La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

15/04/2021 | FRANCE | N°19VE01875

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 7ème chambre, 15 avril 2021, 19VE01875


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. et Mme C... B... ont demandé au tribunal administratif de Cergy-Pontoise de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2009, 2010 et 2011.

Par un jugement n° 1611526 du 26 mars 2019, le tribunal administratif de Cergy-Pontoise a prononcé un non-lieu à statuer sur les conclusions à fin de décharge présentées par

M. et Mme B..., à concurrence du dégrèvement accordé en c

ours d'instance à hauteur de la somme globale de 4 406 euros (article 1er), et a rejeté le sur...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. et Mme C... B... ont demandé au tribunal administratif de Cergy-Pontoise de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2009, 2010 et 2011.

Par un jugement n° 1611526 du 26 mars 2019, le tribunal administratif de Cergy-Pontoise a prononcé un non-lieu à statuer sur les conclusions à fin de décharge présentées par

M. et Mme B..., à concurrence du dégrèvement accordé en cours d'instance à hauteur de la somme globale de 4 406 euros (article 1er), et a rejeté le surplus des conclusions de leur demande (article 2).

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 22 mai 2019 et le 4 février 2021, M. et Mme C... B..., représentés par Me Dahmoun, avocat, demande à la Cour :

1°) d'enjoindre à l'administration de produire les copies recto-verso des chèques émis par la société Ferr et Fer en 2009, 2010 et 2011, dont les montants ont été réputés distribués entre leurs mains ;

2°) d'annuler l'article 2 de ce jugement ;

3°) de prononcer la décharge des impositions en litige ;

4°) de mettre à la charge de l'État la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- la procédure d'imposition est irrégulière dès lors qu'aucun avis d'examen de situation fiscale personnelle ne leur a été envoyé ;

- l'administration aurait dû mettre en application la procédure prévue à l'article 117 du code général des impôts ;

- l'administration a imposé à tort M. C... B... en sa qualité de maître de l'affaire, alors qu'elle avait en sa possession l'ensemble des chèques émis par la société Ferr et Fer lui permettant d'identifier les bénéficiaires réels des revenus distribués.

..........................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le décret n° 2020-1406 du 18 novembre 2020 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme A..., première conseillère,

- et les conclusions de M. Illouz, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. A la suite de la vérification de comptabilité de la société Ferr et Fer, dont M. B... est le gérant et détient, avec son épouse, la totalité des parts sociales, M. et Mme B... ont fait l'objet d'un contrôle sur pièces de leur dossier fiscal portant sur les revenus perçus au titre des années 2009, 2010 et 2011. A l'issue de ce contrôle, l'administration fiscale a notifié aux intéressés, par une proposition de rectification en date du 14 décembre 2012, des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales, assorties de pénalités. Les requérants ont demandé la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires auxquelles ils ont été assujettis. Par un jugement n° 1611526 du 26 mars 2019, le tribunal administratif de Cergy-Pontoise a prononcé un non-lieu à statuer sur les conclusions à fin de décharge présentées par M. et Mme B..., à concurrence du dégrèvement accordé en cours d'instance, à hauteur de la somme globale de 4 406 euros (article 1er) et a rejeté le surplus des conclusions de leur demande (article 2). M. et Mme C... B... font appel de ce jugement en ce qu'il a rejeté le surplus des conclusions de leur demande.

Sur la régularité de la procédure d'imposition :

2. Aux termes de l'article L. 10 du livre des procédures fiscales : " L'administration des impôts contrôle les déclarations ainsi que les actes utilisés pour l'établissement des impôts, droits, taxes et redevances. / Elle contrôle également les documents déposés en vue d'obtenir des déductions, restitutions ou remboursements. / A cette fin elle peut demander aux contribuables tous renseignements, justifications ou éclaircissements relatifs aux déclarations souscrites ou aux actes déposés (...) ". Aux termes de l'article L. 12 de ce même livre : " Dans les conditions prévues au présent livre, l'administration des impôts peut procéder à l'examen contradictoire de la situation fiscale des personnes physiques au regard de l'impôt sur le revenu, qu'elles aient ou non leur domicile fiscal en France, lorsqu'elles y ont des obligations au titre de cet impôt. / A l'occasion de cet examen l'administration peut contrôler la cohérence entre, d'une part les revenus déclarés et, d'autre part, la situation patrimoniale, la situation de trésorerie et les éléments du train de vie des membres du foyer fiscal (...) ". Le premier alinéa de l'article L. 47 du même livre dispose que: " Un examen contradictoire de la situation fiscale personnelle au regard de l'impôt sur le revenu, une vérification de comptabilité ou un examen de comptabilité ne peut être engagé sans que le contribuable en ait été informé par l'envoi ou la remise d'un avis de vérification ou par l'envoi d'un avis d'examen de comptabilité ".

