La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

29/12/2020 | FRANCE | N°17VE03669

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 6ème chambre, 29 décembre 2020, 17VE03669


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société Clinique Galliéni a demandé au tribunal administratif de Montreuil, d'une part, d'annuler la décision du 23 février 2016 par laquelle l'inspecteur du travail de l'unité de contrôle n°4 de Seine-Saint-Denis lui a refusé l'autorisation de licencier

Mme C... D... épouse B..., ensemble la décision du 19 août 2016 par laquelle le ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social a rejeté son recours hiérarchique et a confirmé le refus d'autoriser c

e licenciement, d'autre part, d'enjoindre à l'inspecteur du travail de réexaminer sa...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société Clinique Galliéni a demandé au tribunal administratif de Montreuil, d'une part, d'annuler la décision du 23 février 2016 par laquelle l'inspecteur du travail de l'unité de contrôle n°4 de Seine-Saint-Denis lui a refusé l'autorisation de licencier

Mme C... D... épouse B..., ensemble la décision du 19 août 2016 par laquelle le ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social a rejeté son recours hiérarchique et a confirmé le refus d'autoriser ce licenciement, d'autre part, d'enjoindre à l'inspecteur du travail de réexaminer sa demande d'autorisation de licenciement et de prendre une nouvelle décision concernant cette demande dans un délai d'un mois à compter de la notification du jugement à intervenir, sous astreinte de 500 euros par jour de retard, enfin, de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 3 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par un jugement n° 1608139 du 4 octobre 2017, le tribunal administratif de Montreuil a annulé les décisions attaquées du 23 février 2016 et du 19 août 2016, enjoint à l'inspecteur du travail de réexaminer la demande de la société Clinique Galliéni dans un délai d'un mois à compter de la notification du présent jugement, mis à la charge de l'Etat le versement d'une somme de 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et a rejeté le surplus des conclusions de la requête.

Procédure devant la cour :

Par une requête et des mémoires complémentaires enregistrés les 6 décembre 2017, 5 décembre 2018 et 5 décembre 2019, Mme C... D... épouse B..., représentée par Me de Folleville, avocat, demande à la cour :

1°d'infirmer le jugement du tribunal administratif de Montreuil ;

2° de mettre à la charge de la SAS Clinique Galliéni le versement de la somme de 2 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, ainsi que les entiers dépens.

Elle soutient que la fermeture de la Clinique Galliéni au Blanc-Mesnil est provisoire, dès lors que sa réouverture sur un nouveau site est certaine ; la recherche de postes en reclassement n'a ni été sérieuse, ni loyale.

.....................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code du travail ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. E...,

- les conclusions de Mme Margerit, rapporteur public,

- et les observations de Me F... pour Mme B... et de Me A... pour la société Clinique Galliéni.

Considérant ce qui suit :

1. La société Clinique Galliéni a demandé le 23 décembre 2015 à l'inspecteur du travail l'autorisation de licencier Mme D... épouse B... pour motif économique, au titre des mandats de membre suppléant de la délégation unique du personnel et d'ancienne représentante du personnel au CHSCT jusqu'au 11 février 2016. Par des décisions respectivement prises les 23 février 2016 et 19 août 2016, l'inspecteur du travail puis, sur recours hiérarchique formé le 19 avril 2016, le ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social, ont rejeté cette demande, estimant que le motif économique n'était pas établi. La société Clinique Galliéni a saisi le tribunal administratif de Montreuil d'un recours tendant notamment à l'annulation de ces décisions. Par un jugement n° 1608139 du 4 octobre 2017, dont Mme B... relève appel, le tribunal administratif de Montreuil a notamment annulé les décisions du 23 février 2016 et du 19 août 2016 et a enjoint à l'inspecteur du travail de réexaminer la demande de la société Clinique Galliéni dans un délai d'un mois à compter de la notification du présent jugement. En application de l'injonction prononcée par le tribunal administratif de Montreuil, l'inspecteur du travail, puis, sur recours hiérarchique, la ministre de l'inspecteur du travail ont réexaminé la demande présentée par la société Clinique Galliéni et ont de nouveau rejeté cette demande, au motif que l'employeur n'avait pas satisfait à l'obligation de reclassement, par décisions du 11 avril 2018 et du 1er février 2019.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

