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09/02/2023 | FRANCE | N°21VE01225

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 2ème chambre, 09 février 2023, 21VE01225


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. et Mme A... E... ont demandé au tribunal administratif de Cergy-Pontoise d'annuler l'arrêté du 10 octobre 2017 par lequel le maire de la commune de Nanterre a délivré un permis de construire à M. C... en vue de l'extension et de la surélévation d'une maison individuelle, ainsi que la décision du 6 février 2018 par laquelle le maire de la commune de Nanterre a rejeté leur recours gracieux, et de mettre à la charge de la commune de Nanterre une somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761-1

du code de justice administrative.

Par un jugement n° 1802222 du 2 mars ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. et Mme A... E... ont demandé au tribunal administratif de Cergy-Pontoise d'annuler l'arrêté du 10 octobre 2017 par lequel le maire de la commune de Nanterre a délivré un permis de construire à M. C... en vue de l'extension et de la surélévation d'une maison individuelle, ainsi que la décision du 6 février 2018 par laquelle le maire de la commune de Nanterre a rejeté leur recours gracieux, et de mettre à la charge de la commune de Nanterre une somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par un jugement n° 1802222 du 2 mars 2021, le tribunal administratif de Cergy-Pontoise a annulé l'arrêté du 10 octobre 2017 et la décision du maire de la commune de Nanterre rejetant le recours gracieux, a mis à la charge de la commune de Nanterre une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et a rejeté les conclusions de la commune de Nanterre présentées sur ce même fondement.

Procédure devant la cour :

I. Par une requête et un mémoire complémentaire enregistrés, sous le n° 21VE01225, le 29 avril 2021 et le 11 janvier 2023, la commune de Nanterre, représentée par Me Peru, avocat, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) de rejeter la demande de M. et Mme E... ;

3°) de mettre à la charge de M. et Mme E... une somme de 2 500 euros à lui verser sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

La commune de Nanterre soutient que :

- la cour administrative d'appel est compétente pour connaître de ce litige dès lors que le projet ne porte pas sur la réalisation de logements supplémentaires ;

- c'est à tort que les premiers juges ont estimé que le permis de construire ne respectait pas les dispositions de l'article UD 7-1-1 du règlement du plan local d'urbanisme de la commune de Nanterre, alors que ces dispositions n'étaient pas applicables au projet ;

- le dossier de demande du permis de construire était complet ;

- aucune fraude n'a été commise par le pétitionnaire ;

- le projet ne méconnaît pas les dispositions de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme ;

- le projet ne méconnaît pas les dispositions de l'article UD 6-6 du règlement du plan local d'urbanisme ;

- le projet ne méconnaît pas les dispositions de l'article UD 11 du règlement du plan local d'urbanisme.

Par un mémoire en défense, enregistré le 21 octobre 2022, M. et Mme E..., représentés par Me Santini, avocat, concluent au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge de la commune de Nanterre une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- les moyens de la requête ne sont pas fondés ;

- l'arrêté attaqué méconnaît les dispositions de l'article UD 11 du règlement du plan local d'urbanisme.

II. Par une requête et un mémoire complémentaire enregistrés, sous le n° 21VE01381, le 3 mai 2021 et le 12 juillet 2021, M. B... C..., représenté par le cabinet Thouin-Palat et Boucard, avocats au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) de rejeter la demande de M. et Mme E... ;

3°) de mettre à la charge de M. et Mme E... une somme de 5 000 euros à lui verser sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

M. C... soutient que :

- le jugement attaqué est irrégulier en ce qu'il n'est pas démontré que la minute du jugement comporterait les signatures prévues par l'article R. 741-7 du code de justice administrative ;

- c'est à tort que les premiers juges ont estimé que le permis de construire ne respectait pas les dispositions de l'article UD 7-1-1 du règlement du plan local d'urbanisme de la commune de Nanterre, alors que ces dispositions n'étaient pas applicables au projet ;

- le projet aurait pu faire l'objet d'une régularisation sans que cela n'entraîne un bouleversement tel que cela en changerait la nature ;

- le dossier de demande du permis de construire était complet ;

- aucune fraude n'a été commise par le pétitionnaire ;

- le projet ne méconnaît pas les dispositions de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme ;

- le projet ne méconnaît pas les dispositions de l'article UD 6-6 du règlement du plan local d'urbanisme ;

- le projet ne méconnaît pas les dispositions de l'article UD 7-3 du règlement du plan local d'urbanisme qui ne sont pas applicables en l'espèce ;

- le projet ne méconnaît pas les dispositions des articles UD 11-1, UD 11-2 et UD 11-3 du règlement du plan local d'urbanisme.

