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07/06/2022 | FRANCE | N°21VE00310

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 1ère chambre, 07 juin 2022, 21VE00310


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société Ligase a demandé au tribunal administratif de Versailles de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des exercices clos les 31 mai et 31 décembre 2013.

Par un jugement n° 1805660 du 4 décembre 2020, le tribunal administratif de Versailles a réduit sa base d'imposition à l'impôt sur les sociétés au titre de l'exercice clos le 31 mai 2013 de de la somme de 7 590 euros, l'a d

chargée de la cotisation supplémentaire de l'impôt sur les sociétés à laquelle elle a ét...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société Ligase a demandé au tribunal administratif de Versailles de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des exercices clos les 31 mai et 31 décembre 2013.

Par un jugement n° 1805660 du 4 décembre 2020, le tribunal administratif de Versailles a réduit sa base d'imposition à l'impôt sur les sociétés au titre de l'exercice clos le 31 mai 2013 de de la somme de 7 590 euros, l'a déchargée de la cotisation supplémentaire de l'impôt sur les sociétés à laquelle elle a été assujettie au titre de l'exercice clos le 31 mai 2013 à hauteur de cette réduction et a rejeté le surplus des conclusions de sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et des mémoires, enregistrés le 3 février 2021, le 1er avril 2021 et le 5 novembre 2021, la société Ligase, représentée par Me Hémery, Me Thomas-Raquin et Me Le Guerer, avocats, demande à la cour :

1° d'annuler le jugement attaqué en ce qu'il a rejeté le surplus des conclusions de sa requête ;

2° de prononcer la décharge des impositions restant en litige ;

3° de mettre à la charge de l'État la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le jugement attaqué est irrégulier en ce qu'il n'est pas signé ;

- la procédure d'imposition est irrégulière, dès lors qu'il ressort des termes de l'avis de vérification de comptabilité que cette vérification portait sur ses résultats à l'impôt sur les sociétés au titre de l'exercice 2015, alors que celui-ci n'était pas encore clos ;

- l'article L. 48 du livre des procédures fiscales a été méconnu en l'absence, dans la décision d'admission partielle du 8 juin 2018, de notification des conséquences financières du contrôle ;

- l'administration a rejeté à tort la provision de 200 000 euros constituée par elle, qui correspondait au caractère douteux de la créance qu'elle détenait sur la société Millinvest ;

- les charges correspondant aux indemnités kilométriques, aux frais de carburant, aux frais de péage, aux autres frais liés au déplacement, aux frais de réception et aux cadeaux clients sont déductibles, dès lors que l'administration était prête à transiger sur ces charges, que l'avis de la commission départementale des impôts est en faveur de cette déduction et que les exigences de l'administration concernant leur justification sont exorbitantes ;

- les travaux réalisés sur la brasserie " Les Terrasses " constituent, étant donné le caractère modique de leur prix, de simple travaux de conservation et d'entretien, en vue de maintenir des locaux adaptés aux prestations fournies ;

- l'annulation des dettes fournisseurs à hauteur de 102 303,45 euros HT ne correspond pas à un produit exceptionnel, mais au fait que ses associés se sont substitués à elle pour le paiement de certaines de ses dettes fournisseurs, ce qui justifie que leur compte-courant d'associé ait été crédité d'autant ;

- les pénalités sont illégales, dès lors que l'administration n'a pas établi son intention délibérée d'éluder l'impôt.

Par un mémoire en défense, enregistré le 7 septembre 2021, le ministre de l'économie, des finances et de la relance conclut au rejet de la requête.

Il fait valoir que les moyens soulevés par la société Ligase ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Pham, première conseillère,

- et les conclusions de M. Met, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. La société Ligase, qui a pour associés à parts égales M. A... E... et M. B... C..., et qui exerce une activité de gestion immobilière et de location de matériel, a demandé la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie à la suite d'une vérification de comptabilité, au titre des exercices clos les 31 mai et 31 décembre 2013, pour un montant total de 147 019 euros. Par un jugement n° 1805660 du 4 décembre 2020, le tribunal administratif de Versailles a réduit sa base d'imposition à l'impôt sur les sociétés au titre de l'exercice clos le 31 mai 2013 de de la somme 7 590 euros, l'a déchargée de la cotisation supplémentaire de l'impôt sur les sociétés à laquelle elle a été assujettie au titre de l'exercice clos le 31 mai 2013 à hauteur de cette réduction et a rejeté le surplus des conclusions de sa demande. La société Ligase fait appel de ce jugement en ce qu'il a rejeté le surplus des conclusions de sa demande.

