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07/09/2022 | FRANCE | N°21/00421

France | France, Cour d'appel d'Agen, Chambre civile, 07 septembre 2022, 21/00421


ARRÊT DU

07 Septembre 2022





DB/CR





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N° RG 21/00421

N° Portalis

DBVO-V-B7F-C4GC

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S.A.S.

[Adresse 5]



C/



S.A. SMA







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GROSSES le

à









ARRÊT n°











COUR D

'APPEL D'AGEN



Chambre Civile

Section commerciale







LA COUR D'APPEL D'AGEN, 1ère chambre dans l'affaire,







ENTRE :



S.A.S. CASTEL ET FROMAGET

[Adresse 2]

[Localité 1]



Représentée par Me Erwan VIMONT, avocat postulant inscrit au barreau d'AGEN et par Me Julien LAMPE, avocat plaidant inscrit au barreau de PARIS



APPELANTE d'un Jugement d...

ARRÊT DU

07 Septembre 2022

DB/CR

---------------------

N° RG 21/00421

N° Portalis

DBVO-V-B7F-C4GC

---------------------

S.A.S.

[Adresse 5]

C/

S.A. SMA

------------------

GROSSES le

à

ARRÊT n°

COUR D'APPEL D'AGEN

Chambre Civile

Section commerciale

LA COUR D'APPEL D'AGEN, 1ère chambre dans l'affaire,

ENTRE :

S.A.S. CASTEL ET FROMAGET

[Adresse 2]

[Localité 1]

Représentée par Me Erwan VIMONT, avocat postulant inscrit au barreau d'AGEN et par Me Julien LAMPE, avocat plaidant inscrit au barreau de PARIS

APPELANTE d'un Jugement du Tribunal de Commerce d'AUCH en date du 26 Février 2021, RG 2019000426

D'une part,

ET :

S.A. SMA

RCS de Paris n°332 789 296

[Adresse 3]

[Localité 4]

Représentée par Me Mathieu GENY, avocat plaidant inscrit au barreau du GERS et par Me Guy NARRAN, avocat postulant inscrit au barreau d'AGEN

INTIMÉE

D'autre part,

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue et plaidée en audience publique le 02 Mai 2022 devant la cour composée de :

Présidente : Claude GATÉ, Présidente de Chambre

Assesseurs : Dominique BENON, Conseiller qui a fait un rapport oral à l'audience

Cyril VIDALIE, Conseiller

Greffières : Lors des débats : Nathalie CAILHETON

Lors de la mise à disposition : Charlotte ROSA, adjointe administrative faisant fonction de greffière

ARRÊT : prononcé publiquement par mise à disposition au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile

' '

'

FAITS :

Suite à un incendie survenu le 5 août 2010 ayant détruit son bâtiment à usage commercial

situé à [Adresse 6] (84), la SCI Gego 572 a confié à la maîtrise d'oeuvre de la reconstruction à [J] [T], sous contrôle technique de la SA Socotec.

Le lot conception et réalisation des structures métalliques, de la charpente et de la couverture a été confié à la SAS Castel et Fromaget selon marché de travaux du 22 juillet 2011 d'un montant de 379 629,54 Euros TTC.

La SAS Castel et Fromaget a sous-traité à l'EURL [N] [D] la pose de la couverture, de l'isolation en toiture et la pose du bardage.

Il a été contractuellement convenu que le lot devrait être livré le 7 septembre 2012.

Alors que le chantier était en cours, fin 2012, des infiltrations sont apparues en sous-face de la couverture.

Après avoir vainement mis en demeure le sous-traitant de reprendre sa prestation, la SAS Castel et Fromaget est intervenue sur la couverture.

Les infiltrations ont perduré et, lors de la réception le 10 juin 2013, le maître de l'ouvrage a refusé de recevoir les travaux de couverture.

Sur assignation de la SAS Castel et Fromaget, par ordonnance du 13 novembre 2013, le juge des référés a désigné M. [X] en qualité d'expert.

L'expert judiciaire a déposé son rapport le 31 août 2014.

Un procès au fond a ensuite eu lieu devant le tribunal de grande instance de Nîmes entre les parties suivantes : SCI Gego 572, SAS Castel et Fromaget, [J] [T], EURL [N] [D] et son assureur Groupama Sud, SA Socotec.

