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24/02/2022 | FRANCE | N°20VE03173

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 3ème chambre, 24 février 2022, 20VE03173


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. E... N'Tchirifou a demandé au tribunal administratif de Cergy-Pontoise d'annuler l'arrêté, en date du 19 février 2018, par lequel le préfet des Hauts-de-Seine a rejeté sa demande de titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination, à titre principal, d'enjoindre au préfet des Hauts-de-Seine de lui délivrer un titre de séjour dans un délai d'un mois à compter de la notification du jugement à intervenir, sous astreinte de

15 euros par jour de retard, et de lui délivrer une autorisation provisoire de s...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. E... N'Tchirifou a demandé au tribunal administratif de Cergy-Pontoise d'annuler l'arrêté, en date du 19 février 2018, par lequel le préfet des Hauts-de-Seine a rejeté sa demande de titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination, à titre principal, d'enjoindre au préfet des Hauts-de-Seine de lui délivrer un titre de séjour dans un délai d'un mois à compter de la notification du jugement à intervenir, sous astreinte de 15 euros par jour de retard, et de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour et de travail dans cette attente, à titre subsidiaire, d'enjoindre au préfet des Hauts-de-Seine de réexaminer sa situation dans un délai d'un mois à compter de la notification du jugement à intervenir et de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour et de travail dans cette attente et, enfin, de mettre à la charge de l'État une somme de 1 500 euros à verser à son conseil, au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique, sous réserve que celui-ci renonce à percevoir la part contributive de l'État au titre de l'aide juridictionnelle.

Par un jugement n° 1901709 du 7 novembre 2019, le tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 9 décembre 2020, M. N'Tchirifou, représenté par Me Paulhac, avocate, demande à la cour :

1° d'annuler ce jugement ;

2° d'annuler l'arrêté du préfet des Hauts-de-Seine du 19 février 2018 ;

3° d'enjoindre au préfet des Hauts-de-Seine, à titre principal de lui délivrer une carte de séjour dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir et, dans l'attente, de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour l'autorisant à travailler, sous astreinte de 15 euros par jour de retard, ou, à titre subsidiaire, de procéder au réexamen de sa demande dans les mêmes conditions de délai et dans l'attente, de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour l'autorisant à travailler ;

4° de mettre à la charge de l'État le versement d'une somme de 1 500 euros à Me Paulhac au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique, sous réserve que Me Paulhac renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'État au titre de l'aide juridictionnelle.

Il soutient que :

- la décision portant refus de séjour est entachée d'incompétence ;

- elle est insuffisamment motivée et entachée d'un défaut d'examen ;

- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation au regard de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- elle méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;

- la décision portant obligation de quitter le territoire français doit être annulée par voie de conséquence de l'illégalité du refus de titre de séjour, méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;

- la décision fixant le pays de renvoi est insuffisamment motivée et doit être annulée par voie de conséquence de l'illégalité de la mesure d'éloignement.

......................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de Mme Deroc a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. N'Tchirifou, ressortissant togolais né le 31 décembre 1961 à Mongo (Togo), a sollicité son admission exceptionnelle au séjour sur le fondement des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Il fait appel du jugement du 7 novembre 2019 par lequel le tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 19 février 2018 par lequel le préfet des Hauts-de-Seine a rejeté sa demande de titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination de la mesure d'éloignement.

Sur la décision portant refus de séjour :

2. En premier lieu, ainsi que l'ont relevé les premiers juges, l'arrêté contesté est revêtu de la signature de M. D... B..., sous-préfet d'Antony et de Boulogne-Billancourt, qui disposait d'une délégation permanente de signature par arrêté n° 2017-66 du préfet des Hauts-de-Seine du 13 octobre 2017 régulièrement publié au recueil des actes administratifs de l'État dans les Hauts-de-Seine du 17 octobre 2017, aux fins de signer notamment " les refus de séjour (...) ". Si M. N'Tchirifou oppose l'absence signature sur l'ampliation de l'arrêté publié au recueil, les seules mentions figurant sur celle-ci suffisent à établir, en l'absence de toute contestation sérieuse sur ce point, que l'original de l'arrêté de délégation comporte bien la signature du préfet de police. Par suite le moyen tiré de ce que la décision lui refusant la délivrance d'un titre de séjour aurait été prise par une autorité incompétente manque en fait et ne peut qu'être écarté.