2. Lorsque la demande d'autorisation de licenciement pour motif économique est fondée sur la cessation d'activité de l'entreprise, il appartient à l'autorité administrative de contrôler que cette cessation d'activité est totale et définitive. Il ne lui appartient pas, en revanche, de contrôler si cette cessation d'activité est justifiée par l'existence de mutations technologiques, de difficultés économiques ou de menaces pesant sur la compétitivité de l'entreprise. Il incombe ainsi à l'autorité administrative de tenir compte, à la date à laquelle elle se prononce, de tous les éléments de droit ou de fait recueillis lors de son enquête qui sont susceptibles de remettre en cause le caractère total et définitif de la cessation d'activité. Il lui incombe également de tenir compte de toute autre circonstance qui serait de nature à faire obstacle au licenciement envisagé, notamment celle tenant à une reprise, même partielle, de l'activité de l'entreprise impliquant un transfert du contrat de travail du salarié à un nouvel employeur en application de l'article L. 1224-1 du code du travail. Lorsque l'entreprise appartient à un groupe, la seule circonstance que d'autres entreprises du groupe aient poursuivi une activité de même nature ne fait pas, par elle-même, obstacle à ce que la cessation d'activité de l'entreprise soit regardée comme totale et définitive.

3. Il ressort des pièces du dossier qu'à partir de 2013, la société Clinique Galliéni, appartenant depuis 2012 au groupe ORPEA a décidé de mettre en oeuvre le projet " Galliéni 2018/2019 ", comportant deux volets à savoir, d'une part, la fermeture de son établissement de soins de suite et de réadaptation situé au Blanc Mesnil, qui comprenait 88 lits et bénéficiait d'une autorisation d'exploitation délivrée le 27 septembre 2010 et, d'autre part, la réouverture à moyen terme d'un établissement gérée par la même société sur le département de la Seine-Saint-Denis, moyennant la reconversion d'une partie des lits vers une spécialisation cardio-vasculaire. Cette fermeture, motivée par les pertes financières de l'établissement, la sauvegarde de la compétitivité et la vétusté de ses installations, nécessitant la réalisation de travaux de trop grande ampleur, a impliqué le licenciement des salariés, dans le cadre d'un plan de sauvegarde de l'emploi, homologué par l'unité territoriale de Seine Saint Denis de la DIRECCTE d'Île de France le 17 juin 2015.

4. Il ressort des pièces du dossier qu'à la date de la décision de l'inspecteur du travail, l'activité de soins de suite et de réadaptation de la clinique n'était plus exercée sur le site du Blanc-Mesnil depuis le 1er juin 2014, que le personnel avait été licencié dans le cadre d'un plan de sauvegarde de l'emploi et qu'à la suite de la délivrance de plusieurs autorisations de cessation d'activité temporaire pour travaux pour une durée de 6 mois, l'ARS avait finalement constaté, par décision du 18 janvier 2016 la caducité de l'autorisation d'exploitation. Si Mme B... fait valoir que cette cessation d'activité ne serait pas définitive dès lors que la société Clinique Galliéni souhaitait réaliser le second volet du projet " Galliéni 2018/2019 " en rouvrant son établissement en Seine-Saint-Denis sur un site alors identifié à Aulnay-Sous-Bois et qu'à ce titre, l'ARS a fait droit à le 24 octobre 2016 à la demande présentée par la société Clinique Galliéni, tendant, d'une part, au renouvellement de son autorisation d'exploitation, d'autre part à la reconversion de lits vers la nouvelle spécialité cardio-vasculaire et, enfin, au transfert géographique de l'autorisation vers l'établissement à construire, ces circonstances se rattachent aux motifs de la cessation d'activité, qui n'avaient pas à être contrôlés par l'inspecteur du travail, puis par la ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social. Par suite, le moyen doit être écarté.