Par jugement rendu le 19 janvier 2016, le tribunal de grande instance de Nîmes a, essentiellement :

- dit qu'il n'y a pas eu réception de la couverture,

- dit que le refus de réception était justifié et débouté les parties de leur demande de prononcé d'une réception judiciaire,

- dit en conséquence n'y avoir lieu à l'application des dispositions des articles 1792 et suivants du code civil,

- déclaré la société Castel et Fromaget responsable en application de l'article 1147 des désordres affectant la couverture, et a condamné cette société à réparer l'entier préjudice de la SCI Gego 572,

- condamné après apurement des comptes entre les parties la société Castel et Fromaget à payer à la SCI Gego 572 les sommes suivantes :

* 78 633,15 Euros TTC au titre de la réparation des désordres,

* 10 009,62 Euros au titre de la perte locative,

* 15 000 Euros au titre du préjudice financier,

* 7 500 Euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné la SAS Castel et Fromaget aux dépens de l'appel en cause de l'EURL [D] [N] et l'a condamnée à payer à cette dernière la somme de 1 500 Euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné la SAS Castel et Fromaget aux dépens de l'appel en cause de [J] [T] et l'a condamné à payer à ce dernier la somme de 1 500 Euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné la SAS Castel et Fromaget aux entiers dépens en ce compris les frais d'expertise judiciaire,

- renvoyé l'affaire à la mise en état pour qu'il soit débattu du contrat de sous-traitance.

Sur appel de [D] [N], par arrêt du 21 septembre 2017 devenu définitif, la cour d'appel de Nîmes a, essentiellement :

- infirmé partiellement mais statuant sur le tout pour une meilleure compréhension,

- débouté les parties de leur demandes de réception judiciaire,

- condamné sur le fondement de l'article 1147 ancien du code civil la SAS Castel et Fromaget à payer à la SCI Gego 572 les sommes suivantes :

* au titre des travaux réparatoires après compensation : 53 588,20 Euros,

* au titre des pertes locatives jusqu'au 10 juin 2013 : 40 038,48 Euros,

* au titre de la perte d'exploitation à compter du 10 juin 2013 : 21 717,74 euros,

- dit que le partage de responsabilité dans la survenance des désordres s'établit comme suit :

* SAS Castel et Fromaget : 30 %,

* EURL [N] [D] : 60 %,

* SA Socotec : 10 %,

- condamné M. [N] [D] à garantir la SAS Castel et Fromaget à hauteur de 18 % des sommes dues par celle-ci au titre des postes de préjudices suivants :

* travaux réparatoires : 130 000 Euros HT,

* pertes locatives jusqu'au 10 juin 2013 : 40 038,48 Euros,

* perte d'exploitation à compter du 10 juin 2013 : 21 717,74 euros,

- condamné la SA Socotec à garantir la SAS Castel et Fromaget à hauteur de 10 % de ces mêmes sommes,

- condamné la SAS Castel et Fromaget à payer, sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile :

* 2 000 Euros à M. [T],

* 7 500 Euros à la SCI Gego 572,

- dit que M. [N] et la SA Socotec garantiront la SAS Castel et Fromaget du paiement de ces sommes à hauteur respectivement de 18 % et 10 %,

- condamné la SAS Castel et Fromaget aux dépens de 1ère instance et d'appel et dit que M. [N] et la SA Socotec garantiront la SAS Castel et Fromaget du paiement de ces sommes à hauteur respectivement de 18 % et 10 %.

Après vaine demande amiable, par acte délivré le 18 janvier 2019, la SAS Castel et Fromaget a fait assigner la SA SMA devant le tribunal de commerce d'Auch afin de voir dire que la garantie de cette compagnie (qui a pris la suite d'un contrat souscrit initialement par la SAS Castel et Fromaget auprès de la SMABTP) lui est acquise et qu'elle doit prendre en charge les condamnations prononcées par les juridictions nîmoises au titre des préjudices immatériels et des frais de justice incluant le coût de l'expertise judiciaire.

