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11/03/2022 | FRANCE | N°19VE03068

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 2ème chambre, 11 mars 2022, 19VE03068


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société Verizon France a demandé au tribunal administratif de Cergy-Pontoise d'annuler les titres exécutoires du 2 juin 2016 et du 3 juillet 2017 par lesquels le département des Hauts-de-Seine a mis à sa charge les sommes de 44 958,96 euros et 44 761,76 euros et de la décharger de l'obligation de payer ces sommes.

Par un jugement n° 1607565-1708935 du 27 juin 2019, le tribunal administratif de Cergy-Pontoise a annulé ces deux titres exécutoires et déchargé la société Verizon France de l'obl

igation de payer les sommes en cause.

Procédure devant la cour :

Par une requêt...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société Verizon France a demandé au tribunal administratif de Cergy-Pontoise d'annuler les titres exécutoires du 2 juin 2016 et du 3 juillet 2017 par lesquels le département des Hauts-de-Seine a mis à sa charge les sommes de 44 958,96 euros et 44 761,76 euros et de la décharger de l'obligation de payer ces sommes.

Par un jugement n° 1607565-1708935 du 27 juin 2019, le tribunal administratif de Cergy-Pontoise a annulé ces deux titres exécutoires et déchargé la société Verizon France de l'obligation de payer les sommes en cause.

Procédure devant la cour :

Par une requête et deux mémoires enregistrés le 27 août 2019, et les 5 novembre et 4 décembre 2020, le département des Hauts-de-Seine, représenté par Me Banel, avocate, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) de rejeter la demande de la société Verizon France ;

3°) de mettre à la charge de la société Verizon France le versement de la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Le département des Hauts-de-Seine soutient que :

- le jugement n'est pas signé par les membres de la formation de jugement et le greffier ;

- il est insuffisamment motivé ;

- c'est à tort que le tribunal a jugé que le département n'était pas compétent pour délivrer les autorisations d'occupation du domaine public en cause et émettre les titres exécutoires litigieux.

.....................................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général de la propriété des personnes publiques ;

- le code des postes et télécommunications électroniques ;

- le décret n° 2005-1676 du 27 décembre 2005 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Colrat,

- les conclusions de Mme Margerit, rapporteure publique,

- les observations de Me Capdebos, substituant Me Peynet, pour le département des Hauts-de-Seine, et de Me Cano pour la société Verizon France.

Une note en délibéré présentée pour la société Verizon France a été enregistrée le 18 février 2022.

Considérant ce qui suit :

1. Aux termes de l'article L. 46 du code des postes et communications électroniques : " Les autorités concessionnaires ou gestionnaires du domaine public non routier, lorsqu'elles donnent accès à des exploitants de réseaux de communications électroniques, doivent le faire sous la forme de convention, dans des conditions transparentes et non discriminatoires et dans toute la mesure où cette occupation n'est pas incompatible avec son affectation ou avec les capacités disponibles. La convention donnant accès au domaine public non routier ne peut contenir de dispositions relatives aux conditions commerciales de l'exploitation. Elle peut donner lieu à versement de redevances dues à l'autorité concessionnaire ou gestionnaire du domaine public concerné dans le respect du principe d'égalité entre les opérateurs. Ces redevances sont raisonnables et proportionnées à l'usage du domaine. / Les autorités concessionnaires ou gestionnaires du domaine public non routier se prononcent dans un délai de deux mois suivant la demande faite par l'exploitant. / Un décret en Conseil d'Etat détermine le montant maximum des redevances assorties à l'occupation du domaine public non routier ". Selon l'article R. 20-51 de ce code, pris pour l'application de ces dispositions : " Le montant des redevances tient compte de la durée de l'occupation, de la valeur locative de l'emplacement occupé et des avantages matériels, économiques, juridiques et opérationnels qu'en tire le permissionnaire (...) ". Aux termes de l'article R. 20-52 du même code, dans sa rédaction issue du décret susvisé du 27 décembre 2005 : " Le montant annuel des redevances, déterminé, dans chaque cas, conformément à l'article R. 20-51, en fonction de la durée de l'occupation, des avantages qu'en tire le permissionnaire et de la valeur locative de l'emplacement occupé, ne peut excéder : (...) II. - Sur le domaine public non routier, à l'exclusion du domaine public maritime (...) c) Sur les autres dépendances du domaine public non routier : / 1° Dans le cas d'une utilisation du sol ou du sous-sol, par kilomètre et par artère : 1 000 Euros ; / 2° Dans les autres cas, par kilomètre et par artère : 1 000 Euros ; / 3° S'agissant des installations autres que les stations radioélectriques : 650 Euros par mètre carré au sol. L'emprise des supports des artères mentionnées aux 1° et 2° ne donne toutefois pas lieu à redevance. /On entend par artère : / a) Dans le cas d'une utilisation du sol ou du sous-sol, un fourreau contenant ou non des câbles, ou un câble en pleine terre ; / b) Dans les autres cas, l'ensemble des câbles tirés entre deux supports. ".

