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13/09/2012 | FRANCE | N°10/06342

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 8e chambre c, 13 septembre 2012, 10/06342


COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE

8e Chambre C



ARRÊT AU FOND

DU 13 SEPTEMBRE 2012



N° 2012/348













Rôle N° 10/06342







[J] [V] [N]

[W] [M] épouse [N]





C/



Société CAISSE REGIONALE DE CREDIT AGRICOLE MUTUEL PROVENC E COTE D'AZUR



























Grosse délivrée

le :

à :BOISSONNET

DUREUIL




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Décision déférée à la Cour :



Jugement du Tribunal de Grande Instance de TOULON en date du 22 Mars 2010 enregistré au répertoire général sous le n° 09/526.





APPELANT



Monsieur [J] [V] [N]

né le [Date naissance 2] 1963 à [Localité 4] (GUADELOUPE)

demeurant [Adresse 3]

représenté ...

COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE

8e Chambre C

ARRÊT AU FOND

DU 13 SEPTEMBRE 2012

N° 2012/348

Rôle N° 10/06342

[J] [V] [N]

[W] [M] épouse [N]

C/

Société CAISSE REGIONALE DE CREDIT AGRICOLE MUTUEL PROVENC E COTE D'AZUR

Grosse délivrée

le :

à :BOISSONNET

DUREUIL

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Tribunal de Grande Instance de TOULON en date du 22 Mars 2010 enregistré au répertoire général sous le n° 09/526.

APPELANT

Monsieur [J] [V] [N]

né le [Date naissance 2] 1963 à [Localité 4] (GUADELOUPE)

demeurant [Adresse 3]

représenté par la SCP BOISSONNET ROUSSEAU, avocats au barreau d'AIX-EN-PROVENCE, et plaidant par Me JACQUEMART avocat de la SELARL LEFORT-LANCEL-CAMPOLO ET ASSOCCIES avocats au barreau de TOULON

INTIMEE

Société CAISSE REGIONALE DE CREDIT AGRICOLE MUTUEL PROVENC E COTE D'AZUR prise en la personne de son représentant légal en exercice, dont le siège est sis [Adresse 5]

représentée par la SCP Christian DUREUIL, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE constitué aux lieu et place de la SCP MJ DE SAINT FERREOL ET COLETTE TOUBOUL, avoués et plaidant par Me GUETCHIDJIAN avocat de la SCP DUREUIL, avocats

Madame [W] [M] épouse [N], intervenante volontaire

née le [Date naissance 1] 1961 à [Localité 11] (GUADELOUPE)

demeurant [Adresse 3]

représentée par la SCP BOISSONNET ROUSSEAU, avocats au barreau d'AIX-EN-PROVENCE, et plaidant par Me JACQUEMART avocat de la SELARL LEFORT-LANCEL-CAMPOLO ET ASSOCCIES avocats au barreau de TOULON

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions des articles 785,786 et 910 du Code de Procédure Civile, l'affaire a été débattue le 19 Juin 2012, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Monsieur Jean-Louis BERGEZ, Président, chargé du rapport, qui a fait un rapport oral à l'audience, avant les plaidoiries.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Monsieur Jean-Louis BERGEZ, Président

Monsieur Jean-Noël ACQUAVIVA, Conseiller

Monsieur Baudouin FOHLEN, Conseiller

Greffier lors des débats : Madame Valérie VIOLET.

Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 13 Septembre 2012

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 13 Septembre 2012

Signé par Monsieur Jean-Louis BERGEZ, Président et Madame Valérie VIOLET, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

LA COUR

Le 16 juillet 2004, Mme [W] [M] épouse [N] a acquis un fonds de commerce de restaurant au prix de 208 000 € financé au moyen d'un prêt de 185 000€ consenti sur 84 mois par la Caisse régionale de crédit agricole mutuel Provence Côte d'Azur (le Crédit agricole) au taux de 4,5%.

M. [J] [N], époux de l'emprunteuse, s'est porté caution solidaire du remboursement du crédit.

Mme [M] a été mise en redressement judiciaire le 30 juillet 2007 puis en liquidation judiciaire le 9 octobre 2008.

Après avoir mis en demeure M. [N], le Crédit agricole l'a fait assigner en paiement de sa créance, le 23 janvier 2009.

Par jugement du 22 mars 2010, le tribunal de grande instance de Toulon a condamné M. [N] à payer la somme de 132 450,12 € avec intérêts au taux de 6,50% à compter du 13 janvier 2009, se capitalisant dans les conditions de l'article 1154 du code civil. Une indemnité de 900 € a été allouée à la banque au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

M. [N] est appelant de ce jugement.

****

Vu les conclusions déposées le 8 décembre 2010 par le Crédit agricole ;

Vu les conclusions déposées le 25 avril 2012 par M. [N] et par son épouse, laquelle est intervenue volontairement aux débats ;

Vu l'ordonnance de clôture du 22 mai 2012 ;

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur l'extinction de l'obligation de la caution

M. [N] fait valoir que la créance de la banque sur son épouse, débiteur principal, est éteinte par l'effet de la clôture pour insuffisance d'actif de la liquidation judiciaire dont elle a fait l'objet.

