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22/12/2022 | FRANCE | N°20VE01315

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 6ème chambre, 22 décembre 2022, 20VE01315


Vu la procédure suivante :

Par une requête, enregistrée le 27 mai 2020 sous le numéro 20VE01315 et des mémoires, enregistrés le 1er juillet 2020, le 25 juin 2021 et 6 janvier 2022, la société Auchan Supermarché, représentée par Me Encinas, avocate, demande à la cour :

1°) d'annuler l'arrêté portant permis de construire délivré par le maire de Meulan-en-Yvelines sous le n° PC 078 401 19 Y0006 le 19 février 2020, en ce qu'il tient lieu d'autorisation d'exploitation commerciale ;

2°) de mettre à la charge de la commune de Meulan-en-Yvelines et de l'Etat l

a somme de 1 500 euros, à lui verser en application des dispositions de l'article L. 7...

Vu la procédure suivante :

Par une requête, enregistrée le 27 mai 2020 sous le numéro 20VE01315 et des mémoires, enregistrés le 1er juillet 2020, le 25 juin 2021 et 6 janvier 2022, la société Auchan Supermarché, représentée par Me Encinas, avocate, demande à la cour :

1°) d'annuler l'arrêté portant permis de construire délivré par le maire de Meulan-en-Yvelines sous le n° PC 078 401 19 Y0006 le 19 février 2020, en ce qu'il tient lieu d'autorisation d'exploitation commerciale ;

2°) de mettre à la charge de la commune de Meulan-en-Yvelines et de l'Etat la somme de 1 500 euros, à lui verser en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

La société Auchan Supermarché soutient que :

- elle a un intérêt à agir ;

- l'avis de la commission nationale d'aménagement commercial est entaché d'un vice de procédure, car les membres n'ont pas été régulièrement convoqués ;

- en vertu de l'article L. 751-1 du code de commerce, le projet entre dans le champ d'application des critères de l'article L. 752-6 du même code ;

- la commission nationale d'aménagement commercial a commis une erreur d'appréciation au regard du critère d'aménagement du territoire ;

- la commission nationale d'aménagement commercial a commis une erreur d'appréciation au regard du critère de développement durable ;

- la commission nationale d'aménagement commercial a commis une erreur d'appréciation au regard du critère de la protection des consommateurs.

Par des mémoires en défense, enregistrés le 4 août 2020, 8 août 2021 et le 9 février 2022, la société Lidl, représentée par Me Robbes, avocate, conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 5 000 euros soit mise à la charge de la société Auchan Supermarché en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

La société Lidl soutient que les moyens de la requérante ne sont pas fondés.

La commission nationale d'aménagement commercial a produit des pièces enregistrées au greffe de la cour le 2 septembre 2020.

Vu :

- les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code de commerce ;

- le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Viseur-Ferré, rapporteure,

- les conclusions de Mme Moulin-Zys, rapporteure publique,

- les observations de Me Encinas pour la société Auchan Supermarché et de Me Fromentin pour la société Lidl.

Considérant ce qui suit :

1. La société Lidl exploite depuis 2010 un magasin situé rue des Aulnes à Meulan-en-Yvelines d'une surface de vente de 750 mètres carrés. En 2017 elle a présenté un projet de démolition et reconstruction de ce bâtiment qui avait fait l'objet d'un avis favorable de la commission départementale d'aménagement commercial, auquel elle a renoncé en raison d'interrogations du département des Yvelines sur l'accessibilité du projet et d'interrogations sur le raccordement en électricité de la part du gestionnaire de réseau. Un deuxième projet répondant à ces interrogations a été présenté en 2018 et a également fait l'objet d'un avis favorable de la commission départementale d'aménagement commercial. Cependant la commission nationale d'aménagement commercial a émis un avis défavorable au projet le 25 octobre 2018. La société Lidl a déposé, le 5 juin 2019, une demande de permis de construire valant autorisation d'exploitation commerciale, relative à la démolition et reconstruction sur le territoire de la commune de Meulan-en-Yvelines, d'une surface commerciale portant la surface de vente de 750 mètres carrés à 1 438 mètres carrés. La commission départementale d'aménagement commercial a rendu un avis favorable sur ce projet le 9 septembre 2019. Saisie par la société Auchan Supermarché, exploitant un magasin situé sur la commune voisine de Tessancourt, la commission nationale d'aménagement commercial (CNAC) a rendu également un avis favorable le 3 décembre 2019. Par un arrêté du 19 février 2020, le maire de Meulan-en-Yvelines a délivré le permis de construire valant autorisation d'exploitation commerciale demandée par la société Lidl. La société Auchan Supermarché demande à la cour d'annuler cet arrêté en tant qu'il vaut autorisation d'exploitation commerciale.

