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10/11/2011 | FRANCE | N°10/03530

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 1re chambre b, 10 novembre 2011, 10/03530


COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE

1re Chambre B



ARRÊT AU FOND

DU 10 NOVEMBRE 2011

FG

N° 2011/668













Rôle N° 10/03530







SCI LES ORCHIDEES





C/



[V] [T] [A] veuve [I]

[K] [I]

[E] [B]





















Grosse délivrée

le :

à :



SCP COHEN GUEDJ





SCP PAUL ET JOSEPH MAGNAN



SCP J F JOURDAN -

P G WATTECAMPS





Décision déférée à la Cour :



Jugement du Tribunal de Grande Instance de GRASSE en date du 16 Février 2010 enregistré au répertoire général sous le n° 04/3758.







APPELANTE







SCI LES ORCHIDEES

dont le siège social est [Adresse 2]

représentée par représentant légal en exercice demeura...

COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE

1re Chambre B

ARRÊT AU FOND

DU 10 NOVEMBRE 2011

FG

N° 2011/668

Rôle N° 10/03530

SCI LES ORCHIDEES

C/

[V] [T] [A] veuve [I]

[K] [I]

[E] [B]

Grosse délivrée

le :

à :

SCP COHEN GUEDJ

SCP PAUL ET JOSEPH MAGNAN

SCP J F JOURDAN - P G WATTECAMPS

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Tribunal de Grande Instance de GRASSE en date du 16 Février 2010 enregistré au répertoire général sous le n° 04/3758.

APPELANTE

SCI LES ORCHIDEES

dont le siège social est [Adresse 2]

représentée par représentant légal en exercice demeurant audit siège,

représentée par la SCP J F JOURDAN - P G WATTECAMPS, avoués à la Cour, assistée de Me Carole BORGHINI-DUNAC, avocat au barreau de NICE

INTIMES

Madame [V] [T] [A] veuve [I]

demeurant [Adresse 5]

Mademoiselle [K] [I]

née le [Date naissance 3] 1965 à [Localité 6],

demeurant [Adresse 5]

représentées par la SCP PAUL ET JOSEPH MAGNAN, avoués à la Cour,

assistées de Me Jean-Louis AUGEREAU, avocat au barreau de NICE

Maître [E] [B]

Notaire

[Adresse 1]

représenté par la SCP COHEN GUEDJ, avoués à la Cour,

assisté de Me Jérôme LACROUTS associé de Me Hélène BERLINER, avocat au barreau de NICE

COMPOSITION DE LA COUR

L'affaire a été débattue le 13 Octobre 2011 en audience publique. Conformément à l'article 785 du Code de Procédure Civile, Monsieur François GROSJEAN, Président, a fait un rapport oral de l'affaire à l'audience avant les plaidoiries.

La Cour était composée de :

Monsieur François GROSJEAN, Président

Monsieur Hugues FOURNIER, Conseiller

Mme Danielle DEMONT-PIEROT, Conseiller

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Mme Dominique COSTE.

Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 10 Novembre 2011.

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 10 Novembre 2011,

Signé par Monsieur François GROSJEAN, Président et Mme Dominique COSTE, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

EXPOSÉ DES FAITS, PROCÉDURE, PRÉTENTIONS,

Par acte authentique reçu le 18 septembre 2002 par M°[E] [B], notaire salariée de la SCP [C], notaires à Nice, M.[Z] [I] et Mme [V] [A] épouse [I], vendeurs, ont vendu à la SCI Les Orchidées, ayant son siège [Adresse 9], un bien immobilier sis [Adresse 9], désigné dans l'acte comme étant une villa élevée sur sous-sol d'un rez-de-chaussée et d'un étage, jardin autour et une construction élevée sur sous-sol d'un rez-de-chaussée et de trois étages à usage commercial, parcelles cadastrées [Cadastre 7] et [Cadastre 8] d'un total de 5a 37ca, moyennant le prix de 762.245,09 €.

Les 27 avril et 4 mai 2004, la SCI Les Orchidées a fait assigner les vendeurs M.[Z] [I] et Mme [V] [A] épouse [I], et le notaire M°[E] [B], devant le tribunal de grande instance de Grasse, sur le fondement des articles 1641 et suivants du code civil, aux fins de les voir condamner solidairement à lui payer 1.071.030 € à titre de dommages et intérêts.

