La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

30/08/2023 | FRANCE | N°20VE03444

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 6ème chambre, 30 août 2023, 20VE03444


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La SASU Colbert Promotion a demandé au tribunal administratif de Cergy-Pontoise d'annuler l'arrêté du 15 février 2019 par lequel le maire de la commune de Saint-Gratien a refusé de lui accorder le permis de construire valant permis de démolir, enregistré sous le n° PC 095 555 18 800 26, ayant pour objet la démolition totale de l'existant et la construction de 14 logements collectifs groupés en deux bâtiments à Saint-Gratien, d'enjoindre au maire de la commune de Saint-Gratien de lui délivrer le permis

de construire sollicité dans le délai d'un mois, de mettre à la charge de l...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La SASU Colbert Promotion a demandé au tribunal administratif de Cergy-Pontoise d'annuler l'arrêté du 15 février 2019 par lequel le maire de la commune de Saint-Gratien a refusé de lui accorder le permis de construire valant permis de démolir, enregistré sous le n° PC 095 555 18 800 26, ayant pour objet la démolition totale de l'existant et la construction de 14 logements collectifs groupés en deux bâtiments à Saint-Gratien, d'enjoindre au maire de la commune de Saint-Gratien de lui délivrer le permis de construire sollicité dans le délai d'un mois, de mettre à la charge de la commune de Saint-Gratien une somme de 5 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par un jugement n° 1904862 du 20 octobre 2020, le tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 21 décembre 2020, la SASU Colbert Promotion, représentée par Me Lepage, avocate, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du 15 février 2019 par lequel le maire de la commune de Saint-Gratien a refusé de lui accorder le permis de construire valant permis de démolir, enregistré sous le n° PC 095 555 18 800 26, ayant pour objet la démolition totale de l'existant et la construction de 14 logements collectifs groupés en deux bâtiments à Saint-Gratien ;

3°) d'enjoindre au maire de la commune de Saint-Gratien de lui délivrer le permis de construire sollicité dans un délai fixé par la cour ;

4°) de mettre à la charge de la commune de Saint-Gratien une somme de 5 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- son projet ne méconnait pas l'article UG 3 du règlement du plan local d'urbanisme ni l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme ; le tribunal ne se prononce pas sur le motif du refus mais y substitue un nouveau ; il devait se prononcer sur l'erreur manifeste d'appréciation affectant la décision, s'agissant de l'impossibilité de déplacer les trois places de stationnement situées au droit de l'accès au projet ; les trois places en cause ne sont pas situées en limite de parcelle mais au centre du terrain ; l'accès au projet ne peut pas être déplacé et l'emplacement des places de stationnement empêche l'accès au terrain et l'enclave ; il n'est pas justifié que les trois places de stationnement ne peuvent pas être déplacées de quelques mètres ; l'arrêté du 3 août 2012 instituant les trois places en cause ne peut pas lui être opposé ; les trois places ne présentent pas d'utilité et il existe d'autres places de stationnement ; le PDUIF prévoit de mieux réglementer le stationnement sur voirie et l'offre de stationnement est surdimensionnée et gêne la circulation ;

- il ne méconnait pas l'article UG 7 du règlement du plan local d'urbanisme dès lors que les conditions permettant l'implantation en limite séparative du bâtiment B sont remplies, ce bâtiment respectant tant la hauteur que la longueur du bâtiment voisin auquel il s'adosse ; la règle concerne la longueur et la hauteur du mur formant limite et pas celle de la construction ; la hauteur est inférieure à celle du bâtiment voisin prise à l'égout des lucarnes conformément à l'article UG 10 ; le tribunal a commis une erreur en fixant la hauteur à la gouttière du bâtiment voisin alors que les règles du plan local d'urbanisme étaient claires ; il n'y a pas lieu de prendre en compte la longueur de tout le bâtiment mais uniquement la partie en décroché s'implantant en limite séparative ; la distance d'implantation de 4 mètres est respectée pour la partie du bâtiment qui n'est pas en limite séparative et respecte la longueur du bâtiment voisin sur toute sa partie implantée en limite séparative, la partie ainsi implantée représentant 35 % de la longueur ; les décrochés en façade ne sont pas interdits et permettent de créer des vues vers l'Est et l'Ouest.

Par un mémoire en défense enregistré le 16 février 2023, la commune de Saint-Gratien, représentée par Me Gorand, avocat, conclut au rejet de la requête et à ce que la somme de 5 000 euros soit mise à la charge de la société Colbert Promotion en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle fait valoir que les moyens soulevés ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Mauny,

- les conclusions de Mme Moulin-Zys, rapporteure publique,

- et les observations de Me Akli pour la commune de Saint-Gratien.

Une note en délibéré, présentée pour la commune de Saint Gratien, a été enregistrée le 12 juillet 2023.

