêté du 21 octobre 2013, ainsi que l'arrêté du 21 octobre 2013 par lequel le préfet de la région Ile-de-France a mis à sa charge l'obligation de rembourser la somme de 67 587,55 euros au titre des fonds de la formation professionnelle indûment perçus sur les années 2010, 2011 et 2012 ainsi que de payer la somme de 19 131 euros au titre des manoeuvres frauduleuses correspondant aux sommes indûment reçues et, d'autre part, de prononcer la décharge de l'obligation de restituer les sommes indûment perçues au titre des fonds de la formation professionnelle ainsi que de payer les sanctions financières, et d'ordonner la restitution des sommes indûment versées, avec intérêt légal et anatocisme, au titre des articles 1153 et 1154 du code civil.

Par un jugement n° 1403297 du 2 mars 2017, le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire complémentaire, enregistrés respectivement les 7 avril 2017 et 30 juin 2017, la société SXP Conseil, représentée par Me D..., avocat, demande à la Cour, dans le dernier état de ses écritures :

1° d'annuler le jugement du 2 mars 2017 ;

2° d'annuler la décision n° 07/2014 du 30 janvier 2014 rejetant expressément le recours préalable à l'encontre de l'arrêté du 21 octobre 2013, ainsi que l'arrêté du 21 octobre 2013 par lequel le préfet de la région Ile-de-France a mis à sa charge l'obligation de rembourser la somme de 67 587,55 euros au titre des fonds de la formation professionnelle indûment perçus sur les années 2010, 2011 et 2012 ainsi que de payer la somme de 19 131 euros au titre des manoeuvres frauduleuses correspondant aux sommes indûment reçues ;

3° de prononcer la décharge de l'obligation de restituer les sommes indûment perçues au titre des fonds de la formation professionnelle ainsi que de payer les sanctions financières, et d'ordonner la restitution des sommes indûment versées, avec intérêt légal et anatocisme, au titre des articles 1153 et 1154 du code civil ;

4° dire et juger, en tant que de besoin, que M. Q... M... est solidairement responsable du paiement de la majoration au titre de manoeuvres frauduleuses ;

5° de mettre à la charge de l'Etat la somme de 4 200 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le préfet ne justifie pas que le contrôle a été réalisé par des agents commissionnés préalablement à cet effet ;

- la décision est intervenue à l'issue d'une procédure irrégulière en ce que les avis de contrôle sont irréguliers, en ce que les opérations de contrôle n'ont pas respecté le principe du contradictoire, en ce que l'extension des opérations de contrôle aux obligations de la société au titre de la formation continue n'a pas été précédée d'un avis de contrôle, en ce qu'elle a fait l'objet d'un contrôle sur place et sur pièce, en méconnaissance des dispositions de l'article L. 6362-8 du code du travail, en ce que les contrôleurs n'étaient pas autorisés à emporter des pièces qui n'avaient aucun rapport avec le contrôle portant sur les activités d'organisme de formation en qualité de dispensateur de formation, seul objet du contrôle, en ce que les documents ont été obtenus par l'administration sans aucune demande écrite ni aucun accord écrit de SXP Conseil et qu'aucun reçu de ces pièces n'a été établi, en ce que M. P..., qui a été absent lors des opérations de contrôle, n'a jamais donné son accord à la photocopie de pièces sur place, et que s'il a accueilli les deux contrôleurs, il était absent pour raison professionnelle pendant les opérations de contrôle et n'a pas donné de mandat à l'expert comptable, extérieur à SXP Conseil, pour représenter la société, enfin en ce que la mission de contrôle a méconnu la circulaire DGEFP n° 2011-26 du 15 novembre 2011 ainsi que les droits de la défense ;

- les opérations de contrôle des activités de la société SXP Conseil au titre de la formation professionnelle continue reposent sur un faux en écriture pour lequel M. P... a déposé plainte ; cette pièce ne peut donc fonder les opérations de contrôle ;

- la société SXP Conseil ne pouvait faire l'objet d'une opération de contrôle au titre de ses activités de formation professionnelle continue dès lors qu'elle n'exerçait aucune activité de cette nature au cours de la période contrôlée ;