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Le dossier de première instance comprend la minute signée du jugement attaqué. Par suite, il y a lieu d'écarter le moyen tiré de l'irrégularité de ce jugement en l'absence de signature.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

En ce qui concerne la régularité de la procédure d'imposition :

3. En premier lieu, aux termes de l'article L. 47 du livre des procédures fiscales : " Un examen contradictoire de la situation fiscale personnelle d'une personne physique au regard de l'impôt sur le revenu, une vérification de comptabilité ou un examen de comptabilité ne peut être engagé sans que le contribuable en ait été informé par l'envoi ou la remise d'un avis de vérification ou par l'envoi d'un avis d'examen de comptabilité. / Cet avis doit préciser les années soumises à vérification et mentionner expressément, sous peine de nullité de la procédure, que le contribuable a la faculté de se faire assister par un conseil de son choix. ". La société Ligase soutient, dans ses écritures d'appel, que par l'avis de vérification de comptabilité du 24 juillet 2015, qui indique que la période vérifiée s'étend du 1er juin 2012 au 30 avril 2015, l'administration a manifesté son intention d'examiner les résultats imposables à l'impôt sur les sociétés de l'exercice clos en 2015, alors que cet exercice n'était pas encore clôturé. Ce moyen est cependant inopérant, dès lors qu'il n'a été procédé à aucune rectification à l'impôt sur les sociétés au titre de l'exercice clos en 2015, seule la taxe sur la valeur ajoutée ayant fait l'objet d'un contrôle au titre de la période courant du 1er janvier au 30 avril 2015.

4. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 48 du livre des procédures fiscales : " A l'issue d'un examen contradictoire de la situation fiscale personnelle au regard de l'impôt sur le revenu, d'une vérification de comptabilité ou d'un examen de comptabilité, lorsque des rectifications sont envisagées, l'administration doit indiquer, avant que le contribuable présente ses observations ou accepte les rehaussements proposés, dans la proposition prévue au premier alinéa de l'article L. 57 ou dans la notification mentionnée à l'article L. 76, le montant des droits, taxes et pénalités résultant de ces rectifications. Lorsqu'à un stade ultérieur de la procédure de rectification contradictoire l'administration modifie les rehaussements, pour tenir compte des observations et avis recueillis au cours de cette procédure, cette modification est portée par écrit à la connaissance du contribuable avant la mise en recouvrement, qui peut alors intervenir sans délai ". Ces dispositions, qui exigent que les modifications de rehaussements soient portées par écrit à la connaissance du contribuable avant la mise en recouvrement, ne sont pas applicables à la décision d'admission partielle du 8 juin 2018, intervenue postérieurement au recouvrement des impositions litigieuses. Par suite, le moyen tiré de ce que la décision d'admission partielle du 8 juin 2018 ne comporte par les nouvelles conséquences financières du contrôle doit être écarté.

En ce qui concerne le bien-fondé des impositions :

S'agissant de la réintégration d'un produit exceptionnel de 86 199 euros dans le résultat d'imposable de l'exercice clos le 31 décembre 2013 :

5. Aux termes de l'article 1134 du code civil : " Les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites. / Elles ne peuvent être révoquées que de leur consentement mutuel, ou pour les causes que la loi autorise. / Elles doivent être exécutées de bonne foi. ". Dans le cas d'une cession de dettes d'une société à son associé, dès lors que, en vertu de l'article 1134 du code civil, les actes par lesquels un nouveau débiteur accepte d'être substitué au débiteur initial est laissé à la libre convention des deux parties, la société peut établir, par tout moyen de preuve, que les sommes créditées sur le compte courant de son associé peuvent être regardées comme la contrepartie du transfert de charge relatif au paiement de la dette.

