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29/11/2012 | FRANCE | N°12/02187

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 9e chambre a, 29 novembre 2012, 12/02187


COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE

9e Chambre A



ARRÊT AU FOND

DU 29 NOVEMBRE 2012



N°2012/803















Rôle N° 12/02187







[U] [F]





C/



SA SNEF













































Grosse délivrée le :

à :

Me Christian MAILLARD, avocat au barreau de MARSEILLE



Me Frédéric FRIBURGER, avocat au barreau de MARSEILLE



Copie certifiée conforme délivrée aux parties le :



Décision déférée à la Cour :



Jugement du Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de MARSEILLE en date du 26 Janvier 2012, enregistré au répertoire général sous le n° 10/2138.





APPELANT



Monsieur [U] [F], demeurant Domicilié chez...

COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE

9e Chambre A

ARRÊT AU FOND

DU 29 NOVEMBRE 2012

N°2012/803

Rôle N° 12/02187

[U] [F]

C/

SA SNEF

Grosse délivrée le :

à :

Me Christian MAILLARD, avocat au barreau de MARSEILLE

Me Frédéric FRIBURGER, avocat au barreau de MARSEILLE

Copie certifiée conforme délivrée aux parties le :

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de MARSEILLE en date du 26 Janvier 2012, enregistré au répertoire général sous le n° 10/2138.

APPELANT

Monsieur [U] [F], demeurant Domicilié chez Me [H] - [Adresse 2]

comparant en personne, assisté de Me Christian MAILLARD, avocat au barreau de MARSEILLE

INTIMEE

SA SNEF, demeurant [Adresse 3]

représentée par Me Frédéric FRIBURGER, avocat au barreau de MARSEILLE substitué par Me Emilie CARLI, avocat au barreau de MARSEILLE

PARTIE(S) INTERVENANTE(S)

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions de l'article 945-1 du Code de Procédure Civile, l'affaire a été débattue le 27 Septembre 2012, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Monsieur Michel VANNIER, Président, chargé d'instruire l'affaire.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour composée de :

Monsieur Michel VANNIER, Président

Monsieur Gilles BOURGEOIS, Conseiller

Madame Laure ROCHE, Conseiller

Greffier lors des débats : Mme Nadège LAVIGNASSE.

Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 29 Novembre 2012

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 29 Novembre 2012

Signé par Monsieur Michel VANNIER, Président et Mme Nadège LAVIGNASSE, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

FAITS ET PROCÉDURE :

La société Snef, entreprise employant habituellement plus de onze salariés a embauché monsieur [F] par contrat à durée déterminée en date du 19 janvier 2007, transformé en un contrat à durée indéterminée le 2 mai 2007, en qualité de technicien de maintenance, catégorie E de la convention collective des employés, techniciens et agents de maîtrise des travaux publics, pour un salaire brut moyen de 1.800,00 euros.

Le salarié a saisi le conseil de prud'hommes de Marseille le 21 juillet 2010 en résiliation judiciaire de son contrat de travail et il a été licencié pour faute grave par lettre recommandée en date du 27 avril 2012 ; par lettre postée le 3 février 2012, il a régulièrement interjeté appel du jugement rendu le 26 janvier 2012 qui a reconnu qu'il avait bien la qualification de conducteur de travaux et qui a condamné la société à lui payer la somme de 800,00 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.

Monsieur [F] demande à la cour de :

- constater l'aveu judiciaire par lequel l'employeur reconnaît qu'il exerçait bien les fonctions de conducteur des travaux ou chargé d'affaires,

- condamner la société à porter sa classification au niveau G de la convention collective,

- prononcer la résiliation judiciaire de son contrat de travail ou dire que son licenciement est dépourvu de cause réelle et sérieuse,

- condamner l'employeur à lui payer les sommes suivantes :

* 14.845,989 euros de rappel de salaire conventionnel,

* 20.000,00 euros pour discrimination ou différence de traitement,

* 50.000,00 euros d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

* 2.380,53 euros d'indemnité conventionnelle de licenciement,

* 5.269,00 euros d'indemnité compensatrice de préavis,

* 1.023,76 euros de rappel d'heures supplémentaires,

* 2.000,00 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ;

il sollicite en outre la remise de documents sociaux rectifiés sous astreinte de 80,00 euros par jour de retard et l'application de l'article 10 du décret du 8 mars 2001 portant modification du décret du 12 décembre 1996.

