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12/04/2022 | FRANCE | N°21VE01537

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 1ère chambre, 12 avril 2022, 21VE01537


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... A... a demandé au tribunal administratif de Cergy-Pontoise d'annuler l'arrêté du 6 août 2020 par lequel le préfet du Val-d'Oise a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a décidé qu'il serait remis aux autorités espagnoles à défaut de départ volontaire.

Par un jugement n° 2010140 du 29 avril 2021, le tribunal administratif de Cergy-Pontoise a annulé cet arrêté et enjoint au préfet du Val-d'Oise, ou

au préfet territorialement compétent, de procéder au réexamen de la situation administrativ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... A... a demandé au tribunal administratif de Cergy-Pontoise d'annuler l'arrêté du 6 août 2020 par lequel le préfet du Val-d'Oise a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a décidé qu'il serait remis aux autorités espagnoles à défaut de départ volontaire.

Par un jugement n° 2010140 du 29 avril 2021, le tribunal administratif de Cergy-Pontoise a annulé cet arrêté et enjoint au préfet du Val-d'Oise, ou au préfet territorialement compétent, de procéder au réexamen de la situation administrative de M. A..., dans le délai de deux mois à compter de la notification du jugement, et de munir l'intéressé d'une autorisation provisoire de séjour, dans le délai de sept jours.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 28 mai 2021, le préfet du Val-d'Oise, demande à la cour d'annuler ce jugement.

Il soutient que c'est à tort que le tribunal a fait droit à la demande dès lors qu'il a procédé à un examen particulier de la situation de M. A..., que son arrêté ne porte pas une atteinte excessive à son droit au respect de sa vie privée et familiale, qu'il n'a pas commis d'erreur manifeste d'appréciation et que les autres moyens de la demande de M. A... ne sont pas fondés.

Par un mémoire en défense enregistré le 14 mars 2022, M. A..., représenté par Me Monconduit, conclut au rejet de la requête, à ce qu'il soit enjoint au préfet du Val-d'Oise de lui délivrer un titre de séjour mention " vie privée et familiale ", à l'annulation du jugement en tant qu'il prescrit un réexamen de sa situation et à ce qu'une somme de 2 000 euros soit mise à la charge de l'Etat au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il fait valoir que les moyens de la requête du préfet du Val-d'Oise ne sont pas fondés et que le jugement doit être confirmé ; il justifie de l'ancienneté de son séjour en France ; l'arrêté contesté porte une atteinte caractérisée à sa vie privée et familiale.

Par une ordonnance du 1er mars 2022, la clôture d'instruction a été fixée au 15 mars 2022, en application de l'article R. 613-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code d'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience en application des dispositions de l'article R. 732-1-1 du code de justice administrative.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Dorion ;

- les observations de Me Veillat, substituant Me Monconduit, pour M. A....

Considérant ce qui suit :

1. M. A..., ressortissant marocain né le 14 septembre 1974, entré en France en dernier lieu le 5 janvier 2018 avec un titre de séjour espagnol valable du 25 août 2015 au 23 août 2020, a demandé la délivrance d'un titre de séjour le 24 septembre 2019, sur le fondement du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par un arrêté du 6 août 2020 notifié le 14 août 2020, le préfet du Val-d'Oise a rejeté sa demande, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a décidé qu'il serait remis aux autorités espagnoles à défaut de départ volontaire. Le préfet du Val-d'Oise relève appel du jugement du 29 avril 2021du tribunal administratif de Cergy-Pontoise a annulé son arrêté du 6 août 2020 et lui a enjoint de réexaminer la situation de M. A... dans un délai de deux mois.

2. Aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 313-2 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République ; (...) ".

Sur l'appel principal du préfet du Val-d'Oise :

