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26/03/2013 | FRANCE | N°12/05982

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 6e chambre b, 26 mars 2013, 12/05982


COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE

6e Chambre B



ARRÊT AU FOND

DU 26 MARS 2013



N° 2013/327









Rôle N° 12/05982







[H], [T] [L]





C/



[V] [O] épouse [L]

































Grosse délivrée

le :

à :Me TAMISIER

SCP MAGNAN







Décision déférée à la Cour :



Jugement du Juge

aux affaires familiales de NICE en date du 07 Février 2012 enregistré(e) au répertoire général sous le n° 08/1746.





APPELANT



Monsieur [H], [T] [L]



né le [Date naissance 2] 1931 à [Localité 4]



de nationalité Française,



demeurant [Adresse 1]



représenté par Me Roland TAMISIER, avocat postulant et plaidant au barreau d...

COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE

6e Chambre B

ARRÊT AU FOND

DU 26 MARS 2013

N° 2013/327

Rôle N° 12/05982

[H], [T] [L]

C/

[V] [O] épouse [L]

Grosse délivrée

le :

à :Me TAMISIER

SCP MAGNAN

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Juge aux affaires familiales de NICE en date du 07 Février 2012 enregistré(e) au répertoire général sous le n° 08/1746.

APPELANT

Monsieur [H], [T] [L]

né le [Date naissance 2] 1931 à [Localité 4]

de nationalité Française,

demeurant [Adresse 1]

représenté par Me Roland TAMISIER, avocat postulant et plaidant au barreau de NICE

INTIMEE

Madame [V] [O] épouse [L]

née le [Date naissance 1] 1949 à [Localité 8]

de nationalité Française,

demeurant [Adresse 2]

représentée par la SCP PAUL ET JOSEPH MAGNAN, avocats postulants au barreau d'AIX-EN-PROVENCE,

assistée de Me Eric MANAIGO, avocat plaidant au barreau de

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

L'affaire a été débattue le 21 Février 2013 en Chambre du Conseil. Conformément à l'article 785 du Code de Procédure Civile, Dominique KLOTZ, Conseiller a fait un rapport oral de l'affaire à l'audience avant les plaidoiries.

La Cour était composée de :

M. Dominique RICARD, Président

Madame Dominique KLOTZ, Conseiller

Madame Laëtitia UGOLINI, Conseiller

qui en ont délibéré

Greffier lors des débats : Madame Marie-Sol ROBINET.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aura lieu par mise à disposition au greffe le 26 Mars 2013.

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 26 Mars 2013.

Signé par Monsieur Dominique RICARD, Président et Madame Marie-Sol ROBINET, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Vu le jugement rendu le 07/02/2012 par le juge aux affaires familiales du tribunal de grande instance de NICE sous le n°08/01746

Vu l'appel interjeté le 29/03/2012 par [H] [L]

Vu les conclusions de l'appelant notifiées le 28/08/2012

Vu les conclusions d'[V] [O] signifiées le 09/07/2012

Vu l'ordonnance de clôture en date du 14/02/2013

EXPOSE DU LITIGE

[H] [L] et [V] [O] se sont mariés le [Date mariage 1]/1967 devant l'officier d'état civil de la ville de [Localité 2], sans contrat préalable.

Ils ont eu trois enfants respectivement nés en 1972 et en 1980.

[V] [O] a présenté une requête en divorce le 31/03/2008. L'ordonnance de non conciliation a été rendue le 25/09/2008. Le magistrat conciliateur a attribué la jouissance du domicile conjugal, bien dépendant de la communauté, au mari, condamné ce dernier à verser à Madame [O] une provision pour frais d'instance de 10 000 euros et désigné Maitre [F], notaire, pour élaborer un projet de liquidation du régime matrimonial.

[V] [O] a fait assigner son mari en divorce par acte du 10/02/2011 sur le fondement des articles 237et 238 du code civil en réclamant une prestation compensatoire d'une valeur de 150 000 euros par attribution en pleine propriété d'un bien commun situé à [Localité 1]. [H] [L] s'est opposé au prononcé du divorce.