2. En vertu d'une convention conclue le 30 novembre 2007 avec le département des Hauts-de-Seine, la société Verizon France a été autorisée, en vue de l'exploitation d'un réseau de communications électroniques, à occuper des installations du réseau d'assainissement départemental, appartenant au domaine public du département, et ayant fait l'objet d'un traité de concession au profit de la société des eaux de Versailles et de Saint-Cloud (Sevesc) le 30 décembre 1993. Le département a émis le 2 juin 2016 et le 3 juillet 2017 deux titres exécutoires d'un montant de 44 958,96 euros et de 44 761,76 euros à verser par la société Verizon France en contrepartie de l'occupation du domaine public non routier en sous-sol du département pour les années 2016 et 2017. Le département des Hauts-de-Seine fait appel du jugement du 27 juin 2019 par lequel le tribunal administratif de Cergy-Pontoise a annulé ces titres exécutoires et déchargé la société Verizon France de l'obligation de payer les sommes en cause.

3. Aux termes de l'article L. 45-9 du code des postes et communications électroniques: " Les exploitants de réseaux ouverts au public bénéficient d'un droit de passage, sur le domaine public routier et dans les réseaux publics relevant du domaine public routier et non routier, à l'exception des réseaux et infrastructures de communications électroniques, et de servitudes sur les propriétés privées mentionnées à l'article L. 48, dans les conditions indiquées ci-après (...) ". Aux termes de l'article L. 47-1 du même code : " L'autorisation d'occuper les réseaux publics visés à l'article L. 45-9 et appartenant au domaine public routier ou non routier est refusée lorsque l'occupation est incompatible avec l'affectation desdits réseaux ou avec les capacités disponibles. (...) / La convention d'occupation du réseau public ne peut contenir des dispositions relatives aux conditions commerciales de l'exploitation. Elle donne lieu à versement de redevances dues à l'autorité concessionnaire ou gestionnaire du domaine public concerné, dans le respect du principe d'égalité entre tous les opérateurs. Le montant maximum de la redevance applicable est respectivement fixé dans le respect des articles L. 46 et L. 47, selon que le réseau public relève du domaine public non routier ou du domaine public routier. / Lorsque l'autorisation d'occuper le réseau public est consentie par l'autorité visée à l'alinéa précédent, la convention afférente est établie dans un délai de deux mois à compter de ladite autorisation ". Il ne résulte ni de ces dispositions, ni d'aucun texte, que la délégation à un tiers de la gestion du service public exploité au moyen d'un réseau public relevant du domaine public routier ou non entraîne nécessairement, dans le silence de la convention, le transfert au concessionnaire de la compétence pour autoriser l'occupation de ce réseau par les exploitants de réseaux ouverts au public visés au premier alinéa précité de l'article L. 45-9 du code des postes et communications électroniques ainsi que pour fixer et percevoir les redevances correspondantes.

4. Ainsi, le département des Hauts-de-Seine est fondé à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif s'est fondé, pour faire droit aux conclusions de la société Verizon France, sur les motifs tirés, d'une part, de ce qu'en vertu du code des postes et communications électroniques, il n'appartenait qu'à la Sevesc, concessionnaire du service public départemental de l'assainissement et gestionnaire des ouvrages publics nécessaires au bon fonctionnement de ce service en vertu d'un contrat d'affermage conclu le 31 décembre 1993 avec le département des Hauts-de-Seine, d'octroyer les permissions d'occupation du domaine public constitué par le réseau départemental d'assainissement et de percevoir les redevances correspondantes, et, d'autre part, de ce que l'avenant n° 10 du 19 janvier 2014 au contrat d'affermage, par lequel le département et la Sevesc ont convenu que " toute utilisation du patrimoine qui ne répondrait pas aux nécessités du service public de l'assainissement relève de la compétence du département en sa qualité de propriétaire des ouvrages et équipements et autorité organisatrice du service d'assainissement ", n'avait pu légalement confier cette compétence au département. Par suite, le département des Hauts de Seine est fondé, sans qu'il soit besoin de statuer sur sa régularité, à demander l'annulation du jugement attaqué.

5. Il appartient à la Cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner l'autre moyen soulevé par la société Verizon France devant le tribunal administratif de Cergy-Pontoise.