Par ordonnance du 4 mars 2005, le juge de la mise en état du tribunal de grande instance de Grasse a ordonné une expertise. Cette ordonnance a été infirmée par arrêt de la cour d'appel d'Aix-en-Provence 3ème chambre A du 30 mars 2006.

M.[Z] [I] est décédé le [Date décès 4] 2008. La procédure a été poursuivie à l'égard de Mme [V] [A] veuve [I], tant à titre personnel qu'ès qualités d'ayant droit de feu [Z] [I], et de Mlle [K] [I], fille et héritière de feu [Z] [I].

Par jugement en date du 16 février 2010, le tribunal de grande instance de Grasse a :

- dit que la SCI Les Orchidées ne rapporte pas la preuve de l'existence de vices cachés rendant le bien acheté impropre à sa destination, au sens de l'article 1641 du code civil,

- en conséquence, débouté la SCI Les Orchidées de ses demandes de dommages et intérêts formées à l'encontre des consorts [I],

- dit que la SCI Les Orchidées ne rapporte pas la preuve d'une faute commise par M°[B], notaire, en sa qualité de rédacteur d'acte, susceptible d'engager sa responsabilité civile professionnelle,

- en conséquence, débouté la SCI Les Orchidées des demandes formées à l'encontre de M°[E] [B],

- condamné la SCI Les Orchidées à payer à M°[E] [B] la somme de 1.500 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- dit n'y avoir lieu à plus ample application de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné la SCI Les Orchidées aux dépens, distraits au profit de la Selarl [N] et de M°[O] [Y],

- dit n'y avoir lieu à exécution provisoire.

Par déclaration de la SCP JOURDAN & WATTECAMPS, avoués, en date du 23 février 2010, la SCI Les Orchidées a relevé appel de ce jugement.

Par ses conclusions, notifiées et déposées le 22 juin 2010, la SCI Les Orchidées demande à la cour d'appel, au visa des articles 1641 et suivants du code civil, de :

- dire que l'acte de vente est affecté volontairement de vices cachés par les époux [I],

- dire que la responsabilité professionnelle du notaire chargé de rédiger l'acte de vente et qui était le conseil de la SCI Les Orchidées a été engagée ; qu'elle est totale et entière,

- condamner solidairement les consorts [I] et M°[B] à payer à la SCI Les Orchidées la somme de 1.071.030 € à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice subi,

- débouter les consorts [I] et M°[B] de l'ensemble de leurs demandes, fins et conclusions,

- condamner les consorts [I] et M°[B] à payer respectivement à la SCI Les Orchidées la somme de 4.000 € en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner le consorts [I] et M°[B] aux entiers dépens, ceux d'appel distraits au profit de la SCP JOURDAN & WATTECAMPS, avoués.

La SCI Les Orchidées fait observer que l'immeuble est infecté de termites et comprend des parties en amiante, de sorte que les lieux seraient impropres à leur destination.

La SCI Les Orchidées fait valoir que la partie de la construction relative au restaurant a été irrégulièrement réalisée, sans permis de construire, aucune régularisation n'étant possible, alors que M.[Z] [I] a été condamné à ce titre pour infraction au code de l'urbanisme. La SCI Les Orchidées estime que de ce fait aucun aménagement du restaurant n'est possible, ce qui empêche sa mise aux normes et de ce fait son exploitation. Elle fait remarquer que les vendeurs ont caché cette situation irrégulière qui rend l'utilisation du local impossible comme restaurant. La SCI Les Orchidées considère que M.[I] a fait une fausse déclaration en présentant un extrait cadastral sur lequel apparaît la construction illégale et en présentant un plan de géomètre avec un détail des constructions comprenant les parties illégalement réalisées. Elle fait observer que sur 497,02 m² de surface construite, 128,48 m² ont été construits illégalement.

La SCI Les Orchidées considère subir un préjudice du fait de cette construction illégale.

La SCI Les Orchidées estime que la responsabilité civile du notaire est engagée, alors qu'il aurait dû attirer leur attention sur la recherche de conformité des constructions avec le permis de construire, et demander des précisions au sujet de la recherche de termites. La SCI Les Orchidées estime que le notaire devait donner des conseils sur la compatibilité de leur projet avec la situation du bien.

