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05/10/2012 | FRANCE | N°10/13730

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 11e chambre a, 05 octobre 2012, 10/13730


COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE

11e Chambre A



ARRÊT AU FOND

DU 05 OCTOBRE 2012



N° 2012/ 476













Rôle N° 10/13730







SARL CIFFREO & BONA

SOCIETE NEYROLLE





C/



SAS NEYROLLE

SARL CIFFREO & BONA





















Grosse délivrée

le :

à :



SCP COHEN

SCP BADIE SIMON THIBAUT










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Décision déférée à la Cour :



Jugement du Tribunal de Grande Instance d'AIX-EN-PROVENCE en date du 31 Mai 2010 enregistré au répertoire général sous le n° 98/5917.





APPELANTE et INTIMEE



SARL CIFFREO & BONA, prise en la personne de son gérant en exercice, demeurant [Adresse 8]

représentée par la SCP COHEN GUEDJ, avo...

COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE

11e Chambre A

ARRÊT AU FOND

DU 05 OCTOBRE 2012

N° 2012/ 476

Rôle N° 10/13730

SARL CIFFREO & BONA

SOCIETE NEYROLLE

C/

SAS NEYROLLE

SARL CIFFREO & BONA

Grosse délivrée

le :

à :

SCP COHEN

SCP BADIE SIMON THIBAUT

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Tribunal de Grande Instance d'AIX-EN-PROVENCE en date du 31 Mai 2010 enregistré au répertoire général sous le n° 98/5917.

APPELANTE et INTIMEE

SARL CIFFREO & BONA, prise en la personne de son gérant en exercice, demeurant [Adresse 8]

représentée par la SCP COHEN GUEDJ, avocats au barreau D'AIX-EN-PROVENCE,

Plaidant par Me DEUR Nicolas de l' ASS ESCOFFIER-WENZINGER-DEUR, avocats au barreau de NICE

INTIMEE et APPELANTE

SAS NEYROLLE, prise en la personne de son représentant légal, demeurant [Adresse 9]

représentée par la SCP BADIE, SIMON-THIBAUT et JUSTON, avocats au barreau d'AIX-EN-PROVENCE aux lieu et place de la SCP MJ DE SAINT FERREOL ET COLETTE TOUBOUL, Avoués

Plaidant par Me ROUSTAN de la SCP ROUSTAN-BERIDOT, avocats au barreau d'AIX-EN-PROVENCE,,

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

L'affaire a été débattue le 27 Juin 2012 en audience publique. Conformément à l'article 785 du Code de Procédure Civile, Monsieur Daniel ISOUARD, Président, a fait un rapport oral de l'affaire à l'audience avant les plaidoiries.

La Cour était composée de :

Monsieur Daniel ISOUARD, Président

Monsieur Jean-Claude DJIKNAVORIAN, Conseiller

Madame Sylvie PEREZ, Conseillère

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Madame Mireille LESFRITH.

Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 05 Octobre 2012

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 05 Octobre 2012,

Signé par Monsieur Daniel ISOUARD, Président et Madame Mireille LESFRITH, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

EXPOSÉ DU LITIGE :

Le 1er mars 1990, la société Neyrolle a donné à bail pour une durée de neuf ans à la société Ciffreo & Bona deux parcelles contiguës situées à [Adresse 6] d'une superficie totale de 9 400 mètres carrés sur lesquelles le preneur s'obligeait à édifier un bâtiment de 1 200 mètres carrés comprenant un hangar de stockage et 200 mètres carrés de bureaux.

Le 3 mars 1999, la société Ciffreo & Bona a demandé le renouvellement de son bail à compter du 1er mars 1999 et le 22 avril 1999 la société Neyrolle lui a opposé son refus sans indemnité d'éviction, invoquant diverses infractions au bail.

Par jugement du 7 novembre 2002 confirmé par arrêt de cette Cour du 28 septembre 2006, le tribunal de grande instance d'Aix-en-Provence a :

- constaté que le bail avait pris fin le 28 février 1999,

- dit que la société Neyrolle devait payer une indemnité d'éviction à la société Ciffreo & Bona,

- désigné un expert pour donner les éléments nécessaires à sa fixation,

- rappelé que la société Ciffreo & Bona avait droit au maintien dans les lieux jusqu'au paiement de cette indemnité et a rejeté la demande d'expulsion à son encontre,

- fixé à la somme de 35 673,07 euros par an outre les augmentations déjà intervenues résultant des révisions prévues au bail, l'indemnité d'occupation due par la société Ciffreo & Bona à compter du 1er mars 1999.