- la société ne peut être tenue responsable de l'erreur commise par l'organisme paritaire collecteur agréé (OPCA) FAFIEC qui a validé les formations de M. K... G..., de M. N... I..., de Mme E... B..., de M. S... V... qui ont été remises en cause par l'administration, alors même qu'elles ne permettraient pas au salarié d'atteindre un coefficient supérieur dans la convention collective SYNTEC ;

- en ce qui concerne la formation suivie par Mme R..., le motif de remise en cause tenant à l'absence d'authenticité des attestations produites en raison d'une divergence de signature est erroné, Mme R... s'étant mariée le 24 septembre 2011, elle a pu changer de signature ;

- en ce qui concerne M. A... et M. H..., aucun fait ne peut être invoqué par la DIRECCTE du fait de la prescription ;

- en ce qui concerne les feuilles d'émargement, l'administration ne peut lui opposer l'article 3.4 de la circulaire n° 2011-26 du 15 novembre 2011 qui est dépourvue de valeur réglementaire, et ne peut lui reprocher de ne pas avoir présenté de feuille d'émargement dès lors qu'elle a produit les " attestations de suivi de formation " sollicitées par l'OPCA FAFIEC ;

- en ce qui concerne le plan de l'évaluation de la formation, l'administration ne peut lui opposer l'article 3.4 de la circulaire n° 2011-26 du 15 novembre 2011 qui est dépourvue de valeur réglementaire ; que sa méthode d'évaluation était orale pour 1'ensemble des salariés en contrat de professionnalisation, cette modalité étant mentionnée dans les demandes de prise en charge FAFIEC ; qu'en réalité les décisions litigieuses apprécient également le principe même du recours aux dispositifs de contrats de professionnalisation et de période de professionnalisation en portant une appréciation sur la valeur des salariés, ce qui ne relève pas de son contrôle ; que 1'administration ne peut pas davantage contrôler le contenu du bilan de fin de formation, le formalisme d'une évaluation ne pouvant remettre en cause la réalité d'une formation donnée ;

- l'administration n'apporte pas la preuve que la société SXP Conseil a agi intentionnellement aux fins d'obtenir frauduleusement des financements dans le domaine de la formation professionnelle ; qu'une pénalité ne peut reposer sur des faits prescrits et de toutes façons erronés ; qu'elle a répondu à chacune des demandes de communication des contrôleurs, et a fourni l'ensemble des documents en sa possession, établis en conformité avec les conditions générales de son OPCA, le FAFIEC ; qu'il ne peut davantage être invoqué, pour tenter de justifier les manoeuvres frauduleuses qu'un seul contrat de professionnalisation est arrivé à son terme, cette affirmation des contrôleurs étant matériellement fausse, seul un des quatre employés n'étant pas allé au terme de sa période (M. I...), deux l'ayant achevée (MM. G... et V...) et un ayant démissionné (Mme B...).

..........................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code du travail ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme O...,

- les conclusions de Mme Bruno-Salel, rapporteur public,

- et les observations de Me F... substituant Me D... pour la société SXP Conseil.

Considérant ce qui suit :