Par un mémoire en défense, enregistré le 21 octobre 2022, M. et Mme E..., représentés par Me Santini, avocat, concluent au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge de M. C... une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, pour les mêmes motifs que ceux exposés dans le cadre de la requête enregistrée sous le numéro 21VE01225.

Vu les autres pièces des dossiers.

Vu :

- le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme D...,

- les conclusions de M. Frémont, rapporteur public,

- les observations de Me Régis, substituant Me Peru, pour la commune de Nanterre et de Me Güner, pour le cabinet Thouin-Palat et Boucard, pour M. C....

Deux notes en délibéré présentées pour la commune de Nanterre ont été enregistrées les 26 janvier et 6 février 2023 postérieurement à l'audience.

Considérant ce qui suit :

1. Le maire de la commune de Nanterre a, par un arrêté du 10 octobre 2017, accordé à M. C... un permis de construire pour la surélévation d'une maison individuelle située 28 avenue Gabriel à Nanterre. Par un jugement n° 1802222 du 2 mars 2021, le tribunal administratif de Cergy-Pontoise a annulé cet arrêté. La commune de Nanterre et M. C... demandent l'annulation de ce jugement et le rejet de la demande de première instance.

2. Les requêtes de la commune de Nanterre et de M. C... sont dirigées contre le même jugement. Il y a lieu de les joindre pour statuer par un seul arrêt.

Sur la régularité du jugement attaqué :

3. Aux termes de l'article R. 741-7 du code de justice administrative : " Dans les tribunaux administratifs et les cours administratives d'appel, la minute de la décision est signée par le président de la formation de jugement, le rapporteur et le greffier d'audience ". Il ressort des pièces du dossier que la minute du jugement attaqué a été signée par le président de la formation de jugement, le rapporteur et le greffier d'audience. Le moyen tiré de l'omission de ces signatures manque donc en fait et doit être écarté.

Sur le motif d'annulation retenu par les premiers juges :

4. En vertu des dispositions de l'article L. 600-4-1 du code de l'urbanisme, il appartient au juge d'appel, saisi d'un jugement par lequel un tribunal administratif a prononcé l'annulation d'une décision d'urbanisme en retenant un ou plusieurs moyens, de se prononcer expressément sur le bien-fondé de tous les motifs d'annulation retenus par les premiers juges, dès lors que ceux-ci sont contestés devant lui, et d'apprécier si l'un au moins de ces moyens justifie la solution d'annulation. Dans ce cas, le juge d'appel n'a pas à examiner les autres moyens de première instance.

5. Pour annuler l'arrêté attaqué, les premiers juges ont retenu qu'il avait été délivré en méconnaissance de l'article UD 7 du règlement du plan local d'urbanisme.

6. Aux termes de l'article UD 7-1 du règlement du plan local d'urbanisme de la commune de Nanterre : " UD 7-1-1 Pour les terrains dont la largeur de façade au droit de la construction est inférieure ou égale à 15 mètres, les constructions sont autorisées : / - Sur l'une ou les deux limites séparatives latérales ou en retrait de ces limites ; / - En retrait des limites séparatives de fond, sauf dans les deux cas suivants, où les constructions peuvent également s'implanter en limite séparative de fond : / - si elles s'adossent à une construction voisine existante en bon état. La construction nouvelle ne pourra pas avoir des dimensions supérieures à la façade de la construction voisine sur laquelle elle s'adosse (hauteur et longueur), / - ou si la hauteur de la construction n'excède pas 2,60 mètres à l'égout et 3 mètres au faîtage. (...) ". En outre, l'article UD 7-3 du même règlement prévoit : " Distances minimales à respecter en cas d'implantation des constructions en retrait : / (...) par rapport aux limites séparatives de fond, les constructions doivent respecter une distance, mesurée en tout point perpendiculairement par rapport à la limite séparative, au moins égale à leur hauteur de façade (...) avec : / - un minimum de 6 m, en cas de façade avec baie(s), / - un minimum de 3 m en cas de façade sans baie ". Enfin, en vertu de l'article UD 7-5 de ce règlement : " Les dispositions figurant à l'article UD 7-3 ne s'appliquent pas aux extensions sous réserve que ces dernières soient réalisées dans le prolongement des murs de la construction existante, et sans réduire le retrait existant entre la construction et la limite séparative, non conforme aux dispositions des articles 7-1 ou 7-2. / Toutefois, aucune baie ne pourra être réalisée sur les façades des extensions ayant bénéficié de la présente dérogation. / Cette dérogation ne s'applique que pour les règles d'implantation par rapport aux limites séparatives latérales, et non pour les règles d'implantation par rapport aux limites séparatives de fond. (...) ".

