La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

07/12/2005 | FRANCE | N°JURITEXT000006947155

France | France, Cour d'appel d'agen, Chambre civile 1, 07 décembre 2005, JURITEXT000006947155


ARRÊT DU 7 DÉCEMBRE 2005 FT/SBA ----------------------- 04/00459 ----------------------- S.A.S SOGARA FRANCE - CARREFOUR C/ Melle X... (Héritière) Damien LABAT (Héritier) Sébastien LABAT (Héritier) Michel LABAT décédé le 29 mai 2003 ----------------------- ARRÊT no 407 COUR D'APPEL D'AGEN Chambre Sociale Prononcé à l'audience publique et solennelle du sept décembre deux mille cinq par René SALOMON, Premier Président, assisté de Dominique SALEY, Greffière La COUR d'APPEL D'AGEN, CHAMBRE SOCIALE, dans l'affaire ENTRE : S.A.S SOGARA FRANCE - CARREFOUR 1 rue Jean Mermoz 91080 COU

RCOURONNES Rep/assistant : la SCP HENRI TANDONNET (avoués à la Co...

ARRÊT DU 7 DÉCEMBRE 2005 FT/SBA ----------------------- 04/00459 ----------------------- S.A.S SOGARA FRANCE - CARREFOUR C/ Melle X... (Héritière) Damien LABAT (Héritier) Sébastien LABAT (Héritier) Michel LABAT décédé le 29 mai 2003 ----------------------- ARRÊT no 407 COUR D'APPEL D'AGEN Chambre Sociale Prononcé à l'audience publique et solennelle du sept décembre deux mille cinq par René SALOMON, Premier Président, assisté de Dominique SALEY, Greffière La COUR d'APPEL D'AGEN, CHAMBRE SOCIALE, dans l'affaire ENTRE : S.A.S SOGARA FRANCE - CARREFOUR 1 rue Jean Mermoz 91080 COURCOURONNES Rep/assistant : la SCP HENRI TANDONNET (avoués à la Cour) et la SCP ALQUIE-VINCENT-LIEBGOTT (avocats au barreau de BAYONNE) DEMANDERESSE AU RENVOI CASSATION prononcé par arrêt du 9 décembre 2003 cassant et annulant l'arrêt de la Cour d'Appel de PAU en date du 22 Mai 2000 d'une part, ET : Melle X... LABAT Lotissement Y... de la Vierge 64990 LAHONCE M. Damien LABAT Lotissement Y... de la Vierge 64990 LAHONCE M. Sébastien LABAT Z... du Maréchal Joffre 65000 TARBES ès-qualités d'héritiers de Michel LABAT décédé le 29 mai 2003 Rep/assistant : la SCP GUY NARRAN (avoués à la Cour) et la SCPA VIOLANTE RAYNAL-VIOLANTE HAUCIARCE-REY (avocats au barreau de BAYONNE) DÉFENDEURS AU RENVOI

d'autre part,

A rendu l'arrêt contradictoire suivant après que la cause ait été débattue et plaidée en audience publique et solennelle, tenue en robes rouges le 9 novembre 2005 devant René SALOMON, Premier Président, Jean-Louis BRIGNOL et Bernard BOUTIE, Présidents de Chambre, Francis TCHERKEZ et Françoise MARTRES, Conseillers, assistés de Solange BELUS, Greffière, et après qu'il en ait été délibéré par les magistrats du siège ayant assisté aux débats, les parties ayant été avisées de la date à laquelle l'arrêt serait rendu. * * * FAITS ET PROCÉDURE

Michel LABAT a été employé par la S.A. SOGARA FRANCE en qualité d'ouvrier boulanger professionnel depuis le 23 avril 1970 et a été licencié pour faute grave en date du 18 août 1997 (lettre du 16 août 1997).