La société Snef demande à la cour de :

- constater que la classification et la rémunération de monsieur [F] sont conformes au dispositions conventionnelles,

- débouter le salarié de l'ensemble de ses demandes,

- dire et juger que son licenciement pour faute grave est légitime et régulier,

- subsidiairement, ramener à de plus justes proportions les sommes réclamées par monsieur [F],

- condamner l'appelant à lui payer 2.000,00 euros au titre de ses frais irrépétibles.

Pour un plus ample exposé des faits de la procédure, des moyens et prétentions des parties, il y a lieu de se référer à la décision déférée et aux écritures déposées, oralement reprises à l'audience du 27 septembre 2012.

MOTIFS DE LA DECISION :

Lorsque le salarié demande la résiliation judiciaire de son contrat de travail en raison de faits qu'il reproche à son employeur et que ce dernier le licencie ultérieurement, le juge doit d'abord rechercher si la demande de résiliation du contrat de travail était justifiée ; c'est seulement dans le cas contraire qu'il doit se prononcer sur le licenciement notifié par l'employeur.

- sur la demande de résiliation judiciaire :

* sur la qualification professionnelle du salarié :

La qualification professionnelle d'un salarié dépend des fonctions réellement exercées, comme l'a rappelé, au cas d'espèce, une 'lettre d'information juridique' de la Snef, de décembre 2007, relative à la 'modification de la Convention Collective du Bâtiment ETAM'.

Monsieur [F] a été embauché le 19 janvier 2007 en qualité de technicien de maintenance, catégorie E de la convention collective des employés, techniciens et agents de maîtrise des travaux publics puis, par avenant en date du 1er juin 2008, il a accepté l'application d'une nouvelle convention collective, celle des employés, techniciens et agents de maîtrise du bâtiment et il a été alors informé du nouveau libellé de son emploi qui devenait 'agent technique' et du maintien de sa classification au niveau E ; il revendique le niveau G de la convention collective comme il avait déjà réclamé, par la lettre du 14 septembre 2009, une réévaluation de son titre et de sa rémunération.

Selon la convention collective - avenant n°1 du 26 septembre 2007 en vigueur étendu relatif à la classification des emplois - la définition des emplois Etam est la suivante pour les deux niveaux concernés :

- l'Etam de niveau E :

* est titulaire d'un diplôme de l'enseignement technologique ou professionnel de niveau BTS, DUT, DEUG ou licence professionnelle (ce qui est le cas de monsieur [F]) ;

* réalise des travaux d'exécution, de contrôle, d'organisation, d'études ou exerce un commandement sur les salariés placés sous son autorité, résout des problèmes à partir de méthodes et techniques préétablies, peut transmettre ses connaissances ;

* agit dans le cadre d'instructions permanentes et/ou de délégations dans un domaine d'activités strictement défini ;

* est amené à prendre une part d'initiatives, de responsabilités et d'animation ;

* échange des informations avec des interlocuteurs externes ;

* effectue des démarches courantes ;

* veille à faire respecter l'application des règles de sécurité ;

* a une connaissance des principaux aspects techniques et savoir-faire de sa spécialité professionnelle, une bonne technicité dans sa spécialité dans laquelle il se tient à jour ;

- l'Etam de niveau G :

* a une expérience acquise en niveau F ou une formation générale, technologique ou professionnelle ;

