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19/09/2023 | FRANCE | N°21VE02502

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 1ère chambre, 19 septembre 2023, 21VE02502


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société à responsabilité limitée (SARL) D... a demandé au tribunal administratif de Versailles de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre de l'exercice clos en 2011 et des rappels de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été réclamés au titre de la période du 1er octobre 2010 au 30 septembre 2013 et de rétablir le déficit reportable qu'elle a déclaré au titre des exercices clos en 2012 et 2013.

Par un

jugement n° 1903861 du 25 juin 2021, le tribunal administratif de Versailles a rejeté sa d...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société à responsabilité limitée (SARL) D... a demandé au tribunal administratif de Versailles de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre de l'exercice clos en 2011 et des rappels de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été réclamés au titre de la période du 1er octobre 2010 au 30 septembre 2013 et de rétablir le déficit reportable qu'elle a déclaré au titre des exercices clos en 2012 et 2013.

Par un jugement n° 1903861 du 25 juin 2021, le tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 25 août 2021, la SARL D..., représentée par Me Planchat, avocat, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) de prononcer la décharge des impositions mises à sa charge au titre des exercices 2011 à 2013 ;

3°) de mettre à la charge de l'État la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le jugement est insuffisamment motivé, en ce que le tribunal s'est contenté d'affirmer que le pourcentage des frais de clôture admis en déduction par l'administration est suffisamment motivé dans la proposition de rectification et en ce qu'il a omis d'exposer les raisons pour lesquelles les premiers juges ont considéré que les dépenses exposées en vue du déplacement de son siège social n'avaient pas été engagées dans son intérêt ;

- la proposition de rectification est insuffisamment motivée, au vu des exigences de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales, en ce qui concerne les modalités de détermination du pourcentage des frais de réfection d'une clôture admis en déduction ;

- dès lors que sa comptabilité n'a pas été écartée et doit être regardée comme probante, l'administration fiscale ne pouvait pas légalement reconstituer la taxe sur la valeur ajoutée (TVA) collectée en retenant le montant du chiffre d'affaires comptabilisé, corrigé de la variation des comptes clients entre le début et la fin de l'exercice ;

- le solde débiteur du compte courant de la SCI La Calidusienne dans sa comptabilité à la clôture de son exercice en 2013 n'a pas pour conséquence de réduire la variation de son actif net au titre de cet exercice ;

- les dépenses engagées pour régler le loyer du terrain et aménager le terrain qui devait accueillir son nouveau siège social ont été engagées dans son intérêt et sont de ce fait déductibles de son bénéfice imposable.

Par un mémoire en défense, enregistré le 13 janvier 2022, le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique conclut au non-lieu à statuer en ce qui concerne le rétablissement du déficit reportable au titre de l'exercice clos au 30 septembre 2013, à l'irrecevabilité des conclusions à fin de décharge des rappels de TVA déductible relatifs aux travaux de réhabilitation du terrain loué à la SCI La Calidusienne et au rejet du surplus des conclusions de la requête.

Il fait valoir que :

- la rectification relative au compte débiteur au nom de la SCI La Calidusienne est abandonnée ;

- les conclusions visant les rappels de TVA déductible relatifs aux travaux de réhabilitation du terrain loué à la SCI La Calidusienne ne sont assorties d'aucun moyen ;

- les autres moyens soulevés par la SARL D... ne sont pas fondés.

Par ordonnance du 27 juillet 2023, la clôture d'instruction a été fixée au 28 août 2023 à 12 heures en application de l'article R. 613-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Tar,

- et les conclusions de M. Lerooy, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. La SARL D... a pour objet la location de camions avec chauffeur et bennes. Elle a fait l'objet d'une vérification de comptabilité à l'issue de laquelle l'administration fiscale lui a notifié des rappels de taxe sur la valeur ajoutée au titre de la période du 1er octobre 2010 au 30 septembre 2013, des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés au titre de l'exercice clos en 2011 et la réduction de son déficit reportable au titre des exercices clos en 2012 et 2013. Elle relève appel du jugement du 25 juin 2021 par lequel le tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande de décharge de ces suppléments d'impôt et de rétablissement de ses déficits reportables et ne présente en appel que des conclusions à fin de décharge.

