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19/10/2021 | FRANCE | N°19VE04051

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 1ère chambre, 19 octobre 2021, 19VE04051


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme C... D... et M. A... B... ont demandé au tribunal administratif de Versailles d'annuler la décision du 18 janvier 2017 par laquelle le préfet des Yvelines a demandé à Mme D... de se présenter en préfecture le 24 février 2017 afin de restituer ses titres d'identité français ainsi que le passeport de son fils mineur, M. A... B....

Par un jugement n° 1701852 du 4 octobre 2019, le tribunal administratif de Versailles a rejeté leur demande.

Procédure devant la cour :

Par une requêt

e enregistrée, le 5 décembre 2019, Mme D... et M. B..., représentés par Me Gutierrez Fernandez...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme C... D... et M. A... B... ont demandé au tribunal administratif de Versailles d'annuler la décision du 18 janvier 2017 par laquelle le préfet des Yvelines a demandé à Mme D... de se présenter en préfecture le 24 février 2017 afin de restituer ses titres d'identité français ainsi que le passeport de son fils mineur, M. A... B....

Par un jugement n° 1701852 du 4 octobre 2019, le tribunal administratif de Versailles a rejeté leur demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée, le 5 décembre 2019, Mme D... et M. B..., représentés par Me Gutierrez Fernandez, avocat, demandent à la cour :

1° d'annuler le jugement attaqué ;

2° d'annuler la décision attaquée ;

3° de mettre à la charge de l'État la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ainsi que les entiers dépens de l'instance.

Ils soutiennent que :

- l'administration ne pouvait conclure à une dissimulation de la part de Mme D... E... la réalité de sa situation familiale alors que, d'elle-même, elle a procédé en 2012 à la retranscription de son mariage adoulaire ;

- Mme D... estimait qu'en l'absence de retranscription, il n'y avait pas lieu d'informer l'administration de ce mariage adoulaire ;

- l'administration a elle-même commis de nombreuses erreurs qui ont laissé Mme D... dans un flou juridique et ne doivent pas lui nuire aujourd'hui.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code civil ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- le décret n° 93-1362 du 30 décembre 1993 relatif aux déclarations de nationalité, aux décisions de naturalisation, de réintégration, de perte, de déchéance et de retrait de la nationalité française modifié ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Pham, première conseillère,

- et les conclusions de M. Met, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. Mme D... a acquis la nationalité française par un décret de naturalisation du 16 mai 2011 puis s'est vue délivrer un passeport français le 25 août 2011 et une carte de nationalité française le 4 octobre 2011. Son fils mineur, M. A... B..., né le 5 avril 2016 à Rambouillet, s'est vu délivrer un passeport français le 9 mai 2016. Cependant, l'existence d'un mariage religieux contracté au Maroc par Mme D... avec un compatriote, le 26 mars 2011, a été portée à la connaissance des services du ministre de l'intérieur par les services du ministre des affaires étrangères. Par un décret du 30 juillet 2014, le Premier ministre a rapporté le décret du 16 mai 2011 prononçant la naturalisation de Mme D... au motif que celui-ci avait été pris au vu d'informations erronées délivrées par l'intéressée quant à la réalité de sa situation familiale. Par une décision du 18 janvier 2017, le préfet des Yvelines a demandé à Mme D... de se présenter en préfecture le 24 février 2017 afin de restituer ses titres d'identité français ainsi que le passeport de son fils mineur. Mme D... et M. B... ont formé un recours contentieux à l'encontre de la décision du 18 janvier 2017 qui a été rejeté par le le tribunal administratif de Versailles par son jugement n° 1701852 du 4 octobre 2019, dont Mme D... et M. B... relèvent régulièrement appel de ce jugement.

2. D'une part, l'illégalité d'un acte administratif, qu'il soit ou non réglementaire, ne peut être utilement invoquée par la voie de l'exception à l'appui de conclusions dirigées contre une décision administrative ultérieure que si cette dernière décision a été prise pour l'application du premier acte ou s'il en constitue la base légale. S'agissant d'un acte non réglementaire, l'exception n'est recevable que si l'acte n'est pas devenu définitif à la date à laquelle elle est invoquée, sauf dans le cas où l'acte et la décision ultérieure constituant les éléments d'une même opération complexe, l'illégalité dont l'acte serait entaché peut être invoquée en dépit du caractère définitif de cet acte.