3. En deuxième lieu et d'une part, M. N'Tchirifou fait valoir que la décision contestée serait insuffisamment motivée en droit en l'absence de précision, dans ses visas, des articles du code des relations entre le public et l'administration. Toutefois, la décision contestée ne trouvant pas son fondement dans ce code, cette circonstance est sans incidence. D'autre part, il fait valoir que la décision contestée serait insuffisamment motivée en fait en ce qu'elle indique qu'il ne justifie, depuis le 20 janvier 2017, " d'aucune activité professionnelle, n'apporte aucune garantie d'insertion économique dans la société française et ne justifie pas de moyens d'existence propres " alors qu'il établit la réalité de la continuité de son insertion professionnelle après cette date. Toutefois, cette circonstance a trait au bien-fondé de l'appréciation portée par le préfet et non au caractère suffisant ou non de sa motivation. S'il fait également valoir une insuffisante motivation en fait dès lors que l'arrêté indique qu'il est " célibataire et sans charge de famille " et qu'il n'est par conséquent pas porté une atteinte disproportionnée à son droit à sa vie privée et familiale, sans détailler ses attaches familiales en France, notamment la présence de sa demie-sœur, le préfet n'était pas tenu de faire état de l'ensemble des éléments de fait relatifs à la situation personnelle de l'intéressé mais seulement de ceux sur lesquels il s'est effectivement fondé pour prendre sa décision. Par suite et dès lors que la décision attaquée comporte l'énoncé des considérations de fait et de droit qui en constituent le fondement, le moyen tiré de ce que la décision contestée ne serait pas motivée manque en fait.

4. En troisième lieu, il ne ressort pas des pièces du dossier, en particulier des mentions de l'arrêté contesté, qui font état d'éléments de fait propres à la situation personnelle de l'intéressé, que le préfet des Hauts-de-Seine n'aurait pas procédé à un examen complet et particulier de la situation du requérant.

5. En quatrième lieu, aux termes de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée aux 1° et 2° de l'article L. 313-10 peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 313-2 (...) ".

6. En présence d'une demande de régularisation présentée, sur le fondement des dispositions précitées, par un étranger qui ne serait pas en situation de polygamie et dont la présence en France ne présenterait pas une menace pour l'ordre public, il appartient à l'autorité administrative de vérifier, dans un premier temps, si l'admission exceptionnelle au séjour par la délivrance d'une carte portant la mention " vie privée et familiale " répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard de motifs exceptionnels, et à défaut, dans un second temps, s'il est fait état de motifs exceptionnels de nature à permettre la délivrance, dans ce cadre, d'une carte de séjour temporaire portant la mention " salarié " ou " travailleur temporaire ".