Par jugement rendu le 26 février 2021, le tribunal de commerce d'Auch a :

- dit que s'agissant des pertes d'exploitation, la garantie de la société SMA est acquise à son assuré,

- dit que le montant du sinistre est inférieur à la franchise du contrat,

- dit qu'en conséquence la société SMA n'a pas à régler le sinistre,

- débouté la société Castel et Fromaget de l'intégralité de ses autres demandes,

- dit qu'il n'y a pas lieu d'ordonner l'exécution provisoire du jugement,

- condamné la société SMA à payer 1 000 Euros à la société Castel et Fromaget au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné la société SMA aux entiers dépens, liquidés pour le greffe à la somme de 73,22 Euros.

Par acte du 14 avril 2021, la SAS Castel et Fromaget a déclaré former appel du jugement en indiquant que l'appel porte sur les dispositions du jugement qui ont :

- dit que le montant du sinistre est inférieur à la franchise du contrat,

- dit qu'en conséquence la société SMA n'a pas à régler le sinistre,

- débouté la société Castel et Fromaget de l'intégralité de ses autres demandes, qu'elle reprend dans son acte d'appel.

La clôture a été prononcée le 13 avril 2022 et l'affaire fixée à l'audience de la Cour du 2 mai 2022.

PRETENTIONS ET MOYENS :

Par dernières conclusions notifiées le 21 mars 2022, auxquelles il est renvoyé pour le détail de l'argumentation, la SAS Castel et Fromaget présente l'argumentation suivante :

- Les préjudices immatériels causés doivent être pris en charge par l'assureur :

* le contrat couvre les dommages immatériels causés aux tiers, et notamment les pertes locatives au titre de la garantie de l'article 7.1 qui dispose 'nous garantissons le paiement des dommages corporels, matériels et immatériels causés aux tiers lorsque, dans le cadre de votre activité déclarée et définie aux conditions particulières et du fait des opérations de construction désignées par avenant, votre responsabilité professionnelle est engagée sur quelque fondement que ce soit et aussi longtemps qu'elle peut être recherchée', ce qui couvre de tels préjudices, extérieurs à l'ouvrage, survenus avant ou après réception.

* l'article 7.2 des conditions générales invoquée par la SA SMA qui exclut 'les conséquences pécuniaires de toute nature résultant d'un retard dans la réalisation des travaux lorsque ce retard n'a pas pour origine un dommage garanti au titre du présent contrat' n'a pas été portée à sa connaissance avant la survenance du sinistre, car l'assureur ne produit que les conditions particulières signées qui ne font pas référence aux conditions générales qui, elles-mêmes n'ont pas été signées.

* cette clause n'est pas formelle et limitée au sens de l'article L. 113-1 du code des assurances du fait qu'elle est vague, sujette à interprétation et qu'elle ne se réfère pas à des hypothèses limitativement énumérées.

* elle n'est pas applicable aux pertes locatives car le sinistre est dû aux désordres non repris et non à un retard du chantier, retard dont la réalité n'est en tout état de cause pas établie, de sorte que ces pertes entrent dans la prise en charge de l'article 7.1.

* il ne peut exister de retard dès lors que la SCI Gego 572 n'a pas fourni la garantie de paiement prévue à l'article 1799-1 du code civil.

- Les frais de procédure et le coût de l'expertise judiciaire entrent dans la garantie de la police : les dommages immatériels sont couverts au titre de la garantie responsabilité 'en cas de dommages extérieurs à l'ouvrage objet de l'opération de construction' de l'article 7.1.

- La SA SMA ne peut se prévaloir de l'autorité de chose jugée de l'arrêt du 21 septembre 2017 :

* il s'agit d'une fin de non-recevoir qui ne peut être tranchée que par le conseiller de la mise en état en vertu des articles 122 et 914 du code de procédure civile.

* seuls les moyens d'irrecevabilité tranchés ne sont pas de la compétence du juge de la mise en état.

* la SA SMA n'était pas partie à la procédure devant les juridictions nîmoises devant lesquelles sa garantie n'a pas été évoquée et dont les décisions ne sont pas revêtues de l'autorité de la chose jugée sur l'existence d'un retard ayant généré les préjudices immatériels.

- La SA SMA ne peut remettre en cause le fait que le tribunal a jugé que la garantie était acquise pour les pertes d'exploitation et qu'il existe une franchise de 18 480 Euros :

* elle n'a pas formé appel incident sur ces points.

