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07/05/2013 | FRANCE | N°11/13700

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 10e chambre, 07 mai 2013, 11/13700


COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE

10e Chambre



ARRÊT AU FOND

DU 7 MAI 2013



N° 2013/ 175













Rôle N° 11/13700







SAS ETABLISSEMENTS DEGREANE





C/



[W] [C]

CAISSE PRIMAIRE D' ASSURANCE MALADIE DU VAR





















Grosse délivrée

le :

à :

















Décision déférée à la Cour :r>


Jugement du Tribunal de Grande Instance de TOULON en date du 16 Juin 2011 enregistré au répertoire général sous le n° 08/03038.





APPELANTE



SAS ETABLISSEMENTS DEGREANE, RCS TOULON B 549 501 203 poursuites et diligences de son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité audit siège, [Adresse 2]

représentée...

COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE

10e Chambre

ARRÊT AU FOND

DU 7 MAI 2013

N° 2013/ 175

Rôle N° 11/13700

SAS ETABLISSEMENTS DEGREANE

C/

[W] [C]

CAISSE PRIMAIRE D' ASSURANCE MALADIE DU VAR

Grosse délivrée

le :

à :

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Tribunal de Grande Instance de TOULON en date du 16 Juin 2011 enregistré au répertoire général sous le n° 08/03038.

APPELANTE

SAS ETABLISSEMENTS DEGREANE, RCS TOULON B 549 501 203 poursuites et diligences de son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité audit siège, [Adresse 2]

représentée par Me Philippe- laurent SIDER, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE constitué aux lieu et place de Me Jean-michel SIDER, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE,

assistée de Me Fabien GUERINI, avocat au barreau de TOULON,

INTIMES

Monsieur [W] [C]

né le [Date naissance 1] 1936 à [Localité 3], demeurant [Adresse 3]

représenté par la SCP TOLLINCHI PERRET VIGNERON, avocats au barreau d'AIX-EN-PROVENCE,

assisté de Me Philippe-Youri BERNARDINI, avocat au barreau de TOULON

CAISSE PRIMAIRE D' ASSURANCE MALADIE DU VAR, , prise en la personne de son représentant légal en exercice y domicilié

[Adresse 1]

assignée

défaillante

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

L'affaire a été débattue le 06 Mars 2013 en audience publique. Conformément à l'article 785 du Code de Procédure Civile, Madame Christiane BELIERES, Présidente, a fait un rapport oral de l'affaire à l'audience avant les plaidoiries.

La Cour était composée de :

Madame Christiane BELIERES, Présidente

Mme Jacqueline FAURE, Conseiller

Madame Corinne DESJARDINS, Conseiller

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Madame Geneviève JAUFFRES.

Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 30 Avril 2013. A cette date, le délibéré a été prorogé au 7 Mai 2013.

ARRÊT

Réputé contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 7 Mai 2013,

Signé par Madame Christiane BELIERES, Présidente et Madame Priscilla BOSIO, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

EXPOSE DES FAITS ET PROCEDURE

Le 18 janvier 1988 M. [W] [C], employé par la Sas Etablissement Degreane, travaillait en qualité de chauffeur chargé de transporter et de livrer un camion toupie rempli de béton sur le chantier de l'autoroute A7 de Sollies Pont lorsqu'il a été victime d'un accident du travail.

Voulant vérifier, après livraison, la quantité de béton restant dans le malaxeur, il a utilisé l'échelle métallique d'accès à la trappe mais, arrivé à son extrémité, les soudures de fixation de l'échelle ont cédé et le salarié a basculé en arrière.

Il a été gravement blessé à la colonne vertébrale.

Par lettre du 25 juin 1992 il a saisi le tribunal des affaires de sécurité sociale du Var aux fins de voir reconnaître la faute inexcusable de l'employeur.

Par jugement du 25 novembre 1993 cette juridiction a admis une telle faute mais, par arrêt du 6 mai 1996, la cour d'appel a réformé en tous points cette décision au motif que la rupture de l'échelle ne provenait d'aucun défaut d'entretien du véhicule et était totalement imprévisible.

Son état de santé s'étant dégradé suivant rapport d'expertise amiable du docteur [O], il a par acte du 23 et 28 novembre 2008 fait assigner la Sas Etablissement Degreane devant le tribunal de grande instance de Toulon sur le fondement de la loi du 5 juillet 1985.