Par déclaration écrite enregistrée au greffe le 2 septembre 1997, Michel LABAT a fait appeler la S.A SOGARA FRANCE devant le conseil de prud'hommes de Bayonne afin de la voir condamnée à lui payer les sommes de :

- 26.247,14 F à titre d'indemnité de préavis,

- 27.996,94 F à titre d'indemnité de licenciement,

-236.224,26 F à titre de dommages et intérêts pour rupture abusive.

Il fait valoir que si le samedi 9 août, il a eu un différend avec Monsieur A... son collègue de travail, ce différend a cessé à la suite de l'intervention de Monsieur B..., responsable du rayon boulangerie, et il aurait repris son travail sans donner de gifle à

Monsieur A...

La S.A. SOGARA FRANCE a conclu au débouté de Michel LABAT de ses demandes en soutenant que l'altercation intervenue avec Monsieur A... et l'agression de celui-ci sur le lieu de travail était constitutif d'une faute grave, la victime ayant porté plainte pour violences et produit un certificat médical, avant de retirer sa plainte en date du 2 décembre 1997 et d'établir le 4 décembre 1997 une attestation pour laquelle il affirmait qu'il n'y aurait pas eu de coups violents et que lui-même aurait été manipulé par son supérieur. Le conseil de prud'hommes a estimé que la S.A. SOGARA FRANCE ne rapportait pas la preuve que Michel LABAT aurait exercé des violences physiques à l'encontre de son collègue de travail.

Qu'elle peut seulement justifier d'une dispute verbale entre les deux salariés ayant pour origine une divergence sur la manière d'exécuter la prestation de travail entre un ouvrier ayant 27 ans d'ancienneté à son poste et un second plus récemment engagé.

Qu'il n'est démontré ni même allégué que cette dispute et le comportement de Michel LABAT était de nature à rendre impossible la continuation du contrat de travail et à imposer la rupture immédiate de celui-ci, en raison du retentissement du fait dénoncé sur la bonne marche de l'entreprise. et par décision du 25 février 1999 le conseil de prud'hommes de Bayonne a :

- dit que le licenciement de Michel LABAT était intervenu de manière abusive,

- condamné la S.A. SOGARA FRANCE à payer à Michel LABAT les sommes de :

* 26.247,14 F à titre d'indemnité de préavis,

[* 27.996,64 F à titre d'indemnité de licenciement,

*] 118.112,13 F à titre de dommages et intérêts pour rupture abusive, - condamné la S.A. SOGARA FRANCE à verser à Michel LABAT une somme de 2.000 F au titre de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile,

- condamné la S.A. SOGARA FRANCE aux dépens.

La S.A. SOGARA FRANCE a fait appel le 18 mars 1999.

La cour d'appel de Pau a estimé qu'il s'ensuivait qu'au-delà même des cas visés dans le règlement intérieur, un tel comportement du salarié était d'autant plus inexcusable que l'intéressé qui avait "20 ans de maison" aurait du montrer une plus grande maîtrise, ce qui constituait une faute d'une gravité telle que le maintien du contrat de travail devenait impossible, et par arrêt du 22 mai 2000 la cour d'appel de Pau a :

- réformé le jugement entrepris en toutes ses dispositions,

- dit et jugé que le licenciement de Michel LABAT pour faute grave était justifié et qu'il est privatif du préavis et des indemnités de licenciement,

- ordonné en tant que de besoins le remboursement de sommes éventuellement versées au titre de l'exécution provisoire,

- débouté Michel LABAT de toutes ses demandes,

- dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile,

- condamné Michel LABAT aux dépens.