6. En l'espèce, à la suite de la vérification de comptabilité de la société Ligase, l'administration fiscale a constaté que celle-ci avait, à la clôture de l'exercice du 31 décembre 2013, soldé des dettes vis-à-vis de fournisseurs, inscrites à son passif pour un montant de 102 303,45 euros toutes taxes comprises, soit 86 199,66 euros hors taxe, en créditant du même montant le compte courant de deux associés à parts égales de 51 151,72 euros. L'administration a considéré que la somme de 89 199,66 euros devait être regardée comme un produit exceptionnel qu'elle a réintégré au résultat imposable de la société au titre de l'exercice clos le 31 décembre 2013. En appel, la société Ligase produit un courrier du 17 mai 2013 de la SARL Le jardin de Grigny, son ancienne dénomination, proposant à la société AD BAT que ses associés se substituent à elle comme débiteurs de la créance détenue par cette dernière société à son encontre, cette proposition étant acceptée.

7. Si l'administration fiscale ne peut utilement remettre en cause la validité de cet acte au motif qu'il ne remplit pas les formalités de l'article 1690 du code civil, dès lors que ces dispositions sont applicables aux seules cessions de créance, mais non aux cessions de dette, cette substitution de créanciers n'a fait l'objet d'aucune décision d'assemblée générale de la société Ligase. En outre, il ressort de la proposition de rectification du 15 décembre 2015 que les dettes annulées ne concernaient la société AD Bat qu'à hauteur de 64 813,63 euros TTC. En l'absence de documents établissant la substitution de créanciers pour les autres dettes annulées, qui concernent quatre autres sociétés tierces, ainsi que de toute décision d'assemblée générale, l'inscription de la somme de 51,151,25 euros au crédit de chaque compte courant d'associé apparait injustifiée. Il s'ensuit que l'administration était fondée à réintégrer la somme de 89 199,66 euros au résultat imposable de la société au titre de l'exercice clos le 31 décembre 2013.

S'agissant de la provision pour dépréciation de créance :

8. Aux termes de l'article 39 du code général des impôts, applicable pour la détermination de l'impôt sur les sociétés en vertu de l'article 209 du même code : " 1. Le bénéfice net est établi sous déduction de toutes charges, celles-ci comprenant, sous réserve des dispositions du 5, notamment : / (...) 5° Les provisions constituées en vue de faire face à des pertes ou charges nettement précisées et que des événements en cours rendent probables, à condition qu'elles aient été effectivement constatées dans les écritures de l'exercice (...) ". Il résulte de ces dispositions qu'une entreprise peut valablement porter en provisions et déduire des bénéfices imposables d'un exercice des sommes correspondant à des pertes ou charges qui ne seront supportées qu'ultérieurement par elle, à la condition que ces pertes ou charges soient nettement précisées quant à leur nature et susceptibles d'être évaluées avec une approximation suffisante, qu'elles apparaissent comme probables eu égard aux circonstances constatées à la date de clôture de l'exercice et qu'elles se rattachent aux opérations de toute nature déjà effectuées, à cette date, par l'entreprise. Par ailleurs, en vertu des règles gouvernant l'attribution de la charge de la preuve devant le juge administratif, applicables sauf loi contraire, il incombe, en principe, à chaque partie d'établir les faits nécessaires au succès de sa prétention, les éléments de preuve qu'une partie est seule en mesure de détenir ne sauraient être réclamés qu'à celle-ci. Il appartient, dès lors, au contribuable de justifier tant du montant des provisions qu'il entend déduire du bénéfice net défini à l'article 38 du code général des impôts que de la correction de leur inscription en comptabilité, c'est-à-dire du principe même de leur déductibilité.