7. M. N'Tchirifou fait valoir qu'il est entré en France en 2005 et y réside depuis lors, qu'il y a en conséquence fixé ses attaches personnelles et qu'il dispose d'une expérience professionnelle significative dans la mesure où il justifie, par les documents qu'il produit, avoir travaillé de 2016 à 2018. Toutefois, la seule durée de résidence habituelle en France ne saurait, en la supposant même établie, constituer un motif d'admission exceptionnelle au séjour, alors qu'il est constant que l'intéressé est célibataire, sans charge de famille et dispose encore d'attaches familiales dans son pays d'origine où résident sa fratrie et ses trois enfants dont l'un est mineur, et où il a vécu lui-même jusqu'à l'âge de quarante-quatre ans. Par ailleurs, si le préfet des Hauts-de-Seine admet, dans la décision contestée, que l'intéressé a travaillé sous une autre identité comme agent de service du 2 novembre 2015 au 20 janvier 2017, il ressort des pièces du dossier que cet emploi correspondait à un contrat à durée déterminée et ne donnait lieu qu'au versement de rémunérations très limitées, de parfois seulement quelques centaines d'euros. M. N'Tchirifou, ne justifie pas, pour la période postérieure au 20 janvier 2017, d'une intégration professionnelle par la production de documents épars afférents à un emploi auprès de la société EPPSI au titre des seuls mois d'avril 2017, janvier et avril 2018 pour un salaire modique libellés au nom d'un tiers, M. C..., et afférents à un emploi à temps partiel auprès de la société Selsia et à durée déterminée, libellés au nom d'un autre tiers, M. A.... L'attestation de concordance de la société Selsia avec le nom de M. C..., non datée, ni signée est à cet égard dépourvue de valeur probante. Au demeurant, en admettant même qu'ils concernent l'intéressé, ces seuls documents ne suffisent pas à établir l'existence d'un motif d'admission exceptionnelle au titre du travail. Par suite, les moyens tirés de ce que la décision attaquée méconnaîtrait les dispositions précitées et serait entachée d'une erreur manifeste d'appréciation à ce titre doivent être écartés.

8. En cinquième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance (...) ".

9. M. N'Tchirifou fait valoir l'ancienneté de sa résidence en France depuis 2005, le bénéfice de moyens d'existence stables et suffisants entre novembre 2015 et avril 2018 et l'existence attaches familiales sur le territoire français, notamment sa demie-sœur, de sorte que l'ensemble de ses relations professionnelles, familiales et amicales, se trouvent sur le territoire français. Toutefois, pour les mêmes motifs de fait que ceux rappelés au point 7., M. N'Tchirifou n'est pas fondé à soutenir que la décision attaquée méconnaitrait l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ni qu'elle serait entachée d'une erreur manifeste d'appréciation de sa situation personnelle.

Sur la décision portant obligation de quitter le territoire français :

10. En premier lieu, ainsi qu'il a été dit précédemment, la décision de refus de titre de séjour n'étant pas illégale, M. N'Tchirifou n'est pas fondé à demander l'annulation, par voie de conséquence de l'irrégularité de cette décision, de la décision portant obligation de quitter le territoire français.

11. En second lieu, pour les mêmes motifs de fait que ceux rappelés au point 7., les moyens tirés de ce que la décision contestée méconnaîtrait l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et serait entachée d'une erreur manifeste d'appréciation, ne peuvent qu'être écartés.

Sur la décision fixant le pays de renvoi :

12. En premier lieu, la décision vise les textes dont elle fait application et notamment l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ainsi que la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Elle mentionne également que M. N'Tchirifou n'établit pas être exposé à des peines, ou des traitements contraires à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales en cas de retour dans son pays d'origine ou dans son pays de résidence habituelle où il est effectivement admissible. M. N'Tchirifou n'est ainsi pas fondé à soutenir que la décision fixant le pays de destination est insuffisamment motivée, ni que le préfet n'aurait pas procédé à un examen suffisant de sa situation personnelle notamment au regard de l'article 3 de la convention précédemment mentionnée.

13. En second lieu, ainsi qu'il a été dit ci-dessus, les décisions portant refus de séjour et obligation de quitter le territoire français n'étant pas illégales, M. N'Tchirifou n'est pas fondé à demander l'annulation, par voie de conséquence de l'irrégularité de ces décisions, de la décision fixant le pays de destination.

14. Il résulte de tout ce qui précède que M. N'Tchirifou n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande. Ses conclusions à fins d'injonction et d'astreinte ainsi que celles présentées au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ne peuvent, par suite, qu'être rejetées.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. N'Tchirifou est rejetée.

2

N° 20VE03173


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 20VE03173
Date de la décision : 24/02/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-03 Étrangers. - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. BRESSE
Rapporteur ?: Mme Muriel DEROC
Rapporteur public ?: M. HUON
Avocat(s) : PAULHAC

Origine de la décision
Date de l'import : 01/03/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2022-02-24;20ve03173 ?
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