La SCI Les Orchidées estime subir un préjudice correspondant à la proportion de surface illégale par rapport à la surface totale vendue, soit 197.040,83 €, plus au coût des travaux inutilement réalisés alors que l'exploitation du restaurant est impossible, soit 173.990 €, plus un préjudice pour perte d'exploitation de 700.000 €, soit au total 1.071.030 €.

Elle demande la condamnation solidaire des consorts [I] et du notaire à lui payer cette somme à titre de dommages et intérêts.

Par leurs dernières conclusions, notifiées et déposées le 10 octobre 2011, Mme [V] [A] veuve [I] et Mlle [K] [I] demandent à la cour d'appel de confirmer le jugement du 16 février 2010 en toutes ses dispositions, de débouter la SCI Les Orchidées de son appel et de toutes ses demandes, de la condamner à leur payer la somme de 5.000€ en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile et à payer les entiers dépens, avec distraction au profit de la SCP MAGNAN, avoués.

Les consorts [I] font remarquer que les rapports techniques relatifs à la recherche de termites et d'amiante étaient joints à l'acte de vente et estime que la SCI Les Orchidées ne peut invoquer aucune garantie à ce titre.

Les consorts [I] font observer que la SCI Les Orchidées se trouve propriétaire d'une surface supérieure à celle indiquée à l'acte, que du fait de l'arrêt pénal rendu le 22 février 1980 par la cour d'appel d'Aix-en-Provence disant n'y avoir lieu à démolition, et du jugement du tribunal correctionnel de Grasse du 23 mars 1981, les constructions sont acquises et ne peuvent être démolies, qu'il s'agit d'ouvrages existants.

Les consorts [I] estiment que rien n'empêche la mise aux normes de ces constructions et font remarquer que la SCI Les Orchidées n'a pas demandé l'autorisation de faire cet aménagement de mise en conformité puis l'autorisation d'ouvrir son restaurant.

Les consorts [I] considèrent que la SCI Les Orchidées n'a pas été trompée.

Ils estiment que la SCI Les Orchidées n'a subi aucun préjudice.

Par ses conclusions, notifiées et déposées le 9 décembre 2010, M°[E] [B], notaire, demande à la cour d'appel de :

- constater que l'existence de termites et de trace d'amiante ne peut en aucun cas constituer un vice caché dès lors que les diagnostics afférents, rigoureusement exacts, ont été portés à la connaissance des acquéreurs et annexés à l'acte de vente,

- dire que la SCI Les Orchidées ne rapporte pas le preuve de ce que l'infraction de construction sans permis d'une partie du bâtiment à usage commercial pour laquelle M.[I] a été condamné à une simple amende, à l'exclusion de toute démolition, il y a plus de 20 ans, constitue en quoi que ce soit un obstacle à la réalisation des travaux de mises aux normes du bâtiment à usage d'hôtel restaurant au regard des règles applicables aux établissements recevant du public, alors que la police de l'affectation, relevant du code de la construction et de l'habitation et de la législation d'urbanisme, relevant du code de l'urbanisme, sont totalement

distinctes et indépendantes l'une de l'autre, et que s'agissant de simples travaux d'aménagement intérieurs qui n'impliquent ni surélévation de l'immeuble, ni modification des façades ou du volume, ni changement d'affectation, au sens de l'article L.421-1 du code de l'urbanisme, ne nécessitent strictement aucune autorisation préalable, autorisation de travaux ou permis de construire,

- dire en conséquence qu'elle n'établit pas que l'information dissimulée par les vendeurs constitue un vice caché rendant le bien vendu impropre à sa destination ou diminuant son usage,

- dire la SCI Les Orchidées radicalement infondée à exercer l'action estimatoire de l'article 1644 du code civil à l'encontre des vendeurs,

- dire la SCI Les Orchidées de plus fort infondée à prétendre à une quelconque condamnation solidaire ou même in solidum du notaire, M°[B], qui n'est bien évidemment pas tenu à garantie d'un vice caché inexistant,

- en toute hypothèse, dire que M°[B] n'a commis strictement aucune faute en relation de cause à effet avec le dommage allégué, de nature à engager sa responsabilité civile professionnelle sur le fondement de l'article 1382 du code civil seul applicable,