6. Aux termes de l'article L. 46 du code des postes et communications électroniques : " Les autorités concessionnaires ou gestionnaires du domaine public non routier, lorsqu'elles donnent accès à des exploitants de réseaux de communications électroniques, doivent le faire sous la forme de convention, dans des conditions transparentes et non discriminatoires et dans toute la mesure où cette occupation n'est pas incompatible avec son affectation ou avec les capacités disponibles. La convention donnant accès au domaine public non routier ne peut contenir de dispositions relatives aux conditions commerciales de l'exploitation. Elle peut donner lieu à versement de redevances dues à l'autorité concessionnaire ou gestionnaire du domaine public concerné dans le respect du principe d'égalité entre les opérateurs. Ces redevances sont raisonnables et proportionnées à l'usage du domaine. / Les autorités concessionnaires ou gestionnaires du domaine public non routier se prononcent dans un délai de deux mois suivant la demande faite par l'exploitant. / Un décret en Conseil d'Etat détermine le montant maximum des redevances assorties à l'occupation du domaine public non routier ". Selon l'article R. 20-51 de ce code, pris pour l'application de ces dispositions : " Le montant des redevances tient compte de la durée de l'occupation, de la valeur locative de l'emplacement occupé et des avantages matériels, économiques, juridiques et opérationnels qu'en tire le permissionnaire (...) ". Aux termes de l'article R. 20-52 du même code, dans sa rédaction issue du décret susvisé du 27 décembre 2005 : " Le montant annuel des redevances, déterminé, dans chaque cas, conformément à l'article R. 20-51, en fonction de la durée de l'occupation, des avantages qu'en tire le permissionnaire et de la valeur locative de l'emplacement occupé, ne peut excéder : (...) II. - Sur le domaine public non routier, à l'exclusion du domaine public maritime (...) c) Sur les autres dépendances du domaine public non routier : / 1° Dans le cas d'une utilisation du sol ou du sous-sol, par kilomètre et par artère : 1 000 Euros ; / 2° Dans les autres cas, par kilomètre et par artère : 1 000 Euros ; / 3° S'agissant des installations autres que les stations radioélectriques : 650 Euros par mètre carré au sol. L'emprise des supports des artères mentionnées aux 1° et 2° ne donne toutefois pas lieu à redevance. /On entend par artère : / a) Dans le cas d'une utilisation du sol ou du sous-sol, un fourreau contenant ou non des câbles, ou un câble en pleine terre ; / b) Dans les autres cas, l'ensemble des câbles tirés entre deux supports. ".

7. La société Verizon France ne peut se prévaloir du droit de passage institué par l'article L. 45-9 précité du code des postes et des communications électroniques qui est sans influence sur les montants des redevances mises à la charge des sociétés exploitant des réseaux filaires pour l'occupation du domaine public non routier en sous-sol.

8. Il résulte de l'instruction que le département des Hauts-de-Seine a fixé une redevance égale au plafond prévu par le décret du 27 décembre 2005 susvisé. Si la société Verizon France conteste ce montant et soutient qu'il revêt un caractère disproportionné, elle ne conteste pas le montant annuel de 8 millions d'euros exécutés par le département pour l'entretien du réseau d'assainissement dont elle utilise les installations et ne conteste pas que le coût d'installation de son réseau de fibre optique utilisant le réseau d'assainissement lui permet de diviser par cinq les frais qui résulteraient d'une installation sous le domaine public routier soumis par ailleurs à de fréquents travaux qui seraient une source de perturbations pour le fonctionnement de son réseau. Par suite, la société Verizon France ne démontre pas que la redevance mise à sa charge par le département des Hauts-de-Seine atteindrait un niveau manifestement disproportionné au regard des avantages qui lui sont procurés par l'utilisation du domaine public.

9. Il résulte de tout ce qui précède que la demande de la société Colt Technologies Services ainsi que, par voie de conséquence, ses conclusions présentées en appel sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées. Il y a lieu, en revanche, de mettre à la charge de la société Verizon France le versement au département des Hauts-de-Seine de la somme de 2 000 euros au titre des dispositions de cet article.

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Cergy-Pontoise n° 1607565-1708935 du 11 avril 2019 est annulé.

Article 2 : La demande présentée par la société Verizon France devant le tribunal administratif de Cergy-Pontoise, ainsi que ses conclusions présentées en appel sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : La société Verizon France versera au département des Hauts-de-Seine la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

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N° 19VE03068


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 19VE03068
Date de la décision : 11/03/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

24-01-02-01-01-04 Domaine. - Domaine public. - Régime. - Occupation. - Utilisations privatives du domaine. - Redevances.


Composition du Tribunal
Président : M. EVEN
Rapporteur ?: Mme Sophie COLRAT
Rapporteur public ?: Mme MARGERIT
Avocat(s) : SELARL GOUTAL, ALIBERT et ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 22/03/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2022-03-11;19ve03068 ?
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