Sur le pourvoi formé par Michel LABAT la cour de cassation a estimé

que la cour d'appel n'avait pas méconnu les limites du litige fixées par la lettre de licenciement qui invoquait un comportement agressif du salarié ayant dégénéré en violences physiques, mais au visa des articles L.122-6, L.122-8 et L.122.9 du Code du travail, elle a relevé que pour dire que le licenciement reposait sur une faute grave, l'arrêt retient qu'il ne peut être accepté que des salariés se livrent à des règlements de compte sur leur lieu de travail et que le comportement de Michel LABAT était d'autant plus inexcusable qu'il comptait vingt ans d'ancienneté ;

Qu'en statuant ainsi, alors qu'il résultait de ses constatations que le comportement fautif présentait un caractère exceptionnel, ce dont il découlait que l'impossibilité de maintenir le salarié dans l'entreprise pendant la durée du préavis n'étaient pas caractérisée, la cour d'appel, avait, en retenant la faute grave, violé les textes susvisés ;

Elle a donc par arrêt du 9 décembre 2003 cassé et annulé, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 22 mai 2000, entre les parties, par la cour d'appel de Pau, remis en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les a renvoyées devant la cour d'appel d'Agen, condamné la S.A. SOGARA FRANCE aux dépens. MOYENS ET PRÉTENTIONS DES PARTIES

La S.A. SOGARA FRANCE soutient que cette rixe, cette altercation, est intervenue sur le lieu de travail dans le rayon boulangerie pâtisserie et que l'on imagine ce qui aurait pu se passer compte tenu de l'emportement de Michel LABAT, de son caractère énervé lorsqu'il est arrivé sur son site de travail, eu égard au matériel existant dans une boulangerie pâtisserie ;

Que le comportement de Michel LABAT est encore moins acceptable compte tenu de l'ancienneté qui était la sienne au sein du magasin

CARREFOUR ANGLET ;

Que c'est donc à tort que le conseil de prud'hommes a considéré que le licenciement de Michel LABAT n'était pas fondé sur une faute grave, ni même sur une cause réelle et sérieuse.

Elle demande donc à la cour :

- de réformer en toutes ses dispositions, le jugement rendu par le conseil de prud'hommes de Bayonne le 25 février 1999,

- de dire et juger que les faits commis le 9 août 1997 par Michel LABAT sont constitutifs de "fautes graves",

- de débouter les héritiers LABAT de l'ensemble de leurs demandes,

- de faire application de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile et de les condamner aux dépens. * * *

Pour leur part les héritiers de Michel LABAT soutiennent que le seul point établi est un différend entre deux employés qui ne relèverait si les faits étaient établis que d'un blâme disciplinaire ; que l'entretien préalable permet de constater que l'employeur ne soutient pas qu'il y ait eu des violences ou des coups ; qu'il n'y avait aucun témoin de l'incident ; que Monsieur A... autre employé concerné a parfaitement relativisé la situation dans une attestation ; que l'échange verbal même vif entre les deux salariés n'est pas de nature à justifier un licenciement, et ils demandent donc à la cour :

- de dire et juger que le licenciement dont a fait l'objet Michel LABAT, le 18 août 1997 est abusif,

- de condamner la S.A. SOGARA FRANCE - CARREFOUR à leur verser les sommes de :

* 4.001,37 ç au titre du préavis,

* 4.268,09 ç au titre de l'indemnité de licenciement,

* 36.012,16 ç au titre de l'indemnité pour rupture abusive,

outre l'intérêt au taux légal à compter de la saisine du conseil de prud'hommes le 2 septembre 1997,

- de condamner la S.A. SOGARA FRANCE - CARREFOUR au paiement de la somme de 5.000 ç en vertu de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile,

- de condamner la S.A. SOGARA FRANCE - CARREFOUR aux dépens. MOTIFS DE LA DÉCISION

Des éléments contradictoirement débattus devant la cour il s'évince le caractère très exceptionnel de l'événement qui a donné lieu par l'employeur à la procédure de licenciement, à raison de l'ancienneté du salarié, de ses fonctions, de la situation et du caractère problématique des éléments de l'altercation telle qu'elle est alléguée.