- constater en outre que la SCI Les Orchidées ne justifie d'aucun préjudice, que les postes allégués sont totalement fantaisistes et injustifiés, et ses prétentions exorbitantes, lorsqu'elle prétend conserver le bien et obtenir en guise d'indemnisation plus que le remboursement du prix,

- dire en tout état de cause que l'indemnité qui pourrait être due par les vendeurs au titre de la garantie des vices cachés, à déterminer à dire d'experts, ne constitue pas un préjudice indemnisable susceptible d'être mis à la charge du notaire,

- débouter en conséquence la SCI Les Orchidées de toutes ses demandes, fins et conclusions à l'encontre de M°[B],

- dire la SCI Les Orchidées infondée en son appel,

- confirmer en toutes ses dispositions le jugement,

- y ajoutant, condamner la SCI Les Orchidées à payer à M°[B] la somme de 5.000 € pour appel abusif,

- condamner la SCI Les Orchidées, ou tout succombant, à lui payer 3.000 € en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile et à payer les dépens, avec distraction au profit de la SCP Hervé COHEN Laurent COHEN & Paul GUEDJ, avoués.

L'instruction de l'affaire a été définitivement déclarée close, d'accord des représentants des parties, le 13 octobre 2011, avant les débats.

MOTIFS,

-I) Sur l'action de la SCI Les Orchidées à l'égard des consorts [I] :

La SCI Les Orchidées exerce son action contre les consorts [I] sur le seul fondement de la garantie des vices cachés.

Sur ce fondement elle ne demande pas la résolution de la vente, souhaitant conserver le bien acquis.

Elle demande une somme compensant le caractère illégal d'une partie de la surface, qu'elle dénomme préjudice, mais qui correspond à une restitution partielle du prix, plus d'autres sommes à titre de dommages et intérêts pour travaux inutiles et perte d'exploitation.

La SCI Les Orchidées fait état de trois vices cachés: la présence de termites, la présence d'amiante, l'existence d'une partie de la construction sans permis de construire.

I-1) Termites, amiante :

En ce qui concerne ce qu'elle prétend être des vices cachés pour présence de termites et présence d'amiante, la SCI Les Orchidées ne demande rien d'autre qu'un constat à ce sujet, sans en tirer de conséquences ni à titre rédhibitoire, ni à titre estimatoire, ni en termes de dommages et intérêts.

A l'acte de vente est annexé un état parasitaire du cabinet [F] du 13 mai 2002 précisant que le bien était infesté par des termites, des capricornes, des vrillettes, et un autre rapport de M.[U], expert, du 26 juin 2002, précisant l'absence de rhinotermides vivants le jour du constat.

Pour justifier de la présence de termites, la SCI Les Orchidées produit un diagniostic notant la présence de traces de parasites xylophages.

Ce vice n'a pas été caché à la SCI Les Orchidées, alors que le diagnostic fait avant la vente relevait ces traces.

En tout état de cause, compte tenu ce diagnostic annexé à l'acte, les acquéreurs sont couverts au titre de la clause de non garantie.

A l'acte est également annexé un diagnostic amiante, relevant notamment la présence de fibrociment sur la toiture et dans les conduits d'évacuation.

Ce vice a été précisé.

I-2) Partie de construction sans permis :

L'acte de vente désigne le bien en pages 3 et 4 comme :

'une propriété située sur le territoire de la commune de [Adresse 9], comprenant une villa élevée sur sous-sol d'un rez-de-chaussée et d'un étage, jardin autour et une construction élevée sur sous-sol d'un rez-de-chaussée et de trois étages à usage commercial, édifiée en suite d'un permis de construire en date du 9 juin 1969 et 9 mars 1972 suivi d'un permis modificatif en date du 28 juillet 1969 suivi d'un certificat de conformité en date du 6 février 1975, d'un permis de construire autorisant la surélévation accordé le 31 mai 1972 et suivi d'un certificat de conformité du 20 février 1975 et un troisième permis de construire accordé pour rectificatif des façades le 17 août 1973 suivi d'un certificat de conformité en date du 12 avril 1974. Tel que le tout figure au cadastre rénové de ladite commune sous les indications suivantes : section [Cadastre 7] lieudit [Adresse 2] pour une contenance de 4 ares et 65 centiares et section [Cadastre 8] lieudit [Localité 10] pour une contenance de 72 centiares.'