1. La société SXP Conseil, société ayant pour objet l'apport d'affaires, de fournir des prestations de service informatique, le conseil pour les affaires et la gestion, la formation et le négoce, a été enregistrée comme organisme de formation professionnelle continue entre le 5 novembre 2008 et le 31 décembre 2011. Par un avis de contrôle en date du 20 juillet 2012, elle a été informée de l'ouverture d'un contrôle administratif et financier des activités et dépenses de formation au titre des années 2010 et 2011. A l'issue d'un contrôle sur place qui s'est tenu le 6 septembre 2012, un avis d'extension de contrôle a été notifié le 28 février 2013 à la société. Cette extension portait, d'une part, sur le contrôle de l'activité de dispensateur de formation au titre de l'année 2012 et, d'autre part, sur le contrôle de son obligation, en sa qualité d'employeur, de participer au développement de la formation professionnelle continue de la société. Les résultats de la fin du contrôle ont été adressés à la société le 3 mai 2013, puis le 21 mai 2013, par une notification annulant et remplaçant la précédente notification. La société a fait valoir ses observations écrites en réponse au rapport de contrôle le 14 juin 2013 et son dirigeant a été auditionné le 12 juillet 2013, puis elle a transmis des éléments de réponse complémentaires le 8 août 2013. Par décision du 21 octobre 2013, notifiée le 28 octobre 2013, le préfet de la région Ile-de-France a mis à la charge de la société SXP Conseil le reversement au Trésor public de la somme de 67 587,55 euros au titre des fonds de la formation professionnelle indûment perçus pour les années 2010, 2011 et 2012 et lui a ordonné, solidairement avec son dirigeant, de verser au Trésor public la somme de 19 131 euros au titre des manoeuvres frauduleuses correspondant aux sommes indûment perçues. Par un courrier du 20 décembre 2013, réceptionné le 26 décembre 2013, la société SXP Conseil a formé une réclamation préalable. Le préfet de la région Ile-de-France a pris une décision du 30 janvier 2014, notifiée le 14 février 2014, confirmant les sommes mises à la charge de la société SXP Conseil. La société SXP Conseil a demandé au Tribunal administratif de Cergy-Pontoise, d'une part, d'annuler la décision n° 07/2014 du 30 janvier 2014 et, d'autre part, de prononcer la décharge de l'obligation de restituer les sommes indûment perçues. Par un jugement n° 1403297 du 2 mars 2017, le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande. La société SXP Conseil relève régulièrement appel de ce jugement.

Sur les conclusions afin d'annulation et de décharge :

En ce qui concerne la légalité externe :

2. En premier lieu, aux termes de l'article L. 6361-5 du code du travail alors en vigueur : " Sans préjudice des attributions propres des corps d'inspection compétents à l'égard des établissements concernés, les contrôles prévus au présent titre sont réalisés par les inspecteurs et contrôleurs du travail, les inspecteurs de la formation professionnelle et les agents de la fonction publique de l'Etat de catégorie A placés sous l'autorité du ministre chargé de la formation professionnelle, formés préalablement pour assurer les contrôles prévus au présent titre, assermentés et commissionnés à cet effet. / Ils peuvent se faire assister par des agents de l'Etat. / Les agents participant aux contrôles sont tenus au secret professionnel dans les termes des articles 226-13 et 226-14 du code pénal. ". Aux termes de l'article R. 6361-2 du même code : " Les agents de contrôle mentionnés au premier alinéa de l'article L. 6361-5 sont commissionnés par : / 1° Le préfet de région lorsqu'ils interviennent dans les limites d'une région ; / 2° Le ministre chargé de la formation professionnelle lorsqu'ils ont vocation à intervenir sur l'ensemble du territoire. ".

3. Il résulte de l'instruction que les opérations de contrôle ont été réalisées par M. T... C... et Mme J... L..., contrôleurs du travail. D'une part, le préfet de la région Ile-de-France justifie qu'à la date des opérations de contrôle, M. C... avait été commissionné par un arrêté du 9 février 2012. D'autre part, si le préfet de la région Ile-de-France ne justifie pas du commissionnement de Mme L... dès le début des opérations de contrôle, mais seulement à compter du 6 décembre 2012, soit deux mois après le début des opérations de contrôle, lesquelles ont duré encore six mois, il ne résulte pas de l'instruction que cette dernière, qui a assisté M. C... dans le cadre des opérations de contrôle en litige, notamment au cours des deux premiers mois de sa mission, ait elle-même réalisé des opérations indépendantes du contrôle dont M. C... était le responsable. La société SXP Conseil ne se prévaut par ailleurs d'aucune circonstance de nature à établir que la présence de Mme L... aurait excédé sa mission d'assistance à M. C... et aurait, en l'espèce, entraîné une irrégularité de nature à vicier la procédure de contrôle. Par suite, le moyen tiré de l'absence de commissionnement de Mme L... dès le début des opérations de contrôle doit être écarté.