3. D'autre part, l'article R. 421-1 du code de justice administrative dispose que : " La juridiction ne peut être saisie que par voie de recours formé contre une décision, et ce, dans les deux mois à partir de la notification ou de la publication de la décision attaquée. (...) ". L'article R. 421-5 du même code énonce que " Les délais de recours contre une décision administrative ne sont opposables qu'à la condition d'avoir été mentionnés, ainsi que les voies de recours, dans la notification de la décision. ".

4. Le principe de sécurité juridique, qui implique que ne puissent être remises en cause sans condition de délai des situations consolidées par l'effet du temps, fait obstacle à ce que puisse être contestée indéfiniment une décision administrative individuelle qui a été notifiée à son destinataire, ou dont il est établi, à défaut d'une telle notification, que celui-ci en a eu connaissance. En une telle hypothèse, si le non-respect de l'obligation d'informer l'intéressé sur les voies et les délais de recours, ou l'absence de preuve qu'une telle information a bien été fournie, ne permet pas que lui soient opposés les délais de recours fixés par le code de justice administrative, le destinataire de la décision ne peut exercer de recours juridictionnel au-delà d'un délai raisonnable. En règle générale et sauf circonstances particulières dont se prévaudrait le requérant, ce délai ne saurait, sous réserve de l'exercice de recours administratifs pour lesquels les textes prévoient des délais particuliers, excéder un an à compter de la date à laquelle une décision expresse lui a été notifiée ou de la date à laquelle il est établi qu'il en a eu connaissance.

5. Les requérants excipent, à l'appui de leurs conclusions à fin d'annulation dirigées contre la décision du 18 janvier 2017, de l'illégalité du décret du 30 juillet 2014 rapportant le décret du 16 mai 2011 prononçant la naturalisation de Mme D..., qui revêt un caractère non réglementaire. Ces deux actes ne constituent pas les éléments d'une même opération complexe. Par ailleurs, il ressort des pièces du dossier que le décret du 30 juillet 2014 avait été publié au Journal officiel de la République française du 1er août 2014 et que, par courrier du 21 janvier 2015, distribué le 22 janvier 2015 et non réclamé, l'administration a demandé à Mme D... de se présenter au service des cartes nationales d'identité pour restituer ses titres de circulation au motif qu'elle n'avait plus la nationalité française suite au décret du 30 juillet 2014. Par suite, à la date de sa saisine du tribunal administratif, le 16 mars 2017, Mme D... doit être considérée comme ayant connaissance du décret du 30 juillet 2014 depuis plus d'un an et n'était plus recevable à exciper de son illégalité. Le moyen tiré de l'exception d'illégalité du décret du 30 juillet 2014 est, par suite, irrecevable.

6. Lorsqu'elle délivre un passeport ou une carte nationale d'identité, l'administration se borne à constater, au vu des documents produits, l'état civil et la nationalité de l'intéressé. Le caractère purement recognitif d'une telle décision de délivrance d'un passeport ou d'une carte nationale d'identité a pour conséquence que l'administration peut rapporter sa décision pour illégalité, sans condition de délai et même en l'absence de fraude. En l'espèce, dès lors que Mme D... n'avait plus la nationalité française, le préfet pouvait régulièrement lui demander de se présenter en préfecture afin de restituer ses titres d'identité français ainsi que le passeport de son fils mineur.

7. Il résulte de tout ce qui précède que Mme D... et M. B... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Versailles a rejeté leur demande. Par voie de conséquence, leurs conclusions à fin d'injonction et celles présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées. Les requérants ne justifiant pas avoir, au cours de l'instance, exposé de dépens, au sens et pour l'application de l'article R. 761-1 du code de justice administrative, les conclusions qu'ils présentent à ce titre doivent également être rejetées.

DECIDE :

Article 1er : La requête de Mme D... et M. B... est rejetée.

2

N° 19VE04051


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 19VE04051
Date de la décision : 19/10/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

26-01-01-015 Droits civils et individuels. - État des personnes. - Nationalité. - Perte de la nationalité.


Composition du Tribunal
Président : M. BEAUJARD
Rapporteur ?: Mme Christine PHAM
Rapporteur public ?: M. MET
Avocat(s) : GUTIERREZ FERNANDEZ

Origine de la décision
Date de l'import : 26/10/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2021-10-19;19ve04051 ?
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