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10/02/2022 | FRANCE | N°20VE00535

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 3ème chambre, 10 février 2022, 20VE00535


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... B... a demandé au tribunal administratif de Versailles, d'une part, de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales restant à sa charge au titre de l'année 2011 à concurrence de la somme globale, en droits et pénalités, de 63 490 euros, et, d'autre part, de condamner l'État à lui rembourser les sommes déjà perçues avec le paiement d'intérêts moratoires, en application de l'article L. 208 du livre des procédures fiscales.

Par

un jugement n° 1708562 du 17 décembre 2019, le tribunal administratif de Versailles ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... B... a demandé au tribunal administratif de Versailles, d'une part, de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales restant à sa charge au titre de l'année 2011 à concurrence de la somme globale, en droits et pénalités, de 63 490 euros, et, d'autre part, de condamner l'État à lui rembourser les sommes déjà perçues avec le paiement d'intérêts moratoires, en application de l'article L. 208 du livre des procédures fiscales.

Par un jugement n° 1708562 du 17 décembre 2019, le tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 17 février 2020 et le 2 juin 2021, M. B..., représenté par Me Elbaz, avocat, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) de le décharger des impositions et prélèvements sociaux supplémentaires, de la majoration de 40 % et des intérêts de retard mis à sa charge au titre de l'année 2011, pour une somme globale de 66 860 euros ;

3°) de mettre à la charge de l'État la somme de 3 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, ainsi que les dépens.

Il soutient que :

- la procédure d'imposition est irrégulière au regard de l'article L. 76 B du livre des procédures fiscales, en l'absence de communication des documents obtenus par l'administration auprès des établissements bancaires dans le cadre de la mise en œuvre de son droit de communication, comme il en a fait la demande par courrier du 3 mars 2014 ;

- la somme de 18 179,48 euros correspond au remboursement par son employeur, la société Ates, de frais professionnels qu'il a avancés et dont il justifie ;

- il n'est pas établi qu'il ait été bénéficiaire des revenus distribués par la société Ates ; d'une part, les courriers des 1er et 20 février 2013 n'ont pas été produits ; d'autre part, le gérant de la société Ates ne l'a jamais désigné comme bénéficiaire de ces revenus, la procédure de l'article 117 du code général des impôts n'ayant pas été mise en œuvre à la suite de la vérification de comptabilité de la société Ates ;

- la majoration de 40 % pour manquement délibéré n'est pas fondée en l'absence de sommes dissimulées par des encaissements d'argent liquide et eu égard au fait que les sommes perçues de la société Ates constituent des avances sur salaires et des remboursements de frais, l'importance des sommes ne pouvant suffire à fonder la pénalité.

..........................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Bonfils,

- les conclusions de M. Huon, rapporteur public,

- et les observations de Me Elbaz, avocat, pour M. B....

Considérant ce qui suit :

1. M. B... a fait l'objet d'un examen de situation fiscale personnelle portant sur les années 2010 et 2011, à l'issue duquel l'administration lui a proposé des rectifications portant, d'une part, selon la procédure contradictoire, sur des revenus qu'elle a regardés comme distribués par la SARL Ates, et, d'autre part, selon la procédure de taxation d'office, sur des revenus d'origine indéterminée. M. B... fait appel du jugement du 17 décembre 2019 par lequel le tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande tendant à la décharge, en droits, majorations et intérêts de retard, des suppléments d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquels il a ainsi été assujetti au titre de l'année 2011.

Sur la régularité de la procédure d'imposition :

2. Aux termes de l'article L. 76 B du livre des procédures fiscales : " L'administration est tenue d'informer le contribuable de la teneur et de l'origine des renseignements et documents obtenus de tiers sur lesquels elle s'est fondée pour établir l'imposition faisant l'objet de la proposition prévue au premier alinéa de l'article L. 57 ou de la notification prévue à l'article L. 76. Elle communique, avant la mise en recouvrement, une copie des documents susmentionnés au contribuable qui en fait la demande. " Il résulte de ces dispositions qu'il incombe à l'administration, quelle que soit la procédure d'imposition mise en œuvre, et au plus tard avant la mise en recouvrement, d'informer le contribuable dont elle envisage soit de rehausser, soit d'arrêter d'office les bases d'imposition, de l'origine et de la teneur des documents et renseignements obtenus auprès de tiers, qu'elle a utilisés pour fonder les impositions, avec une précision suffisante pour mettre à même l'intéressé d'y avoir accès avant la mise en recouvrement des impositions qui en procèdent. Lorsque le contribuable lui en fait la demande, l'administration est, en principe, tenue de lui communiquer, alors même qu'il en aurait eu connaissance, les renseignements, documents ou copies de documents obtenus auprès de tiers qui lui sont opposés, afin de lui permettre d'en vérifier l'authenticité ou d'en discuter la teneur ou la portée.

