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13/12/2011 | FRANCE | N°10/15243

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 17e chambre b, 13 décembre 2011, 10/15243


COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE

17e Chambre B



ARRÊT AU FOND

DU 13 DECEMBRE 2011



N°2011/216

BP













Rôle N° 10/15243







[O] [J]





C/



[M] [U]













































Grosse délivrée le :



à :

Me DUPAIN, avocat au barreau de GRASSE



Me

DELPLANCKE avocat au barreau de NICE





Copie certifiée conforme délivrée le :



Décision déférée à la Cour :



Jugement du Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de NICE en date du 29 Juin 2010, enregistré au répertoire général sous le n° 07/1078.





APPELANTE



Madame [O] [J], demeurant [Adresse 2]



comparant en personne, assistée de Me Cath...

COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE

17e Chambre B

ARRÊT AU FOND

DU 13 DECEMBRE 2011

N°2011/216

BP

Rôle N° 10/15243

[O] [J]

C/

[M] [U]

Grosse délivrée le :

à :

Me DUPAIN, avocat au barreau de GRASSE

Me DELPLANCKE avocat au barreau de NICE

Copie certifiée conforme délivrée le :

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de NICE en date du 29 Juin 2010, enregistré au répertoire général sous le n° 07/1078.

APPELANTE

Madame [O] [J], demeurant [Adresse 2]

comparant en personne, assistée de Me Catherine DUPAIN, avocat au barreau de GRASSE substitué par Me Richard PELLEGRINO, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE

INTIME

Monsieur [M] [U], demeurant [Adresse 1]

comparant en personne, assisté de Me Christian DELPLANCKE, avocat au barreau de NICE

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions de l'article 945-1 du Code de Procédure Civile, l'affaire a été débattue le 03 Novembre 2011, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Brigitte PELTIER, Conseiller, chargé d'instruire l'affaire.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour composée de :

Monsieur Yves ROUSSEL, Président

Madame Ghislaine POIRINE, Conseiller

Madame Brigitte PELTIER, Conseiller

Greffier lors des débats : Madame Monique LE CHATELIER.

Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 13 Décembre 2011.

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 13 Décembre 2011

Signé par Monsieur Yves ROUSSEL, Président et Madame Monique LE CHATELIER, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le 7 octobre1991, le cabinet d'assurance [T] et Saliceti, a embauché Mme [O] [J], par contrat verbal et à temps partiel en qualité de secrétaire agent administratif et l'a licencié pour motif économique par courrier du 12 février 2007 ;

Par déclaration enregistrée le 6 aout 2010, Mme [O] [J] a interjeté appel d'un jugement en date du 22 juin 2010, notifié le 6 juillet, au terme duquel le conseil de prud'hommes de Nice, saisi le 20 aout 2007, l'a débouté de toutes ses demandes et mis les dépens à sa charge.

Aux termes des écritures, reprises oralement à l'audience, et auxquelles il convient de se référer pour plus ample exposé des faits, de la procédure ainsi que des prétentions, les parties formulent les demandes suivantes :

Mme [J] conclut à l'infirmation du jugement déféré, et à la condamnation de Mr [M] [U] à lui payer les sommes de 50.998,01 euros au titre de la modification des conditions de son emploi, 5099,80 euros au titre des congés payés y afférents, 6.386,67 euros à titre de rappel sur indemnité de licenciement selon convention, 31.850 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, 5.000 euros à titre de dommages et intérêts pour rupture vexatoire, 2.500 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'entiers dépens.

Mr [U] conclut à la confirmation du jugement entrepris, au débouté adverse, outre condamnation de l'appelante au paiement de la somme de 3.000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile et entiers dépens.