Sur l'étendue du litige :

2. Par son mémoire en défense enregistré le 13 janvier 2022, le ministre a indiqué que le déficit reportable de la SARL D... au titre de l'exercice clos le 30 septembre 2013 était rétabli à hauteur de la somme de 11 134 euros. La SARL D... n'ayant pas présenté en appel de conclusions aux fins de rétablissement de son déficit reportable, il n'y a pas lieu de constater le non-lieu à statuer.

Sur la régularité du jugement :

3. Aux termes de l'article 9 du code de justice administrative : " Les jugements sont motivés ".

4. En premier lieu, le tribunal a répondu aux points 2 et 3 du jugement attaqué au moyen tiré de l'insuffisance de motivation de la proposition de rectification et suffisamment précisé les motifs pour lesquels il a estimé que cette proposition était suffisamment motivée en ce qui concerne le pourcentage des dépenses de réparation de clôture admis en déduction.

5. En second lieu, la SARL D... soutient que le jugement est insuffisamment motivé, faute d'expliquer les raisons pour lesquelles le tribunal a considéré que les dépenses qu'elle a exposées en vue du déménagement de son siège social sur le terrain appartenant à la SCI La Calidusienne n'ont pas été engagées dans son intérêt. Toutefois, le jugement attaqué mentionne, à cet effet, que le montant du loyer excédait l'usage possible de ce terrain et que l'intérêt pour la SARL D... de supporter à la place de la SCI les frais de dépollution de ce terrain n'était pas démontré, dès lors que le terrain et les bâtiments ne présentaient pas des caractéristiques empêchant la SCI La Calidusienne de les louer à d'autres sociétés et que les travaux de construction n'étaient pas commencés en 2014. Le moyen manque en fait.

Sur la régularité de la procédure d'imposition :

6. Il y a lieu d'écarter, par adoption de motifs retenus à bon droit par les premiers juges aux points 2 et 3 du jugement attaqué, le moyen tiré de ce que la proposition de rectification du 4 septembre 2014 serait insuffisamment motivée au vu des exigences de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales, s'agissant du chef de rectification relatif à la taxe sur la valeur ajoutée grevant des frais de remplacement du grillage bornant le terrain d'assiette du siège social de la SARL D....

Sur le bien-fondé des impositions :

En ce qui concerne la taxe sur la valeur ajoutée collectée :

7. Aux termes de l'article R. 194-1 du livre des procédures fiscales : " Lorsque, ayant donné son accord à la rectification ou s'étant abstenu de répondre dans le délai légal à la proposition de rectification, le contribuable présente cependant une réclamation faisant suite à une procédure contradictoire de rectification, il peut obtenir la décharge ou la réduction de l'imposition, en démontrant son caractère exagéré ". La SARL D... a présenté des observations sur la proposition de rectification du 4 septembre 2014, par lesquelles elle indique explicitement accepter le chef de rehaussement relatif à la taxe sur la valeur ajoutée collectée sur la période correspondant à l'exercice clos en 2013. La SARL D... supporte en conséquence la charge de la preuve de l'exagération des impositions correspondant à ce rehaussement.

8. Aux termes de l'article 269 du code général des impôts : " (...) 2. La taxe est exigible : / (...) c) Pour les prestations de services autres que celles visées au b bis, lors de l'encaissement des acomptes, du prix, de la rémunération ou, sur option du redevable, d'après les débits (...) ". En l'absence de remise en cause du caractère régulier, sincère et probant de la comptabilité, l'administration fiscale ne peut, pour apporter la preuve qui lui incombe, sauf attribution particulière de la charge de la preuve, de ce que la société n'aurait pas déclaré la taxe sur la valeur ajoutée grevant l'ensemble des recettes encaissées, recourir à une méthode d'évaluation moins précise que les écritures comptabilisées. Il lui est en revanche loisible de procéder à des tests de cohérence des déclarations de taxe sur la valeur ajoutée en les rapprochant d'autres éléments tirés de la comptabilité de la société, tels les soldes des comptes de produits et ceux des comptes des clients, corrigés de leurs variations entre l'ouverture et la clôture de la période considérée.