Sur les conclusions à fin d'annulation :

En ce qui concerne la procédure devant la commission nationale d'aménagement commercial :

2. Aux termes de l'article R. 732-5 du code de commerce " La commission nationale se réunit sur convocation de son président. Cinq jours au moins avant la réunion, chacun des membres reçoit, par tout moyen, l'ordre du jour ainsi que, pour chaque dossier : 1° L'avis ou la décision de la commission départementale ; 2° Le procès-verbal de la réunion de la commission départementale ; 3° Le rapport des services instructeurs départementaux ; 4° Le ou les recours à l'encontre de l'avis ou de la décision ; 5° Le rapport du service instructeur de la commission nationale ".

3. Il ressort des pièces du dossier que les membres de la commission nationale d'aménagement commercial ont été convoqués le 19 novembre 2019 pour la réunion programmée le 3 décembre suivant. Cette convocation informait les membres de l'ordre du jour, ainsi que de la disponibilité des documents listés par les dispositions précitées de l'article R. 732-5 du code de commerce sur la plateforme de téléchargement de la commission, au moins cinq jours avant la réunion. Il ressort également des pièces du dossier que le dossier adressé aux membres de la commission comprenait outre le rapport du service instructeur de la commission nationale, les avis des ministres en charge, respectivement, du commerce et de l'urbanisme, l'avis et le procès-verbal de la commission départementale d'aménagement commercial et le rapport des services instructeurs devant la commission départementale d'aménagement commercial. Le moyen tiré du vice dont aurait été entachée la procédure tenue devant la commission nationale d'aménagement commercial doit donc être écarté, en tout état de cause, comme manquant en fait.

En ce qui concerne l'appréciation portée par la commission nationale d'aménagement commercial :