SUR CE

Sur la demande en paiement au titre de la re-qualification du contrat de travail :

En vertu de l'article L.212-4-3 ancien du code du travail, encore applicable à la date du licenciement et issu de la loi n° 2000-37 du 19 janvier 2000 : « Le contrat de travail des salariés à temps partiel est un contrat écrit. Il mentionne la qualification du salarié, les éléments de la rémunération, la durée hebdomadaire ou, le cas échéant, mensuelle prévue et, sauf pour les salariés des associations et entreprises d'aide à domicile, la répartition de la durée du travail entre les jours de la semaine ou les semaines du mois. Il définit en outre les cas dans lesquels une modification éventuelle de cette répartition peut intervenir ainsi que la nature de cette modification. Toute modification doit être notifiée au salarié sept jours au moins avant la date à laquelle elle doit avoir lieu. Le contrat de travail détermine également les modalités selon lesquelles les horaires de travail pour chaque journée travaillée sont communiqués par écrit au salarié. (') / Le contrat de travail précise par ailleurs les limites dans lesquelles peuvent être effectuées des heures complémentaires au-delà de la durée de travail fixée par le contrat. Le nombre d'heures complémentaires effectuées par un salarié à temps partiel au cours d'une même semaine ou d'un même mois ne peut être supérieur au dixième de la durée hebdomadaire ou mensuelle de travail prévue dans son contrat. (') »

Il en résulte que le contrat de travail du salarié à temps partiel doit être un contrat écrit qui mentionne notamment la durée hebdomadaire ou mensuelle prévue et la répartition de la durée du travail entre les jours de la semaine ou les semaines du mois, les cas dans lesquels une modification éventuelle de cette répartition peut intervenir ainsi que les modalités selon lesquelles les horaires de travail pour chaque journée travaillée sont communiqués par écrit au salarié ;

Il suit de ces dispositions que l'absence d'écrit mentionnant la durée du travail et sa répartition fait présumer que l'emploi est à temps complet et qu'il incombe à l'employeur qui conteste cette présomption de rapporter la preuve, d'une part, de la durée exacte hebdomadaire ou mensuelle convenue, d'autre part, que le salarié n'était pas placé dans l'impossibilité de prévoir à quel rythme il devait travailler et qu'il n'avait pas à se tenir constamment à la disposition de l'employeur ;

Pour contester la demande de re-qualification du contrat en contrat de travail à temps complet, formée en application de l'article L.212-4-3 ancien sus visé du code du travail, Mr [U] soutient en premier lieu que les conclusions des conseillers rapporteurs démontrent que le contrat était à temps partiel et que la

salariée n'était pas tenue de se tenir à disposition de l'employeur, circonstance résultant également d'une part de l'attestation de Mme [H], cousine de l'appelante, intervenue pour la faire engager, d'autre part des bulletins de salaire émis, enfin des relevés manuscrits du nombre de jours travaillés établis mois par mois ;

Or, ni l'attestation émanant de Mme [H] qui déclare : « c'est uniquement sur mon appel téléphonique ou sur celui de M. [I] [T] que Mme [J] venait travailler les jours où elle pouvait se libérer de ses occupations personnelles (') elle venait travailler en fonction de ses seules convenances personnelles (') Elle ou moi inscrivions ses jours et heures de travail (') sur un cahier (') avec un total en fin de mois destiné à établir la feuille de paie », ni l'examen des bulletins de salaire émis, ni enfin les relevés manuscrits du nombre de jours travaillés établis mois par mois, ne démontrent l'existence d'une régularité convenue du nombre de journées travaillées ; bien au contraire, il résulte de l'ensemble de ces éléments que le nombre d'heures mensuelles travaillées était irrégulier et a subi une très nette diminution à compter de l'année 2004 ;

Il en résulte que Mr [U] auquel incombe la charge de la preuve, ne démontre ni l'existence d'une durée de travail convenue, ni en conséquence que Mme [J] n'était pas placée dans l'impossibilité de prévoir à quel rythme elle devait travailler et qu'elle devait ainsi se tenir constamment à la disposition de son employeur ;