3. En premier lieu, pour rejeter la demande de titre de séjour mention " vie privée et familiale " présentée par M. A..., le préfet du Val-d'Oise s'est fondé sur la circonstance, que celui-ci, célibataire sans enfant, n'est pas dépourvu d'attaches dans son pays d'origine où réside une partie de sa fratrie et où lui-même a vécu jusqu'à l'âge de 44 ans. Il ressort toutefois des pièces du dossier que ces circonstances de fait sont erronées, tant en ce qui concerne les attaches familiales de M. A... que l'âge auquel il a quitté son pays d'origine dès lors, d'une part, que M. A... avait mentionné dans sa fiche de salle que son frère cadet de nationalité belge réside en Belgique, que ces deux sœurs de nationalité marocaine résident l'une en Espagne, l'autre en situation régulière en France, et que le benjamin de sa fratrie est français, d'autre part, que le préfet n'ignorait pas que M. A... réside régulièrement depuis au moins 2015 en Espagne, pays qui lui a délivré un permis de résidence de longue durée et à destination duquel l'arrêté en litige prescrit son éloignement. En outre, l'intéressé peut se prévaloir d'autres attaches personnelles et familiales en France, telles que la nationalité française de son père et le séjour régulier de sa mère en France, de ses liens anciens avec la France dont il avait fait déjà état à l'appui d'une demande d'admission exceptionnelle au séjour présentée en 2014 et de la circonstance qu'il est propriétaire depuis 2002 pour moitié d'une boutique de taxiphone à Argenteuil, et gérant depuis 2003 de la SARL Champioux.com qui l'exploite. Dans ces conditions, le tribunal a, à bon droit, estimé que la demande de M. A... n'avait pas fait l'objet d'un examen particulier suffisamment approfondi.

4. En second lieu, en annulant l'arrêté contesté pour le motif rappelé au point précédent, et en enjoignant au préfet du Val-d'Oise de réexaminer la situation de M. A..., le tribunal n'a pas préjugé de l'appréciation, à laquelle il appartient au préfet de procéder à nouveau en exécution du jugement attaqué, de la situation personnelle et familiale de M. A... et de l'atteinte susceptible d'être portée par un refus de séjour et une mesure d'éloignement au droit de M. A... au respect de sa vie personnelle et familiale. Le moyen tiré de ce que l'ancienneté, l'intensité et la stabilité des liens personnels et familiaux de M. A... en France ne justifieraient pas la délivrance du titre sollicité au regard, tant des dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers en France et des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, que de l'article L. 313-14 du même code, ne peut qu'être écarté, de même que le moyen tiré de ce que l'arrêté contesté ne serait pas entaché d'une erreur manifeste d'appréciation.

Sur l'appel incident de M. A... :

5. Aux termes de l'article 911-1 du code de justice administrative : " Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne à nouveau une décision après une nouvelle instruction, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision juridictionnelle, que cette nouvelle décision doit intervenir dans un délai déterminé. "

6. M. A... demande la réformation du jugement attaqué en tant qu'il a enjoint au préfet du Val-d'Oise de réexaminer sa situation et demande qu'il lui soit enjoint de lui délivrer un titre de séjour mention " vie privée et familiale ". Il résulte de ce qui a été dit aux points 3 et 4 qu'il appartient au préfet d'examiner à nouveau la situation de M. A.... En l'état du dossier, le présent arrêt n'implique pas, en revanche, que le préfet du Val-d'Oise délivre à M. A... un titre de séjour. Ces conclusions doivent dès lors être rejetées.

7. Il résulte de ce qui précède que le préfet du Val-d'Oise n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Cergy-Pontoise a annulé son arrêté du 6 août 2020 et lui a enjoint de réexaminer la situation de M. A... dans un délai de deux mois. Sa requête d'appel et les conclusions présentées à titre incident par M. A... doivent être rejetées. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 800 euros au profit de M. A... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

DECIDE :

Article 1er : La requête du préfet du Val-d'Oise est rejetée.

Article 2 : L'Etat versera la somme de 800 euros à M. A... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'intérieur et à M. C... A.... Copie en sera adressée au préfet du Val-d'Oise.

Délibéré après l'audience du 29 mars 2022, à laquelle siégeaient :

M. Beaujard, président de chambre,

Mme Dorion, présidente-assesseure,

M. Bouzar, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 12 avril 2022.

La rapporteure,

O. DORION Le président,

P. BEAUJARD

La greffière,

M. B...

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour exécution conforme,

La greffière,

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 21VE01537
Date de la décision : 12/04/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03 Étrangers. - Séjour des étrangers. - Refus de séjour.


Composition du Tribunal
Président : M. BEAUJARD
Rapporteur ?: Mme Odile DORION
Rapporteur public ?: M. MET
Avocat(s) : LEXGLOBE SELARL CHRISTELLE MONCONDUIT

Origine de la décision
Date de l'import : 19/04/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2022-04-12;21ve01537 ?
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