4. Aux termes de l'article L. 750-1 du code de commerce : " Les implantations, extensions, transferts d'activités existantes et changements de secteur d'activité d'entreprises commerciales et artisanales doivent répondre aux exigences d'aménagement du territoire, de la protection de l'environnement et de la qualité de l'urbanisme. Ils doivent en particulier contribuer au maintien des activités dans les zones rurales et de montagne ainsi qu'au rééquilibrage des agglomérations par le développement des activités en centre-ville et dans les zones de dynamisation urbaine (...) ". Aux termes de l'article L. 752-6 du code de commerce dans sa rédaction alors applicable : " I.- L'autorisation d'exploitation commerciale mentionnée à l'article L. 752-1 est compatible avec le document d'orientation et d'objectifs des schémas de cohérence territoriale ou, le cas échéant, avec les orientations d'aménagement et de programmation des plans locaux d'urbanisme intercommunaux comportant les dispositions prévues au deuxième alinéa de l'article L. 151-6 du code de l'urbanisme. / La commission départementale d'aménagement commercial prend en considération : 1° En matière d'aménagement du territoire : a) La localisation du projet et son intégration urbaine ; b) La consommation économe de l'espace, notamment en termes de stationnement ; c) L'effet sur l'animation de la vie urbaine, rurale et dans les zones de montagne et du littoral ; d) L'effet du projet sur les flux de transports et son accessibilité par les transports collectifs et les modes de déplacement les plus économes en émission de dioxyde de carbone ; e) La contribution du projet à la préservation ou à la revitalisation du tissu commercial du centre-ville de la commune d'implantation, des communes limitrophes et de l'établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre dont la commune d'implantation est membre ; f) Les coûts indirects supportés par la collectivité en matière notamment d'infrastructures et de transports ; / 2° En matière de développement durable : a) La qualité environnementale du projet, notamment du point de vue de la performance énergétique et des émissions de gaz à effet de serre par anticipation du bilan prévu aux 1° et 2° du I de l'article L. 229-25 du code de l'environnement, du recours le plus large qui soit aux énergies renouvelables et à l'emploi de matériaux ou procédés éco-responsables, de la gestion des eaux pluviales, de l'imperméabilisation des sols et de la préservation de l'environnement ; b) L'insertion paysagère et architecturale du projet, notamment par l'utilisation de matériaux caractéristiques des filières de production locales ; c) Les nuisances de toute nature que le projet est susceptible de générer au détriment de son environnement proche. / Les a et b du présent 2° s'appliquent également aux bâtiments existants s'agissant des projets mentionnés au 2° de l'article L. 752-1 ; / 3° En matière de protection des consommateurs : a) L'accessibilité, en termes, notamment, de proximité de l'offre par rapport aux lieux de vie ; b) La contribution du projet à la revitalisation du tissu commercial, notamment par la modernisation des équipements commerciaux existants et la préservation des centres urbains ; c) La variété de l'offre proposée par le projet, notamment par le développement de concepts novateurs et la valorisation de filières de production locales ; d) Les risques naturels, miniers et autres auxquels peut être exposé le site d'implantation du projet, ainsi que les mesures propres à assurer la sécurité des consommateurs. / II.- A titre accessoire, la commission peut prendre en considération la contribution du projet en matière sociale. / III.- La commission se prononce au vu d'une analyse d'impact du projet, produite par le demandeur à l'appui de sa demande d'autorisation. Réalisée par un organisme indépendant habilité par le représentant de l'Etat dans le département, cette analyse évalue les effets du projet sur l'animation et le développement économique du centre-ville de la commune d'implantation, des communes limitrophes et de l'établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre dont la commune d'implantation est membre, ainsi que sur l'emploi, en s'appuyant notamment sur l'évolution démographique, le taux de vacance commerciale et l'offre de mètres carrés commerciaux déjà existants dans la zone de chalandise pertinente, en tenant compte des échanges pendulaires journaliers et, le cas échéant, saisonniers, entre les territoires. / IV.- Le demandeur d'une autorisation d'exploitation commerciale doit démontrer, dans l'analyse d'impact mentionnée au III, qu'aucune friche existante en centre-ville ne permet l'accueil du projet envisagé. En l'absence d'une telle friche, il doit démontrer qu'aucune friche existante en périphérie ne permet l'accueil du projet envisagé. ". Aux termes de l'article L. 752-21 code de commerce : " Un pétitionnaire dont le projet a été rejeté pour un motif de fond par la Commission nationale d'aménagement commercial ne peut déposer une nouvelle demande d'autorisation sur un même terrain, à moins d'avoir pris en compte les motivations de la décision ou de l'avis de la commission nationale. / Lorsque la nouvelle demande ne constitue pas une modification substantielle au sens de l'article L. 752-15 du présent code, elle peut être déposée directement auprès de la Commission nationale d'aménagement commercial. "

5. La requérante soutient qu'en émettant un avis favorable à la demande d'exploitation commerciale de la société Lidl, la commission d'aménagement commercial a commis une erreur d'appréciation de la conformité du projet aux objectifs fixés par la loi au vu des critères d'évaluation mentionnés à l'article L. 752-6 du code de commerce.