3. Il résulte de l'instruction qu'à la suite de la vérification de comptabilité de la société Ferr et Fer, dont M. B... est le gérant et détient, avec son épouse, la totalité des parts sociales, l'administration fiscale, a notifié aux requérants, le 14 décembre 2012, des rectifications en matière de revenus de capitaux mobiliers et au niveau du revenu global, au titre des mêmes années. Ces rectifications ne procédaient pas d'un examen contradictoire de la situation fiscale personnelle des contribuables, lequel implique un contrôle de cohérence globale entre l'ensemble des revenus déclarés par les contribuables et leur situation de trésorerie, leur situation patrimoniale ou leur train de vie, mais d'un examen des pièces du dossier de M. et Mme C... B... détenu par le service. Par suite, le moyen tiré de l'irrégularité de la procédure d'imposition en l'absence d'envoi d'un avis d'examen de situation fiscale personnelle, doit être écarté.

Sur le bien-fondé des impositions :

4. En premier lieu, aux termes de l'article L.57 du livre des procédures fiscales : " L'administration adresse au contribuable une proposition de rectification qui doit être motivée de manière à lui permettre de formuler ses observations ou de faire connaître son acceptation. / Sur demande du contribuable reçue par l'administration avant l'expiration du délai mentionné à l'article L.11, ce délai est prorogé de trente jours (...) ". L'article L. 11 du même livre dispose : " A moins qu'un délai plus long ne soit prévu par le présent livre, le délai accordé aux contribuables pour répondre aux demandes de renseignements, de justifications ou d'éclaircissements et, d'une manière générale, à toute notification émanant d'un agent de l'administration des impôts est fixé à trente jours à compter de la réception de cette notification ". Aux termes de l'article R. 194-1 du livre des procédures fiscales : " Lorsque, ayant donné son accord à la rectification ou s'étant abstenu de répondre dans le délai légal à la proposition de rectification, le contribuable présente cependant une réclamation faisant suite à une procédure contradictoire de rectification, il peut obtenir la décharge ou la réduction de l'imposition, en démontrant son caractère exagéré ".

5. Il résulte de l'instruction qu'en réponse à la proposition de rectification du 14 décembre 2012 qui a été réceptionnée le 21 décembre 2012, M. et Mme C... B... ont sollicité une prorogation du délai de réponse le 23 janvier 2013, soit après l'expiration du délai légal qui leur était imparti pour présenter leurs observations. En l'absence de contestation des rectifications litigieuses dans le délai légal, les requérants doivent être regardés comme les ayant tacitement acceptées. Ils supportent dès lors la charge de la preuve de leur exagération.

6. En deuxième lieu, aux termes de l'article 109 du code général des impôts : " 1. Sont considérés comme revenus distribués : 1° Tous les bénéfices ou produits qui ne sont pas mis en réserve ou incorporés au capital (...) ". Aux termes de l'article 110 du même code : " Pour l'application du 1° du 1 de l'article 109, les bénéfices s'entendent de ceux qui ont été retenus pour l'assiette de l'impôt sur les sociétés ". Le contribuable qui, disposant seul des pouvoirs les plus étendus au sein de la société, est en mesure d'user sans contrôle de ses biens comme de biens qui lui sont propres et doit ainsi être regardé comme le seul maître de l'affaire, est présumé avoir appréhendé les distributions effectuées par la société qu'il contrôle.