Mais la clôture de la liquidation judiciaire pour insuffisance d'actif n'est pas une cause d'extinction des créances, même si elle ne fait pas recouvrer aux créanciers, hors cas particuliers, leur droit de poursuite individuelle.

Sur le grief de financement d'une activité dépourvue de viabilité

M. [N] fait valoir, d'un côté, que le dossier de financement fait état d'un résultat net prévisionnel de 26 000 € par an qui ne permettait pas de couvrir les charges d'emprunt et la rémunération de l'exploitant, d'un autre côté, que la charge de loyer n'a été prise en compte que pour un montant de 2 000€ par mois alors qu'elle était en réalité de 2 700 €.

Il en infère que le Crédit agricole a sciemment financé une activité dépourvue de viabilité.

La banque n'oppose pas à ce moyen les dispositions de l'article L 650-1 du code de commerce qui restreignent la faculté de mettre en jeu la responsabilité d'un établissement de crédit pour faute lors de l'octroi d'un crédit à une entreprise qui a ensuite fait l'objet d'une procédure collective.

En tout état de cause, le grief procède d'une lecture inexacte du budget prévisionnel puisque, d'une part, le dossier de financement fait état d'un 'point mort' de 324 K€ pour un chiffre d'affaires estimé à 329 K€ et que le point mort est calculé après prise en compte 'des divers autres postes maintenus et du futur prêt sollicité', d'autre part, que le loyer a été comptabilisé pour son montant réel, la somme de 2 000 € n'étant portée qu'à titre d'information en considération d'un projet de renégociation du bail.

Par suite, le grief est écarté.

Sur le grief de manquement à l'obligation de mise en garde

La banque, qui ne soutient pas que M. [N] avait la qualité de caution avertie, se borne à opposer à ce grief la circonstance que M. [N] 'disposait de revenus annuels au moment de la signature de l'engagement d'un montant de 164 645 €'.

Mais on ne peut inférer du revenu de l'année 2003, dont la pérennité était incertaine puisqu'il excédait notablement la moyenne de la profession d'infirmier libéral et qu'il n'avait été que de l'ordre de 96 000 € l'année précédente, ce dont la banque était informée pour en avoir fait état page 5 du dossier de financement, qu'il n'existait pour M. [N] aucun risque d'endettement lié à la souscription du cautionnement d'un prêt de 185 000€, d'autant que si les époux étaient propriétaires d'un bien immobilier estimé à 350 000€, ce dernier était grevé d'un prêt de 289 000€ souscrit en 2003.

La banque, qui était tenue à une obligation de mise en garde envers une caution non avertie, n'a pas satisfait à cette obligation.

Le préjudice qui en est résulté ne consiste que dans la perte d'une chance de ne pas s'être engagé. Ce préjudice est à la mesure de la chance perdue, sans qu'il puisse être équivalent à l'avantage qui aurait été tiré d'un défaut de souscription du cautionnement

En considération des circonstances de l'espèce, notamment de l'intérêt que M. [N] avait à garantir le projet de son épouse, ce dont il résulte une forte probabilité que même s'il avait été mis en garde il n'aurait pas renoncé à s'engager, le préjudice doit être fixé à la somme de

10 000€.

Le jugement attaqué est infirmé.

****

M. [N], qui succombe pour l'essentiel, est condamné aux dépens.

Le Crédit agricole, qui succombe partiellement, ne peut qu'être débouté de sa demande en paiement de dommages-intérêts pour abus dans l'exercice du droit d'appel.

L'équité ne commande pas l'application de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La Cour

Statuant publiquement, par arrêt contradictoire,

Confirme le jugement attaqué en ce qu'il a écarté le grief de soutien abusif d'une entreprise dépourvue de viabilité, en ce qu'il a écarté le moyen tiré d'une extinction prétendue de l'obligation de caution, et sur les dépens,

L'infirme pour le surplus,

Statuant à nouveau

Dit que la Caisse régionale de crédit agricole mutuel Provence Côte d'Azur a manqué à l'obligation de mise en garde envers M. [J] [N],

La condamne à payer à M. [J] [N] la somme de 10 000 € à titre de dommages-intérêts,

Après compensation des créances réciproques,

Condamne M. [J] [N] à payer à la Caisse régionale de crédit agricole mutuel Provence Côte d'Azur la somme de 122 450,12 € avec intérêts au taux de 6,50% à compter du 13 janvier 2009, se capitalisant dans les conditions de l'article 1154 du code civil,

Rejette la demande en paiement de dommages-intérêts formée par la Caisse régionale de crédit agricole mutuel Provence Côte d'Azur,

Dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile,

Condamne M. [J] [N] aux dépens,

Vu l'article 699 du code de procédure civile,

Autorise, si elle en a fait l'avance sans avoir reçu provision, la SCP De Saint Ferreol - Touboul à recouvrer les dépens d'appel, exposés jusqu'au 1er janvier 2012, directement contre M. [J] [N].

Le Greffier Le Président


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : 8e chambre c
Numéro d'arrêt : 10/06342
Date de la décision : 13/09/2012

Références :

Cour d'appel d'Aix-en-Provence 8C, arrêt n°10/06342 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2012-09-13;10.06342 ?
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