Considérant ce qui suit :

1. La société Colbert Promotion demande l'annulation de l'arrêté du 15 février 2019 par lequel le maire de la commune de Saint-Gratien a refusé de lui délivrer un permis de construire 14 logements collectifs, répartis dans deux bâtiments A et B, sur une parcelle sise 9 rue de Picolo à Saint-Gratien.

Sur le bien-fondé du jugement :

En ce qui concerne l'article UG 3 du règlement du plan local d'urbanisme :

2. D'une part, aux termes de l'article UG 3 du règlement du plan local d'urbanisme, relatif à l'accès et à la voirie : " Pour être constructible, un terrain doit être accessible par une voie carrossable publique ou privée en bon état de viabilité et présentant des caractéristiques permettant de satisfaire aux exigences de la sécurité, de la défense contre l'incendie et la protection civile, en particulier dans les conditions de l'article R. 111-5 du code de l'urbanisme ".

3. D'autre part, sauf dispositions législatives contraires, les riverains d'une voie publique ont le droit d'accéder librement à leur propriété, et notamment, d'entrer et de sortir des immeubles à pied ou avec un véhicule. L'autorité domaniale, le cas échéant consultée par l'autorité saisie d'une demande d'autorisation d'urbanisme, ne peut refuser d'accorder un tel accès, qui constitue un accessoire du droit de propriété, que pour des motifs tirés de la conservation et de la protection du domaine public ou de la sécurité de la circulation sur la voie publique. Il est toutefois loisible au plan local d'urbanisme, qui peut, en vertu de l'article L. 151-39 du code de l'urbanisme, fixer les conditions de desserte des terrains susceptibles de recevoir des constructions ou de faire l'objet d'aménagements, de préciser, dans le respect du principe énoncé au point précédent, les conditions de l'accès à ces terrains par les voies publiques.

4. S'il ressort des pièces du dossier que trois places de stationnement sont implantées au droit de l'accès prévu dans le dossier de demande de permis de construire, créées par un arrêté du 3 août 2012, la société Colbert Promotion relève, à juste titre, que ces places de stationnement ne sont pas situées à équidistance de celles implantées en aval et en amont de la rue de Picolo, respectivement à 32,70 et 25,80 mètres, et qu'elles auraient donc pu être déplacées de quelques mètres sans remettre en cause les conditions de circulation sur cette route, et notamment sans compromettre les capacités de croisement de véhicules, y compris ceux de grande longueur. La commune se borne à faire valoir qu'il manque des places de stationnement dans cette rue et que la circulation, à double sens, y est particulièrement dense, sans justifier toutefois qu'il serait impossible de procéder au déplacement suggéré par la SASU Colbert Promotion. En outre, ainsi que l'a justement relevé le tribunal, la circonstance que la rue de Picolo supporte une circulation dense et à double sens n'est pas de nature à emporter par elle-même des risques pour la circulation publique. La circonstance que la légalité de l'arrêté du 3 août 2012, qui a été pris dans l'exercice des pouvoirs de police du maire avant le projet en litige et répond à d'autres objectifs, n'a pas été remise en cause, est sans incidence sur la solution du litige. Ainsi, et dès lors qu'il ne ressort pas des pièces du dossier qu'un aménagement léger du domaine public n'était pas possible, consistant au cas d'espèce en un simple déplacement des places de stationnement situées au droit de l'accès projeté, la SASU Colbert Promotion est fondée à soutenir que l'article UG 3 ne pouvait pas fonder la décision de refus qui lui a été opposée.

En ce qui concerne l'article UG 7 du règlement du plan local d'urbanisme :

5. Aux termes de l'article UG 7 du règlement du plan local d'urbanisme relatif à l'implantation des constructions par rapport aux limites séparatives du terrain : " La distance de la marge d'isolement se calcule en tous points de la construction. / A... avec baies supérieures à 0.25m² / La largeur (L) des façades d'isolement est au moins égale à la hauteur (H) de la construction par rapport au niveau du terrain naturel au droit des limites séparatives avec un minimum de 4 m. / A... sans baies ou baies inférieures ou égales à 0.25m² / Cette largeur (L) peut être réduite à la moitié de la hauteur (H/2) avec un minimum de 2,50 mètres si le mur qui fait face à la limite séparative ne comporte pas de baies supérieures à 0,25m², à l'exclusion des baies dont l'appui est situé à plus de 1,90 mètres au-dessus du plancher. / Secteur UG et UGc : - Terrains dont la largeur de façade est supérieure à 20 m / Les constructions doivent respecter les marges d'isolement. (...) Exceptions à l'ensemble de la zone / Les constructions peuvent être édifiées en limite séparative, si l'une des conditions suivantes est respectée : - La hauteur totale du mur construit au droit de cette limite séparative ne doit être supérieure à 2,60 m, - lorsqu'une construction existe, en limite séparative sur le terrain voisin, le bâtiment à édifier peut s'y adosser à condition qu'il respecte la hauteur et la longueur du mur formant limite (...) ". En vertu de ces dispositions, lorsque la largeur de la façade du terrain d'assiette du projet est supérieure à 20 mètres, l'implantation des constructions par rapport aux limites séparatives doit en principe respecter les marges d'isolement. Une implantation en limite séparative est cependant admise si le bâtiment à édifier s'adosse à une construction existante implantée elle-même en limite séparative et qu'il respecte tant la longueur que la hauteur du mur formant limite.