9. Par contrat en date du 20 juin 2012, la société Ligase a prêté la somme de 300 000 euros à la société Millinvest, dont M. C... est associé à hauteur de 99 % des parts. Ce prêt avait pour objet de financer l'achat d'un bien immobilier à Antibes et sa rénovation par la société Millinvest en vue de sa revente, son remboursement devant intervenir en une seule fois, à la date de revente du bien, et au plus tard le 31 décembre 2013. Par courrier du 2 juillet 2013 remis en mains propres à la société Ligase, la société Millinvest lui a fait part du surcoût des travaux réalisés sur cet immeuble, du retard pris sur le chantier, des problèmes de financement qu'elle connaissait et de la baisse du marché immobilier depuis la fin de l'année 2012, rendant les perspectives de revente difficiles. Il a alors été convenu que la société Millinvest ne verserait le 31 décembre 2013 que la somme de 100 000 euros au titre du prêt consenti, le remboursement du solde étant différé à la date de revente, qui n'a pu être fixée par la société Millinvest.

10. La société Ligase a constitué le 31 mai 2013 une provision à hauteur de 200 000 euros sur l'exercice clos le 31 mai 2013 pour dépréciation de créances détenues sur la société Millinvest. Elle soutient que la perte de sa créance à hauteur de 200 000 euros était probable à la date du 31 mai 2013 en se prévalant du surcoût de plus de 600 000 euros des travaux sur le bien immobilier d'Antibes, de la vente de ce bien avec une moins-value de 400 000 euros, ainsi que des circonstances invoquées par la société Millinvest dans son courrier du 2 juillet 2013 en faisant valoir que ces circonstances étaient connues par elle dès le 31 mai 2013 en raison du fait que M. C... était un de ses deux associés.

11. D'une part, la société Ligase n'a produit aucun document établissant la réalité du surcoût des travaux ou des problèmes de financement que la société Millinvest aurait connus. La déclaration d'impôt sur les sociétés de la société Millinvest pour l'année 2016, qui indique un bilan d'actif de 956 000 euros au 31 décembre 2014, ne permet pas d'établir que cette somme correspondrait aux travaux engagés sur l'immeuble d'Antibes seul.

12. D'autre part, la société Ligase ne démontre pas que, quand bien même l'immeuble d'Antibes aurait été vendu à perte, le remboursement du solde du prêt, d'une valeur de 200 000 euros, serait improbable, alors que ce remboursement a été différé au moment de la vente de l'immeuble qui est finalement survenue en 2016, que l'immeuble a été vendu au prix de 1 250 000 euros et que le bilan de l'exercice clos au 31 décembre 2013 de la société Millinvest, qui n'était pas en situation de cessation de paiement au 31 mai 2013, fait apparaître un total d'actif de 1 902 558 euros et un passif exigible de 1 164 059 euros.

13. Enfin, il résulte des termes de la proposition de rectification du 15 décembre 2015 que l'article 3 du contrat de prêt prévoyait, à titre de garantie, la possibilité de lever une hypothèque en cas de non-respect du contrat de prêt. Or, la société Ligase n'a pas levé d'hypothèque quand, par courrier du 2 juillet 2013, la société Millinvest l'a informée qu'elle ne serait pas en mesure de revendre l'immeuble au 31 décembre 2013 et donc d'honorer l'échéance prévue pour le remboursement du prêt. Il s'ensuit qu'elle n'a pas mis en œuvre tous les moyens à sa disposition pour recouvrer sa créance.

14. Dans ces conditions, et en dépit de l'avis rendu par la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires, le 17 octobre 2016, c'est à bon droit que l'administration a réintégré cette somme dans les résultats imposables de la SAS Ligase au titre des exercices en litige.

15. Par ailleurs, si la société Ligase soutient qu'elle a repris la provision litigieuse au titre de l'exercice clos en 2016, si bien que le maintien des rehaussements a entraîné pour elle une double imposition, ce moyen est sans incidence sur le présent litige, qui concerne les exercices clos en 2013.