Le jugement entrepris prononce le divorce des époux pour altération définitive du lien conjugal et condamne [H] [L] à verser à son épouse la somme de 60 000 euros à titre de prestation compensatoire après avoir relevé les 44 années de mariage, constaté que le patrimoine des époux comprend plusieurs biens immobiliers dont la valeur et les fruits ne sont pas détaillés, retenu le concubinage de la femme, usufruitière du bien dont son compagnon est propriétaire et enfin la modicité des ressources de l'épouse comparée aux revenus de son mari.

Il convient de préciser que la mesure d'instruction ordonnée par le magistrat conciliateur n'a pas été organisée faute de consignation.

[H] [L] a interjeté appel de cette décision le 29/03/2012. Il conclut à l'infirmation, au rejet de la demande en divorce, subsidiairement au rejet de la demande de prestation compensatoire. Il conclut au débouté de la demande fondée sur l'article 700 du code de procédure civile. Il demande à la cour de dire que « le partage se fera avec attribution à l'époux de ce que l'épouse a sollicité en première instance pour elle même et que les biens sis en Italie soient aussi partagés ». Il réclame enfin 6 600 euros au titre de ses frais irrépétibles.

Selon lui, les époux vivent séparés depuis des décennies car l'épouse a quitté le domicile conjugal en abandonnant mari et enfants qui étaient encore jeunes. Elle vit en concubinage en Italie et le divorce ne créera donc aucune disparité. Il rappelle avoir exercé l'activité d'agent immobilier qui ne lui procure qu'une faible retraite mais qui lui a permis de faire des acquisitions immobilières dont l'épouse profitera dans la liquidation. Il prétend avoir élevé ses enfants quasiment seul et produit des attestations en ce sens. Il dit ne pas être en mesure de verser le capital, la communauté ne comprenant que des biens immobiliers dont il ne précise ni la valeur ni le nombre. Il ajoute que son épouse aurait acquis le bien qu'elle occupe avec l'argent de la communauté qu'il lui a donné. Elle aurait toutefois pris soin de mettre la nue propriété de ce bien au nom de son amant. Il considère que la demande de prestation compensatoire doit être écartée compte tenu du comportement de son épouse avec les enfants. Il relève aussi que le juge a partagé à tort les dépens entre les époux alors qu'en vertu de l'article 1127 du code de procédure civile, ils doivent rester à la charge du demandeur au divorce pour altération définitive du lien conjugal.

[V] [O] conclut à la confirmation et réclame 5 000 euros au titre des frais irrépétibles de procédure.

Elle estime que les attestations versées par l'appelant sont partiales car émanant de membres de la famille de l'intéressé. Elle soutient avoir du quitter le domicile en raison de la violence de son mari, lequel ne s'est pas opposé à ce qu'elle réside en Italie. Elle conteste le concubinage et indique n'être que dame de compagnie, hébergée en contrepartie de l'entretien de la maison. Elle rappelle que le mari gère seul l'important patrimoine familial, que la cohabitation a duré 28 ans, qu'elle est malade et s'occupe de sa fille atteinte d'une sclérose en plaques, qu'elle n'a pas de revenus.

Selon sa proposition de règlement des intérêts patrimoniaux, le couple possèderait 4 appartements à [Localité 9], une maison à [Localité 3], une villa à [Localité 1], une maison et des parcelles agricoles à [Localité 9] ainsi qu'un appartement à [Localité 6].

MOTIFS DE LA DECISION

Au fond

Il y a lieu de rappeler à titre liminaire qu'en vertu de l'article 954, alinéa 2 du code de procédure civile, les prétentions des parties sont récapitulées sous forme de dispositif et que la cour ne statue que sur les demandes énoncées au dispositif des conclusions.

Sur le divorce

La demande est fondée sur l'article 237 du code civil qui prévoit le divorce pour altération définitive du lien conjugal. Dans ce cas, il incombe au demandeur d'établir que la cessation de la communauté de vie tant matérielle qu'affective a pris depuis au moins deux ans lors de l'assignation en divorce.