L'acte de vente ne comprend aucune indication sur la surface des constructions, ni aucune indication sur l'aménagement intérieur et le nombre de pièces.

La description du bien objet de la vente est particulièrement sommaire.

La déclaration d'intention d'aliéner jointe en annexe à l'acte indique une surface construite au sol d'environ 120 m² et une surface utile ou habitable d'environ 400 m².

L'étude réalisée à la demande de la SCI Les Orchidées, selon un rapport non contradictoirement établi par Mme [G], expert foncier, mais pouvant être pris à titre indicatif, retient que la surface utile se répartit sur les trois niveaux de la partie dite 'villa' sous-sol, rez-de-chaussée et étage, sur 140,11 m², et sur les cinq niveaux de la partie dite 'hôtel restaurant' sous-sol, rez-de-chaussée, et trois étages sur 350,21 m² plus 44,63 m² d'annexes. On aboutit à 490,32 m² de surface utile, plus 44,63 m² d'annexes.

L'arrêté du Maire de Cagnes-sur-mer de refus de permis de construire du 18 octobre 2010 suite à la demande de la SCI Les Orchidées précise que l'emprise au sol des constructions est de 271m² alors que l'emprise autorisée est de 134,25m² , que la surface hors oeuvre nette existante est de 457,50 m² alors que la surface hors oeuvre nette autorisée est de 322,20m².

Cet arrêté note l'existence d'une extension à 1,02mètre du boulevard de la Plage alors que plan d'occupation des sols interdit une construction à moins de 5 mètres d'une voie publique.

M.[Z] [I] avait été poursuivi pénalement en 1977 pour avoir édifié sans autorisation administrative préalable la construction d'un appentis à usage de cuisine de restaurant en façade Est du bâtiment existant et d'une annexe de la salle de restaurant en façade principale Sud (dimensions 5,65 m x 3,70 m x 2,80 m à 3,20 m de hauteur).

Par arrêt en date du 22 février 1980, la cour d'appel d'Aix-en-Provence a rappelé que l'action publique était éteinte par prescription au sujet de l'appentis à usage de cuisine, et a déclaré M.[I] coupable pour le reste c'est à dire l'annexe de la salle de restaurant Sud, l'a

condamné à une amende de 3.000 francs, mais a dit ne pas y avoir lieu à démolition de l'ouvrage.

Par jugement en date 23 mars 1988, le tribunal correctionnel de Grasse a déclaré M.[I] coupable d'avoir courant juillet 1979 édifié une construction sans avoir obtenu le permis de construire en l'espèce un local de 8,50 m x 10 m constitué par des châssis, soutenus par des poteaux de 8cm de section fixés au sol et condamné à 1.000 francs d'amende. Mais là encore la juridiction pénale a dit n'y avoir lieu à démolition.

Selon les éléments objectifs retenus par les services de la commune de Cagnes-sur-mer, la SCI Les Orchidées a acquis un bien immobilier d'une surface hors oeuvre nette de 457,50 m² alors que la surface hors oeuvre nette autorisée est de 322,20m², soit une différence de 135,30 m².

La SCI les Orchidées estime qu'il existe 128,48 m² de surface construite illégalement sur un total de 497,02 m² de surface construite.

Il est en tout état de cause établi qu'une partie de la construction, pour environ un quart de sa surface construite, a été édifiée sans permis de construire, que ces faits, soit ont été déclarés prescrits, soit ont entraîné une simple amende payée par M.[I].

Il en résulte que cette partie de construction est acquise, n'a pas à être démolie, bien que construite sans permis.

L'acte de vente ne précise pas qu'une partie de la construction a été édifiée sans permis de construire.

La SCI Les Orchidées ne fonde son action à ce sujet que sur le seul fondement de la garantie du vice caché. Elle ne se prévaut pas d'un dol, ni d'une erreur sur une qualité substantielle, ni d'un absence de délivrance conforme du bien vendu.

En application de l'article 1641 du code civil le vice caché est un défaut caché de la chose vendue qui la rend impropre à l'usage auquel on la destine, ou qui en diminue tellement cet usage que l'acheteur ne l'aurait pas acquise, ou n'en aurait donné qu'un moindre prix, s'il l'avait connu.