Il est en effet établi que celle-ci reste indéterminée dans ses composantes ; l'employeur étant dans l'incapacité de démontrer l'existence de violences puisque même si elles ont pu être alléguées dans un certain temps, des attestations ultérieures écartent toute hypothèse de cette nature ; le doute subsisterait-il qu'il est de règle qu'il doit profiter au salarié ; dès lors l'altercation rapportée assez indéterminée dans sa consistance et dans sa substance n'était pas de nature à perturber de façon permanente et dommageable le fonctionnement de l'entreprise et ne saurait donc être analysé comme une faute grave qui implique nécessairement une impossibilité du maintien du salarié dans l'entreprise ce qui n'était pas le cas en l'espèce ; comme sur ce point la charge de la preuve incombe au débiteur employeur à cet égard, cet événement minime ne justifie pas le licenciement de la nature sollicitée (faute grave) ; pas plus

qu'il ne saurait, à raison des circonstances indéterminées rappelées ci-dessus, s'analyser en une cause réelle et sérieuse de licenciement.s qu'il ne saurait, à raison des circonstances indéterminées rappelées ci-dessus, s'analyser en une cause réelle et sérieuse de licenciement.

C'est donc à tort que la S.A. SOGARA FRANCE s'obstine à imputer à son salarié -à l'époque- un comportement susceptible d'une procédure de licenciement.

La décision du conseil de prud'hommes doit donc être confirmée en ce qu'elle a en tiré les conséquences légales en accordant à Michel LABAT les indemnités correspondant à ce licenciement abusif, sauf à relever que la condamnation interviendra désormais en faveur de ses ayants droits et que la computation des intérêts sur les sommes allouées s'effectuera en application de l'article 1153 du Code civil. Une indemnité fondée sur les dispositions de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile est justifiée à la hauteur demandée.

La S.A. SOGARA FRANCE supportera la charge des dépens des procédures d'appel. PAR CES MOTIFS :

La cour, statuant publiquement, par arrêt contradictoire et en dernier ressort,

Statuant en suite de l'arrêt de la cour de cassation en date du 9 décembre 2003,

Confirme le jugement du conseil de prud'hommes de Bayonne en date du 25 février 1999 dans toutes ses dispositions sauf à traduire le montant des sommes allouées en euros,

Y ajoutant dit que ces sommes sont désormais dues aux ayants droits de Michel LABAT présents dans la cause, que ces sommes porteront intérêts au taux légal à compter du 2 septembre 1997 et jusqu'à parfait paiement,

Déboute les parties du surplus de leurs demandes en cause d'appel de renvoi,

Condamne la S.A. SOGARA FRANCE - CARREFOUR à payer aux intimés présents dans la cause in-solidium la somme supplémentaire de 5.000 ç en application de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile relativement aux instances d'appel,

Condamne la S.A. SOGARA FRANCE - CARREFOUR aux dépens d'appel.

Le présent arrêt a été signé par René SALOMON, Premier Président et par Dominique SALEY, Greffière présente lors du prononcé.

LA GREFFIÈRE :

LE PREMIER PRÉSIDENT :


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'agen
Formation : Chambre civile 1
Numéro d'arrêt : JURITEXT000006947155
Date de la décision : 07/12/2005
Type d'affaire : Civile

Analyses

CONTRAT DE TRAVAIL, RUPTURE - Licenciement - Cause - Cause réelle et sérieuse - Faute du salarié - Faute grave - Défaut - Applications diverses

La faute grave susceptible de justifier un licenciement implique nécessairement une impossibilité du maintien du salarié dans l'entreprise. L'altercation qui est rapportée, assez indéterminée dans sa consistance et dans sa substance, n'était pas de nature à perturber de façon permanente et dommageable le fonctionnement de l'entreprise ce qui implique nécessairement une impossibilité du maintien du salarié dans l'entreprise ce qui n'était pas le cas en l'espèce de sorte que la faute grave n'est pas caractérisée


Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.agen;arret;2005-12-07;juritext000006947155 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award