[H] [L], qui ne sollicite pas le prononcé du divorce sur le fondement de l'article 242 du code civil, précise lui-même en page 2 de ses dernières écritures que, très vite, l'épouse a quitté le domicile familial en abandonnant ses enfants afin de vivre en ITALIE, et en page 3 des mêmes écritures, que le couple est séparé de fait depuis des décennies. Il soutient cependant que les articles 237 et 238 du code civil portent atteinte à son droit à la vie privée et familiale, protégé par l'article 8 de la Convention Européenne des Droits de l'Homme de sorte qu'il y aurait lieu de rejeter la demande en divorce.

Or il sera relevé que ce texte prévoit qu'une restriction au droit à la vie privée et familiale est possible lorsqu'elle est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure nécessaire à la protection des droits et libertés d'autrui notamment.

Le divorce pour altération définitive du lien conjugal est prévu par la loi du 26 mai 2004, il remplace le divorce pour rupture de la vie commune dont la cour de cassation a dit le 25 mars 1987, qu'il n'était pas contraire à l'article 8 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

Le jugement déféré qui prononce le divorce des époux en application de l'article 237 du code civil après avoir constaté que le lien conjugal était définitivement altéré depuis deux ans avant l'assignation du10/02/2011, sera en conséquence confirmé.

Sur la prestation compensatoire

La prestation compensatoire que l'un des époux peut être tenu de verser à l'autre, est destinée à compenser, autant que possible, la disparité que la rupture du mariage crée dans leurs conditions de vie respectives.

Elle est fixée selon les besoins de l'époux à qui elle est versée et les ressources de l'autre, en tenant compte de la situation au moment du divorce et de l'évolution de celle-ci dans un avenir prévisible.

Elle est versée en capital mais, à titre exceptionnel, le juge peut la fixer sous forme de rente viagère, si l'âge ou l'état de santé du créancier ne lui permet pas de subvenir à ses besoins.

Pour en déterminer le montant, le juge prend notamment en considération :

-la durée du mariage,

-l'âge et l'état de santé des époux,

-leur qualification et leur situation professionnelles,

-les conséquences des choix professionnels faits par l'un des époux pendant la durée de la vie commune pour l'éducation des enfants et du temps qu'il faudra encore y consacrer, ou pour favoriser la carrière du conjoint au détriment de la sienne,

- le patrimoine estimé ou prévisible des époux, tant en capital qu'en revenu après la liquidation du régime matrimonial,

-leurs droits existants ou prévisibles,

-leur situation respective en matière de pension, de retraite.

À titre liminaire, il convient de rappeler qu'en raison du caractère général de l'appel, la cour doit se placer à la date du présent arrêt pour apprécier la situation des parties. Il est en effet de jurisprudence constante que le divorce n'acquiert force de chose jugée qu'à la date de l'arrêt confirmatif, la cour demeurant jusqu'alors saisie de l'intégralité du litige, nonobstant l'état des dernières conclusions. (Cass.1ere civ. 05 mars 2008, Cass. 1ere civ. 06 octobre 2010).

De la déclaration sur l'honneur en date du 21/01/2013 et des pièces communiquées, la cour tire les éléments suivants relatifs à la situation d'[V] [O], étant précisé que les documents rédigés en langue italienne et non traduits, versés aux débats, doivent être écartés : l'intéressée, âgée de 63 ans, demeure à [Localité 5] en Italie ; elle affirme percevoir un revenu global de 474,12 euros par mois dont 51,06 euros versés par l'assurance retraite des [Localité 7] ; aucun élément n'est fourni sur son activité professionnelle en Italie où elle réside depuis 1995 ; elle précise avoir cessé cette activité en 2003 pour des raisons de santé dont elle ne justifie pas. Elle prétend assumer la charge de [X], 33 ans, atteinte de sclérose en plaques mais ne le démontre pas. Son mari produit divers témoignages, (la cour écartera les attestations émanant des enfants du couple en application de l'article 205 du code de procédure civile), dont il résulte qu'elle vivait en concubinage avec Monsieur [B] en 2004. Madame [O] est toujours domiciliée à la même adresse où, selon le maire de la commune qui en a attesté le 20/10/2004, demeurait également [W] [B]. Force est de constater que ces éléments sont simplement critiqués par l'appelante dans ses conclusions et qu'elle ne les combat par la production de pièces contraires, à l'exception toutefois de l'attestation de Monsieur [B] datée du 17/11/2004, laquelle ne revêt aucun caractère probant au regard de ce qui précède.