Après dépôt du rapport de l'expert judiciaire, le tribunal de grande instance d'Aix-en-Provence, après avoir révoqué par ordonnances des 21 janvier et 18 mars 2010 l'ordonnance de clôture prononcée le 10 décembre 2009, a, par jugement du 31 mai 2010, condamné la société Neyrolle à payer à la société Ciffreo & Bona la somme de 135 000 euros d'indemnité d'éviction et celle de 5 000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile.

Le 20 juillet 2010, la société Ciffreo & Bona a interjeté appel de cette décision.

Le 16 novembre 2012 la société Neyrolle a interjeté appel de l'ordonnance du 21 janvier 2010 et le 16 avril 2012 de celle du 18 mars 2010. Ces deux recours ont été joints à celui de son adversaire.

La société Ciffreo & Bona prétend que les deux appels de son adversaire ne sont pas recevables aux motifs pour le premier qu'il a été formé par acte distinct de ses conclusions d'appel incident et pour le second qu'il est postérieur à cet appel incident. Elle soutient également que la révocation de l'ordonnance de clôture s'imposait, rendant recevables ses conclusions devant le premier juge et qu'au surplus sa demande en fixation de l'indemnité d'éviction ne constitue pas une demande nouvelle en appel.

Au fond elle estime son préjudice, en cas de perte totale de son fonds de commerce à la somme de 1 763 931 euros. Elle reconnaît qu'il y a eu transfert d'activité et évalue ainsi l'indemnité d'éviction due dans ce cas :

- perte partielle de clientèle ....................................................... : 150 400 €,

- indemnité de remploi .............................................................. : 28 345 €,

- frais de déménagement hors stock ............................................. : 61 929 €,

- trouble commercial .................................................................... : 210 750 €,

- frais de réinstallation .................................................................. : 1 645 607 €,

- frais d'administratifs .................................................................. : 7 275 €,

- double loyer ................................................................................ : 204 320 €

Total ............................................................................................. : 2 308 626 €.

L'indemnité d'éviction en cas de déplacement du fonds de commerce ne pouvant être supérieure à celle due en cas de perte de ce fonds, elle réclame la condamnation de la société Neyrolle à lui payer de ce chef la somme de 1 763 931 euros avec intérêts de retard à compter du 7 novembre 2002 ainsi que celle de 954 000 euros de dommages-intérêts et celle de

20 000 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile.

La société Neyrolle conclut à la réformation de l'ordonnance du 21 janvier 2010 prononçant la révocation de l'ordonnance de clôture du 10 décembre 2009. Elle en tire comme conséquence que les conclusions de la société Ciffreo & Bona chiffrant son indemnité d'éviction déposées les 8 janvier et 10 mars 2010 sont irrecevables, que le premier juge ne pouvait statuer sur le montant de cette indemnité et que la demande en montant de cette indemnité présentée en appel est irrecevable comme nouvelle et qu'il n'y a plus lieu de statuer sur le montant de cette indemnité en absence de demande recevable.

Subsidiairement, elle conclut à la réformation du jugement attaqué estimant que la société Ciffreo & Bona ne rapporte pas la preuve d'un préjudice en relation avec l'éviction.

Elle demande sa condamnation à lui payer la somme de 10 000 euros par application de l'article 700 du Code de procédure civile.

* *

* * *

* *

MOTIFS DE LA DÉCISION :

Sur la procédure :

Il se déduit de l'article 545 du Code de procédure civile que l'ordonnance du juge de la mise en état révoquant l'ordonnance de clôture ne peut être frappée d'appel qu'avec le jugement sur le fond.

La société Ciffreo & Bona reproche à la société Neyrolle de ne pas avoir interjeté appel des deux ordonnances des 21 janvier 2010 et du 18 mars 2010 du juge de la mise en état révoquant l'ordonnance de clôture par le même acte que le jugement au fond.

Mais d'une part, la société Neyrolle n'est pas appelante du jugement du 31 mai 2010, le recours ayant été formé par la société Ciffreo & Bona. Dès lors elle pouvait en interjeter appel par actes distincts. D'autre part, concernant l'appel de l'ordonnance du 21 janvier 2010, l'appel en a été interjeté le 16 novembre 2010 le même jour que le dépôt des conclusions de la société Neyrolle contenant appel incident.

Le recours de la société Neyrolle contre ces deux ordonnances est recevable.