4. En deuxième lieu, la société SXP Conseil soutient que la procédure de contrôle serait viciée aux motifs que la procédure initiale de contrôle de son activité de dispensateur de formation aurait été initiée en se fondant sur un document qui présente les caractères d'un faux en écriture pour lequel son dirigeant a déposé une plainte auprès du Procureur de la République, que la procédure de contrôle de ses obligations en matière de formation professionnelle continue serait intervenue dans le cadre d'une opération de contrôle portant exclusivement sur son activité d'organisme de formation qui ne revêtait aucune réalité, que les avis de contrôle seraient irréguliers, que le principe du respect du contradictoire aurait été méconnu et, enfin, qu'elle aurait fait l'objet d'un contrôle sur place et sur pièces, en méconnaissance des dispositions de l'article L. 6362-8 du code du travail, et qu'aucun accord n'aurait été donné à l'emport de documents ni aucune demande écrite adressée à la société en ce sens.

5. Aux termes de l'article L. 6362-10 du code du travail : " Les décisions de rejet de dépenses et de versement mentionnées au présent livre prises par l'autorité administrative ne peuvent intervenir, après la notification des résultats du contrôle, que si une procédure contradictoire a été respectée ". Aux termes de l'article L. 6362-11 du même code : " lorsque les contrôles ont porté sur des prestations de formation financées par l'Etat, les collectivités territoriales, le fonds paritaire de sécurisation des parcours professionnels, l'institution publique mentionnée à l'article L. 5312-1, les employeurs ou les organismes collecteurs des fonds de la formation professionnelle continue, l'autorité administrative les informe, chacun pour ce qui le concerne, des constats opérés. Le cas échéant, les constats opérés sont adressés au service chargé du contrôle de l'application de la législation du travail ". Aux termes de l'article R. 6362-2 du même code : " La notification des résultats du contrôle prévue à l'article L. 6362-9 intervient dans un délai ne pouvant dépasser trois mois à compter de la fin de la période d'instruction avec l'indication des procédures dont l'organisme contrôlé dispose pour faire valoir ses observations. Les résultats du contrôle peuvent comporter des observations adressées à l'organisme contrôlé. Lorsque la procédure d'évaluation d'office est mise en oeuvre, le délai mentionné ci-dessus est de six mois à compter de la fin de la période fixée par la mise en demeure ". De plus, aux termes de l'article R. 6362-3 du même code : " Les résultats des contrôles prévus aux articles L. 6361-1 à L. 6361-3 sont notifiés à l'intéressé avec l'indication du délai dont il dispose pour présenter des observations écrites et demander, le cas échéant, à être entendu. / Ce délai ne peut être inférieur à trente jours à compter de la date de la notification. ". Enfin, aux termes de l'article R. 6362-4 du même code : " La décision du ministre chargé de la formation professionnelle ou du préfet de région ne peut être prise qu'au vu des observations écrites et après audition, le cas échéant, de l'intéressé, à moins qu'aucun document ni aucune demande d'audition n'aient été présentés avant l'expiration du délai prévu à l'article R. 6362-3. / La décision est motivée et notifiée à l'intéressé. ". Il résulte de ces dispositions que le respect du principe du contradictoire, dans le cadre de la procédure de contrôle d'une entreprise en matière de formation continue, implique seulement de laisser un délai suffisant à la société contrôlée à l'issue de la notification du rapport de contrôle, pour qu'elle puisse présenter ses observations.

6. Il n'est pas contesté que ces formalités ont été, en l'espèce, respectées, la société requérante ayant pu présenter ses observations à trois reprises. De plus, il ne ressort d'aucune disposition législative ou réglementaire applicable à cette procédure que les contrôles doivent être précédés d'un avis de contrôle, ni qu'ils doivent être entourés des garanties applicables aux procédures de vérification en matière fiscale, les dispositions de l'article L. 6362-12 du code du travail citées dans la requête se bornant à renvoyer aux modalités, sûretés, garanties et sanctions applicables à la taxe sur la valeur ajoutée en ce qui concerne seulement le recouvrement des versements exigibles au titre des contrôles réalisés en application des articles L. 6361-1 à L. 6361-3 du code du travail.