* réalise des travaux d'exécution, de contrôle, d'organisation, d'études, de gestion, d'action commerciale portant sur un projet important ou complexe ou sur plusieurs projets ou exerce un commandement sur plusieurs équipes de salariés affectés à un projet important ou complexe ou plusieurs projets, résout des problèmes variés avec choix de la solution la plus adaptée tenant compte des données et contraintes d'ordre économique, technique, administratif et commercial, sait et doit transmettre ses connaissances ;

* agit par délégation dans le cadre d'instructions ;

* à un rôle d'animation ;

* sait faire passer l'information et conduit des relations régulières avec des interlocuteurs externes ;

* représente l'entreprise dans le cadre de ces instructions et délégations;

* veille à faire respecter l'application des règles de sécurité et participe à leur adaptation et à leur amélioration ;

* a une connaissance approfondie des techniques et savoir-faire de sa spécialité et des connaissances de base de techniques connexes, une haute technicité dans sa spécialité et une technicité de base dans des domaines connexes, tient à jour ses connaissances et sa spécialité et ses connaissances de base des techniques connexes, notamment par recours à la formation professionnelle continue.

Si monsieur [F] produit de multiples documents émanant de la Snef dans lequel il est qualifié de 'conducteur de travaux' - c'est la qualification que lui reconnaît effectivement l'employeur dans le corps de ses écritures (page 9)- et deux autres dans lesquels il est qualifié de 'chargé d'affaires', ces deux derniers documents n'étant toutefois pas significatifs qu'ils sont tous deux antérieurs à d'autres documents dans lesquels l'entreprise lui reconnaît la qualification de conducteur de travaux, il ne décrit à aucun moment les fonctions qu'il exerçait au sein de l'entreprise ; néanmoins, il résulte des pièces du dossier émanant de la Snef que monsieur [F] :

- a mis à jour, sur ordre du 8 octobre 2007, un contrat de maintenance avec la BNP;

- a transmis :

* le 11 octobre 2007, un planning des astreintes de 7 personnes y compris lui-même ;

* le 15 septembre 2008, 'le pointage de la semaine 37, pour les équipes SNEF et INTERIM du génie climatique ;

- s'est vu demander, ainsi qu'aux salariés [G], [O], [B], [N], [V], [X] et [E] :

* le 23 mars 2009, de fournir les pointages 'de l'encadrement' et 'de toute personne dont le nombre d'heures est supérieur à 35h00" ;

* le 7 avril 2009, de préciser le rôle de 48 autres salariés ;

* le 24 avril 2009, de faire rempli par ses employés, une fiche de dotation nominative de matériel de sécurité ;

- a transmis les 29 janvier et 2 octobre 2009 les candidatures d'un frigoriste et d'un chauffagiste ;

- a signé le 17 avril 2009, en représentation de son employeur, le procès verbal de réception de travaux sans réserve suite au remplacement total d'une installation de climatisation ;

- était en charge, à partir du 3 juin 2009 suite à une nouvelle organisation, du suivi d'un certain nombre de sites avec messieurs [J] et [E] ;

- en tant que 'responsable de zone de maintenance' le 7 septembre 2009 était 'responsable d'une équipe de maintenance préventive et corrective pour un effectif

- a suivi à partir de décembre 2009, le suivi de 22 convecteurs en apposant une étiquette sur chacun d'eux avant de constituer un fichier de suivi de ces matériels ;

- a procédé le 6 décembre 2009 à l'achat d'un convecteur ;

- a dirigé en avril 2010 une équipe qui a réalisé des 'brassages téléphoniques' pour palier l'absence d'un salarié ;

- a établi le 1er mars 2010 un devis d'environ 2.000,00 euros et s'est vu demander le 21 mai 2010 un devis pour l'achat de 20 badges ;

- a dû gérer en juin 2010, l'audit d'un site, la réclamation d'un devis de sous-traitant, exécuter divers dépannages et réclamer et donner des informations elles aussi diverses;