L'ordonnance du 21 janvier 2010 a révoqué l'ordonnance de clôture du 10 décembre 2009. Cette révocation s'avère fondée ; en effet rien n'établit que la société Ciffreo & Bona avait eu connaissance de la date à laquelle cette ordonnance devait intervenir, l'avis du juge de la mise en état du 24 septembre 2009 indiquant seulement que l'affaire est renvoyée pour nouvel examen de la procédure au 10 décembre 2009 pour conclusions de la SCP Roustan - Béridot (avocats de la société Neyrolle).

En absence d'avis de clôture et de conclusions de la société Ciffreo & Bona établissant que l'affaire était en l'état, l'ordonnance de clôture ne pouvait intervenir et sa révocation s'imposait.

L'ordonnance du 21 janvier 2010 ne prévoit aucune date pour une nouvelle clôture de l'instruction de l'affaire.

L'ordonnance du 18 mars 2010 révoque de nouveau l'ordonnance de clôture du

10 décembre 2009 alors que cette ordonnance était déjà révoquée et n'a de ce chef aucune portée. Elle clôture l'affaire.

Ainsi toutes les écritures déposées devant le premier juge étaient recevables et celui-ci pouvait statuer sur les prétentions chiffrées de la société Ciffreo & Bona.

Au surplus, admettre une irrégularité de la procédure en première instance, ne priverait pas la société Ciffreo & Bona de son droit à présenter une demande chiffrée en appel. En effet le premier juge, par jugement du 7 novembre 2002 confirmé par arrêt de cette Cour du 28 septembre 2006, avait retenu le droit de la société Ciffreo & Bona à une indemnité d'éviction; et ne constitue pas une demande nouvelle prohibée par l'article 564 du Code de procédure civile, le chiffrage d'une demande formulée en première instance car elle en est le complément.

Sur l'indemnité d'éviction :

L'article L. 145-14 du Code de commerce énonce : 'Le bailleur peut refuser le renouvellement du bail. Toutefois, le bailleur doit, sauf exceptions prévues aux articles L. 145-17 et suivants, payer au locataire évincé une indemnité dite d'éviction égale au préjudice causé par le défaut de renouvellement. Cette indemnité comprend notamment la valeur marchande du fonds de commerce, déterminée suivant les usages de la profession, augmentée éventuellement des frais normaux de déménagement et de réinstallation, ainsi que des frais et droits de mutation à payer pour un fonds de même valeur, sauf dans le cas où le propriétaire fait la preuve que le préjudice est moindre'.

La société Ciffreo & Bona reconnaît avoir pu déplacer son fonds et conserver la majeure partie de sa clientèle.

1 °) sur la perte partielle de clientèle :

La société Ciffreo & Bona exerçait sur le site loué une activité de négoce de matériaux de construction et une activité relative aux travaux publics. Après le congé, elle a pris en possession un nouveau terrain situé à [Adresse 1], où elle a transféré son activité relative aux travaux publics puis, à travers un bail à construire, un autre terrain situé à [Localité 5] à environ trois cents mètres de celui pris en location à la société Neyrolle et où elle a transféré son activité restante le 1er janvier 2011.

Elle expose que son chiffre d'affaires 2011 sur le nouveau site se monte à la somme de 2 667 000 euros contre 3 043 000 euros pour l'année 2010 sur le site pris en location à la société Neyrolle soit une baisse de 376 000 euros. Estimant avec l'expert judiciaire que son fonds s'évalue à 40 % de son chiffre d'affaires, elle estime la perte partielle de clientèle à 150 400 € (376 000 € × 40 %).

Mais cette baisse du chiffre d'affaires sur un seul exercice ne suffit pas à établir une perte de clientèle ; en effet les résultats de la société Ciffreo & Bona sur le site d'Éguilles varient de manière notable d'un exercice à l'autre et les exercices précédents ne révèlent pas une évolution continue ; par exemple si l'exercice 2010 a été de 3 043 000 euros, celui de 2009 s'élevait à 2 149 000 euros.

Même si le nouveau terrain se situe en retrait par rapport à celui loué à la société Neyrolle, il ne ressort pas que cette position présente une commercialité moindre pour de ce type de produits vendus dont les acheteurs sont essentiellement des professionnels.

L'expert a constaté que la clientèle matériaux de construction avait été conservée par le fonds d'Éguilles et celle travaux publics transférée au site des Milles situé à une dizaine de kilomètres dans le même secteur de l'agglomération aixoise.

