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10/11/2021 | FRANCE | N°20VE02016

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 6ème chambre, 10 novembre 2021, 20VE02016


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... C... a demandé au tribunal administratif de Montreuil d'annuler l'arrêté du 2 juillet 2019 par lequel le préfet de la Seine-Saint-Denis a rejeté sa demande de titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi.

Par un jugement n° 1908070 du 18 juin 2020, le tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 3 août 2020, M. C..., représent

par Me Ngounou, avocat, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) d'annuler, pour exc...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... C... a demandé au tribunal administratif de Montreuil d'annuler l'arrêté du 2 juillet 2019 par lequel le préfet de la Seine-Saint-Denis a rejeté sa demande de titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi.

Par un jugement n° 1908070 du 18 juin 2020, le tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 3 août 2020, M. C..., représenté par Me Ngounou, avocat, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, cet arrêté ;

3°) d'enjoindre au préfet de la Seine-Saint-Denis de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " dans un délai de trente jours mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 150 euros par jour de retard, ou, à défaut, de procéder à un nouvel examen de sa demande dans les mêmes conditions de délai et d'astreinte ;

4°) de mettre à la charge de l'État la somme de 2 000 euros à verser à Me Ngounou, sur le fondement des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Il soutient que :

- son droit à être entendu a été méconnu ;

- le rapport médical et l'avis du collège des médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration (OFII) du 24 juin 2019 ne lui ont pas été communiqués ;

- il n'est pas établi que l'auteur du rapport médical n'aurait pas siégé au sein du collège des médecins de l'OFII ayant rendu un avis sur sa situation médicale ;

- le docteur A..., qui avait été membre d'un collège ayant émis un précédent avis sur sa situation médicale, a siégé, à nouveau, au sein du collège qui s'est réuni le 24 juin 2019, en violation du principe d'impartialité applicable aux autorités administratives ;

- l'arrêté attaqué est insuffisamment motivé ;

- le préfet n'a pas procédé à un examen particulier de sa situation ;

- il appartenait à l'autorité préfectorale de solliciter de sa part de nouveaux éléments dans le cadre du réexamen de sa demande de titre ;

- le préfet n'a pas examiné sa demande d'admission exceptionnelle au séjour présentée au titre de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa numérotation alors applicable ;

- il n'a pas davantage examiné sa demande de titre fondée sur les stipulations de la convention entre la République française et la République du Cameroun relative à la circulation et au séjour des personnes, signée à Yaoundé le 24 janvier 1994 ;

- le préfet s'est exclusivement fondé sur l'avis du collège des médecins de l'OFII, sans épuiser son pouvoir d'appréciation ;

- le collège des médecins de l'OFII et le préfet n'ont pas examiné sa situation médicale à l'aune de l'ensemble des pathologies dont il souffre ;

- l'arrêté attaqué est entaché d'une erreur de droit, le préfet n'ayant pas recherché s'il pouvait effectivement bénéficier d'un traitement approprié à sa pathologie au Cameroun ;

- cet arrêté a été pris en méconnaissance du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa numérotation alors en vigueur ;

- il est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation de sa situation dès lors que celle-ci justifiait, en tout état de cause, une admission exceptionnelle au séjour.

La requête a été communiquée au préfet de la Seine-Saint-Denis, qui n'a pas produit de mémoire en défense.

M. C... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 30 juin 2021.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;

- la convention entre la République française et la République du Cameroun relative à la circulation et au séjour des personnes, signée à Yaoundé le 24 janvier 1994 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Albertini, président de chambre,

- et les observations de Me Ngounou, pour M. C....