S'agissant de l'actif déduit en charge :

16. Aux termes du 2 de l'article 38 du code général des impôts : " Le bénéfice net est constitué par la différence entre les valeurs de l'actif net à la clôture et à l'ouverture de la période dont les résultats doivent servir de base à l'impôt diminuée des suppléments d'apport et augmentée des prélèvements effectués au cours de cette période par l'exploitant ou par les associés. L'actif net s'entend de l'excédent des valeurs d'actif sur le total formé au passif par les créances des tiers, les amortissements et les provisions justifiés. " et aux termes du 1 de l'article 39 du même code : " Le bénéfice net est établi sous déduction de toutes charges, celles-ci comprenant, sous réserve des dispositions du 5, notamment : / 1° Les frais généraux de toute nature (...) ". Pour l'application des dispositions précitées du 1° du 1 de l'article 39 précité, seuls peuvent être compris dans les frais généraux et constituer des charges d'un exercice déterminé les travaux de réparation et d'entretien qui concourent à maintenir en état d'usage ou de fonctionnement les différents éléments de l'actif immobilisé de l'entreprise. En revanche les dépenses qui entraînent normalement une augmentation de la valeur pour laquelle un élément immobilisé figure au bilan de l'entreprise ou qui ont pour objet de prolonger de manière notable la durée probable d'utilisation d'un élément de cette nature ne peuvent être portées en frais généraux.

17. La requérante a acquis, le 27 mars 2013, dans un ensemble immobilier à Evry (91), un café brasserie pour un montant de 400 000 euros et le bien a été donné en location à la Sarl DLM dont M. C... est le gérant depuis janvier 2013, et qui y exerce une activité de restauration. La société Ligase a comptabilisé l'intégralité des travaux effectués à la suite de cette acquisition pour un montant total de 51 314,30 euros réparti sur les trois exercices clos au 31 mai 2013, 31 décembre 2013 et 31 décembre 2014. Le service a considéré que ces dépenses s'inscrivaient en totalité dans le cadre d'une opération globale de réaménagement et de rénovation du bien, ayant pour effet l'augmentation de la valeur de l'actif et a refusé leur déduction du bénéfice imposable de la société en tant que charges. Il résulte de l'instruction que le litige ne porte plus, en raison de l'acceptation partielle des rectifications par la requérante, et de l'admission en charges de certaines de ces dépenses par le jugement attaqué, dont le ministre ne relève pas appel, que sur les sommes de 10 942 euros au titre de l'exercice clos le 31 décembre 2013 et 5 795 euros au titre de l'exercice clos le 31 décembre 2013. Il ressort de l'annexe 9 à la proposition de rectification du 15 décembre 2015 que ces sommes correspondent au coût des travaux de remise en état, de restructuration et d'évacuation de la cuisine et des toilettes, de réfection d'un plancher, ainsi que des fournitures afférentes. De tels travaux ne constituent pas de simples travaux d'entretien ou de réparation, mais entraînent normalement une augmentation de la valeur de l'actif immobilisé et ont pour objet de prolonger de manière notable la durée probable de son utilisation. La société Ligase ne peut en tout état de cause tirer argument de leur modicité par rapport au prix de l'actif, dès lors que le coût global de l'ensemble des travaux s'est élevé à 51 314,30 euros. Par suite, il y a lieu d'écarter le moyen avancé.

S'agissant des autres charges des exercices clos les 31 mai et 31 décembre 2013 :

18. La société Ligase ne peut utilement se prévaloir de la proposition de transaction de l'administration concernant les frais de réception, ni de l'avis du 17 octobre 2016 de la commission départementale des impôts, qui aurait proposé d'admettre la déductibilité des frais de réception à hauteur d'un certain pourcentage. Par ailleurs, contrairement à ce que soutient la requérante, l'administration n'a pas fait peser sur elle une exigence hors des usages professionnels en vigueur en lui demandant d'indiquer, pour chaque charge examinée, son objet et sa destination, ainsi que de produire, elle seule pouvant le faire, les justificatifs afférents tout en lui laissant le choix quant à la nature des documents justificatifs à présenter.