* elle se limite à conclure au débouté des demandes présentées en appel.

- Elle doit être intégralement garantie :

* les condamnations prononcées à son encontre portent sur les sommes de 58 588,20 Euros, 40 038,48 Euros et 21 717,74 Euros, et non sur 30 % de ces montants.

* elle a versé à la SCI Gego 572 la totalité des sommes dues.

* l'existence d'une action récursoire, qui porte sur 72 % et non sur 30 %, ne peut faire obstacle à la prise en charge totale, l'assureur pouvant ensuite être subrogé dans l'action récursoire dont bénéficie son assuré.

Au terme de ses conclusions, elle demande à la Cour de :

- se déclarer incompétente pour statuer sur l'irrecevabilité de ses demandes sur le fondement de la chose jugée,

- réformer le jugement,

- condamner la SA SMA à lui payer les sommes suivantes :

- 61 756,22 Euros au titre des condamnations prononcées pour préjudices immatériels, avec intérêts légaux à compter de l'introduction de l'instance,

- 9 500 Euros au titre des condamnations prononcées sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, avec intérêts légaux à compter de l'introduction de l'instance,

- 1 909,65 Euros au titre des condamnations aux dépens hors frais d'expertise, avec intérêts légaux à compter de l'introduction de l'instance,

- 5 000 Euros au titre des frais d'expertise avancés, avec intérêts légaux à compter de l'introduction de l'instance,

- 15 149,70 Euros au titre des frais d'expertise exposés et honoraires d'avocats et frais d'huissier, avec intérêts légaux à compter de l'introduction de l'instance,

- 10 000 Euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- mettre les dépens à la charge de la SA SMA.

*

**

Par dernières conclusions notifiées le 16 mars 2022, auxquelles il est renvoyé pour le détail de l'argumentation, la SA SMA présente l'argumentation suivante :

- La condamnation de la SAS Castel et Fromaget relève d'un dommage non garanti par le contrat :

* cette société a été condamnée sur le fondement de la responsabilité contractuelle avant réception.

* elle ne conteste pas ne pas pouvoir être garantie pour le montant des travaux réparatoires.

- Les pertes locatives ne sont pas garanties :

* dans les conditions particulières, l'assurée a reconnu avoir reçu les conditions générales.

* l'article 7.2 des conditions générales exclut de la garantie 'les conséquences pécuniaires de toute nature résultant d'un retard dans la réalisation des travaux lorsque ce retard n'a pas pour origine un dommage garanti au titre du présent contrat'.

* les pertes locatives allouées correspondent à la période du 7 septembre 2012 (date contractuelle de fin des travaux) au 10 juin 2013, date de refus de la réception.

* il a été définitivement jugé que les pertes locatives ont été générées par un retard de chantier et elle peut invoquer cet argument, le conseiller de la mise en état ne pouvant examiner une fin de non-recevoir déjà soumise au juge du fond.

* la clause d'exclusion a un caractère formel et limité.

- La perte d'exploitation n'est pas garantie :

* la perte d'exploitation d'un montant de 21 717,74 Euros correspond en réalité à la poursuite des pertes locatives du fait du même retard et se heurte à la même exclusion et, à défaut se heurte également à l'exclusion de l'article 36.9 qui stipule que 'ne sont jamais garantis les dépenses nécessaires à l'exécution ou à la finition de votre marché'.

* cette perte a été arrêtée à 18 515,29 Euros selon un protocole d'accord du 1er août 2019 produit tardivement en appel par la SAS Castel et Fromaget.

- Les condamnations doivent être limitées : la SAS Castel et Fromaget a été condamnée à indemniser 30 % des dommages de sorte qu'elle ne pourrait obtenir que 30 % de 61 526,22 Euros, soit 18 526,86 Euros, représentant un montant inférieur à la franchise contractuelle de 20 400 Euros.

- La prise en charge des frais de procédure n'est pas garantie par le contrat : elle n'a pas pris la direction du procès et a opposé une non-garantie dès la déclaration de sinistre.

Au terme de ses conclusions, elle demande à la Cour de :

- débouter la SAS Castel et Fromaget de ses demandes,

- à défaut :

- limiter toute condamnation éventuelle à 30 % des sommes réclamées au titre des préjudices immatériels, soit 18 526,86 Euros,

- limiter la perte d'exploitation réglée à 18 515,29 Euros,

- opposer la franchise contractuelle de 20 400 Euros.

