La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

20/11/2002 | FRANCE | N°2001/38

France | France, Cour d'appel d'agen, 20 novembre 2002, 2001/38


DU 20 Novembre 2002 ------------------------- F.C/M.F.B

COMITE REGIONAL DE RUGBY DU PERIGORD D'AGENAIS COMITE REGIONAL DE RUGBY D'ARMAGNAC BIGORRE S.A. LA SAUVEGARDE C/ Frédéric X..., C P A M DE LOT ETGARONNE RG Y... : 01/00038 - A R R E T Y...° - ----------------------------- Prononcé à l'audience publique du vingt Novembre deux mille deux, par Bernard Z..., Président de Chambre. LA COUR D'APPEL D'AGEN, 1ère Chambre dans l'affaire, ENTRE : COMITE REGIONAL DE RUGBY DU PERIGORD D'AGENAIS pris en la personne de son président, demeurant en cette qualité audit siège 2 rue Pierre d

e Coubertin 47000 AGEN COMITE REGIONAL DE RUGBY D'ARMAGNAC BIGO...

DU 20 Novembre 2002 ------------------------- F.C/M.F.B

COMITE REGIONAL DE RUGBY DU PERIGORD D'AGENAIS COMITE REGIONAL DE RUGBY D'ARMAGNAC BIGORRE S.A. LA SAUVEGARDE C/ Frédéric X..., C P A M DE LOT ETGARONNE RG Y... : 01/00038 - A R R E T Y...° - ----------------------------- Prononcé à l'audience publique du vingt Novembre deux mille deux, par Bernard Z..., Président de Chambre. LA COUR D'APPEL D'AGEN, 1ère Chambre dans l'affaire, ENTRE : COMITE REGIONAL DE RUGBY DU PERIGORD D'AGENAIS pris en la personne de son président, demeurant en cette qualité audit siège 2 rue Pierre de Coubertin 47000 AGEN COMITE REGIONAL DE RUGBY D'ARMAGNAC BIGORRE prise en la personne de son président, demeurant en cette qualité audit siège 18 rue Abbé de Coubertin 47000 AGEN S.A. LA SAUVEGARDE prise en la personne de son représentant légal actuellement en fonctions domicilié en cette qualité au siège 140 rue anatole France 92597 LEVALLOIS PERRET CEDEX représentés par Me TANDONNET, avoué assistés de la SCP LETU CAYLA, avocats APPELANTS d'un jugement du Tribunal de Grande Instance AGEN en date du 05 Décembre 2000 D'une part, ET :

Monsieur Frédéric X... né le 03 Juillet 1981 à FUMEL (47500) Demeurant 127 avenue Jean Jaurès 47500 FUMEL représenté par Me Solange TESTON, avoué assisté de Me Philippe LEBOIS, avocat CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DE LOT ET GARONNE prise en la personne de son représentant légal actuellement en fonctions domicilié en cette qualité au siège 2 rue Diderot 47014 AGEN CEDEX représentée par Me Jean Michel BURG, avoué INTIMES D'autre part, a rendu l'arrêt contradictoire. La cause a été débattue et plaidée en audience publique, le 16 Octobre 2002 sans opposition des parties, devant François CERTNER, et Arthur ROS Conseillers rapporteurs assisté de Monique FOUYSSAC, greffière. Les Conseillers rapporteurs ont, dans leur délibéré, rendu compte à la Cour composée, outre eux-mêmes, de Bernard Z... président de chambre, en application des dispositions

des articles 945-1 et 786 du Nouveau Code de Procédure Civile, et qu'il en ait été délibéré par les magistrats ci-dessus nommés, les parties ayant été avisées de la date à laquelle l'arrêt serait rendu. EXPOSE DU LITIGE

Dans des conditions de régularité de forme et de délai non discutées, le COMITE REGIONAL DE RUGBY DU PERIGORD-AGENAIS, le COMITE REGIONAL DE RUGBY D'ARMAGNAC BIGORRE et la S.A. LA SAUVEGARDE ont interjeté appel à l'encontre de Frédéric X... et de la C.P.A.M. du LOT ET GARONNE d'un Jugement rendu par le Tribunal de Grande Instance d'AGEN le 05/10/00:

* ayant donné acte à la S.A. LA SAUVEGARDE de son intervention volontaire aux lieu et place de la G.M.F. et mis cette dernière hors de cause,