7. La circonstance qu'une construction existante n'est pas conforme à une ou plusieurs dispositions d'un plan d'occupation des sols régulièrement approuvé ne s'oppose pas, en l'absence de dispositions de ce plan spécialement applicables à la modification des immeubles existants, à la délivrance ultérieure d'un permis de construire s'il s'agit de travaux qui, ou bien doivent rendre l'immeuble plus conforme aux dispositions réglementaires méconnues, ou bien sont étrangers à ces dispositions.

8. Le permis de construire litigieux porte sur des travaux de surélévation en vue de la création d'un étage supplémentaire sur une construction existante déjà implantée en fond de parcelle en méconnaissance des dispositions précitées de l'article UD 7 du règlement du plan local d'urbanisme de la commune de Nanterre.

9. D'une part, il ressort des dispositions de l'article UD 7-5 du règlement du plan local d'urbanisme que les dispositions particulières qui permettent de déroger aux règles de retrait prévues par l'article UD 7-3, ne sont pas applicables aux règles d'implantation par rapport au limites séparatives de fond. Sont ainsi seules applicables au projet litigieux les dispositions de l'article UD 7-1-1 qui ne permettent une implantation sur la limite de fond de parcelle que si la construction s'adosse à une construction voisine existante ou si la hauteur de la construction n'excède pas 2,60 mètres à l'égout et 3 mètres au faîtage, sans que cette dernière règle ne distingue entre les constructions existantes et les constructions nouvelles. En l'espèce, il ressort des pièces du dossier que la construction existante et son extension projetée ne respectent aucune de ses conditions dès lors qu'elles ne s'adossent pas à une construction voisine et que la construction nouvelle sera d'une hauteur de 7,70 mètres au faîtage. A cet égard, la circonstance que le faîtage serait en retrait par rapport à la limite séparative est sans incidence sur l'application de la règle de l'article UD 7-1-1 dès lors que celle-ci prévoit expressément une hauteur maximale distincte pour la façade et pour la toiture, cette dernière étant mesurée au faîtage.

10. D'autre part, les travaux ainsi autorisés par le maire, en tant qu'ils permettent la surélévation de la toiture du bâtiment implanté en méconnaissance des dispositions du règlement du plan local d'urbanisme relatives à l'implantation de constructions par rapport aux limites séparatives, ne sont pas étrangers auxdites dispositions et ne rendent pas la construction plus conforme à ces dispositions. Par suite, les requérants ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que les premiers juges ont retenu le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions précitées.

11. Eu égard à l'ampleur du vice retenu, à sa nature et à la configuration du terrain d'assiette ainsi que des constructions existantes, c'est à bon droit que les premiers juges ont estimé qu'il ne pouvait donner lieu à une régularisation sans apporter à ce projet un bouleversement tel qu'il en changerait la nature même.

12. Il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de première instance conformément à ce qui a été exposé au point 4, que la commune de Nanterre et M. C... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté leurs demandes.

Sur l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

13. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de M. et Mme E..., qui ne sont pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement de la somme que la commune de Nanterre et M. C... demandent à ce titre. Il y a lieu en revanche de mettre à la charge solidaire de la commune de Nanterre et de M. C... une somme de 1 500 euros à verser à M. et Mme E... sur le fondement des mêmes dispositions.

DÉCIDE :

Article 1er : Les requêtes susvisées de la commune de Nanterre et de M. C... sont rejetées.

Article 2 : La commune de Nanterre et M. C... verseront, solidairement, à M. et Mme E... une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la commune de Nanterre, à M. B... C... et à M. et Mme A... E....

Délibéré après l'audience du 26 janvier 2023, à laquelle siégeaient :

M. Even, président de chambre,

Mme Le Gars, présidente-assesseure,

Mme Houllier, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 9 février 2023.

La rapporteure,

S. D...Le président,

B. EVENLa greffière,

C. RICHARD

La République mande et ordonne au préfet des Hauts-de-Seine en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme

La greffière,

2

N° 21VE01225...


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 21VE01225
Date de la décision : 09/02/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

68-03-025 Urbanisme et aménagement du territoire. - Permis de construire. - Nature de la décision.


Composition du Tribunal
Président : M. EVEN
Rapporteur ?: Mme Sarah HOULLIER
Rapporteur public ?: M. FREMONT
Avocat(s) : SELARL GAIA

Origine de la décision
Date de l'import : 19/02/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2023-02-09;21ve01225 ?
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