Il résulte de ces documents que monsieur [F], dont l'activité principale consistait à assurer des interventions de maintenance, d'abord dans le cadre d'une activité multi-sites, c'est-à-dire chez des clients disposant de plusieurs succursales (comme la BNP), ensuite sur un secteur géographique au profit de clients ayant une activité multi-sites ou mono-sites, puis enfin à nouveau uniquement chez les clients disposant de plusieurs sites :

- n'est intervenu qu'à une seule reprise en avril 2009 en représentation de son employeur lors de la réception de travaux et ne justifie pas avoir bénéficié d'une délégation de pouvoirs ;

- recevait les instructions précises et régulières de ses supérieurs hiérarchiques ;

- ne disposait pas d'une grande autonomie puisqu'il devait rendre compte régulièrement de son activité ;

- dirigeait une seule équipe de moins de 10 personnes, en contrôlant les horaires de travail des salariés et en s'assurant que les consignes de sécurité étaient respectées, équipe qu'il ne gérait pas réellement puisque les salariés étaient répartis sur un chantier donné par un chargé d'affaires, son supérieur hiérarchique, notamment monsieur [O] ;

- procédait sous le contrôle de son supérieur à de petits achats de matériels ;

- effectuait de petits devis.

L'ensemble de ses attributions relevaient bien du niveau E de la convention collective, la cour relevant en outre, bien qu'il ne le réclame pas, que monsieur [F] ne pouvait pas plus prétendre au niveau F faute pour l'intéressé de démontrer qu'il exerçait des activités de gestion et d'action commerciale portant sur des projets plus techniques, ou qu'il a résolu des problèmes avec choix de la solution la plus adaptée par référence à des méthodes, des procédés ou des moyens habituellement mis en oeuvre dans l'entreprise, ou qu'il transmettait ses compétences ou qu'il était amené à prendre des initiatives et des responsabilités ou qu'il avait un rôle d'animation, ou qu'il avait une haute technicité dans sa spécialité ou qu'il se tenait à jour dans celle-ci notamment par le recours à la formation professionnelle continue.

En outre, si l'employeur ne démontre pas avoir accordé au salarié un entretien individuel au moins biennal ni pris en compte, dans le délai de 3 mois, sa demande du 14 septembre 2009 susvisée - aucune réponse à ce courrier n'est versée aux débats -, ce non respect de l'article 3 en vigueur étendu concernant l'évolution de carrière du salarié ne saurait être sanctionné par l'octroi d'une qualification autre que celle applicable à l'emploi réellement exercé ; enfin, monsieur [F] ne prouve pas avoir exercé de façon habituelle des tâches relevant d'un niveau supérieur à sa qualification.

* sur la discrimination :

Monsieur [F] soutient ne pas avoir été traité sur le plan de la qualification et du salaire comme ses autres collègues, messieurs [Y], [J], [W] et [R] et avoir été discriminé par rapport à ceux-ci en raison de ses origines, mais il ne produit aucun éléments de fait laissant supposer l'existence d'une discrimination directe ou indirecte, les seuls documents produits étant quelques courriels adressés aux uns et aux autres ; au demeurant, l'employeur prouve qu'aucun de ces salariés n'était positionné au niveau G réclamé par monsieur [F] puisque monsieur [Y] est agent technique niveau D et monsieur [R] ouvrier électricien - l'un et l'autre étant donc d'une classification inférieure ce qui suffit à démontrer le peu de sérieux de la prétendue discrimination - et que les deux autres salariés sont positionnés au niveau F, l'appelant ne versant aucun élément permettant de contredire l'employeur qui soutient que ces deux salariés occupaient des fonctions plus importantes que celles de monsieur [F], le premier en intervenant sur plusieurs centres de maintenance et le second en étant plus directement en contact avec plus de clients.