* ayant déclaré le COMITE REGIONAL DE RUGBY DU PERIGORD-AGENAIS et le COMITE REGIONAL DE RUGBY D'ARMAGNAC BIGORRE solidairement responsables du préjudice subi par Frédéric X... sur le fondement de l'art. 1384 alinea 1er du Code Civil et les ayant dit tenus à sa réparation intégrale in solidum avec leur compagnie d'assurances la S.A. LA SAUVEGARDE,

* ayant condamné le COMITE REGIONAL DE RUGBY DU PERIGORD-AGENAIS et le COMITE REGIONAL DE RUGBY D'ARMAGNAC BIGORRE à verser à la C.P.A.M. du LOT ET GARONNE la somme de 13.259,09 francs représentant le montant provisoire de ses débours en réservant les droits de cette dernière quant à ses débours ultérieurs,

* ayant avant dire droit sur l'indemnisation de la victime ordonné une mesure d'expertise médicale,

* les ayant condamné in solidum à payer à Frédéric X... une provision de 200.000 francs,

* ayant prononcé l'exécution provisoire de la décision et réservé tant les demandes fondées sur l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile que les dépens;

Les faits de la cause ont été relatés par le premier Juge en des énonciations auxquelles la Cour se réfère expressément;

Les appelants concluent à l'infirmation de la décision entreprise et au rejet des prétentions de Frédéric X... aux motifs suivants:

- l'arbitre du match et le délégué sportif ainsi que deux témoins ont rapporté que Frédéric X... avait été blessé lors d'une mêlée sans qu'il soit possible de préciser dans quelles circonstances alors qu'il n'y avait eu, ni mauvais geste, ni irrégularité,

- le témoignage unique d'une personne non identifiée sur lequel s'est fondé le premier Juge est totalement imprécis et sans portée,

- la preuve de ce que les règles strictes et précises qui régissent les mêlées auraient été transgressées n'est pas rapportée,

- rien ne permet d'affirmer que l'un des participants de la rencontre aurait joué un rôle causal et encore moins fautif à l'origine des blessures de l'intimé,

- la premier Juge s'est trompé en recherchant cumulativement et non alternativement la responsabilité éventuelle du club auquel appartenait la victime ou de celui de l'équipe adverse, sauf à admettre une responsabilité collective et indifférenciée,

- les conditions de la responsabilité en pareille matière ne sont pas

réunies: aucun acte de violence volontaire n'est établi ni aucun acte illicite contraire aux lois et même à l'esprit de ce sport d'affrontements et de contacts, dont les risques sont connus et acceptés de ses participants,

- l'effondrement éventuel de la mélée tient à plusieurs causes parfois fortuites et à des facteurs antagonistes et ne ressortent pas nécessairement d'un acte irrégulier: état du terrain, mauvais positionnement des joueurs adverses, voire de ses propres coéquipiers, qui ne peuvent pas être immédiatement décélés par l'arbitre;

De son côté, Frédéric X... conclut à la confirmation du Jugement querellé et à la condamnation des appelants à lui payer la somme de 1.500 Euros par application de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile;

Il soutient que:

- la responsabilité des comités appelants est recherchée sur le fondement de l'art. 1384 alinea 1er du fait des dommages causés par les joueurs de l'une ou l'autre équipe, sans qu'il soit possible de les identifier précisemment,

- les séquelles très graves dont il se trouve atteint résultent de violences dont il a été victime ou à tout le moins d'une action de jeu anormale car, s'il n'a pû identifier celui qui lui a occasionné les blessures, il est constant qu'il a reçu un choc à hauteur des vertèbres ou une poussée sur celles-ci extrèmement violente lors de l'effondrement d'une mêlée ordonnée,

- un tel effondrement, s'il était volontaire, ne constitue pas une phase de jeu régulière et fait l'objet de sanctions de la part du corps arbitral dès lors que le responsable en est identifié,

- la Jurisprudence n'exige pas la preuve de coups ou de brutalités

mais seulement l'existence d'un rôle causal entre les faits et les blessures qui peuvent parfaitement résulter d'une action de jeu illicite, tel un effondrement volontaire,

- cette preuve d'un rôle causal est rapportée par le fait que les joueurs étaient mal positionnés au moment de l'entrée en mêlée,

- la mise en jeu de la responsabilité fondée sur les dispositions de l'art. 1384 alinea 1er du Code Civil exige seulement l'existence d'un rôle causal sans requérir nécessairement la démonstration d'actes de violences volontaires,