7. De plus, aux termes des dispositions de l'article L. 6361-1 du code du travail : " L'Etat exerce un contrôle administratif et financier sur les dépenses de formation exposées par les employeurs (...) et sur les actions prévues aux articles L. 6316-1 et L. 6314-1 qu'ils conduisent, financées par l'Etat, les collectivités territoriales, le fonds paritaire de sécurisation des parcours professionnels, l'institution mentionnée à l'article L. 5312-1 ou les organismes collecteurs des fonds de la formation professionnelle continue. ". Aux termes de l'article L. 6361-3 du même code : " Le contrôle administratif et financier des dépenses et activités de formation porte sur l'ensemble des moyens financiers, techniques et pédagogiques, à l'exclusion des qualités pédagogiques, mis en oeuvre pour la formation professionnelle continue. / Ce contrôle peut porter sur tout ou partie de l'activité, des actions de formation ou des dépenses de l'organisme. (...). ". Aux termes de l'article L. 6362-4 du code du travail : " Les employeurs justifient de la réalité des actions de formation qu'ils conduisent lorsqu'elles sont financées par l'Etat, les collectivités territoriales, le fonds paritaire de sécurisation des parcours professionnels, l'institution mentionnée à l'article L. 5312-1 ou les organismes agréés pour collecter ou gérer les fonds de la formation professionnelle continue. ". Enfin, aux termes de l'article L. 6362-5 de ce code : " Les organismes mentionnés à l'article L. 6361-2 sont tenus, à l'égard des agents de contrôle mentionnés à l'article L. 6361-5 : / 1° De présenter les documents et pièces établissant l'origine des produits et des fonds reçus ainsi que la nature et la réalité des dépenses exposées pour l'exercice des activités conduites en matière de formation professionnelle continue ; / 2° De justifier le rattachement et le bien-fondé de ces dépenses à leurs activités ainsi que la conformité de l'utilisation des fonds aux dispositions légales régissant ces activités. / A défaut de remplir ces conditions, les organismes font, pour les dépenses considérées, l'objet de la décision de rejet prévue à l'article L. 6362-10. ".

8. Il résulte de ces dispositions que les employeurs doivent, notamment, justifier, à tout moment, et sur demande des contrôleurs du travail, de la réalité des actions de formation qu'ils conduisent lorsqu'elles sont financées par l'Etat ; qu'il s'en suit que les circonstances que la décision initiale de contrôle, aurait été initiée sur la base d'un faux document, ce qui ne résulte pas de l'instruction compte tenu de la date tardive de la plainte formée par le dirigeant de la société SXP Conseil, que les opérations de contrôle des obligations en matière de formation continue de la société SXP Conseil serait intervenues, en dehors d'un avis de contrôle ad hoc et alors que la procédure de contrôle dont avait été avisée la société portait exclusivement sur l'activité de dispensateur de formation qu'elle n'exerçait d'ailleurs plus, sont, en elles-mêmes, sans incidence sur la régularité de la procédure de contrôle.

9. Enfin, contrairement à ce que soutient la société SXP Conseil, elle n'a fait l'objet que d'un contrôle sur place qui s'est tenu le 6 septembre 2013, à l'occasion duquel des photocopies de documents ont été réalisées par les agents de la mission de contrôle afin de ne pas perturber davantage le fonctionnement de la société. La société requérante n'établit pas que son dirigeant se serait opposé à la reproduction de ces documents, qui n'était soumise à aucune formalité particulière, alors qu'il n'a pas assisté aux opérations de contrôle et les a laissés en la seule présence de l'expert comptable de la société après les avoir accueillis.

10. La société SXP Conseil n'est donc pas fondée à soutenir que c'est à tort que le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a considéré que la décision en litige n'était pas intervenue à l'issue d'une procédure irrégulière et a écarté le moyen tiré du vice de procédure.