* sur les heures supplémentaires :

La preuve des heures de travail n'incombant spécialement à aucune des parties, il appartient au salarié qui réclame le paiement d'heures supplémentaires de fournir des éléments de nature à étayer sa demande et suffisamment précis pour permettre à l'employeur de verser les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés.

En l'espèce, monsieur [F], qui ne justifie pas avoir effectué des heures supplémentaires à la demande de son employeur ni que son emploi nécessitait habituellement l'accomplissement de telles heures, étaye cependant sa demande en produisant aux débats un message électronique du 20 octobre 2009 par lequel il réitérait une précédente demande du 18 juin 2008, adressée à un monsieur [P], de paiement des heures supplémentaires réalisées dans le cadre du contrat avec la BNPP ainsi qu'un tableau faisant état de 67 heures supplémentaires.

Il convient toutefois de constater que le tableau produit aux débats n'est pas suffisamment précis puisqu'en effet il se contente de mentionner un nombre d'heures prétenduement effectuées au regard d'une semaine déterminée, jusqu'à et y compris la semaine 24 de l'année 2008, sans mentionner quels jours sont concernés par ces horaires supplémentaires ni les plages horaires au cours desquelles elles auraient été effectuées ; ainsi, par exemple : 'semaine 6, 41 heures, 6 heures supplémentaires' .

En outre, l'employeur fait remarquer à juste titre que ce tableau de réclamations ne reflète pas la réalité puisqu'en effet, il lui est réclamé à nouveau au 20 octobre 2009 le paiement d'heures supplémentaires réalisées au cours de semaines 23 et 24 correspondant au 2 premières semaines de juin 2008 alors qu'il est prouvé par la fiche de paie de l'intéressé qu'il lui a été réglé 25 heures supplémentaires à 25 % au cours du mois considéré ; enfin, l'employeur justifie des heures effectivement réalisées, ne comportant aucune heure supplémentaire, en versant aux débats l'intégralité des fiches de paie du salarié pour le premier semestre 2008.

Surabondamment, la cour estime qu'un arriéré d'heures supplémentaires de 641,76 euros (1.023,76 € réclamés par le salarié - 382,00 € payés en juin 2008) ne constitue pas un motif sérieux et en tout cas suffisamment grave justifiant une résiliation judiciaire du contrat de travail.

Aucune faute n'étant établie à l'encontre de l'employeur, le premier juge a rejeté à juste titre la demande de résiliation judiciaire du contrat de travail de monsieur [F].

- sur le licenciement :

Monsieur [F] a été licencié par lettre recommandée du 27 avril 2012 ainsi libellée :

'Nous avons constaté que vous ne vous êtes pas présenté à votre poste de travail depuis le 1er juin 2011, sans apporter de justifications à votre employeur.

En effet, par courrier du 23 mars 2011, vous avez sollicité le renouvellement de votre congé sabbatique de 11 mois et qui devait prendre fin le 1er juin 2011.

Conformément aux dispositions légales en la matière, nous vous avons indiqué que nous refusions votre demande de renouvellement de congé sabbatique.

Or, le 1er juin 2011, vous ne vous êtes pas présenté à votre poste de travail, ni les jours et semaines qui ont suivi.

Nous vous avons envoyé, le 16 juin 2011, un courrier recommandé avec accusé de réception vous demandant de bien vouloir justifier vos absences.

Ce courrier, réceptionné par vos soins, est demeuré sans réponse.

N'ayant toujours pas de vos nouvelles ni d'explications quant à votre absence ininterrompue à votre poste de travail depuis le 1er juin 2011, nous vous avons alors adressé par courrier recommandé avec accusé de réception, une dernière mise en demeure en date du 9 février 2012, vous demandant une nouvelle fois de bien vouloir justifier votre absence ininterrompue à votre poste de travail depuis le 1er juin 2011.

Ce courrier est également resté sans réponse.