La société Ciffreo & Bona n'établit pas la perte partielle de sa clientèle.

2°) sur l'indemnité de remploi :

L'indemnité de remploi indemnise le preneur des frais et droits de mutation à payer pour l'acquisition d'un fonds de même valeur ou d'un droit au bail équivalent.

La société Ciffreo & Bona réclame la somme de 3 192,50 euros, montant des frais de rédaction du bail à construire relatif au nouveau terrain sur lequel elle s'est installée et la somme de 25 153 euros représentant la taxe locale d'équipement.

Les frais de rédaction d'acte se trouvent justifiés.

La société Ciffreo & Bona établit également qu'elle a dû verser au titre de la taxe locale d'équipement générée par la construction qu'elle a édifiée sur le terrain où elle a déplacé son fonds la somme de 25 153 euros. Contrairement à ce que soutient son adversaire, il importe peu que cette construction ait été réalisée dans le cadre d'un bail à construire, l'assujetti à cette taxe étant le titulaire du permis de construire et son titre d'occupation important peu.

La taxe locale d'équipement constitue un frais de remploi.

Ainsi le montant des frais de remploi s'élève à la somme de 28 345,50 euros.

3°) sur les frais de déménagement :

Pour ses frais de déménagement la société Ciffreo & Bona réclame la somme de 61 929,39 euros qu'elle ventile en 37 103,77 euros pour les dépenses effectuées et de

24 825,62 euros représentant le salaire de sept de ses salariés affectés au mois de décembre 2010 à ce transfèrement du matériel et autres meubles de l'ancien local au nouveau.

Le coût de cette main d''uvre ne ressort que d'une lettre établie par elle-même au commissaire aux comptes insuffisante à démontrer une charge de ce montant.

L'évaluation de ces frais de déménagement à la somme de 60 000 euros par le premier juge doit être confirmée.

4°) sur le trouble commercial :

Le trouble commercial correspond au préjudice subi par le locataire pendant la période de déménagement et de réinstallation.

Le premier juge suivant l'avis de l'expert, l'a fixé à la somme de 75 000 euros soit trois mois de masse salariale en raison du caractère déficitaire de l'exercice 2006.

La société Ciffreo & Bona réclame la somme de 210 750 euros représentant trois mois de la marge brute d'autofinancement dégagé en 2011 (843 000 €).

Mais compte tenu de la fluctuation de cette marge, c'est très exactement que le premier juge a fixé le trouble commercial à trois mois de masse salariale soit la somme de 75 000 euros.

5°) sur les frais normaux de réinstallation :

Les frais normaux d'installation du locataire évincé dans ses nouveaux locaux y compris ceux nécessités pour l'aménagement de ceux-ci à son activité ouvrent droit à indemnisation.

La société Ciffreo & Bona expose qu'elle a dû faire construire un nouveau bâtiment pour exercer son activité d'un coût de 1 645 607 euros.

Pour rejeter sa demande de ce chef, le premier juge s'est fondé sur la clause du bail prévoyant que les constructions effectuées sur le terrain de la société Neyrolle donné en location lui reviendrait sans indemnité à la libération dudit terrain. Mais la demande du locataire ne se fonde pas sur l'indemnisation du bâtiment abandonné mais sur le coût imposé pour en construire un autre sur le nouveau terrain. Ce motif du rejet de l'indemnisation pour frais normaux de réinstallation est inopérant.

Le bail liant la société Neyrolle et la société Ciffreo & Bona imposait à celle-ci de construire un bâtiment d'environ 1 200 mètres carrés. Ainsi cette édification ressort d'une obligation du bail et non pas d'un choix du seul preneur.

La nouvelle location conclue le 17 janvier 2002 stipule également une obligation de construire étant précisé qu'elle ne constitue pas un bail commercial mais un bail à construction d'une durée de 20 ans.

Les frais de réinstallation doivent prendre en compte l'obligation où se trouve la société Ciffreo & Bona pour se réinstaller d'édifier un immeuble équivalent à celui qu'elle occupait.

Contrairement à ce que soutient la société Neyrolle, il ne convient pas de comparer le terrain nu avec obligation de construire qu'elle a donné à bail à la société Ciffreo & Bona le 1er mars 1990 avec le terrain nu pris en location avec aussi obligation de construire par celle-ci le 17 janvier 2002 mais le local commercial délaissé avec bâtiment avec la nouvelle location.