Par jugement du 23 mars 2009 signifié le 28 avril 2009 cette juridiction

- s'est déclarée compétente pour statuer en application des dispositions de la loi du 5 juillet 1985 et de l'article L 455-1-1 du code de la sécurité sociale

- a sursis à statuer

- a ordonné une expertise pour statuer sur l'aggravation du préjudice depuis le rapport d'expertise établi par le professeur [M] le 16 février 1994, confiée au docteur [D] qui a déposé son rapport le 26 novembre 2009.

- a réservé les dépens et les frais irrépétibles.

Par ordonnance du juge de la mise en état du 22 février 2010 une expertise complémentaire a été prescrite, confiée au même expert qui a déposé son rapport le 2 août 2010.

Par jugement réputé contradictoire du 16 juin 2011 signifié le 12 juillet 2011 assorti de l'exécution provisoire cette juridiction a

- débouté la Cpam du Var de toutes ses demandes formulées dans ses conclusions du 13/08/2008

- constaté qu'elle avait fait connaître le 17 mars 2011 qu'elle entendait intervenir dans la présente instance sur le fondement de l'article 15 du décret 86-15 du 6 janvier 1986

- déclaré la décision commune et opposable à la Cpam du Var

- constaté que cet organisme social n'avait pas produit le montant de ses débours, ni provisoires ni définitifs depuis l'assignation de 2008

- débouté M. [C] de ses demandes d'indemnisation au titre des frais de logement adapté, du préjudice esthétique temporaire nouveau, du préjudice esthétique permanent nouveau

- donné acte à M. [C] de ses réserves concernant son indemnisation sur les dépenses de santé actuelles, la perte de gains professionnels actuels, les dépenses de santé futures, la perte de gains professionnels futurs, l'incidence professionnelle

- condamné la Sas Etablissement Degreane à verser à M. [C] en réparation des conséquences dommageables de l'accident du 18 janvier 1988, en deniers ou quittance, sous déduction des provisions versées, au titre de

* frais divers : 162.493,05 €

* assistance de tierce personne après consolidation : 182.490,84 €

* déficit fonctionnel temporaire : 40.760,02 €

* souffrances endurés : 5.200 €

* déficit fonctionnel permanent : 8.500 €

* préjudice d'agrément : 8.000 €

soit au total 407.353,91 €

- dit que les intérêts au taux légal sur les sommes allouées partiront à compter de la présente décision

- dit qu'il sera fait application de l'article 1154 du code civil pour les intérêts dus pour au moins une année entière

- condamné la Sas Etablissement Degreane à verser à M. [C] la somme de 2.000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

- condamné la Sas Etablissement Degreane aux dépens en ce compris les frais d'expertise.

Pour statuer ainsi il a considéré que la Sas Etablissement Degreane devait assumer, en tant que responsable du camion confié à son employé, les conséquences dommageables ayant résulté dudit accident pour M. [C] qui, par application des articles 3 à 5 de la loi du 5 juillet 1985, bénéficiait d'un droit à réparation intégrale de son préjudice, limitées pour respecter le principe du contradictoire à l'aggravation de son état de santé seule visée dans l'assignation introductive d'instance dès lors que les conclusions exigeant réparation de l'entier préjudice découlant de l'accident de 1978 n'avaient pas été signifiées au défendeur non constitué.

Par acte du 1er août 2011, dont la régularité et la recevabilité ne sont pas contestées, la Sas Etablissement Degreane a interjeté appel général de la décision.

MOYENS DES PARTIES

La Sas Etablissement Degreane demande dans ses conclusions du 19 janvier 2002 de

A titre principal,

- dire que M. [C] ne peut valablement solliciter l'application des dispositions de l'article L 455-1-1 du code de la sécurité sociale du fait des circonstances de l'accident du travail du 18 janvier 1988

- dire que le tribunal a commis une erreur de droit manifeste en faisant application de la loi du 5 juillet 1985

- réformer le jugement

- débouter M. [C] de l'intégralité de ses demandes

- condamner M. [C] à lui payer les sommes de

* 5.000 € à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive

* 10.000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile

- mettre les entiers dépens à la charge de M. [C].

Elle fait valoir que les circonstances de l'accident, telles qu'elles résultent de la déclaration d'accident du travail et des éléments de l'enquête réalisée par les services compétents de la caisse primaire d'assurance maladie du Var, établissent que le véhicule conduit par son salarié, M. [C], se trouvait à l'arrêt sur le chantier de travaux publics de l'autoroute A57 dont elle était en charge de la réalisation lorsqu'après avoir déversé le béton transporté sur place par le camion toupie il est monté sur la plate forme du malaxeur pour regarder la quantité de béton restant et a chuté à la suite de la rupture de l'échelle d'accès du camion.