Par suite, la disposition sus visée étant d'ordre public, les circonstances résultant de ce que l'existence d'un contrat à temps partiel n'est pas contestée, que Mme [J] était satisfaite de ses conditions de travail qu'elle n'a jamais critiquées, et avait même refusé une autre offre d'emploi à temps partiel, ne peuvent qu'être écartées comme inopérantes, tout comme celle résultant du caractère familial de l'entreprise ;

Il en résulte que c'est par une application erronée de cette disposition que les conseillers rapporteurs, après avoir relevé que le nombre d'heures de travail résultant des bulletins de salaire était de « 623 en 1992, 644 en 1993, 869 en 1994, 987,50 en 1995, 777,35 en 1996, 524,10 en 1997, 408,80 en 1998, 538,20 en 1999, 737,10 en 2000, 806,60 en 2001, 935,30 en 2002, 703,31 en 2003, 479,70 en 2004, 534,30 en 2005, 288,60 en 2006 », ont considéré : « Tant l'employeur que la salariée ne nous ont fourni aucun élément nécessaire aux fins de vérifier la réelle activité de la salariée sur les années 2003 [à] 2007 (') les parties ayant produit (') aucune répartition hebdomadaire ou mensuelle de travail, salaire mensuel et qualification. Au vu de l'absence d'élément nous n'avons pu déterminer si modification il y a eu » ;

Il s'ensuit que le jugement déféré qui déboute Mme [J] de sa demande en paiement formée sur le fondement de cette même disposition au motif que « l'emploi du temps (') étant fixé en fonction des besoins du Cabinet et des disponibilités de Mme [J] » ne peut qu'être réformé ;

Il suit de ce qui précède que Mme [J] est fondée en solliciter le paiement de la somme de 50.998,01 euros correspondant, comme cela résulte du son décompte non autrement contesté, au rappel de salaire résultant d'un contrat à temps complet au titre de l'année 2003 jusqu'à la date de licenciement, outre celle de 5.099,80 euros au titre des congés payés y afférents ;

Sur les demandes en paiement au titre du licenciement :

En ce qui concerne la cause réelle et sérieuse du licenciement :

En application de l'article L.312-1 ancien du code du travail, encore applicable à la date du licenciement : « Constitue un licenciement pour motif économique le licenciement effectué par un employeur pour un ou plusieurs motifs non inhérents à la personne du salarié résultant d'une suppression ou transformation d'emploi ou d'une modification, refusée par le salarié, d'un élément essentiel du contrat de travail, consécutives notamment à des difficultés économiques ou à des mutations technologiques. / Les dispositions du présent chapitre sont applicables à toute rupture du contrat de travail résultant de l'une des causes énoncées à l'alinéa précédent. (...) »

En l'espèce, la lettre de licenciement du 12 février 2007 qui fixe les limites du litige énonce : « Notre cabinet a subi en 2006, une baisse de plus de 10 % de son chiffre d'affaires. Au surplus et comme vous le savez notre cabinet comptait deux associés dont l'un vient de se retirer et cela accentue nos difficultés. Ces difficultés nous amènent à procéder à une réorganisation afin de sauvegarder notre compétitivité. Cette réorganisation entraîne la suppression de votre emploi. »

Au soutien de sa demande visant à entendre déclarer sans cause réelle et sérieuse le licenciement prononcé à son encontre, Mme [J] fait valoir d'une part que la baisse du chiffre d'affaire n'est pas un motif de licenciement d'autant lorsque celle-ci représente 10 % du chiffre d'affaire, d'autre part que deux jeunes salariés ont été embauchés en 2006 ;

Pour justifier de la cause réelle et sérieuse du motif économique du licenciement, Mr [U] qui rappelle que l'employeur doit produire les éléments permettant d'établir que les mesures de réorganisation de l'entreprise sont nécessaires à la sauvegarde de sa compétitivité, indique en premier lieu que le cabinet a commencé à rencontrer des difficultés économiques dès le mois de janvier 2007, lesquelles se sont confirmées tout au long de l'année 2007, entraînant une baisse de résultat et des recettes au 31 décembre 2007 par rapport à celles comptabilisées au 31 décembre 2006 ; Il ajoute que ce n'est que pour sauvegarder la compétitivité du cabinet, que l'emploi de Mme [J] a été supprimé et que celui des salariés embauchés en 2006, dans la perspective d'une reprise des activités du cabinet, ont été licenciés au 31 décembre 2007 ;