5. Aux termes de l'article L.1233-4 du code du travail, dans sa version alors applicable : " Le licenciement pour motif économique d'un salarié ne peut intervenir que lorsque tous les efforts de formation et d'adaptation ont été réalisés et que le reclassement de l'intéressé ne peut être opéré sur les emplois disponibles, situés sur le territoire national dans l'entreprise ou les autres entreprises du groupe dont l'entreprise fait partie. Le reclassement du salarié s'effectue sur un emploi relevant de la même catégorie que celui qu'il occupe ou sur un emploi équivalent assorti d'une rémunération équivalente. A défaut, et sous réserve de l'accord exprès du salarié, le reclassement s'effectue sur un emploi d'une catégorie inférieure. Les offres de reclassement proposées au salarié sont écrites et précises. ". Pour apprécier si l'employeur a satisfait à son obligation en matière de reclassement, l'autorité administrative doit s'assurer, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, qu'il a procédé à une recherche sérieuse des possibilités de reclassement du salarié, tant au sein de l'entreprise que dans les entreprises du groupe auquel elle appartient, ce dernier étant entendu, à ce titre, comme les entreprises dont l'organisation, les activités ou le lieu d'exploitation permettent, en raison des relations qui existent avec elles, d'y effectuer la permutation de tout ou partie de son personnel.

6. Mme B... se borne à faire valoir que la recherche de reclassement faite par la société Clinique Galliéni n'aurait pas été loyale et sérieuse, dès lors que vingt-huit postes d'infirmière en contrats à durée indéterminée ont été pourvus par recrutement extérieur, sans lui être proposé. Toutefois, il ressort des pièces du dossier que par courriers des 29 juin 2015, 29 juillet 2015, 13 novembre 2015, 15 juin 2016, 12 décembre 2016 et 30 juin 2017, cette entreprise a transmis six courriers de propositions de reclassement, correspondant à plus de deux-cents postes, à Mme B..., auxquels elle n'a pas donné suite, alors qu'elle avait été mise en disponibilité depuis la 16 avril 2014. En outre, il ressort des pièces du dossier que la circonstance que vingt-huit postes d'infirmière en contrats à durée indéterminée ont été pourvus par recrutement extérieur est postérieure à la date des décisions attaquées. Par suite, le moyen tel qu'il a été soulevé, doit être écarté.

7. Il résulte de tout ce qui précède que Mme B... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort, que par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montreuil a annulé les décisions attaquées du 23 février 2016 et du 19 août 2016, de l'inspecteur du travail et du ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social. Les conclusions à fin d'annulation présentée par Mme B... doivent être rejetées.

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

8. Aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y pas lieu à cette condamnation ".

9. La société Clinique Galliéni n'étant pas la partie perdante, les conclusions présentées par Mme B... tendant à mettre à sa charge une somme en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, ne peuvent qu'être rejetées. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de Mme B... une somme à verser à la société Clinique Galliéni, en application de ces mêmes dispositions.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête présentée par Mme D... épouse B... est rejetée.

Article 2 : Les conclusions présentées par la société Clinique Galliéni sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

N° 17VE03669


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 17VE03669
Date de la décision : 29/12/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

66-07-01-04-03 Travail et emploi. Licenciements. Autorisation administrative - Salariés protégés. Conditions de fond de l'autorisation ou du refus d'autorisation. Licenciement pour motif économique.


Composition du Tribunal
Président : M. ALBERTINI
Rapporteur ?: M. Marc FREMONT
Rapporteur public ?: Mme MARGERIT
Avocat(s) : CABINET MAOUCHE DE FOLLEVILLE AVOCATS

Origine de la décision
Date de l'import : 15/06/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2020-12-29;17ve03669 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award