6. S'il ressort des pièces du dossier, et notamment du plan d'héberge produit en appel par la SASU Colbert Promotion, dont les mentions ne sont pas contestées, que la maison d'habitation sise sur la parcelle AE 104 en limite séparative du terrain d'assiette du projet a une hauteur au faitage de 7,89 mètres, alors qu'il est constant que la hauteur à l'acrotère du bâtiment B projeté est de 5,70 mètres, cette circonstance est sans incidence sur la solution du litige dès lors que, selon l'article UG 10 du même règlement, la hauteur d'un bâtiment, s'apprécie soit à l'égout de toit soit à l'égout de lucarne. S'il ressort en outre des pièces du dossier que la hauteur du bâtiment B est supérieure à la hauteur à l'égout de toit du bâtiment sis sur la parcelle AE 104, il n'en va pas de même s'agissant de la hauteur à l'égout de lucarne qui se situe à 6,27 mètres. Ainsi, et dès lors qu'il ne ressort pas des dispositions précitées de l'article UG 7 que le bâtiment projeté devrait respecter en tous points de sa façade la hauteur du bâtiment auquel il s'adosse, la SASU Colbert Promotion est fondée à soutenir que la hauteur du décroché du bâtiment B s'adossant à la construction existante en limite séparative ne méconnait pas l'article UG 7 du règlement du plan local d'urbanisme. En revanche, il résulte de l'article précité que lorsqu'une construction existe, en limite séparative sur le terrain voisin, le bâtiment à édifier peut s'y adosser à condition qu'il respecte également la longueur du mur formant limite. Ce faisant, les rédacteurs du plan local d'urbanisme ont entendu, sans commettre d'erreur manifeste d'appréciation ni en tout état de cause empêcher la réalisation de décrochés sur une construction nouvelle dès lors que cette dernière respecterait les distances d'implantation, imposer au pétitionnaire que son projet respecte le gabarit de la construction implantée en limite séparative dès lors que ledit projet ne respecte la distance de retrait de 4 mètres que l'article UG 7 pose pour principe. Il suit de là que le projet litigieux, qui ne s'adossait à la construction existante que par un décroché ne représentant qu'un tiers de la longueur totale du bâtiment B, qui excède donc largement celle de la partie du bâtiment implantée en limite séparative sur la parcelle AE 104, méconnaissait les dispositions de l'article UG 7, ainsi que l'a exactement jugé le tribunal administratif de Cergy-Pontoise.

7. Il résulte de tout ce qui précède que la société Colbert Promotion n'est pas fondée à se plaindre de ce que le tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande. Il y a lieu, par suite, de rejeter ses conclusions aux fins d'annulation de l'arrêté du 15 février 2019 ainsi que celles présentées aux fins d'injonction.

Sur les frais liés au litige :

8. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de la commune de Saint-Gratien, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement de la somme que la société Colbert Promotion demande au titre des frais exposés par elle. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions de la commune présentées sur le même fondement.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de la société Colbert Promotion est rejetée.

Article 2 : Les conclusions de la commune de Saint-Gratien présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la SASU Colbert Promotion et à la commune de Saint-Gratien.

Délibéré après l'audience du 6 juillet 2023, à laquelle siégeaient :

M. Albertini, président de chambre,

M. Mauny, président-assesseur,

Mme Villette, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 30 août 2023.

Le rapporteur,

O. MAUNYLe président,

P.-L. ALBERTINILa greffière,

S. DIABOUGA

La République mande et ordonne au préfet du Val-d'Oise en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme

La greffière,

N° 20VE03444 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 20VE03444
Date de la décision : 30/08/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

68-03-025-03 Urbanisme et aménagement du territoire. - Permis de construire. - Nature de la décision. - Refus du permis.


Composition du Tribunal
Président : M. ALBERTINI
Rapporteur ?: M. Olivier MAUNY
Rapporteur public ?: Mme MOULIN-ZYS
Avocat(s) : SAS HUGLO LEPAGE AVOCATS

Origine de la décision
Date de l'import : 03/09/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2023-08-30;20ve03444 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award