Considérant ce qui suit :

1. M. C..., ressortissant camerounais né le 15 janvier 1967, a été muni d'une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale ", sur le fondement du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dans sa numérotation alors applicable, dont il a sollicité le renouvellement le 2 mai 2017. Ce renouvellement lui a été refusé par un arrêté du préfet de la Seine-Saint-Denis du 17 avril 2018 que le tribunal administratif de Montreuil a annulé par un jugement du 12 novembre 2018 devenu définitif. Ressaisi de la demande de l'intéressé du fait de ce jugement, le préfet de la Seine-Saint-Denis lui a à nouveau refusé le renouvellement de son titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi par un arrêté du 2 juillet 2019. M. C... relève régulièrement appel du jugement du 18 juin 2020 par lequel le tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

2. En premier lieu, M. C... reprend en appel, sans apporter de précisions ou de justifications nouvelles ou pertinentes, les moyens soulevés en première instance tirés de la méconnaissance de son droit à être entendu, du défaut de communication du rapport médical et de l'avis du collège des médecins de l'OFII du 24 juin 2019, de ce qu'il ne serait pas établi que l'auteur du rapport médical n'aurait pas siégé au sein de ce collège, de la violation du principe d'impartialité, de l'insuffisance de motivation de l'arrêté attaqué et de ce que le préfet se serait estimé lié, à tort, par cet avis, sans épuiser son pouvoir d'appréciation. Il y a lieu, dès lors, d'écarter ces moyens par adoption des motifs retenus à bon droit par les premiers juges.

3. En deuxième lieu, M. C... indique qu'il souffrirait de troubles de nature tant psychique que neurologique et que sa situation médicale n'aurait été examinée par le collège des médecins de l'OFII, puis par le préfet qu'à l'aune de ses seuls troubles neurologiques. Il ne ressort cependant pas des pièces du dossier que l'intéressé se serait prévalu d'une pathologie d'ordre psychique durant l'instruction de sa demande, ni, en tout état de cause, que l'avis médical du 24 juin 2019 et l'arrêté préfectoral du 2 juillet suivant auraient, au regard de leurs énonciations, exclu toute prise en compte d'une pathologie autre que neurologique. Ce moyen doit, par suite, être écarté.

4. En troisième lieu, ainsi qu'il a été dit au point 1., par un jugement du 12 novembre 2018 devenu définitif, le tribunal administratif de Montreuil a annulé un précédent refus opposé à M. C... de renouvellement de sa carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " et enjoint au préfet de la Seine-Saint-Denis de réexaminer la situation de l'intéressé. S'il appartenait au préfet, ressaisi de la demande de M. C... par l'effet de cette annulation contentieuse, de procéder à une nouvelle instruction de celle-ci, notamment en saisissant à nouveau pour avis le collège des médecins de l'OFII, aucun principe ni aucune disposition législative ou réglementaire ne lui imposait de solliciter la production d'éléments actualisés relatifs à la situation de l'intéressé, auquel il était, en tout état de cause, loisible de faire spontanément part à l'auteur du rapport médical ou à l'administration de tout élément nouveau relatif à sa situation. Il ressort, par ailleurs, des termes de l'arrêté attaqué que le préfet a procédé à un examen particulier de la situation, tant médicale que familiale, de l'appelant. Ces moyens doivent, par suite, être écartés.

5. En quatrième lieu, il ne ressort pas des pièces du dossier que M. C... aurait sollicité son admission exceptionnelle au séjour sur le fondement de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa numérotation alors applicable, ou la délivrance d'un titre sur le fondement d'une stipulation quelconque de la convention entre la République française et la République du Cameroun relative à la circulation et au séjour des personnes, signée à Yaoundé le 24 janvier 1994. Par suite, le moyen tiré de ce que le préfet aurait omis d'examiner son droit au séjour sur le fondement de ces stipulations et dispositions ne peut qu'être écarté.

6. En cinquième lieu, aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa numérotation alors applicable : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) / 11° A l'étranger résidant habituellement en France, si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié. (...) La décision de délivrer la carte de séjour est prise par l'autorité administrative après avis d'un collège de médecins du service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, dans des conditions définies par décret en Conseil d'État. (...) ".