En ce qui concerne la légalité interne :

11. Aux termes de l'article L. 6313-3 du code du travail : " Les actions d'adaptation et de développement des compétences des salariés ont pour objet de favoriser leur adaptation au poste de travail, à l'évolution des emplois, ainsi que leur maintien dans l'emploi, et de participer au développement de leurs compétences ". Aux termes de l'article L. 6314-1 du même code : " Tout travailleur engagé dans la vie active ou toute personne qui s'y engage a droit à l'information, à l'orientation et à la qualification professionnelles et doit pouvoir suivre, à son initiative, une formation lui permettant, quel que soit son statut, de progresser au cours de sa vie professionnelle d'au moins un niveau en acquérant une qualification correspondant aux besoins de l'économie prévisibles à court ou moyen terme : 1° Soit enregistrée dans le répertoire national des certifications professionnelles prévu à l'article L. 335-6 du code de l'éducation ; 2° Soit reconnue dans les classifications d'une convention collective nationale de branche ; 3° Soit ouvrant droit à un certificat de qualification professionnelle ". Aux termes de l'article L. 6325-1 du même code : " Le contrat de professionnalisation a pour objet de permettre d'acquérir une des qualifications prévues à l'article L. 6314-1 et de favoriser l'insertion ou la réinsertion professionnelle ". Aux termes de l'article L. 6325-1 du code du travail : " Le contrat de professionnalisation a pour objet de permettre d'acquérir une des qualifications prévues à l'article L. 6314-1 et de favoriser l'insertion ou la réinsertion professionnelle. (...) ". Aux termes de l'article L. 6314-1 du même code : " Tout travailleur engagé dans la vie active ou toute personne qui s'y engage a droit à la qualification professionnelle et doit pouvoir suivre, à son initiative, une formation lui permettant, quel que soit son statut, de progresser au cours de sa vie professionnelle d'au moins un niveau en acquérant une qualification correspondant aux besoins de l'économie prévisibles à court ou moyen terme : / 1° Soit enregistrée dans le répertoire national des certifications professionnelles prévu à l'article L. 335-6 du code de l'éducation ; / 2° Soit reconnue dans les classifications d'une convention collective nationale de branche ; / 3° Soit ouvrant droit à un certificat de qualification professionnelle de branche ou interbranche. (...) ". Ces dispositions prévoient que le contrat de professionnalisation a pour objet de permettre d'acquérir une des qualifications prévues à l'article L. 6314-1, ce qui vise une qualification, soit enregistrée dans le répertoire national des certifications professionnelles, soit reconnue dans les classifications d'une convention collective nationale de branche, soit ouvrant droit à un certificat de qualification professionnelle.

12. Le préfet de la région Ile-de-France a remis en cause les fonds versés à la société SXP Conseil au titre des contrats de professionnalisation conclus avec M. V..., Mme B..., Mme P..., MM. I... et G... au cours des années 2010 à 2012 au motif que la société SXP Conseil, qui a délivré en interne les formations, ne justifiait pas que les formations reçues par ces salariés permettaient d'acquérir une qualification enregistrée dans le répertoire national des certifications professionnelles, qui ouvrait droit à un certificat de qualification professionnelle ou était reconnue dans les classifications de la convention collective nationale applicable au personnel des bureaux d'études techniques, des cabinets d'ingénieurs-conseils et des sociétés de conseils (SYNTEC).

13. La société SXP Conseil ne conteste pas ce constat mais fait valoir qu'elle ne peut en être tenue pour responsable dès lors que la prise en charge financière de ces formations a été acceptée par l'organisme paritaire collecteur agréé (OPCA) dont elle dépend qui a vérifié, en application des dispositions de l'article D. 6325-2 du code du travail, que les stipulations du contrat ne sont pas contraires à une disposition légale ou à une stipulation conventionnelle.

14. Toutefois, la circonstance que l'OPCA a accepté la prise en charge financière de l'ensemble des contrats de professionnalisation qui lui ont été transmis par la société requérante n'est pas de nature, à elle seule, à démontrer que lesdits contrats devraient être regardés comme remplissant l'ensemble des conditions régissant les contrats de professionnalisation au regard de la réglementation applicable en la matière. En effet, dans le cadre de son pouvoir de contrôle administratif et financier sur les dépenses de formation exposées par les employeurs, il appartient à l'Etat de vérifier, notamment, le bien-fondé des contrats de professionnalisation conclus au regard des dispositions du code du travail. En outre, contrairement à ce que soutient la société, cet accord de l'OPCA ne saurait l'exonérer de sa propre responsabilité en qualité d'employeur au regard des obligations qui pèse sur elle en matière de formation professionnelle continue.