3. Il résulte de l'instruction que le courrier du 3 mars 2014 par lequel M. B... a demandé au service de lui communiquer copie des documents obtenus auprès des établissements financiers constituait la réponse à la proposition de rectification émise le 20 décembre 2013, laquelle portait exclusivement sur les revenus de l'année 2010. M. B... ne justifie pas avoir adressé une demande équivalente s'agissant des redressements opérés au titre de ses revenus de l'année 2011, lesquels sont seuls en litige. Dans ces conditions, il n'est pas fondé à invoquer une irrégularité de procédure commise en méconnaissance des dispositions de l'article L. 76 B du livre des procédures fiscales. Par suite, le moyen doit être écarté comme manquant en fait.

Sur le bien-fondé des impositions en litige :

En ce qui concerne les revenus d'origine indéterminée :

4. Aux termes de l'article L. 16 du livre des procédures fiscales : " En vue de l'établissement de l'impôt sur le revenu, l'administration peut demander au contribuable des éclaircissements. (...) Elle peut également lui demander des justifications lorsqu'elle a réuni des éléments permettant d'établir que le contribuable peut avoir des revenus plus importants que ceux qu'il a déclarés (...) ". Aux termes de l'article L. 69 du même livre : " (...) sont taxés d'office à l'impôt sur le revenu les contribuables qui se sont abstenus de répondre aux demandes d'éclaircissements ou de justifications prévues à l'article L. 16. ". Enfin, l'article L. 192 du livre des procédures fiscales dispose : " (...) La charge de la preuve incombe au contribuable (...) en cas de taxation d'office à l'issue d'un examen contradictoire de la situation fiscale personnelle en application des dispositions des articles L. 16 et L. 69 ".

5. Il incombe à M. B..., qui ne conteste pas la régularité de la procédure de taxation d'office diligentée à son encontre en application des dispositions des articles L. 16 et L. 69 du livre des procédures fiscales au titre de l'impôt sur le revenu de l'année 2011, d'apporter la preuve de l'origine et de la nature des crédits taxés comme revenus d'origine indéterminée, ainsi que celle, du caractère non imposable des sommes concernées.

6. Il résulte de l'instruction que l'administration fiscale a taxé la somme de 16 014 euros en tant que revenus d'origine indéterminée dès lors qu'elle n'a pu identifier l'origine et la nature des crédits correspondants, en l'absence notamment de débit bancaire correspondant constaté sur les comptes de la société Ates dont M. B... indique être salarié. Si l'appelant soutient que la somme en litige correspondrait au remboursement par son employeur de divers frais professionnels qu'il a avancés pour le compte de ce dernier, il ne ressort du relevé des dépenses mensuelles, établi en appel par l'intéressé et appuyé par la production de factures, aucune correspondance avec les sommes créditées sur les comptes privés. Surtout, en dépit des nombreuses pièces qu'il produit, M. B... n'établit pas de lien entre ces factures et l'activité de la société Ates, la majorité de ces factures ne comportant d'ailleurs pas même le nom de l'intéressé. S'agissant des quelques factures établies au nom de cette société, rien ne permet de justifier leur règlement sur des fonds propres de M. B.... Dans ces conditions, l'appelant n'apporte pas la preuve qui lui incombe de l'origine et de la nature de la somme taxée dans la catégorie de revenus d'origine indéterminée. Par suite, le moyen tiré du caractère non imposable de ces sommes doit être écarté.

En ce qui concerne les revenus distribués :

7. Aux termes de l'article L. 109 du code général des impôts : " 1. Sont considérés comme revenus distribués : / 1° Tous les bénéfices ou produits qui ne sont pas mis en réserve ou incorporés au capital ; (...) ". Aux termes de l'article 111 du même code : " Sont notamment considérés comme revenus distribués : (...) c. Les rémunérations et avantages occultes ". L'administration supporte la charge de démontrer l'existence et le montant des revenus distribués et de leur appréhension par le contribuable, dès lors que ce dernier, comme c'est le cas en l'espèce, n'a pas accepté les redressements, notifiés selon la procédure contradictoire.