Nous sommes donc en l'état d'une absence injustifiée et ininterrompue depuis plusieurs mois à votre poste de travail, ce en dépit des multiples courriers dont nous vous avons rendu destinataire vous interrogeant sur les motifs de cette absence et vous invitant, à défaut de justification valable, à reprendre immédiatement vos fonctions.

Un tel comportement est contraire aux dispositions du réglement intérieur de l'entreprise qui stipule que « Toute absence doit être justifiée dans les 48 heures. Toute absence non justifiée dans ce délai pourra faire l'objet de l'une des sanctions prévues par le présent réglement ».

En tout état de cause, votre absence injustifiée est de nature à nuire au bon fonctionnement de l'entreprise.

En outre, il a été porté à notre connaissance, le 10 avril 2012, que vous étiez Directeur d'une entreprise multi-services (génie climatique, génie électrique...) À [Localité 5] portant le nom de la société FERA et qui n'a aucun lien avec la société SNEF.

Aux termes de la plaquette de présentation de la société FERA, vous faites expressément référence à la société SNEF et aux contrats commerciaux que notre entreprise a passés avec plusieurs de ses clients. Il est inadmissible que vous utilisiez le nom de votre employeur et ses références commerciales pour le compte d'une entreprise dont vous êtes le Directeur.

Outre le fait que vous méconnaissiez vos obligations de confidentialité, cette attitude constitue une méconnaissance grave de votre obligation de loyauté vis-à-vis de votre employeur.

Aussi, compte tenu de la gravité des faits qui vous sont reprochés, nous ne pouvons envisager de poursuivre l'exécution de votre contrat de travail, même pendant la durée d'un préavis...'.

La société rapporte la preuve de l'absence injustifiée de monsieur [F] à compter du 1er août 2011 et de l'exercice par l'intéressé d'une autre profession dans un pays étranger en versant aux débats les documents suivants :

- la lettre du salarié du 16 avril 2010 par laquelle il a sollicité un congé sabbatique pour redresser une entreprise familiale à [Localité 5] du 1er août 2010 au 1er juin 2011, congé qui lui a été accordé par courrier du 26 avril 2010 ;

- la lettre de monsieur [F] de demande de renouvellement du congé pour une durée de 11 mois (jusqu'au 2 avril 2012), lettre datée du '23/03/10" au lieu du 23 mars 2011, réceptionnée par l'employeur le 8 avril 2011, dans laquelle le salarié se déclarait alors domicilié '[Adresse 9]', cette lettre étant postérieure à la saisine du conseil de prud'hommes en vue de la résiliation judiciaire du contrat de travail ;

- la réponse négative de la société du 2 mai 2011 postée à l'adresse indiquée à [Localité 5] qui vient contredire l'affirmation du salarié selon laquelle l'employeur serait resté plus de trente jours sans répondre à sa demande de renouvellement de congé ;

- la mise en demeure du 16 juin 2011 de faire parvenir à l'employeur un certificat médical ou tout autre justificatif d'absence depuis le 1er juin 2011, adressée par courriers recommandés aux deux adresses connues du salarié, à [Localité 5], plateau du Marabout, et en France, à [Localité 8], [Adresse 1], l'une et l'autre non réclamées par leur destinataire ;

- la dernière mise en demeure pour justification d'absence du 9 février 2012, adressée à [Localité 5] et non réclamée par le destinataire ;

- le contrat de travail de monsieur [F] du 19 janvier 2007 dans lequel il s'est engagé à 'conserver confidentielles toutes les informations concernant les activités du Groupe et de la Société' qu'il pourrait recueillir à l'occasion de ses fonctions et 'de ne sortir ou communiquer aucun document ou renseignement du Groupe et de la Société, quel qu'en soit le support' , cette obligation devant jouer 'à l'égard des tiers comme des salariés du Groupe' et s'appliquant 'pendant toute la durée du contrat de travail' et se prolongeant après la rupture de celui-ci, pour quelque motif que ce soit ;