Ainsi l'édification d'un nouveau bâtiment pour exercer son activité donne droit à indemnisation à la société Ciffreo & Bona.

Cependant la somme de 1 645 607 euros réclamée ne peut être allouée pour ce montant.

En effet l'expertise judiciaire montre que la valeur neuve du bâtiment édifié sur le terrain de la société Neyrolle était de 975 000 euros. La différence de prix établit que la nouvelle construction ne correspond pas à l'ancienne et s'avère soit en importance soit en aménagement d'un niveau supérieur.

Ensuite l'ancienne construction édifiée entre 1992 et 1996 présentait une certaine vétusté qui aurait occasionné des frais d'entretien supérieurs à ceux du nouveau bâtiment.

En raison de ces considérations, il convient d'évaluer l'indemnité de réinstallation à la somme de 750 000 euros.

6°) sur les frais administratifs :

La société Ciffreo & Bona réclame le paiement de la somme de 7 275 euros correspondant aux frais de publicité effectués pour informer sa clientèle du déplacement de son fonds.

Cette dépense ayant aussi un impact publicitaire doit donner lieu à indemnisation pour la somme de 4 000 euros.

7°) sur le double loyer :

Le double loyer indemnise la nécessité pour le locataire de payer un loyer pour l'ancien et le nouveau local durant la période de déménagement.

La société Ciffreo & Bona réclame la somme de 204 320 euros correspondant au loyer du nouveau local du 1er octobre 2002, date où elle a pris celui-ci en location au 31 décembre 2010, jour où elle a libéré le local pris à bail à la société Neyrolle.

Mais alors qu'elle bénéficiait du droit au maintien dans les lieux jusqu'à leur libération, elle a fait le choix de prendre à bail un nouveau local, de ne pas s'y établir et de rester dans celui loué à la société Neyrolle jusqu'au 31 décembre 2010.

Ce double loyer ressort d'un choix de gestion ou de stratégie et non pas d'une nécessité liée à sa réinstallation.

Le déménagement ayant duré environ un mois et l'indemnité d'occupation étant de 35 673 euros par an, l'indemnité pour double loyer doit être fixée à la somme de 2 972,75 euros.

L'indemnité d'éviction doit être évaluée à la somme de 920 318,25 euros avec intérêts au taux légal à compter de ce jour, date de sa fixation.

Sur les dommages-intérêts :

La société Ciffreo & Bona fonde sa demande en dommages-intérêts pour la somme de 954 000 euros sur les multiples man'uvres effectuées par la société Neyrolle pour précariser sa situation manifestant un comportement qui a dégénéré en abus, cause d'une baisse important de son chiffre d'affaires sur le site d'Éguilles.

Contrairement à ce qu'elle soutient, l'expert judiciaire n'a pas chiffré ce préjudice à cette somme ni à une autre, retenant que la perte du fonds d'Éguilles était compensée par un transfèrement de clientèle sur celui des Milles.

L'échec de la société Neyrolle dans ses procédures contre la société Ciffreo & Bona ne suffit pas à caractériser un abus de droit et la société Ciffreo & Bona n'établit pas l'existence d'un préjudice distinct de celui réparé par cet arrêt.

Aucun principe d'équité ne conduisant à écarter l'application de l'article 700 du Code de procédure civile, la société Neyrolle doit être condamnée à payer à la société Ciffreo & Bona la somme de 5 000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile.

* *

* * *

* *

PAR CES MOTIFS :

Statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort ;

Déboute la société Neyrolle de sa demande contre les décisions du juge de la mise en état des 21 janvier 2010 et 18 mars 2010 ;

Réforme le jugement du 31 mai 2010 du tribunal de grande instance d'Aix-en-Provence ;

Statuant à nouveau :

Fixe l'indemnité d'éviction due par la société Neyrolle à la société Ciffreo & Bona à la somme de 920 318,25 euros avec intérêts à compter de ce jour ;

Déboute la société Ciffreo & Bona de sa demande en dommages-intérêts ;

Condamne la société Neyrolle à payer à la société Ciffreo & Bona la somme de 5 000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ;

Condamne la société Neyrolle aux dépens et dit qu'ils seront recouvrés conformément à l'article 699 du Code de procédure civile.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : 11e chambre a
Numéro d'arrêt : 10/13730
Date de la décision : 05/10/2012

Références :

Cour d'appel d'Aix-en-Provence A1, arrêt n°10/13730 : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2012-10-05;10.13730 ?
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