S'agissant de l'aménagement du territoire :

6. En premier lieu, pour contester l'appréciation portée par la commission nationale d'aménagement commercial sur l'impact du projet sur l'animation urbaine et le commerce de centre-ville, la requérante indique que le projet aura des conséquences négatives sur les nombreux commerces de centre-ville, en particulier des commerces de bouche, des Mureaux mais également de Meulan-en-Yvelines, qui sont bénéficiaires du programme Action Cœur de ville et qui connaissent des taux de vacance commerciale supérieures de près de cinq points à la moyenne nationale pour s'établir aux alentours de 16 %, la méthode de détermination du taux de vacance commerciale retenue par la société Lidl n'étant pas conforme aux méthodes retenues par le Conseil général de l'environnement et du développement durable, l'Institut national de la statistique et des études économiques, la fédération de promotion et défense du commerce spécialisé (PROCOS), le centre d'observation économique régional de la chambre de commerce et d'industrie de Paris Ile-de-France ou le Sénat. La requérante indique en outre que cet impact ne sera pas compensé par l'augmentation de la population, car les données de l'Institut national de la statistique et des études économiques contredisent le constat tendant à établir une augmentation significative de la population de Meulan-en-Yvelines, qui n'a pas connue une augmentation de plus de 5 % mais seulement de près de 3 % entre 2008 et 2018. La requérante indique enfin que ce point était déjà relevé dans l'avis du 25 octobre 2018 de la commission nationale d'aménagement commercial et qu'en application de l'article L. 752-21 du code de commerce la société Lidl aurait dû apporter des garanties sur ce point précis, ce qui n'est pas le cas.

7. Toutefois, l'engagement d'une action " Cœur de Ville " dans les communes des Mureaux et de Meulan-en-Yvelines n'est pas suffisante pour écarter l'extension de tout projet commercial en dehors du centre-ville de cette commune, l'accès au centre-ville des Mureaux notamment, distant de plus de deux kilomètres du site d'implantation du projet, étant limité par la barrière physique formée par la Seine et la départementale 190, en particulier aux heures de pointe. En outre, il ressort des pièces du dossier que le projet présenté s'appuie sur une étude indiquant que le projet aura un impact faible sur les commerces installés dans le centre-ville des Mureaux, cet impact étant en outre compensé par l'augmentation de la zone de chalandise estimée à 4 %. Si une étude d'impact réalisée par la chambre de commerce et d'industrie a été réalisée et conclut à un taux de vacance commerciale à Meulan-en-Yvelines de plus de 16 %, supérieur à la moyenne de la zone étudiée qui est de 11 % comme de la moyenne départementale qui est de 8 %, il ressort des pièces du dossier que cette vacance est concentrée en centre-ville et concerne principalement d'anciens commerces non alimentaires ainsi que quelques commerces alimentaires dont la vacance est ancienne. S'agissant du secteur alimentaire, cette étude indique que " la première destination des dépenses alimentaires des habitants de la zone est Tessancourt-sur-Aubette (26 %, Auchan), devant Meulan-en-Yvelines (24 %, Lidl, L'Entrepôt, commerces de centre-ville), puis Hardricourt (12 %, hyper Casino, Leader Price) et Juziers (3 %). L'évasion en dehors de la zone s'élève à 35 %. [...] L'évasion alimentaire (35 %), se réalise pour 13 % vers le centre commercial Carrefour de Flins-sur-Seine, puis vers les Mureaux (5 %), Cergy (4 %) et Buchelay (3 %, CC Auchan) ". Ainsi, au regard du positionnement commercial de la société Lidl et alors qu'une étude de la chambre de commerce et d'industrie relève que le taux de chômage sur la commune de Meulan-en-Yvelines est supérieur à la moyenne de la zone étudiée et même du département et que le revenu net moyen annuel est très en dessous de la moyenne de la zone et du département, comme la part des foyers fiscaux imposés, le projet devra permettre de limiter l'évasion commerciale dans le secteur alimentaire. En outre, malgré l'existence du magasin Lidl dont l'extension est projetée et surtout d'une concentration des dépenses alimentaires dans les grandes surfaces pour plus de 60 % des dépenses, il ressort des pièces du dossier que le centre-ville de Meulan comprend six commerces de fruits et légumes, deux fleuristes, six commerces de détail de viande ou poisson, un commerce de proximité de surgelé, six commerces de proximité de libre-service et cinq boulangeries et celui des Mureaux, deux commerces de fruits et légumes, deux fleuristes, huit commerce de viande ou poisson et huit boulangeries et il ne ressort pas des pièces du dossier que leur situation économique serait fragile.