- s'agissant d'un régime de responsabilité de plein droit fondé sur une présomption de responsabilité, il suffit d'établir à l'encontre du gardien l'existence d'un pouvoir de garde et du pouvoir de diriger l'activité d'autrui -ce qui est le cas pour les Comités en cause- pour le rendre responsable sans avoir à démontrer que le fait d'autrui présente un caractère fautif de sorte que les appelants ne sont pas fondés à opposer à la victime la théorie de l'acceptation du risque;

Pour sa part, la C.P.A.M. du LOT ET GARONNE conclut à la confirmation de la décision attaquée en ce qui concerne la responsabilité et le principe des condamnations prononcées;

Elle demande à la Cour de constater que sa créance de débours provisoires s'élève au titre des prestations primaires à la somme de 291.024,96 Euros et au titre des frais d'hébergement annuels à l'IME de TALENCE à la somme de 61.883,43 Euros;

Elle réclame la condamnation du COMITE REGIONAL DE RUGBY DU PERIGORD-AGENAIS, du COMITE REGIONAL DE RUGBY D'ARMAGNAC BIGORRE et de la S.A. LA SAUVEGARDE à lui payer:

- la somme provisionnelle de 352.908,39 Euros assortie des intérêts légaux,

- les intérêts légaux calculés sur la somme de 2.021,34 Euros à compter de la demande en Justice formée devant le premier Juge,

- la somme de 762,25 Euros en vertu de l'art. 376-1 du Code de la Sécurité Sociale,

- la somme de 304,90 Euros par application de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile;

MOTIFS DE LA DECISION

Il est constant que Frédéric X..., licencié auprès de la FEDERATION FRANCAISE DE RUGBY et joueur du COMITE REGIONAL DE RUGBY DU PERIGORD-AGENAIS a été grièvement blessé au cours d'un match disputé à TOULOUSE le 28/02/99 au titre de la finale junior TADDEI lors de l'effondrement d'une mêlée ordonnée;

Dans son rapport, l'arbitre mentionne simplement que Frédéric X... a été évacué par le SAMU à la 4ème minute de la rencontre;

Dans son rapport, le délégué sportif indique la même chose et ajoute:

"accident de jeu, mêlée effondrée";

Deux témoins, Bernard A... et Gilbert B..., dans des attestations circonstanciées, expliquent que la mêlée fermée s'est organisée au commandement, "sur l'ordre et les recommandations" de l'arbitre, et qu'à la suite de l'impact des deux packs, elle s'est effondrée;

Tous deux déclarent n'avoir constaté aucun "mauvais geste, aucune bagarre, aucune brutalité ou acte répréhensible";

Du reste, l'arbitre n'a pas sifflé de pénalité;

Seule la déclaration effectuée auprès de la compagnie d'assurance par le père de Frédéric X... et un dirigeant mal identifié du club de

la victime fait état d'un "mauvais positionnement lors d'une entrée en mêlée, les joueurs n'étant pas prêts, dû à l'incompétence de l'arbitre";

L'art. 1384 alinea 1er du Code Civil dispose notamment que l'on est responsable des personnes dont on doit répondre;

Il est de Jurisprudence établie que les groupements sportifs ayant pour mission d'organiser, de diriger et de contrôler l'activité de leurs membres -tels était le cas des Comités en cause, dont il n'est de surcroit pas contesté qu'ils étaient les maîtres d'oeuvre de la rencontre à l'occasion de laquelle le joueur a été blessé- au cours des compétitions sportives auxquelles ceux-ci participent sont responsables au sens de l'article 1384 alinea 1er du Code Civil des dommages qu'ils causent à cette occasion, qu'ils soient ou non identifiés;

L'effondrement d'une mêlée fermée ne peut être que la conséquence d'un mauvais positionnement d'un ou plusieurs joueurs ou d'une poussée anormale, soit latérale, soit vers le bas;

Cet effondrement est nécessairement le résultat d'une faute, certes courante, mais volontaire et de nature technique; il s'agit d'une violation des régles de positionnement de mise en mêlée ou d'une poussée irrégulière, d'une faute non dans le jeu mais contre le jeu; Il convient en conséquence, par substitution de motifs, de confirmer la décision déférée, sauf en ce qui concerne la C.P.A.M. du LOT ET GARONNE, sachant que:

1 ) les conditions de mise en oeuvre des dispositions légales précitées sont réunies: le dommage a été produit par une faute contre le jeu d'un ou plusieurs des participants de la mêlée; cette faute a joué un rôle causal dans les blessures subies par la victime à la

suite de l'effondrement de la mêlée ordonnée,

2 ) la notion d'acceptation du risque est insusceptible de faire obstacle à l'application du régime de responsabilité de plein droit dès lors qu'a été commise une faute volontaire, ce qui est le cas en l'espèce;