Toutefois, et au soutien de ces affirmations, Mr [U] auquel incombe la charge de la preuve de la réalité du motif économique ne produit pour toute pièce justificative que sa déclaration de revenus dressée au titre de sa cessation d'activité pour cause de retraite au 31 décembre 2007 ; Par suite, et alors que cette unique pièce ne permet aucunement d'établir la réalité des difficultés économiques de l'entreprise au mois de février 2007, Mme [J] est fondée à soutenir que son licenciement est dépourvu de cause réelle et sérieuse ;

Il s'ensuit qu'en l'état des contestations élevées par la salariée, le jugement déféré qui se borne à reprendre les affirmations de l'employeur sans avoir pu en vérifier la réalité ne peut qu'être réformé ;

En ce qui concerne la demande en réparation du fait du licenciement :

Mme [J], qui sollicite paiement d'une somme de 31.850 euros correspondant à deux années de salaires, calculées sur la base d'un temps plein, fait valoir qu'elle était âgée de 57 ans et avait 16 ans d'ancienneté à la date du licenciement et qu'elle n'a jamais pu retrouver un emploi à l'exception d'un emploi d'une durée de 6 mois en qualité de surveillante dans un lycée ;

Mr [U] soutient qu'aucune pièce, ni décompte permettant d'apprécier la pertinence des prétentions de la salariée, n'est communiqué ;

Toutefois, au regard d'une part des divers relevés de situation assedic produits pour les années 2007 et 2008, d'autre part de l'ensemble des circonstances de l'espèce, la cour dispose des éléments suffisants pour fixer à la somme de 1.000 euros, le montant devant être alloué de ce chef, tout en déboutant l'appelante de sa demande à fin de dommages et intérêts pour licenciement brutal et vexatoire, circonstance ne résultant pas, au regard de la taille de l'entreprise (composée de 5 salariés), du seul non respect des dispositions applicables à la législation du contrat de travail à temps partiel ;

En ce qui concerne qui concerne le rappel sur l'indemnité conventionnelle de licenciement :

Mme [J] fait valoir, sans être contestée sur ce point, que la convention collective applicable prévoit le paiement de 25 % du salaire mensuel par année de présence ;

Il en résulte, par suite de la re-qualification de son contrat de travail, que Mme [J] est fondée en solliciter le paiement de la somme de (6.386,67 - 1817 =) 4.569,67 euros correspondant, comme cela ressort de son décompte non autrement contesté, au rappel dû de ce chef, après déduction de l'indemnité de licenciement mentionnée au bulletin de salaire du mois de février 2007 ;

Sur les dépens et l'article 700 du code de procédure civile :

Les dépens seront supportés par Mr [U] qui succombe ;

En revanche, les circonstances de l'espèce justifient qu'il ne soit pas fait droit aux demandes formées sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La Cour, statuant en audience publique, par arrêt contradictoire, en matière prud'homale,

Infirme le jugement déféré, et statuant à nouveau,

Condamne Mr [M] [U] à payer à Mme [O] [J] somme de 50.998,01 euros à titre de rappel de salaire, et celle de 5.099,80 euros au titre des congés payés y afférents ;

Condamne Mr [M] [U] à payer à Mme [O] [J] somme de 1.000 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, celle de 4.569,67 euros à titre de rappel sur l'indemnité conventionnelle de licenciement ;

Condamne Mr [M] [U] aux entiers dépens.

Rejette toute autre demande plus ample ou contraire.

LE GREFFIER LE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : 17e chambre b
Numéro d'arrêt : 10/15243
Date de la décision : 13/12/2011

Références :

Cour d'appel d'Aix-en-Provence 7B, arrêt n°10/15243 : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2011-12-13;10.15243 ?
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