15. En deuxième lieu, que la société SXP Conseil soutient qu'il ne peut lui être reproché de ne pas justifier de la réalité des formations suivies au motif qu'elle n'a pas produit les feuilles d'émargement des formations suivies par les salariés en contrat de professionnalisation dès lors qu'elle a produit, au cours des opérations de contrôle, les attestations de suivi de formation signées par ces salariés. Toutefois, les dispositions de l'article R. 6332-26 du code du travail lient l'établissement des attestations de suivi de formation à l'existence des feuilles d'émargement qui indiquent, par demi-journée, le nom du formateur et la signature du salarié cependant que l'attestation de suivi, qui est signée par le salarié et le dirigeant de l'entreprise, se borne à indiquer le nombre d'heures de formation suivies. A elles seules, les attestations de suivi de formation ne permettent donc pas d'établir que les formations ont été organisées. Les attestations produites par les salariés concernés, largement postérieures au rapport de contrôle notifié à la société SXP Conseil, ne le sont pas davantage. Notamment, en ce qui concerne la réalité de la formation suivie par Mme R... au cours de sa période de professionnalisation, si la société a produit, au cours des opérations de contrôle, une attestation de cette dernière indiquant qu'elle a suivi une formation dans le cadre de la période de professionnalisation du 7 mars au 22 juin 2012 dans les locaux de la société JLP, la mission de contrôle a relevé, outre son établissement postérieur de près d'un an à la date de la formation alléguée, que contrairement à ce que soutient la société sans plus de précision, l'absence d'identité entre la signature de cette attestation et une précédente datant de l'année 2009 ne peut résulter, ainsi que le soutient la requérante, de la circonstance que Mme R... s'est mariée le 24 septembre 2011, cette dernière n'ayant pas utilisé, dans l'attestation produite, le nom de son mari mais son nom de jeune fille. Le mariage ne peut dès lors expliquer la différence de signature relevée, et l'attestation produite est dénuée de valeur probante et, partant, insusceptible d'établir que la formation a bel et bien été suivie.

16. En troisième lieu, aux termes de l'article L. 6353-1 du code du travail : " (...) A l'issue de la formation, le prestataire délivre au stagiaire une attestation mentionnant les objectifs, la nature et la durée de l'action et les résultats de l'évaluation des acquis de la formation ". Il résulte des dispositions précitées que l'organisme de formation doit produire un document mentionnant les objectifs, la nature et la durée de l'action mais également les résultats de l'évaluation des acquis de la formation.

17. La société SXP Conseil soutient qu'il ne peut lui être reproché de ne pas avoir prévu l'évaluation des formations qu'elle a diligentées à ses salariés dès lors qu'elle a été prévue et réalisée, selon les modalités qui ont été communiquées à l'OPCA à l'appui de la demande de prise en charge financière et consistait en des entretiens tout au long de la formation suivis d'un entretien final afin de valider l'acquisition des connaissances. Toutefois, la société SXP Conseil ne produit un commencement de preuve à l'appui de son allégation et ne justifie ainsi pas avoir procédé à l'évaluation de la formation requise dans le cadre d'un contrat de professionnalisation et qu'il lui incombait de mener.

18. En quatrième lieu, si le préfet s'est interrogé sur la pertinence du recours au contrat de professionnalisation au regard de la formation initiale des salariés en cause, et notamment de leur qualification initiale importante, et des objectifs assignés aux formations diligentées, il ne résulte pas de l'instruction qu'il ait fondé sa décision sur la non pertinence du recours à ce dispositif ou porté une appréciation sur la valeur des salariés ou la valeur pédagogique des formations dispensées.

19. En cinquième lieu, aux termes de l'article L. 6362-7-2 du code du travail : " Tout employeur ou prestataire de formation qui établit ou utilise intentionnellement des documents de nature à éluder l'une de ses obligations en matière de formation professionnelle ou à obtenir indûment le versement d'une aide, le paiement ou la prise en charge de tout ou partie du prix des prestations de formation professionnelle est tenu, par décision de l'autorité administrative, solidairement avec ses dirigeants de fait ou de droit, de verser au Trésor public une somme égale aux montants imputés à tort sur l'obligation en matière de formation ou indûment reçus. ".