La créance de la C.P.A.M. du LOT ET GARONNE est justifiée au vu des pièces produites; nul ne disconvient que ses débours provisoires s'élèvent au titre des prestations primaires à la somme de 291.024,96 Euros et au titre des frais d'hébergement annuels à l'IME de TALENCE à la somme de 61.883,43 Euros;

Il convient en conséquence de condamner in solidum le COMITE REGIONAL DE RUGBY DU PERIGORD-AGENAIS, le COMITE REGIONAL DE RUGBY D'ARMAGNAC BIGORRE et la S.A. LA SAUVEGARDE à lui payer:

- la somme provisionnelle de 352.908,39 Euros assortie des intérêts légaux,

- les intérêts légaux calculés sur la somme de 2.021,34 Euros à compter du 08/03/00, date de la demande en Justice formée devant le premier Juge;

L'équité et la situation économique commandent d'allouer à Frédéric X... le remboursement des sommes exposées par lui pour la défense de ses intérêts;

Il convient de lui accorder la somme de 1.500 Euros en application de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile;

L'équité et la situation économique commandent d'allouer à la C.P.A.M. du LOT ET GARONNE le remboursement des sommes exposées pour sa défense;

Il convient de lui accorder la somme de 300 Euros en application de

l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile et celle de 300 Euros en vertu de l'art. 376-1 du Code de la Sécurité Sociale;

Les dépens d'appel suivent le sort du principal; PAR CES MOTIFS LA COUR

Statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort après en avoir délibéré conformément à la Loi,

Confirme la décision déférée par motifs substitués,

Condamne in solidum le COMITE REGIONAL DE RUGBY DU PERIGORD-AGENAIS, le COMITE REGIONAL DE RUGBY D'ARMAGNAC BIGORRE et la S.A. LA SAUVEGARDE à payer à:

etgt; Frédéric X... la somme de 1.500 Euros (mille cinq cents Euros) en application de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile, etgt; la C.P.A.M. du LOT ET GARONNE la somme provisionnelle de 352.908,39 Euros (trois cent cinquante deux mille neuf cent huit Euros trente neuf Cents)assortie des intérêts légaux, les intérêts légaux calculés sur la somme de 2.021,34 Euros (deux mille vingt et un Euros trente quatre Cents) à compter du 08/03/00, la somme de 300 Euros ( trois cents Euros) en application de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile et celle de 300 Euros ( trois cents Euros) en vertu de l'art. 376-1 du Code de la Sécurité Sociale,

Condamne in solidum le COMITE REGIONAL DE RUGBY DU PERIGORD-AGENAIS, le COMITE REGIONAL DE RUGBY D'ARMAGNAC BIGORRE et la S.A. LA SAUVEGARDE aux entiers dépens d'appel,

Autorise les Avoués de la cause à recouvrer directement ceux des dépens dont ils auraient fait l'avance sans avoir reçu provision.

Le présent arrêt a été signé par Bernard Z..., Président de Chambre et Monique FOUYSSAC, Greffière. LA GREFFIERE LE PRESIDENT M. FOUYSSAC B. Z...


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'agen
Numéro d'arrêt : 2001/38
Date de la décision : 20/11/2002

Analyses

RESPONSABILITE DELICTUELLE OU QUASI DELICTUELLE - Personnes dont on doit répondre - Membres des associations sportives - Activité au cours des compétitions sportives - Joueur - Violation des règles du jeu

Il est de jurisprudence établie que les groupements sportifs ayant pour mission d'organiser, de diriger er de contrôler l'activité de leurs membres au cours des compétitions sportives auxquelles ceux-ci participent, sont responsables, au sens de l'article 1384 alinéa 1 du Code Civil, des dommages qu'ils causent à cette occasion, qu'ils soient ou non identifiés. Tel est le cas lors de l'effondrement d'une mêlée, qui est nécessairement le résultat d'une faute volontaire et de nature technique et qui a joué un rôle causal dans les blessures subies par la victime. La notion d'acceptation du risque est insusceptible de faire obstacle à l'application du régime de responsabilité de plein droit dès lors qu'a été commise une faute volontaire, ce qui est le cas en l'espèce


Références :

Code civil, article 1384 alinéa 1

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.agen;arret;2002-11-20;2001.38 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award