- la condamner à lui payer la somme de 5 000 Euros en application de l'article 700 du code de procédure civile et mettre les dépens à sa charge.

-------------------

MOTIFS :

1) Sur la recevabilité de la fin de non-recevoir attachée à l'autorité de chose jugée par l'arrêt du 12 septembre 2017 :

Vu les articles 907, 789 et 914 du code de procédure civile,

Selon l'avis n° 21-70006 rendu le 3 juin 2021 par la deuxième chambre civile de la Cour de cassation, le conseiller de la mise en état ne peut connaître ni des fins de non-recevoir qui ont été tranchées par le juge de la mise en état, ou par le tribunal, ni de celles qui, bien que n'ayant pas été tranchées en première instance, auraient pour conséquence, si elles étaient accueillies, de remettre en cause ce qui a été jugé au fond par le premier juge.

En l'espèce, la SA SMA déclare opposer l'autorité de chose jugée attachée à l'arrêt rendu par la cour d'appel de Nîmes le 12 septembre 2017 en estimant que cette décision a définitivement jugé que les pertes locatives ont été générées par un retard pour lequel sa garantie est exclue.

Dès lors que, dans ses motifs, pour rendre son jugement du 26 février 2021, le tribunal de commerce a décidé que cet arrêt avait effectivement pour effet d'exclure la garantie pour les pertes locatives compte tenu de son caractère définitif, il s'est prononcé sur l'autorité de chose jugée qui y est attachée.

Par conséquent, en application du principe ci-dessus, la SA SMA n'avait pas à présenter cet argument tiré de l'autorité de la chose jugée devant le conseiller de la mise en état et il devra être étudié en même temps que le fond de l'action.

2) Sur l'opposabilité de la clause d'exclusion stipulée à l'article 7.2 des conditions générales du contrat d'assurance :

La SAS Castel et Fromaget, en la personne d'[E] [I], a signé les conditions particulières du contrat d'assurance le 9 mars 1993.

Ce document renvoie expressément dans plusieurs de ses articles aux conditions générales.

En outre, dans un paragraphe précédant la signature de l'assuré, il est indiqué :

'Vous reconnaissez avoir reçu un exemplaire des documents suivants :

- (...)

- conditions générales du contrat (ref P 1708)

(...)

Par conséquent il est établi que, lors de la signature des conditions particulières, la SAS Castel et Fromaget s'est vue remettre un exemplaire des conditions générales.

Il est d'ailleurs singulier que la SAS Castel et Fromaget invoque à son profit les dispositions de l'article 7.1 du contrat, tout en prétendant que l'article 7.2 n'aurait pas été porté à sa connaissance alors que l'article 7.2 se situe sur la même page juste après l'article 7.1.

Dès lors la clause d'exclusion invoquée par l'assureur, qui se situe dans ces conditions générales référencées P 1708, lui sont opposables.

3) Sur la clause d'exclusion :

L'article 7.1 du contrat d'assurance stipule :

'CE QUE NOUS GARANTISSONS

7.1.1. Dommages causés aux tiers

Nous garantissons le paiement des dommages corporels, matériels et immatériels causés aux tiers, y compris vos co-contractants, par vous-même ou vos sous-traitants lorsque, dans l'exercice de vos activités déclarées, votre responsabilité est engagée sur quelque fondement juridique que ce soit, aussi longtemps qu'elle peut être recherchée.

Cette garantie n'a d'autres conditions et limites que celles énoncées aux articles 7.2 à 13 ci-après.'

L'article 7.2 du contrat stipule :

'CE QUE NOUS NE GARANTISSONS PAS :

En complément des exclusions formulées à l'article 36 ci-après, ne sont pas garantis :

- (...)

- les conséquences pécuniaires de toute nature résultant d'un retard dans la réalisation des travaux, lorsque ce retard n'a pas pour origine un dommage garanti au titre du présent contrat.'

En premier lieu, la clause d'exclusion ci-dessus ne peut être considérée comme n'étant pas formelle et limitée tel que l'impose l'article L. 113-1 du code des assurances.