7. D'une part, il résulte des termes-mêmes de l'arrêté attaqué que le préfet de la Seine-Saint-Denis a notamment relevé que, dans son avis du 24 juin 2019 dont il a entendu s'approprier les motifs, le collège des médecins de l'OFII a estimé que M. C... pouvait effectivement bénéficier d'un traitement approprié à son état de santé au Cameroun et que l'intéressé n'apportait aucun élément de nature à établir l'inaccessibilité d'un tel traitement dans son pays d'origine. Ainsi, l'autorité administrative a recherché, comme elle y était tenue, si un traitement adéquat était effectivement accessible dans le pays dont M. C... a la nationalité. Le moyen tiré de l'erreur de droit doit, par suite, être écarté.

8. D'autre part, la partie qui justifie d'un avis du collège des médecins de l'OFII qui lui est favorable doit être regardée comme apportant des éléments de fait susceptibles de faire présumer l'existence ou l'absence d'un état de santé de nature à justifier la délivrance ou le refus d'un titre de séjour. Dans ce cas, il appartient à l'autre partie, dans le respect des règles relatives au secret médical, de produire tous éléments permettant d'apprécier l'état de santé de l'étranger et, le cas échéant, l'existence ou l'absence d'un traitement approprié dont il peut effectivement bénéficier dans le pays de renvoi. La conviction du juge, à qui il revient d'apprécier si l'état de santé d'un étranger justifie la délivrance d'un titre de séjour dans les conditions ci-dessus rappelées, se détermine au vu de ces échanges contradictoires. En cas de doute, il lui appartient de compléter ces échanges en ordonnant toute mesure d'instruction utile.

9. Pour contester l'appréciation portée par le collège des médecins de l'OFII, puis par le préfet sur sa faculté d'accéder de façon effective à un traitement approprié à sa pathologie au Cameroun, M. C... se borne à produire des extraits d'un article publié sur un site internet d'informations généralistes et d'études faisant état de difficultés d'ordre général dans le traitement de l'épilepsie et des maladies mentales dans ce pays, un document montrant le coût de la Dépakine au Cameroun, où elle est disponible dans les dosages qui lui sont prescrits, comme, au demeurant, des médicaments génériques anticonvulsivants dont la molécule est le valproate de sodium, et une attestation du gérant d'une pharmacie camerounaise indiquant que ce médicament ne serait disponible que dans certaines officines situées dans les grandes villes de ce pays. Ces seuls éléments, et particulièrement ceux concernant les coûts du traitement, s'ils mettent en lumière des difficultés potentielles en dehors des grandes villes pour la poursuite du traitement médical suivi par l'appelant ne sont pas, à eux seuls, de nature à révéler l'impossibilité, pour M. C..., qui est à même d'exercer une activité professionnelle, d'accéder de façon effective à un traitement pour soigner les différentes pathologies dont il est atteint dans son pays d'origine. Par suite, c'est par une exacte application des dispositions précitées du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa numérotation alors en vigueur, que le préfet a rejeté sa demande de renouvellement de carte de séjour temporaire.

10. En sixième et dernier lieu, M. C... produit des pièces attestant d'une présence en France depuis 2013 et justifie d'un contrat de travail à durée indéterminée signé en août 2019 et de l'obtention d'un diplôme d'agent de sécurité privée. Il n'est cependant pas contesté que l'intéressé, qui ne peut utilement se prévaloir des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ainsi qu'il a été dit au point 5., ne dispose d'aucune attache familiale en France. Par ailleurs, et ainsi qu'il a été dit au point 9., celui-ci ne justifie pas de l'impossibilité d'accéder à un traitement médical adapté à son état de santé en cas de retour au Cameroun. Par suite, le moyen tiré de ce que l'arrêté attaqué serait entaché d'une erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle doit être écarté.

11. Il résulte de tout ce qui précède que M. C... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction ainsi que celles présentées sur le fondement des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 ne peuvent qu'être rejetées.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. C... est rejetée.

3

N° 20VE02016


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 20VE02016
Date de la décision : 10/11/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-03 Étrangers. - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. ALBERTINI
Rapporteur ?: M. Paul-Louis ALBERTINI
Rapporteur public ?: Mme BOBKO
Avocat(s) : NGOUNOU

Origine de la décision
Date de l'import : 23/11/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2021-11-10;20ve02016 ?
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