Elle souligne que M. [C] n'a, à l'époque, jamais contesté cette situation factuelle, que le témoignage du chef de chantier, M. [H], qui avait eu lui-même à monter sur la plate-forme et à se servir de l'échelle quelques minutes auparavant, confirme bien que le véhicule était à immobilisé sur la voie d'autoroute en travaux.

Elle en déduit que cette victime ne peut obtenir la réparation complémentaire prévue par l'article L 455-1-1 du code de la sécurité sociale qui est conditionnée à la survenance d'un accident de travail sur une voie ouverte à la circulation publique impliquant un véhicule terrestre à moteur conduit par un préposé de l'employeur, l'autorité de l'employeur s'exerçant sur toute l'emprise du chantier et s'arrêtant là où les règles du code de la route l'emportent sur celles du code du travail.

Elle soutient que cette disposition spéciale vise à exclure du champ d'application de l'indemnisation complémentaire régie par les dispositions de la loi du 5 juillet 1985 les accidents qui auraient lieu dans l'enceinte de l'entreprise ou à l'intérieur des chantiers et, notamment, ceux survenus sur un chantier de travaux publics installé sur une voie partiellement ouverte à la circulation publique, dans la partie fermée à la circulation publique, ce qui est le cas en l'espèce.

Elle ajoute que M. [C] ayant été blessé, alors que le camion était immobile, en chutant de l'échelle d'accès à la plate forme du malaxeur, élément d'équipement étranger à la fonction de déplacement du véhicule, constitue un second motif d'exclusion du régime social d'indemnisation complémentaire de la part du préjudice non réparé au titre des prestations versées par la sécurité sociale.

M. [C] demande dans ses conclusions du 28 novembre 2011 de réformer le jugement et de

- débouter la Sas Etablissement Degreane de l'ensemble de ses demandes

- confirmer le jugement en ce qu'il a déclaré la Sas Etablissement Degreane responsable de son dommage à la suite de l'accident du 18 janvier 1988 sur le fondement de la loi du 5 juillet 1985

A titre principal,

- réformer le jugement en ce qu'il a dit que M. [C] n'était pas fondé à solliciter réparation intégrale de son préjudice découlant de cet accident

- condamner la Sas Etablissement Degreane à lui verser la somme de 765.638,02 € en réparation de son préjudice corporel intégral se décomposant comme suit

préjudices patrimoniaux

temporaires

* dépenses de santé actuelles : pour mémoire

* frais divers : 313.019,79 €

* pertes de gains professionnels actuels : pour mémoire

permanents

* dépenses de santé futures : pour mémoire

* frais de logement adapté : 25.307,96 €

* frais de véhicule adapté : pour mémoire

* assistance de tierce personne : 189.950,27 €

* perte de gains professionnels futurs : pour mémoire

* incidence professionnelle : pour mémoire

préjudices patrimoniaux

temporaires

* déficit fonctionnel temporaire : 134.160 €

* souffrances endurées : 35.200 €

* préjudice esthétique temporaire : 3.500 €

permanents

* déficit fonctionnel permanent : 51.000 €

* préjudice d'agrément : 10.000 €

* préjudice esthétique permanent 3.500 €

Subsidiairement

- confirmer le jugement en ce qu'il a condamné la Sas Etablissement Degreane à réparer le préjudice lié à l'aggravation de son état de santé depuis le rapport [M] du 16 février 1994

- le réformer sur les montants alloués

- condamner la Sas Etablissement Degreane à lui verser la somme de 462.991,67 € se décomposant comme suit

préjudices patrimoniaux

temporaires

* dépenses de santé actuelles : pour mémoire

* frais divers : 162.493,44 €

* pertes de gains professionnels actuels : pour mémoire

permanents

* perte de gains professionnels futurs : pour mémoire

* dépenses de santé futures : pour mémoire

* frais de logement adapté : 25.307,96 €

* frais de véhicule adapté : pour mémoire

* assistance de tierce personne : 189.950,27 €

* incidence professionnelle : pour mémoire

préjudices patrimoniaux

temporaires

* déficit fonctionnel temporaire : 49.140 €

* souffrances endurées :10.600 €

* préjudice esthétique temporaire : 3.500 €

permanents

* déficit fonctionnel permanent : 8.500 €

* préjudice d'agrément : 10.000 €

* préjudice esthétique permanent : 3.500 €

En toute hypothèse,

- confirmer le jugement en ce qu'il a

* dit que la somme allouée devra être assortie des intérêts légaux à compter de la date de la décision de première instance