L'acte de vente ne donne aucune précision de surface construite. La surface indicative mentionnée dans la déclaration d'intention d'aliéner ne constitue pas une description du bien.

La partie villa destinée à l'habitation est propre à l'habitation.

La partie dite hôtel-restaurant est devenue inutilisable à cet effet, non pas du fait des vendeurs, mais parce que la réglementation a changé et que les normes actuelles des établissements recevant du public exigent des transformations.

Compte tenu de ce qu'une partie a été construite sans permis de construire, en violation fragrante des règles du plan d'occupation des sols, en violation des zones non aedificandi, il est évident que, même si la commune ne peut en exiger la démolition compte tenu de ce que certains travaux sont prescrits et pour d'autres, aucune démolition n'a été ordonnée en justice, cette prescription et ces décisions de non démolition ne valent pas autorisation de construire. Aucun permis de régularisation ne sera accordé non plus qu'aucune autorisation de modification des lieux, ni aucune autorisation de reconstruction à l'identique en cas de sinistre.

La question posée est de savoir si, malgré cela, le restaurant peut être utilisé comme tel, sans autorisation de modification des lieux nécessitant un permis de construire.

Les travaux de mise aux normes pour obtenir de la commune une autorisation de recevoir du public en tant qu'établissement de 5ème catégorie selon la classification de l'article R.123-19 du code de la construction et de l'habitation ne correspondent pas forcément à des travaux soumis à permis de construire. Il n'y a pas forcément correspondance entre les deux.

Mais l'article R.123-13 du code de la construction et de l'habitation précise que certains établissements peuvent, en raison de leur conception ou de leur disposition particulière, donner lieu à des prescriptions exceptionnelles. Une commune peut toujours prévoir des prescriptions particulières eu égard à la disposition de l'établissement.

Il convient de rappeler qu'il s'agit d'un restaurant dont la salle de restaurant et la cuisine ont été illégalement construits, trop près de la voie publique, sur une voie très passante, sans les places de stationnement normalement exigées.

En l'occurrence l'architecte de la SCI Les Orchidées, M.[J], a étudié le projet d'ouverture du restaurant avec les services de la mairie.

M.[J], architecte, précise : 'la vocation commerciale, recevant du public, de l'établissement projeté, vous oblige à demander une autorisation administrative afin de mettre aux normes l'établissement en ce qui concerne la sécurité des personnes, la solidité des ouvrages, l'accessibilité aux personnes handicapées et l'hygiène. L'autorisation d'exploitation du local ainsi que toute modification extérieure seront liées au respect de cette réglementation. Ce point n'a été personnellement confirmé par le service de l'urbanisme de la commune de Cagnes-sur-mer. Toute demande d'autorisation entraînera donc la suppression de 107,90 m² de l'emprise du bâtiment (surface projetée au rez-de-chaussée) ce qui représente 90% de la surface illégale, et le respect du recul de 5 mètres par rapport au périmètre de la parcelle limite fortement l'implantation d'une éventuelle construction. Il apparaît donc, au vu des surfaces nécessaires à une salle de restaurant et à ses annexes (cuisine, sanitaires etc..) que le projet d'aménagement d'un restaurant est extrêmement limité et complexe dans ces conditions'.

Il en résulte que la mairie subordonne la réouverture de l'établissement à la suppression de l'emprise illégale.

En tout état de cause, la sécurisation de la salle de restaurant et de la cuisine suppose le démontage de la toiture et sa réfection, ce qui est soumis au minimum à une déclaration de travaux que la commune ne donnera jamais pour un édifice illégal.

Si la non démolition de la partie illégale a permis aux époux [I] d'exploiter un restaurant en d'autres temps, ce n'est plus possible aujourd'hui. Le profit tiré par les époux [I] de la non démolition, qui leur a évité de devoir fermer leur restaurant en 1980, n'a pas créé de droit acquis et cessible d'exploiter indéfiniment et trente ans plus tard un restaurant dans une construction illégale.

Les époux [I] ont vendu à la SCI Les Orchidées un bâtiment d'hôtel restaurant qui ne peut être utilisé comme hôtel restaurant. Il s'agit d'un défaut caché rendant le bien impropre à sa destination.