7. Il est constant que M. C... B... est gérant de droit de la société Ferr et Fer depuis sa création, que son épouse détenait, jusqu'au 30 septembre 2011, 50 % des parts de cette société tandis qu'il en détenait les parts restantes, et que, selon ses déclarations à l'administration, il disposait seul de la signature bancaire sur le compte de la société. Par suite, il doit être considéré comme le seul maître de l'affaire et être présumé avoir appréhendé les revenus distribués par cette société. L'administration pouvait donc, du fait de cette qualité de maître de l'affaire, imposer les revenus distribués entre les mains de M. C... B....

8. Les requérants soutiennent cependant que l'administration fiscale n'était pas fondée à faire jouer la présomption d'appréhension des revenus distribués par le maître de l'affaire, dès lors qu'elle détenait la copie de l'ensemble des chèques émis par la société Ferr et Fer pendant la période litigieuse, ce qui lui permettait de connaître exactement les bénéficiaires des revenus distribués. Toutefois, il ressort de la proposition de rectification du 14 décembre 2012 qu'ont été considérés comme revenus distribués les bénéfices non déclarés de la SARL Ferr et Fer, ainsi que la TVA collectée non déclarée, ces sommes n'étant pas restées investies dans la société. L'administration n'ayant pas estimé le montant des revenus distribués en se fondant sur les chèques tirés, il n'y a pas lieu de se reporter à ces chèques, ni pour évaluer le montant des revenus distribués, ni pour en identifier le ou les bénéficiaires. Au surplus, il n'est pas établi que cette distribution se serait faite exclusivement par chèque, alors que l'activité de cette société, qui est de restauration rapide, entraînait l'entrée et la manipulation de liquidités. Ainsi, M. et Mme C... B... n'apportent pas la preuve, qui leur incombe, du caractère exagéré du montant des revenus réputés distribués entre leurs mains au titre des années 2009, 2010 et 2011.

9. En deuxième lieu, aux termes de l'article 117 du code général des impôts : " Au cas où la masse des revenus distribués excède le montant total des distributions tel qu'il résulte des déclarations de la personne morale visées à l'article 116, celle-ci est invitée à fournir à l'administration, dans un délai de trente jours, toutes indications complémentaires sur les bénéficiaires de l'excédent de distribution. / En cas de refus ou à défaut de réponse dans ce délai, les sommes correspondantes donnent lieu à l'application de la pénalité prévue à l'article 1759 ". Il résulte de ces dispositions que si l'administration s'abstient d'inviter une personne morale à lui faire parvenir des indications sur les bénéficiaires d'un excédent de distribution qu'elle a constaté, cette abstention a seulement pour effet de la priver de la possibilité d'assujettir ladite personne morale à l'impôt sur le revenu à raison des sommes correspondantes mais est sans influence sur la régularité de la procédure d'imposition suivie à l'égard des personnes physiques qui ont bénéficié de la distribution et que l'administration, compte tenu des renseignements dont elle dispose, est en mesure d'identifier. Ainsi, les requérants ne sont pas fondés à soutenir que l'imposition entre les mains de M. C... B... des distributions de la société Ferr et Fer aurait été irrégulière du seul fait que l'administration n'aurait pas mis en application les dispositions précitées de l'article 117 du code général des impôts.

10. Il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il soit besoin de faire droit aux conclusions des requérants tendant à ce qu'il soit enjoint à l'administration de produire la copie des chèques émis par la société Ferr et Fer pendant la période litigieuse, que M. et Mme C... B... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté le surplus des conclusions de leur demande. Par voie de conséquence, leurs conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées.

D É C I D E :

Article 1er : La requête de M. et Mme C... B... est rejetée.

2

N° 19VE01875


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 7ème chambre
Numéro d'arrêt : 19VE01875
Date de la décision : 15/04/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

19-04-01-02-03-01 Contributions et taxes. Impôts sur les revenus et bénéfices. Règles générales. Impôt sur le revenu. Détermination du revenu imposable. Revenus à la disposition.


Composition du Tribunal
Président : M. EVEN
Rapporteur ?: Mme Christine PHAM
Rapporteur public ?: M. ILLOUZ
Avocat(s) : DAHMOUN

Origine de la décision
Date de l'import : 04/05/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2021-04-15;19ve01875 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award