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28/01/2022 | FRANCE | N°21VE01101

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 2ème chambre, 28 janvier 2022, 21VE01101


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B... A... a demandé au tribunal administratif de Versailles d'annuler l'arrêté du 20 novembre 2018 par lequel le maire de la commune d'Orgerus a refusé de faire droit à sa demande de permis de construire, enregistrée sous le n° PC 078 465 18 M 0009, pour la construction d'une maison individuelle avec un garage intégré sur son terrain situé 9, rue de Béconcelle au lieu-dit " La Croix Saint-Denis ", et de mettre à la charge de la commune d'Orgerus la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1

du code de justice administrative.

Par un jugement n° 1903866 du 8 mars ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B... A... a demandé au tribunal administratif de Versailles d'annuler l'arrêté du 20 novembre 2018 par lequel le maire de la commune d'Orgerus a refusé de faire droit à sa demande de permis de construire, enregistrée sous le n° PC 078 465 18 M 0009, pour la construction d'une maison individuelle avec un garage intégré sur son terrain situé 9, rue de Béconcelle au lieu-dit " La Croix Saint-Denis ", et de mettre à la charge de la commune d'Orgerus la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par un jugement n° 1903866 du 8 mars 2021, le tribunal administratif de Versailles a annulé l'arrêté du 20 novembre 2018, enjoint au maire de la commune d'Orgerus de délivrer à Mme A... le permis de construire sollicité, dans un délai d'un mois à compter de la notification du jugement, et mis à la charge de la commune la somme de 1 500 euros à verser à Mme A... au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 13 avril 2021, la commune d'Orgerus, représentée par Me Segalen, avocat, demande à la cour :

1° d'annuler ce jugement ;

2° de rejeter la demande d'annulation de l'arrêté du 20 novembre 2018 refusant à Mme A... la délivrance du permis de construire n° PC 078 465 18 M 0009 pour l'édification d'une maison individuelle sur le lot B issu de la division de son terrain ;

3° de condamner Mme A... à lui verser la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article L.761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le jugement est entaché d'irrégularité car les premiers juges ont rejeté sa demande d'expertise alors qu'elle s'imposait pour trancher la réalité des caractères humide et inondable du terrain d'assiette du projet ;

- c'est à tort que les premiers juges ont estimé que le projet portait atteinte à la sécurité publique et méconnaissait l'article R.111-2 du code de l'urbanisme ;

- c'est à tort que les premiers juges ont rejeté la demande de substitution de motifs fondée sur la méconnaissance des dispositions de l'article UG.2 du règlement du plan local d'urbanisme de la commune d'Orgerus.

....................................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Orio,

- les conclusions de Mme Margerit, rapporteure publique,

- et les observations de Me Segalen pour la commune d'Orgerus et de Me Sallabelle pour Mme A....

Considérant ce qui suit :

1. Mme A..., propriétaire d'un terrain de 9 100 m2 situé 9, rue de Béconcelle à Orgerus, sur lequel était édifiée une maison familiale, a décidé de vendre cette propriété dont elle ne pouvait plus assumer les charges tout en conservant un terrain de 900 m2 sur lequel elle entendait faire construire une maison d'habitation. Mme A... a dans ce but déposé, le 15 avril 2016, une déclaration préalable de division portant création d'un lot à bâtir sous le n° DP 078 465 16 M 0013, pour laquelle elle a obtenu le 17 mai 2016 une décision expresse de non-opposition du maire d'Orgerus. Mme A... a par la suite déposé une demande de permis de construire sous le n° PC 078 465 18 M 0009 pour l'édification d'une maison individuelle sur le lot B issu de la division de son terrain. Par un arrêté du 20 novembre 2018, le maire de la commune d'Orgerus a cependant refusé de lui délivrer le permis de construire sollicité au motif que le projet, situé dans une " zone humide supposée ", contrevenait aux dispositions du plan local d'urbanisme interdisant toute construction dans ces zones, ainsi qu'aux dispositions de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme en raison de l'importante imperméabilisation des sols prévue sur cette parcelle. La commune d'Orgerus fait régulièrement appel du jugement du 8 mars 2021 par lequel le tribunal administratif de Versailles a annulé l'arrêté du 20 novembre 2018 et a enjoint au maire de la commune de délivrer le permis de construire sollicité, dans le délai d'un mois à compter de la notification du jugement.

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. La commune d'Orgerus soutient qu'en rejetant sa demande d'expertise les premiers juges ont entaché leur jugement d'irrégularité. Toutefois, il ressort des termes du jugement attaqué que le tribunal qui disposait de pièces, cartes, attestations et constats n'a pas méconnu son office en estimant au regard des pièces produites par les deux parties qu'il disposait de suffisamment d'éléments de fait pour trancher les questions qui lui étaient soumises, sans qu'il soit besoin de recourir à une expertise. Par suite, le moyen tiré de l'irrégularité du jugement attaqué doit être écarté.

Sur les conclusions à fin d'annulation :

3. En premier lieu, aux termes de l'article R.111-2 du code de l'urbanisme : " Le projet peut être refusé ou n'être accepté que sous réserve de l'observation de prescriptions spéciales s'il est de nature à porter atteinte à la salubrité ou à la sécurité publique du fait de sa situation, de ses caractéristiques, de son importance ou de son implantation à proximité d'autres installations ". En vertu de ces dispositions, lorsqu'un projet de construction est de nature à porter atteinte à la salubrité ou à la sécurité publique, le permis de construire ne peut être refusé que si l'autorité compétente estime, sous le contrôle du juge, qu'il n'est pas légalement possible, au vu du dossier et de l'instruction de la demande de permis, d'accorder le permis en l'assortissant de prescriptions spéciales qui, sans apporter au projet de modifications substantielles nécessitant la présentation d'une nouvelle demande, permettraient d'assurer la conformité de la construction aux dispositions législatives et réglementaires dont l'administration est chargée d'assurer le respect.