Les époux [I] se sont bien gardés d'informer la SCI Les Orchidées de ce que M.[I] avait été condamné pour construction sans permis d'une partie de ce bâtiment.

Cette mauvaise foi rend inopérante toute clause de non garantie.

I-3) Conséquence financière de ce vice caché :

La SCI Les Orchidées demande la somme de 197.040,83 € correspondant à la moins value à proportion de surface illégale par rapport à la surface totale vendue, 173.990 € pour les travaux inutilement réalisés, et 700.000 € pour perte d'exploitation.

Le bien a été acquis au prix de 762.245,09 €. Il s'agit d'un bien rare, situé non loin du bord de mer à Cagnes-sur-mer. La surface de la partie villa représente 140,11 m², surface légale et représente déjà un prix conséquent en valeur 2002. La partie hôtel restaurant peut, à condition de démolir les constructions illégales, être transformée. Cela représente au total une valeur non négligeable. La moins value ou le préjudice de moins value dû à l'illégalité d'une partie de la construction sera évalué à 10% environ de la valeur totale, somme qui sera arrondie à

76.000 €.

Le préjudice pour perte d'exploitation n'est pas établi. Quant aux travaux effectués, il appartenait à la SCI Les Orchidées de faire de bien se renseigner sur leur faisabilité avant de les engager.

Les consorts [I] seront condamnés à verser à la SCI Les Orchidées la somme de

soixante-seize mille euros au titre de la garantie des vices cachés.

-II) Sur l'action de la SCI Les Orchidées à l'égard de M°[E] [B], notaire :

La SCI Les Orchidées demande la condamnation solidaire de M°[B] à lui payer les sommes que seront condamnés à verser les consorts [I].

Elle fonde uniquement et seulement son action contre notaire sur la garantie des vices cachés et les articles 1641 et suivants du code civil.

Le notaire, qui n'est pas le vendeur, et qui n'est pas partie à l'acte, ne peut en aucune façon être condamné au titre de la garantie des vices cachés.

Bien que le notaire ait rappelé à la SCI Les Orchidées qu'elle ne pourrait diligenter une action contre lui que sur le fondement des dispositions de l'article 1382 du code civil, la SCI Les Orchidées a persisté dans son action uniquement fondée sur les articles 1641 et suivants du code civil.

Dans ces conditions la SCI Les Orchidées sera déboutée de ses demandes à l'égard du notaire.

Par équité, alors que le notaire se trouvait à une place où une plus grande vigilance en tant qu'officier ministériel aurait pu éviter le présent procès, l'acte rédigé par lui comportant une description anormalement sommaire du bien, il conservera ses dépens de première instance et d'appel et ses frais irrépétibles de première instance et d'appel.

PAR CES MOTIFS,

Statuant par arrêt contradictoire, prononcé publiquement, par mise à disposition au greffe,

Confirme partiellement le jugement rendu le 16 février 2010 par le tribunal de grande instance de Grasse en ce qu'il a débouté la SCI Les Orchidées des demandes formées à l'encontre de M°[E] [B],

Le réforme pour le surplus,

Statuant à nouveau sur le surplus,

Condamne Mme [V] [A] veuve [I] et Mlle [K] [I] à payer à la SCI Les Orchidées la somme de soixante-seize mille euros (76.000 €) au titre de la garantie des vices cachés, suite à la vente du 18 septembre 2002,

Déboute la SCI Les Orchidées de ses autres demandes à ce titre,

Condamne Mme [V] [A] veuve [I] et Mlle [K] [I] à payer à la SCI Les Orchidées la somme de quatre mille euros (4.000 €) en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

Dit que M°[E] [B] conservera ses frais irrépétibles de première instance et d'appel, et ses dépens de première instance et d'appel,

Condamne Mme [V] [A] veuve [I] et Mlle [K] [I] aux dépens de première instance et d'appel exposés par la SCI Les Orchidées et autorise la SCP JOURDAN & WATTECAMPS, avoués, à recouvrer directement contre elles, en application des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile, les dépens ces avoués affirment avoir fait l'avance sans avoir reçu provision.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : 1re chambre b
Numéro d'arrêt : 10/03530
Date de la décision : 10/11/2011

Références :

Cour d'appel d'Aix-en-Provence 1B, arrêt n°10/03530 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2011-11-10;10.03530 ?
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