19. En premier lieu, l'administration a rejeté la déductibilité en charges, au titre des exercices clos les 31 mai et 31 décembre 2013, des dépenses de déplacement en dehors du ressort des clients de la société, basés entre Evry et Grigny, correspondant à des indemnités kilométriques, à des frais de péage, à des frais de carburant et à des frais de transport vers les aéroport d'Orly et de Roissy. Pour justifier de l'intérêt de ces dépenses, la société Ligase a seulement produit des documents faisant état de la construction d'une villa à Mandelieu La Napoule mais qui, concernant une société tierce, ne la mentionnent aucunement. Aucun autre document, tel qu'un mail commercial ou une étude de marché, n'a été fourni alors que la société Ligase soutenait que certains de ces déplacements avaient été effectués afin de démarcher des clients ou de rechercher une implantation nouvelle pour sa société. Enfin, si la société Ligase a également invoqué une recherche de clients pour la société TRDS, aucun contrat de prospection commerciale n'a été passé avec cette société, qui a les mêmes associés que la société Ligase. Au vu de ces éléments, c'est à bon droit que l'administration a considéré que lesdites dépenses n'avaient pas été exposées dans l'intérêt de la société Ligase et les a exclues des charges déductibles de l'entreprise au titre des exercices clos les 31 mai et 31 décembre 2013.

20. En deuxième lieu, la société requérante n'apportant pas d'éléments nouveaux concernant les frais de réception, il y a lieu d'écarter ce moyen par adoption des motifs retenus par les premiers juges.

21. En dernier lieu, pour contester le rejet des frais de cadeaux, le vérificateur a relevé que la plupart des destinataires de ces cadeaux n'ont pas été identifiés, que le lien avec d'autres, tels que la société France Telecom, n'est pas établi, et que l'envoi d'une à six caisses de champagne à certains de ses prestataires n'était pas justifié. L'administration fiscale a également relevé que certains cadeaux étaient manifestement injustifiés, tels que l'achat d'un bracelet en or pour l'anniversaire de M. D... E... ou d'un châle pour Mme C.... En se bornant à affirmer que la liste des destinataires des cadeaux a été adressée à l'administration fiscale et que le bracelet en or était destiné à son unique client, alors que M. D... E... a manifestement des liens familiaux avec M. A... E..., gérant associé de la société Ligase, ainsi que des intérêts communs dès lors qu'ils sont associés dans d'autres sociétés, et que le cadeau constitué par un bracelet en or revêt, par sa nature, un caractère personnel, la société requérante ne conteste pas utilement ces constatations. Par ailleurs, il résulte de l'instruction que les seules sociétés clientes de la SAS Ligase qui sont destinataires de caisses de champagne, à savoir la SARL DLM et la SASU TRDS, sont également contrôlées par M. E... et M. C.... Il suit de là que c'est à bon droit que le service a exclu ces dépenses des charges déductibles de l'entreprise au titre des exercices clos les 31 mai et 31 décembre 2013.

En ce qui concerne les pénalités :

22. Les pénalités n'ont été appliquées qu'à la rectification relative au produit exceptionnel. Il résulte de ce qui a été dit au point 7 ci-dessus, ainsi que du fait que la gestion de la société Ligase a bénéficié des conseils de deux experts comptables dont les prestations ont été simultanées et régulières sur la période vérifiée, que c'est de façon délibérée que l'annulation des dettes fournisseurs a servi à diminuer le bénéfice de l'exercice clos le 31 décembre 2013 et à enrichir les associés, d'abord en inscrivant la somme de 51 015 euros au crédit de leur compte courant, puis en augmentant la valeur de leur participation au sein de la société Ligase. Par suite, l'administration fiscale établissant l'intention délibérée de la SAS Ligase d'éluder l'impôt, le moyen tiré de ce que les pénalités ne sont pas fondées doit être écarté.

23. Il résulte de tout ce qui précède que la société Ligase n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande. Ses conclusions doivent ainsi être rejetées, y compris celles présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

DECIDE :

Article 1er : La requête de la société Ligase est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la société Ligase et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.

Délibéré après l'audience du 24 mai 2022, à laquelle siégeaient :

M. Beaujard, président de chambre,

Mme Dorion, présidente assesseure,

Mme Pham, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 7 juin 2022.

La rapporteure,

C. PHAM Le président,

P. BEAUJARD

La greffière,

C. FAJARDIE

La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la production industrielle et numérique en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme

La greffière,

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N° 21VE00310


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