8. Il résulte de l'instruction que l'administration a constaté une parfaite concordance entre les sommes qui ont été débitées du compte de la société Ates avec pour libellé " virement B... " et celles créditées sur des comptes détenus au nom de M. C... B... et de son épouse Mme A... B.... Si c'est à tort que l'administration a indiqué dans la proposition de rectification du 16 janvier 2014 avoir mis en œuvre la procédure de demande de désignation des bénéficiaires des distributions prévue par l'article 117 du code général des impôts, et avoir établi dans le cadre de la procédure de vérification de comptabilité diligentée à l'égard de la société Ates l'appréhension de la somme de 71 200 euros par M. B..., cette erreur est sans incidence sur le bien-fondé des rectifications mises à la charge du contribuable dès lors qu'outre les concordances de chiffres précédemment évoquées, elle a produit les courriers des 1er et 20 février 2013 sur lesquels elle s'est fondée, lesquels établissent la désignation, par le gérant de la société Ates, de M. C... B... en qualité de bénéficiaire de sommes précisément listées en page 17 de la proposition de rectification adressée à la société. Au vu de la teneur des courriers produits et de la correspondance de dates et de montants entre les sommes débitées du compte de la société Ates et celles créditées sur les comptes des époux B..., l'administration rapporte la preuve qui lui incombe de l'appréhension par M. et Mme B... des sommes réputées distribuées qu'elle a réintégrées dans leurs revenus au titre des revenus de capitaux mobiliers.

Sur la majoration de 40 % pour manquement délibéré :

9. Aux termes de l'article 1729 du code général des impôts : " Les inexactitudes ou les omissions relevées dans une déclaration ou un acte comportant l'indication d'éléments à retenir pour l'assiette ou la liquidation de l'impôt ainsi que la restitution d'une créance de nature fiscale dont le versement a été indûment obtenu de l'Etat entraînent l'application d'une majoration de : / a. 40 % en cas de manquement délibéré (...) ". Aux termes de l'article L. 195 A du livre des procédures fiscales : " En cas de contestation des pénalités fiscales appliquées à un contribuable au titre des impôts directs (...) la preuve de la mauvaise foi et des manœuvres frauduleuses incombe à l'administration ".

10. Si M. B... soutient qu'il n'a jamais cherché à dissimuler les sommes qui ont été assorties des pénalités pour manquement délibéré dès lors qu'elles n'ont pas été perçues en liquide, cette circonstance est sans incidence dans la mesure où il ne les a pas déclarées. En outre, ainsi qu'il a été dit au point 6, il n'est pas établi que les sommes en cause correspondraient, ne serait-ce qu'en partie, à des remboursements de frais. Enfin en 2011, les comptes bancaires des époux B... ont été crédités de sommes provenant de la société Ates, dont le fils du requérant est le gérant, pour un montant de plus du double de celui des revenus déclarés. Ces éléments sont de nature à établir le caractère intentionnel de l'absence de déclaration des sommes redressées en 2011 et, par suite, à justifier l'application de la majoration pour manquement délibéré sans que le requérant puisse faire valoir utilement que les impositions supplémentaires mises à sa charge au titre de l'année 2010 ont été entièrement dégrevées.

11. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, les conclusions qu'il présente au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête présentée par M. B... est rejetée.

2

N° 20VE00535


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 20VE00535
Date de la décision : 10/02/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

19-04-01-02-05-02-02 Contributions et taxes. - Impôts sur les revenus et bénéfices. - Règles générales. - Impôt sur le revenu. - Établissement de l'impôt. - Taxation d'office. - Pour défaut de réponse à une demande de justifications (art. L. 16 et L. 69 du livre des procédures fiscales).


Composition du Tribunal
Président : M. BRESSE
Rapporteur ?: Mme Marie-Gaëlle BONFILS
Rapporteur public ?: M. HUON
Avocat(s) : ELBAZ

Origine de la décision
Date de l'import : 22/02/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2022-02-10;20ve00535 ?
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