9. Pour retenir une insuffisance de déclaration de chiffre d'affaires de 107 573,74 euros HT au titre de l'exercice clos en 2013, le service vérificateur s'est fondé sur les états de rapprochements, établis par le comptable de la société requérante, entre le chiffre d'affaires indiqué sur les déclarations mensuelles de TVA et le chiffre d'affaires théoriquement encaissé correspondant à celui comptabilisé aux comptes de produits de classe 7, ramené TTC, corrigé de la variation entre l'ouverture et la clôture de ces exercices du montant des factures TTC à établir et des soldes des comptes clients La SARL D... soutient que l'administration fiscale, qui n'a pas remis en cause le caractère probant de sa comptabilité, ne pouvait pas légalement reconstituer le montant de ses recettes au cours de la période correspondant à l'exercice clos en 2013 en retenant le montant du chiffre d'affaires comptabilisé corrigé de la variation des comptes clients entre le début et la fin de l'exercice. Toutefois, en se bornant à contester la méthode de reconstitution des recettes encaissées appliquée par l'administration fiscale, sans apporter aucun élément de nature à justifier les incohérences relevées par l'administration fiscale, la SARL D... n'établit pas, comme elle en a la charge, que le montant de taxe sur la valeur ajoutée encaissée résultant de cette reconstitution serait exagéré.

En ce qui concerne l'impôt sur les sociétés :

10. La SARL D... soutient que c'est à tort que l'administration fiscale a remis en cause la déductibilité de son bénéfice imposable des loyers qu'elle a versé à la SCI La Calidusienne, en tant que ce loyer excédait le montant hors taxe mensuel de 117 euros, et les frais de dépollution du terrain appartenant à cette SCI, au motif que ce loyer et ces dépenses étaient dépourvus d'intérêt pour l'entreprise. Il est constant qu'au cours des années d'imposition en litige, le siège social de la SARL D... était situé à Chauffour-lès-Etrechy, où elle disposait de locaux adaptés à son activité et que le terrain à usage horticole en état d'abandon acquis par la SCI La Caludisienne n'était occupé par la SARL D... que pour le stationnement de deux camions. Dans ces conditions, le service était fondé à ramener la part déductible du loyer à proportion de l'utilité que pouvait en retirer la société vérifiée et à considérer que les dépenses de dépollution et d'aménagement de ce terrain n'étaient pas déductible dès lors qu'elles ne lui incombaient pas. Si la SARL D... soutient qu'elle avait intérêt à supporter ces frais de remise en état du terrain qui était destiné à accueillir son siège social, eu égard à l'étroite communauté d'intérêts entre la SARL D..., détenue à 27,78 % par Mme B... D..., gérante statutaire, à 27,78 % par M. C... D..., et 44,44 % par M. A... D..., et la SCI La Calidusienne, détenue à parts égales entre Mme B... D... et M. C... D..., de telles dépenses doivent être regardées, dans la mesure où elles n'ont pas un caractère locatif, comme ayant été exposées dans l'intérêt personnel du bailleur, dès lors qu'elles ont eu en réalité pour objet principal et pour effet d'accroître le patrimoine de ce dernier. L'administration fiscale était par suite fondée à les réintégrer au résultat imposable de la SARL D....

11. Enfin, si la société requérante soutient que la rectification relative au solde débiteur de la SCI La Caludisienne au titre de l'exercice 2013 n'est pas justifiée en l'absence de diminution de l'actif net à la clôture de l'exercice, ce moyen est inopérant dès lors, d'une part, qu'elle n'a pas présenté en appel de conclusions tendant au rétablissement de son déficit reportable de cet exercice, et d'autre part, en tout état de cause, que cette rectification a été expressément abandonnée par le ministre dans son mémoire en défense en appel.

12. Il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'examiner la fin de non-recevoir opposée en défense, que la SARL D... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande. La requête doit par suite être rejetée, y compris ses conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

D É C I D E :

Article 1er : La requête de la SARL D... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la SARL D... et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.

Délibéré après l'audience du 5 septembre 2023, à laquelle siégeaient :

M. Olson, président de la cour,

Mme Dorion, présidente-assesseure,

M. Tar, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 19 septembre 2023.

Le rapporteur,

G. TAR Le président,

T. OLSONLa greffière,

S. LOUISERELa République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme

La greffière,

2

N°21VE02502


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 21VE02502
Date de la décision : 19/09/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

Contributions et taxes - Impôts sur les revenus et bénéfices - Règles générales - Impôt sur les bénéfices des sociétés et autres personnes morales.

Contributions et taxes - Taxes sur le chiffre d'affaires et assimilées - Taxe sur la valeur ajoutée.


Composition du Tribunal
Président : M. OLSON
Rapporteur ?: M. Gabriel TAR
Rapporteur public ?: M. LEROOY
Avocat(s) : CABINET NATAF et PLANCHAT

Origine de la décision
Date de l'import : 24/09/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2023-09-19;21ve02502 ?
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