4. Il ressort de l'arrêté attaqué que pour s'opposer à la demande de permis de construire de Mme A..., le maire d'Orgerus s'est fondé sur les dispositions de l'article précité en soulignant le " caractère potentiellement humide de la parcelle susvisée et les risques auxquels sont exposés les habitants, notamment au regard des récentes inondations et/ou fortes pluies constatées durant lesquelles cette dernière était partiellement inondée ". Il ressort cependant des pièces du dossier que si la commune est effectivement située dans le périmètre d'un plan de prévention des risques naturels prévisibles, il ne ressort pas de la cartographie qui y est annexée que le terrain d'assiette du projet serait situé en zone inondable. Il ressort également du procès-verbal de constat d'huissier et du courriel de l'agence immobilière mandatée pour la vente du terrain, que ce dernier ne fait apparaître aucune retenue d'eau ni flaques ou cours d'eau. Si la commune d'Orgerus soutient que la construction est de nature à porter atteinte à la sécurité publique en ce qu'une inondation a déjà été constatée sur ce terrain, elle ne produit aucun élément nouveau en appel de nature à établir la récurrence et l'ampleur de ce type d'évènement. Dans ces conditions, faute de démontrer une atteinte à la sécurité publique la commune ne pouvait légalement refuser le permis sollicité pour méconnaissance de l'article R. 111-2 précité.

5. En second lieu, l'administration peut, en première instance comme en appel, faire valoir devant le juge de l'excès de pouvoir que la décision dont l'annulation est demandée est légalement justifiée par un motif, de droit ou de fait, autre que celui initialement indiqué, mais également fondé sur la situation existant à la date de cette décision. Il appartient alors au juge, après avoir mis à même l'auteur du recours de présenter ses observations sur la substitution ainsi sollicitée, de rechercher si un tel motif est de nature à fonder légalement la décision, puis d'apprécier s'il résulte de l'instruction que l'administration aurait pris la même décision si elle s'était fondée initialement sur ce motif. Dans l'affirmative il peut procéder à la substitution demandée, sous réserve toutefois qu'elle ne prive pas le requérant d'une garantie procédurale liée au motif substitué.

6. Aux termes de l'article UG.2 du plan local d'urbanisme de la commune d'Orgerus : " Sont notamment admis les occupations du sol suivantes : (...) Dans le cadre de l'application du SDAGE approuvé en 2009, les constructions et aménagements situés dans zones potentiellement humides figurant en annexe au présent règlement, peuvent être soumis à une procédure " Loi sur l'eau " au titre de la rubrique 3.1.1.0 du titre III de la nomenclature annexée à l'article R.214-1 du code de l'environnement, en fonction de leur nature dès lors que les seuils sont atteints. On veillera particulièrement à limiter l'imperméabilisation des sols ".

7. Si la commune d'Orgerus soutient que c'est à tort que le tribunal administratif a refusé la substitution de motifs sollicitée sur le fondement de l'article UG.2 du plan local d'urbanisme qui résulte de l'application du plan de gestion des eaux, le SDAGE du bassin Seine Normandie préconisant de mettre fin à la disparition et à la dégradation des zones humides, il ne ressort pas des pièces du dossier que le terrain serait situé en zone humide, et il ressort des pièces du dossier que le terrain d'assiette du projet a une superficie totale de 949 m2 et que la construction projetée a une emprise de 99,45 m2, soit un peu plus de 10 % de la superficie totale du terrain. De plus, Mme A... produit pour la première fois en appel un plan de masse attestant de la création de deux puits de 3 mètres de profondeur afin de permettre un traitement des eaux pluviales visant à limiter l'imperméabilisation des sols. Dans ces conditions, la commune d'Orgerus n'est pas fondée à soutenir que l'arrêté attaqué serait justifié par le motif énoncé ci-dessus. Il n'y a dès lors pas lieu de faire droit à la demande de substitution de motifs sollicitée par la commune.

8. Il résulte de tout ce qui précède que la commune d'Orgerus n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Versailles a annulé l'arrêté portant refus de permis de construire du 20 novembre 2018 et l'a enjoint à délivrer cette autorisation.

Sur les frais liés au litige :

9. Il y a lieu, en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, de mettre à la charge de la commune d'Orgerus le versement à Mme A... le versement d'une somme de 2 000 euros en remboursement des frais exposés et non compris dans les dépens. Ces mêmes dispositions font en revanche obstacle à ce que Mme A... verse à la commune d'Orgerus la somme qu'elle demande sur ce même fondement.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de la commune d'Orgerus est rejetée.

Article 2 : La commune d'Orgerus versera à Mme A... la somme de 2 000 euros en application de l'article L.761-1 du code de justice administrative.

2

N° 21VE01101


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 21VE01101
Date de la décision : 28/01/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

68-03 Urbanisme et aménagement du territoire. - Permis de construire.


Composition du Tribunal
Président : M. EVEN
Rapporteur ?: Mme Eugénie ORIO
Rapporteur public ?: Mme MARGERIT
Avocat(s) : SOCIETE D'AVOCATS SEHILI - FRANCESCHINI

Origine de la décision
Date de l'import : 08/02/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2022-01-28;21ve01101 ?
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