8. En second lieu, d'une part, si la requérante fait valoir que le projet aura des conséquences négatives sur les flux de transport en impliquant nécessairement une augmentation importante du trafic sur les voies d'accès au projet, aggravant une situation de saturation du trafic sur les infrastructures existantes, elle n'apporte à l'appui de son affirmation aucun élément de nature à remettre en cause le caractère suffisant de l'étude réalisée en mars 2019 et produite à l'appui du projet contesté. Si la requérante se prévaut en outre de l'avis émis par la direction départementale des territoires et repris par le ministre en charge de l'urbanisme, il ressort des termes mêmes de ces deux avis que la direction départementale des territoires ne s'est pas prononcée sur le caractère suffisant ou non de l'étude de trafic produite par la société Lidl, se bornant à relever un risque d'aggravation d'une situation de saturation du trafic sur les infrastructures existantes, sans se prononcer sur l'importance et la probabilité de ce risque. D'autre part, si la requérante fait valoir que l'existence notoires de difficultés de circulation aurait dû conduire la société Lidl à développer une alternative à l'accès au magasin en voiture et que le site n'est pas correctement desservi par les transports en commun, ce seul élément ne saurait justifier, à lui seul, le refus d'accorder l'autorisation sollicitée. Enfin si la requérante fait valoir que l'accès piéton n'est pas sécurisé, il ressort des pièces du dossier que seule une portion de cinquante mètres linéaires d'accotement au nord du magasin n'est pas équipée en trottoir, la largeur de l'accotement, stabilisé, étant suffisante pour que les piétons puissent l'emprunter si besoin.

S'agissant du développement durable :

9. En premier lieu, si la requérante soutient que l'insertion paysagère et architecturale du projet est insuffisante alors qu'il est situé à proximité de deux maisons d'habitation et que le bâtiment projeté sera particulièrement massif, il ressort d'une part des pièces du dossier que, depuis l'avis défavorable de la commission nationale d'aménagement commercial du 25 octobre 2018, le projet de la société Lidl a été complètement revu s'agissant de l'insertion architecturale, l'usage du modèle architectural standard, en particulier, ayant été abandonné. D'autre part, il ressort des pièces du dossier que les recommandations de l'architecte conseil de la direction départementale des territoires formulées après l'avis négatif du 28 octobre 2018 ont été prises en compte dans le nouveau projet, le bâtiment étant désormais implanté perpendiculairement et en bordure de rue avec création de deux façades vitrées, bardage bois et végétalisation par plantation de dix-sept arbres de haute tige en plus soit trente-cinq arbres implantés sur la parcelle.

10. En second lieu, la requérante fait valoir que les espaces verts ne représentent que 25 % de l'emprise foncière du projet, incluant les aires de stationnement, seules vingt-deux places sur les cents places de stationnement étant réalisées en dalles drainantes engazonnées et le projet étant particulièrement pauvre en terme d'espaces verts. Il ressort toutefois des pièces du dossier, en particulier de la vue aérienne de l'implantation préexistante, des plans du projet, de la vue projetée et de l'avis de la direction départementale des territoires comme du ministre en charge de l'urbanisme, que le projet n'est pas consommateur d'espaces supplémentaires, contrairement au projet présenté en octobre 2018, qui prévoyait l'acquisition de 2 600 mètres carrés sur deux parcelles mitoyennes occupées par deux maisons individuelles. Il ressort également de ces pièces que ce projet augmente la densité construite en diminuant l'emprise au sol de 45 mètres carrés, qu'il augmente les espaces paysagers de 197 mètres carrés, traite les stationnements extérieurs en permettant l'infiltration des eaux et l'écoulement naturel des eaux en particulier en cas de crue, la plupart des places de stationnement créés étant implantées en rez-de-chaussée du magasin qui est pour cela surélevé. En outre, cette densification ne paraissant pas avoir d'effet significatif sur l'ensoleillement des deux maisons individuelles voisines. Il ressort enfin des pièces du dossier que le bâtiment sera équipé de panneaux solaires avec une toiture photovoltaïque de plus de 1 100 mètres carrés pour la production d'électricité et d'eau chaude et que sa performance énergétique sera supérieure à la réglementation thermique 2012 du fait de l'utilisation des matériaux de construction, d'isolation et de décoration durables et de qualité, le projet constituant ainsi une amélioration significative par rapport à l'insertion environnementale de l'implantation préexistante.

