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27/06/2023 | FRANCE | N°23VE00494

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 1ère chambre, 27 juin 2023, 23VE00494


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Versailles d'annuler l'arrêté du 9 janvier 2023 par lequel le préfet de l'Essonne lui a refusé la délivrance d'un duplicata de son titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français sans délai, a fixé le pays à destination duquel il pourra être reconduit et lui a fait interdiction de retour sur le territoire français pendant trois ans.

Par une ordonnance n° 2300993 du 10 février 2023, la présidente du tribunal administratif de Ve

rsailles a rejeté sa demande pour tardiveté.

Procédure devant la cour :

Par une requ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Versailles d'annuler l'arrêté du 9 janvier 2023 par lequel le préfet de l'Essonne lui a refusé la délivrance d'un duplicata de son titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français sans délai, a fixé le pays à destination duquel il pourra être reconduit et lui a fait interdiction de retour sur le territoire français pendant trois ans.

Par une ordonnance n° 2300993 du 10 février 2023, la présidente du tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande pour tardiveté.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 9 mars 2023 et le 18 mai 2023, M. B..., représenté par Me Tisserant, avocate, demande à la cour :

1°) d'annuler l'ordonnance attaquée ;

2°) de renvoyer l'affaire devant le tribunal administratif de Versailles ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros à verser à son conseil, ou, dans l'hypothèse où le bénéfice de l'aide juridictionnelle ne lui serait pas accordé, de lui verser cette somme au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et des articles 37 et 75 de la loi du 10 juillet 1991.

Il soutient que sa demande de première instance ne pouvait être rejetée comme irrecevable pour tardiveté, dès lors que l'arrêté du 9 janvier 2023 lui a été notifié par voie postale.

Par un mémoire en défense enregistré le 4 mai 2023, le préfet de l'Essonne conclut au rejet de la requête.

Il fait valoir que son arrêté est motivé et justifié.

M. B... a obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 9 mai 2023.

Vu les pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991, modifiée ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Ont été entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Dorion,

- les observations de Me Wissaad, substituant Me Tisserant, pour M. B....

Considérant ce qui suit :

1. M. B..., ressortissant congolais né le 29 octobre 1977 à Kinshasa (RDC), a obtenu le statut de réfugié le 5 mars 2003, et s'est vu délivrer une carte de résident de dix ans valable du 4 avril 2013 au 3 avril 2023, dont il a demandé un duplicata le 9 septembre 2021. Par un arrêté du 9 janvier 2023, le préfet de l'Essonne a refusé de lui délivrer ce duplicata, aux motifs qu'il avait été mis fin à son statut de réfugié par une décision du 5 février 2018 devenue définitive et que sa présence en France constituait une menace pour l'ordre public, lui a fait obligation de quitter le territoire français sans délai, a fixé le pays à destination duquel il pourra être reconduit à défaut de départ volontaire et lui a fait interdiction de retour sur le territoire français pendant trois ans. M. B... relève appel de l'ordonnance du 10 février 2023 par laquelle la présidente du tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande d'annulation de cet arrêté, au motif qu'elle était tardive et par suite manifestement irrecevable.

2. Aux termes de l'article L. 614-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger qui fait l'objet d'une obligation de quitter le territoire français peut, dans les conditions et délais prévus au présent chapitre, demander au tribunal administratif l'annulation de cette décision, ainsi que l'annulation de la décision relative au séjour, de la décision relative au délai de départ volontaire et de la décision d'interdiction de retour sur le territoire français qui l'accompagnent le cas échéant. / (...) ". Aux termes de l'article L. 614-6 du même code : " Lorsque la décision portant obligation de quitter le territoire français n'est pas assortie d'un délai de départ volontaire, le président du tribunal administratif peut être saisi dans le délai de quarante-huit heures suivant la notification de la mesure. / (...) ". Aux termes du II de l'article R. 776-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Conformément aux dispositions de l'article L. 614-6 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, la notification par voie administrative d'une obligation de quitter sans délai le territoire français fait courir un délai de quarante-huit heures pour contester cette obligation et les décisions relatives au séjour, à la suppression du délai de départ volontaire, au pays de renvoi et à l'interdiction de retour ou à l'interdiction de circulation notifiées simultanément. (...) ".

3. Il résulte de ces dispositions que les décisions portant obligation de quitter le territoire français sans délai de départ volontaire peuvent faire l'objet d'un recours devant la juridiction administrative dans un délai de quarante-huit heures à compter de leur notification par voie administrative. Par suite, la notification d'une telle obligation de quitter le territoire français à l'intéressé par lettre recommandée avec demande d'avis de réception, quand bien même elle comporte l'indication de ce délai de recours contentieux, n'est pas de nature à faire courir le délai de recours de quarante-huit heures.

4. Il est constant que l'arrêté contesté du 9 janvier 2023 faisant obligation à M. B... de quitter le territoire français sans délai lui a été notifié par lettre recommandée avec demande d'avis de réception, et non par la voie administrative, comme le prévoient les dispositions citées au point 2. Dans ces conditions, le délai de recours contentieux de quarante-huit heures n'est pas opposable à l'intéressé. Par suite, M. B... est fondé à soutenir que l'ordonnance attaquée, qui rejette sa demande pour tardiveté, est entachée d'irrégularité. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, après avoir annulé l'ordonnance attaquée, de renvoyer l'affaire au tribunal administratif de Versailles.

5. M. B... est admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale. Par suite, il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 000 euros au profit de Me Tisserant, sous réserve que celle-ci renonce à la part contributive de l'Etat, en application des articles 37 de la loi du 10 juillet 1991 et L. 761-1 du code de justice administrative.

DÉCIDE :

Article 1er : L'ordonnance n° 2300993 du 10 février 2023 de la présidente du tribunal administratif de Versailles est annulée.

Article 2 : L'affaire est renvoyée devant le tribunal administratif de Versailles pour qu'il soit statué sur la demande de M. B....

Article 3 : L'Etat versera la somme de 1 000 euros à Me Tisserant, au titre des articles 37 de la loi du 10 juillet 1991 et L. 761-1 du code de justice administrative, sous réserve de sa renonciation à la part contributive de l'Etat à l'aide juridictionnelle.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer. Copie en sera adressée au préfet de l'Essonne.

Délibéré après l'audience du 6 juin 2023, à laquelle siégeaient :

Mme Dorion, présidente,

M. Tar, premier conseiller,

Mme Pham, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 27 juin 2023.

L'assesseur le plus ancien,

G. TARLa présidente-rapporteure,

O. DORIONLa greffière,

A. GAUTHIER

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour exécution conforme,

La greffière,

2

N° 23VE00494


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 23VE00494
Date de la décision : 27/06/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-03 Étrangers. - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : Mme DORION
Rapporteur ?: Mme Odile DORION
Rapporteur public ?: Mme BOBKO
Avocat(s) : CABINET D'AVOCATS MONTMARTRE

Origine de la décision
Date de l'import : 10/08/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2023-06-27;23ve00494 ?
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