En effet, elle est claire, se réfère à un critère précis et ne nécessite aucune interprétation en excluant de la garantie de l'assureur les conséquences d'un retard dans les travaux, quelle que la nature des travaux en question (travaux initiaux ou reprises de malfaçons) sauf si ce retard a pour origine un dommage garanti.

Elle a permis à la SAS Castel et Fromaget, lors de la souscription du contrat, de connaître précisément l'étendue de la garantie.

En outre, elle laisse dans le champ de la garantie les conséquences dommageables n'ayant pas de lien avec un retard dans la réalisation des travaux effectués par l'assuré.

Le jugement qui a déclaré cette clause valide doit être confirmé.

En deuxième lieu, les préjudices dont la SAS Castel et Fromaget sollicite la prise en charge par la SA SMA au titre du contrat d'assurance correspondent aux indemnités suivantes accordées à la SCI Gego 572 :

- pertes locatives jusqu'au 10 juin 2013 : 40 038,48 Euros,

- pertes d'exploitation à compter du 10 juin 2013 : 21 717,74 Euros.

Selon l'arrêt du 21 septembre 2017, la fin d'exécution des travaux était contractuellement fixée au 7 septembre 2012 et le locataire s'est installé dans les lieux construits dès juin 2013, date de réception de tous les lots, sauf le lot 'couverture' dont était titulaire la SAS Castel et Fromaget, qui a été refusé par le maître de l'ouvrage.

La Cour d'appel de Nîmes en a tiré la conclusion qu'il existait, entre le 7 septembre 2012 et juin 2013, un retard de chantier exclusivement lié aux désordres de la couverture, c'est à dire à des désordres non repris par la SAS Castel et Fromaget.

Il en résulte que l'indemnisation de la somme de 40 038,48 Euros correspond aux pertes locatives générées par un retard dans la réalisation des travaux imputable à la SAS Castel et Fromaget, qui n'ont pas été livrés le 7 septembre 2012, exclusif de toute suspension légitime de ses prestations, comme par exemple du fait de l'absence de garantie de paiement.

La clause d'exclusion mentionnée ci-dessus doit, dès lors, recevoir application.

Ensuite, les pertes d'exploitations chiffrées à 21 717,74 Euros correspondent également, selon l'arrêt du 21 septembre 2017, à une retenue sur loyers à laquelle le locataire a procédé à compter du 10 juin 2013 du fait d'infiltrations dans le bâtiment et à une indisponibilité au moins partielle du bâtiment pendant les travaux de réfection à prévoir.

Il s'agit par conséquent également de la poursuite de pertes générées par le retard dans la réalisation des travaux après leur date contractuelle de fin, le 7 septembre 2012.

Dès lors, la clause d'exclusion s'applique également pour cette somme.

Finalement, le jeu de la clause d'exclusion s'oppose à l'action en garantie exercée par la SAS Castel et Fromaget pour les sommes mises à sa charge par la cour d'appel de Nîmes, ainsi que pour les frais qu'elle a été amenée à exposer à l'occasion de cette procédure.

Le jugement doit être infirmé et les demandes rejetées.

Enfin, l'équité nécessite d'allouer à l'intimée la somme de 3 000 Euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS :

- la Cour, après en avoir délibéré conformément à la loi, statuant par arrêt contradictoire prononcé par mise à disposition au greffe et en dernier ressort,

- INFIRME le jugement en toutes ses dispositions ;

- STATUANT A NOUVEAU,

- REJETTE la demande de garantie présentée par la SAS Castel et Fromaget à l'encontre de la SA SMA pour les condamnations à indemnisation de préjudices immatériels prononcée à son encontre le 21 septembre 2017 par la cour d'appel de Nîmes ;

- CONDAMNE la SAS Castel et Fromaget à payer à la SA SMA la somme de 3 000 Euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ;

- CONDAMNE la SAS Castel et Fromaget aux dépens de 1ère instance et d'appel.

- Le présent arrêt a été signé par Claude GATÉ, présidente, et par Charlotte ROSA, adjointe aministrative faisant fonction de greffière, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

La Greffière,La Présidente,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Agen
Formation : Chambre civile
Numéro d'arrêt : 21/00421
Date de la décision : 07/09/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-09-07;21.00421 ?
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