20. Pour prononcer une pénalité financière à l'encontre de la société SXP Conseil, le préfet de la région Ile-de-France fait valoir, notamment, que la formation des quatre salariés en période de professionnalisation a été externalisée par la société SXP Conseil auprès de la société JLD et Associés, dont le gérant de M. M..., est l'ancien co-gérant de la société SXP Conseil et que pour justifier de la réalité des formations suivies, des feuilles d'émargement dénuées de valeur probante ont été produites par la société tant auprès de l'OPCA qu'auprès de la mission de contrôle. Cette mission a notamment relevé, d'une part, que M. S... V... a bénéficié d'une période de professionnalisation planifiée du 12 septembre au 15 décembre 2011 mais qu'alors qu'il avait quitté l'entreprise le 7 octobre 2011, des feuilles d'émargement ont été produites jusqu'au 15 décembre 2011, attestant de la présence du salarié qui ont été adressée à l'OPCA en vue du versement des sommes afférantes à la formation du salarié à la société. La mission a, d'autre part, constaté que la signature de Mme R... sur la demande de prise en charge de l'OPCA et sur les feuilles d'émargement de la seconde période de professionnalisation était différente de celle apposée sur les feuilles d'émargement relatives à la première période de professionnalisation suivie par elle en 200. Les informations fournies à l'occasion de l'opération de contrôle et les attestations des salariés en cause indiquant avoir suivi les formations ont été regardées comme dénuées de valeur probante par la mission de contrôle au motif d'une part, s'agissant de M. V..., que celui-ci occupait parallèlement à son contrat de travail avec la société SXP Conseil un poste de directeur associé dans une filiale de son employeur et, d'autre part, s'agissant de Mme R..., que l'explication fournie par le dirigeant de la société tenant au mariage de Mme R... entre les deux périodes de professionnalisation apparaissait peu crédible dès lors que cette dernière utilisait le même nom de famille. La mission de contrôle en a déduit que la réalité des formations suivies par ces deux salariés n'était pas établie et que des documents avaient été produits par la société dans le but de recevoir des fonds de la formation professionnelle. Cette analyse a été reprise par la décision du préfet qui, dans sa décision, a adopté les motifs de la mission de contrôle. Pas plus en appel qu'en première instance, la société SXP Conseil n'apporte d'élément de nature à justifier du suivi des formations en litige, de l'exactitude des attestations produites par M. V... et Mme R... ou de l'inexactitude des éléments sur lesquels s'est fondé le préfet de la région Ile-de-France pour prononcer une sanction financière à son encontre. Par suite, la société SXP Conseil n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement litigieux, le tribunal a considéré que le préfet de la région Ile-de-France devait être regardé comme apportant la preuve du caractère intentionnel des faits reprochés par l'établissement du faisceau d'indices au vu duquel il avait pris sa décision, et a mis à la charge de la société SXP Conseil, solidairement avec son dirigeant, la somme de 19 131 euros au titre des manoeuvres frauduleuses correspondant aux sommes indûment perçues en application de l'article L. 6362-7 du code du travail.

21. Il résulte de tout ce qui précède que la société SXP Conseil n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement du 2 mars 2017, le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du préfet de la région Ile-de-France du 30 janvier 2014 et à la décharge de l'obligation de restituer les sommes indûment perçues au titre des fonds de la formation professionnelle.

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

22. Ces dispositions font obstacle à ce qu'une somme soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante, au titre des frais exposés par la société SXP Conseil au titre des dispositions précitées. Il n'y a pas lieu, en l'espèce, de mettre à la charge de la société SXP Conseil la somme que demande le préfet au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

DECIDE :

Article 1er : La requête de société SXP Conseil est rejetée.

4

N° 17VE01150


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 17VE01150
Date de la décision : 02/06/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. BROTONS
Rapporteur ?: Mme Diane MARGERIT
Rapporteur public ?: Mme BRUNO-SALEL
Avocat(s) : CABINET JEAN GRESY

Origine de la décision
Date de l'import : 09/06/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2020-06-02;17ve01150 ?
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