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29/03/2021 | FRANCE | N°19VE04109

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 4ème chambre, 29 mars 2021, 19VE04109


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. F... E... a demandé au tribunal administratif de Cergy-Pontoise d'annuler l'arrêté notifié le 4 mars 2019 par lequel le préfet du Val d'Oise a refusé de lui délivrer un certificat de résidence portant la mention " vie privée et familiale ", lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination.

Par un jugement n° 1903813 du 3 décembre 2019, le tribunal administratif de Cergy-Pontoise a annulé cet arrêté et a enjoint au préf

et du Val d'Oise de délivrer à M. E... un titre de séjour portant la mention " vie pri...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. F... E... a demandé au tribunal administratif de Cergy-Pontoise d'annuler l'arrêté notifié le 4 mars 2019 par lequel le préfet du Val d'Oise a refusé de lui délivrer un certificat de résidence portant la mention " vie privée et familiale ", lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination.

Par un jugement n° 1903813 du 3 décembre 2019, le tribunal administratif de Cergy-Pontoise a annulé cet arrêté et a enjoint au préfet du Val d'Oise de délivrer à M. E... un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " dans un délai d'un mois à compter de la notification du jugement.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 16 décembre 2019, le préfet du Val d'Oise demande à la Cour d'annuler ce jugement et de rejeter la demande de première instance de M. E....

Il soutient que c'est à tort que le tribunal administratif de Cergy-Pontoise a considéré que son arrêté portait une atteinte à l'intérêt supérieur de l'enfant de M. E... ; que les autres moyens soulevés en première instance ne sont pas fondés.

...............................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié ;

- la convention internationale relative aux droits de l'enfant, signée à New York le 26 janvier 1990 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. D... a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. E..., ressortissant algérien né en 1986 et entré en France le 22 mai 2015, a sollicité le 15 mai 2018 la délivrance d'un certificat de résidence sur le fondement des stipulations de l'article 6-5 de l'accord franco-algérien. Par arrêté notifié le 4 mars 2019, le préfet du Val d'Oise a refusé à M. E... la délivrance du titre de séjour sollicité, l'a obligé à quitter le territoire français et a fixé le pays de destination. Le préfet du Val d'Oise relève appel du jugement du 3 décembre 2019 par lequel le tribunal administratif de Cergy-Pontoise a annulé son arrêté et lui a enjoint de délivrer à M. E... un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale ".

Sur le moyen d'annulation accueilli par le tribunal administratif :

2. Aux termes du paragraphe 1 de l'article 3 de la convention relative aux droits de l'enfant susvisée : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait des institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale ". Il résulte de ces stipulations, qui peuvent être utilement invoquées à l'appui d'un recours pour excès de pouvoir, que, dans l'exercice de son pouvoir d'appréciation, l'autorité administrative doit accorder une attention primordiale à l'intérêt supérieur des enfants dans toutes les décisions les concernant.

3. Il ressort des pièces du dossier que M. E... a épousé le 19 août 2017 Mme A... B..., titulaire d'un certificat de résidence valable jusqu'en 2026. De cette union est née le 22 novembre 2017 Mélina E.... Si l'intimé fait valoir qu'il a la charge de son enfant à plein temps et gère seul le quotidien du foyer alors que son épouse doit cumuler deux emplois, il ne ressort pas des pièces du dossier que d'autres modes de prise en charge de l'enfant du couple ne puissent être envisagés. Ainsi, au regard du caractère récent du mariage, alors que la réalité d'un concubinage antérieur n'est pas établie par la pièce produite, de l'âge de l'unique enfant du couple à la date de la décision attaquée, le préfet du Val d'Oise est fondé à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Cergy-Pontoise a estimé qu'il n'avait pas porté l'attention requise à l'intérêt supérieur de l'enfant de M. E... et, en conséquence, accueilli le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations précitées de la convention relative aux droits de l'enfant pour annuler son arrêté notifié le 4 mars 2019.

4. Toutefois, il appartient à la cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens présentés par M. E... devant le tribunal administratif de Cergy-Pontoise et devant la cour.

Sur les autres moyens soulevés par M. E... :

5. En premier lieu, l'arrêté contesté a été signé par Mme C... G..., adjointe au chef du bureau du contentieux des étrangers, qui disposait d'une délégation de signature consentie par un arrêté n° 18-060 du 27 septembre 2018 du préfet du Val-d'Oise régulièrement publié au recueil des actes administratifs de l'Etat dans le département du Val d'Oise le 28 septembre 2018. Le moyen tiré de l'incompétence du signataire de l'arrêté en litige doit, par suite, être écarté.

6. En deuxième lieu, aux termes de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 : " (...) Le certificat de résidence d'un an portant la mention " vie privée et familiale " est délivré de plein droit : / (...) 5) au ressortissant algérien, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus (...) ". Aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".

7. Il ressort des pièces du dossier, ainsi qu'il a été dit, que M. E... est entré en France en mai 2015 et y a épousé le 19 août 2017 Mme A... B..., titulaire d'un certificat de résidence valable jusqu'en 2026. De cette union est née le 22 novembre 2017 Mélina E.... Eu égard à la durée de la présence en France de M. E..., au caractère assez récent de la communauté de vie avec son épouse, la réalité du concubinage allégué n'étant pas établie antérieurement au mariage, et à la composition de la cellule familiale à la date de l'arrêté en litige, M. E..., qui n'est pas dépourvu de toute attache familiale dans son pays d'origine, n'est pas fondé à soutenir qu'en refusant de lui délivrer un titre de séjour et en lui faisant obligation de quitter le territoire français, le préfet du Val d'Oise aurait porté une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale et, par suite, méconnu les stipulations précédemment citées de l'accord franco-algérien et de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

8. En troisième lieu, il ne ressort pas davantage des pièces du dossier que l'arrêté par lequel le préfet du Val d'Oise a refusé de délivrer à M. E... un titre de séjour et lui a fait obligation de quitter le territoire français serait entaché d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle et familiale.

9. En dernier lieu, si M. E... fait valoir qu'il remplit les conditions pour bénéficier du regroupement familial, cette circonstance est sans incidence sur la légalité des décisions en litige dès lors que le préfet du Val d'Oise ne s'est pas prononcé sur une demande de regroupement familial. A cet égard l'intimé n'est pas davantage fondé à soutenir que le préfet aurait été déloyal.

10. Il résulte de tout ce qui précède que le préfet du Val d'Oise est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Cergy-Pontoise a annulé son arrêté notifié le 4 mars 2019. Les conclusions à fin d'annulation de M. E... doivent par suite être rejetées, de même que, par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction, d'astreinte ainsi que celles présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

DÉCIDE :

Article 1er : Les articles 1er à 3 du jugement n° 1903813 du 3 décembre 2019 du tribunal administratif de Cergy-Pontoise sont annulés.

Article 2 : La demande présentée par M. E... devant le tribunal administratif de Cergy-Pontoise et ses conclusions en appel sont rejetées.

N° 19VE04109 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 19VE04109
Date de la décision : 29/03/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. BROTONS
Rapporteur ?: M. Bruno COUDERT
Rapporteur public ?: Mme GROSSHOLZ
Avocat(s) : FERNANDEZ

Origine de la décision
Date de l'import : 06/04/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2021-03-29;19ve04109 ?
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