[H] [L] est âgé de 81 ans. Il vit seul. Durant la vie commune il a exercé les fonctions de négociateur dans une agence immobilière ; il a donc pu faire un certain nombre d'acquisitions pendant le mariage, dont l'épouse à vocation à profiter.

La valeur des biens communs, situés à [Localité 9], à [Localité 1] et en ITALIE n'est pas déterminée. L'appelant est aussi propriétaire en propre d'une appartement à [Localité 6].

[H] [L] perçoit une retraite et des revenus fonciers pour un total de 1 580 euros par mois. Le montant de ses charges reste ignoré.

La vie commune des époux a duré 28 ans puisque Madame [O] a quitté le domicile familial en 1995. Les époux ont alors rédigé un accord aux termes duquel [H] [L] versait à [V] [O] la somme de cent millions de lires, correspondant au prix d'acquisition d'un bien immobilier situé [Adresse 3], dont elle devait conserver la propriété exclusive. Madame [O] n'évoque pas ce bien dans ses écritures.

Au vu de ces éléments, la cour considère que la preuve d'une disparité dans les conditions de vie respectives, en lien avec la rupture du lien conjugal n'est pas rapportée par l'épouse qui reste particulièrement évasive sur sa situation personnelle et notamment sur le bien qu'elle est censée avoir acquis en 1995 et dont elle pourrait percevoir les fruits puisqu'elle ne l'occupe pas.

Le jugement entrepris sera en conséquence infirmé et la demande de Madame [O] sera rejetée.

Sur la liquidation du régime matrimonial

Le premier juge a ordonné la liquidation du régime matrimonial des époux et les a renvoyés à procéder amiablement aux opérations de compte, de liquidation et de partage.

De ce chef, le jugement déféré sera confirmé, la cour ne disposant d'aucun élément qui lui aurait permis de faire application des dispositions de l'article 267, alinéa 3 du code civil.

Sur les frais irrépétibles et les dépens

L'article 1127 du code civil précise que les dépens de l'instance en divorce pour altération définitive du lien conjugal sont à la charge de l'époux qui en a pris l'initiative, à moins que le juge n'en dispose autrement.

En l'espèce, le partage des dépens n'est pas motivé et rien ne le justifie.

Le jugement entrepris sera donc infirmé de ce chef.

Madame [O] supportera les dépens de la présente instance. Il apparait équitable de la condamner à payer à [H] [L] la somme de 1 000 euros au titre des frais que ce dernier a exposés devant la cour.

PAR CES MOTIFS

La Cour,

Statuant en audience publique, contradictoirement, après débats non publics,

Confirme la décision entreprise sauf en ses dispositions relatives à la prestation compensatoire ainsi qu'aux dépens,

Statuant à nouveau de ces chefs,

Déboute [V] [O] de sa demande de prestation compensatoire,

Condamne [V] [O] aux dépens de première instance,

Condamne [V] [O] à payer à [H] [L] la somme de 1 000 euros au titre des frais irrépétibles de procédure ainsi qu'aux dépens d'appel,

Dit que les dépens d'appel seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

Le Greffier,Le Président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : 6e chambre b
Numéro d'arrêt : 12/05982
Date de la décision : 26/03/2013

Références :

Cour d'appel d'Aix-en-Provence 6B, arrêt n°12/05982 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2013-03-26;12.05982 ?
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