S'agissant de la protection des consommateurs :

11. En premier lieu, la requérante fait valoir que la localisation du site en périphérie de la commune ne permet pas au projet de contribuer à la revitalisation du tissu commercial local. D'une part, comme il a été exposé aux points 6 et 7, le projet doit contribuer à la réduction de l'évasion commerciale de la zone de chalandise et en particulier de la commune de Meulan-en-Yvelines et avoir un impact limité sur les commerces de centre-ville. D'autre part comme le relèvent le ministre en charge de l'urbanisme et la direction départementale des territoires, le projet s'implante dans un secteur identifié comme " quartier à densifier à proximité d'une gare " et est donc de ce point de vue en adéquation avec le schéma directeur régional Ile-de-France (SDRIF) qui préconise l'implantation d'équipements commerciaux sur des zones déjà dédiées aux commerces.

12. En second lieu, si la requérante fait valoir que le projet n'est pas de nature à valoriser les filières de productions locales dès lors que la liste des fournisseurs locaux est extrêmement réduite, cette circonstance ne saurait justifier, à elle seule, un refus de l'autorisation sollicitée,

13. Dès lors c'est sans commettre d'erreur d'appréciation que la commission nationale d'aménagement commercial a retenu que le projet de la société Lidl, qui a effectivement et de façon suffisante pris en compte les motifs ayant fondé l'avis défavorable de la commission nationale d'aménagement commercial du 25 octobre 2018, ne compromet pas les objectifs fixés par les articles l. 750-1 et L. 752-6 du code de commerce.

14. Il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il soit besoin de statuer sur la fin de non-recevoir opposée en défense, que les conclusions de la société Auchan Supermarché tendant à l'annulation du permis de construire délivré par le maire de Meulan-en-Yvelines à la société Lidl, en tant qu'il vaut autorisation d'exploitation commerciale doivent être rejetées.

Sur l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

15. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que les conclusions de la société Auchan Supermarché présentées à ce titre soient accueillies.

16. Il y a lieu en revanche dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la société Auchan Supermarché une somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par la société Lidl et non compris dans les dépens.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de la société Auchan Supermarché est rejetée.

Article 2 : La société Auchan Supermarché versera une somme de 1 500 euros à la société Lidl en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la société Auchan Supermarché, à la commune de Meulan-en-Yvelines, à la société Leader Price Exploitation, à la société Lidl, au président de la Commission nationale d'aménagement commercial, à la ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.

Délibéré après l'audience du 13 décembre 2022, à laquelle siégeaient :

M. Olivier Mauny, président

Mme Cécile Viseur-Ferré, première conseillère

Mme Anne Villette, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 22 décembre 2022

La rapporteure,

C. VISEUR-FERRE Le président,

O. MAUNYLa greffière,

F. PETIT-GALLAND

La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme

La greffière,

N° 20VE01315002


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 20VE01315
Date de la décision : 22/12/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Commerce - industrie - intervention économique de la puissance publique - Réglementation des activités économiques - Activités soumises à réglementation - Aménagement commercial.

Urbanisme et aménagement du territoire - Autorisations d`utilisation des sols diverses - Autorisation d`exploitation commerciale (voir : Commerce - industrie - intervention économique de la puissance publique).


Composition du Tribunal
Président : M. MAUNY
Rapporteur ?: Mme Cécile VISEUR-FERRÉ
Rapporteur public ?: Mme MOULIN-ZYS
Avocat(s) : SELARL LETANG AVOCATS

Origine de la décision
Date de l'import : 19/02/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2022-12-22;20ve01315 ?
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