- une carte de visite au nom de '[U] [F] Directeur', à en-tête de la société FERA - sise à la même boite postale que celle mentionnée dans le courrier du salarié du 23 mars 2011 - ainsi qu'une fiche informatique justifiant de l'activité multiservices et multitechniques de cette société;

- la plaquette de présentation de la société FERA qui mentionne qu'elle a été créée en juin 2011 et qu'elle est gérée par [U] [C] [F], 'issu du groupe français SNEF' dans lequel il initiait les contrats de service auprès des entités clientes du groupe, les 'principaux clients' étant listés (la BNP, La Poste, la banque CIC, le groupe Bred Banque Populaire, le Crédit Agricole, l'assurance Swiss Life, les opérateurs de téléphonie Sfr et Orange) ainsi que le montant des contrats pour chaque client (ex. 'montant du contrat 3.5 Millions d'Euros' pour la BNP).

L'absence injustifiée de monsieur [F], pendant de longs mois et malgré les mises en demeure qui lui ont été adressées dès les premières semaines de son absence - à ses domiciles déclarés en France et à [Localité 5] - mais qu'il n'est pas allé retirées sans en expliquer les motifs à la cour, est donc établie et il résulte encore des pièces du dossier que l'intéressé n'a jamais entendu reprendre son travail à la Snef - il ne l'a d'ailleurs pas fait au 2 avril 2012 comme il s'y était engagé dans sa lettre de demande de renouvellement - puisqu'il a créé à des milliers de kilomètres de la France une société en juin 2011 qui était le mois au cours duquel son congé sabbatique arrivait à son terme ; il est enfin prouvé que monsieur [F] n'a pas respecté son obligation de confidentialité figurant à son contrat de travail ; ces faits, pris séparément, sont chacun constitutif d'une faute grave en ce qu'ils révèlent, pour le premier, la volonté d'abandonner définitivement son poste de travail à la Snef et pour le second, une exécution déloyale de son contrat de travail.

Enfin, contrairement à ce que fait soutenir monsieur [F], la procédure de licenciement est régulière puisque l'employeur prouve lui avoir adressé la lettre de convocation à l'entretien préalable du 16 avril 2012, lettre datée du 21 mars 2012, aux trois adresses connues du salarié:

- à [Localité 5], lettre retournée non réclamée,

- à son domicile personnel à [Localité 8], lettre retournée non réclamée,

- chez son avocat constitué dans le cadre de la procédure prud'homale et chez qui il avait élu domicile le 30 mars 2012, lettre réceptionnée par son destinataire.

L'équité commande que monsieur [F], qui succombe, paie à la société la somme de 1.500,00 euros au titre de ses frais irrépétibles.

PAR CES MOTIFS :

La cour, statuant par arrêt contradictoire prononcé publiquement par mise à disposition au greffe de la cour, les parties en ayant préalablement été avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile,

Infirme le jugement déféré sauf en ce qu'il a reconnu à monsieur [F] la qualification de conducteur de travaux et en ce qu'il a débouté le salarié de sa demande de résiliation judiciaire,

Statuant à nouveau des chefs infirmés et y ajoutant,

Dit que l'employeur devra remettre au salarié des documents sociaux rectifiés faisant apparaître sa qualification de conducteur des travaux,

Dit que le licenciement de monsieur [F] est régulier et fondé sur une cause grave,

Déboute les parties de leurs demandes plus amples ou contraires,

Condamne monsieur [F] à payer à la société Snef la somme de 1.500,00 euros au titre de ses frais irrépétibles et le condamne aux dépens.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : 9e chambre a
Numéro d'arrêt : 12/02187
Date de la décision : 29/11/2012

Références :

Cour d'appel d'Aix-en-Provence 9A, arrêt n°12/02187 : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2012-11-29;12.02187 ?
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