- dit que les intérêts échus pour une année entière seront capitalisés pour produire eux-même intérêts et, à chaque échéance annuelle à compter de cette date, en application de l'article 1154 du code civil

- déclarer la décision du 16 juin 2011 comme et opposable à la Cpam et constaté qu'elle n'a pas produit le montant de ses débours ni provisoires ni définitifs depuis l'assignation de 2008

- condamner la Sas Etablissement Degreane à lui payer la somme de 2.000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens de première instance

- condamner la Sas Etablissement Degreane à lui verser la somme de 5.000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile pour les frais irrépétibles exposés en cause d'appel

- mettre les entiers dépens d'appel à sa charge.

Il fait valoir que, dans le cadre de son action introduite devant la juridiction de droit commun, il n'invoque pas les dispositions du code de la sécurité sociale mais celle de la loi du 5 juillet 1985, que cette loi est parfaitement applicable, que l'échelle permettant de monter sur la plate forme du malaxeur à béton est un accessoire du véhicule terrestre à moteur servant à son utilisation puisqu'elle permet de vérifier le bon fonctionnement de la cuve en donnant accès à une plate-forme technique située au sommet de celui-ci, que la notion de circulation doit être entendue dans un sens très large indépendant de critères tels que le mouvement, le stationnement, ou l'arrêt du véhicule.

Il souligne que le lieu de la chute n'est pas établi avec précision et, notamment, le point de savoir si la portion de route était partiellement fermée à la circulation ni le fait que le véhicule aurait été à l'arrêt, le débat devant le tribunal des affaires de sécurité sociale ne portant que sur les circonstances de la chute à savoir la rupture de l'échelle et sa défectuosité éventuelle entraînant la mise en jeu de la responsabilité de l'employeur pour faute inexcusable.

Il réclame la réparation intégrale du préjudice découlant de l'accident et non de la seule aggravation constatée postérieurement à l'arrêt de la cour d'appel du 6 mai 1996, la consolidation étant intervenue le 6 août 2009 seulement.

La Cpam du Var assignée par acte du 21 octobre 2011 délivré à personne habilitée et contenant dénonce de l'appel et de leurs conclusions n'a pas constitué avoué.

Par courrier du 4 octobre 2011 elle a indiqué 'n'avoir versé aucune prestation à M. [C] au titre de la législation sur les accidents du travail consécutivement à l'aggravation dont il a été victime' et précisé que'le tiers étant l'employeur de la victime elle ne dispose pas de recours au titre de l'article L 454-1 du code de la sécurité sociale qui stipule que si la lésion dont est atteint l'assuré social est imputable à une personne autre que l'employeur ou ses préposés, la victime ou ses ayant droit conserve contre l'auteur de l'accident le droit de demander la réparation du préjudice causé, conformément aux règles de droit commun, dans la mesure où ce préjudice n'est pas réparé par application du présent livre'.

L'arrêt sera réputé contradictoire conformément aux dispositions de l'article 474 du code de procédure civile.

MOTIFS DE LA DECISION

Sur l'action en indemnisation complémentaire de M. [C]

En vertu de l'article L 451-1 du code de la sécurité sociale la réparation forfaitaire des accidents du travail interdit en principe tout recours de la victime contre l'employeur ou ses préposés.

L'article L 455-1-1 du code de la sécurité sociale permet cependant à la victime de demander, conformément aux règles de droit commun, la réparation du préjudice causé non réparé par la législation sociale, lorsque l'accident survient sur une voie ouverte à la circulation publique et implique un véhicule terrestre à moteur conduit par l'employeur, un préposé ou une personne appartenant à la même entreprise que la victime ; elle est alors régie par les dispositions de la loi n° 85-677 du 5 juillet 1985 tendant à l'amélioration de la situation des victimes d'accidents de la circulation et à l'accélération des procédures d'indemnisation.

Ces dispositions spéciales, dérogatoires au dispositions générales dont elles limitent le champ d'application, n'autorisent le recours de droit commun qu'à deux conditions, que l'accident survienne sur une voie ouverte à la circulation publique et qu'il implique un véhicule terrestre à moteur de l'employeur.

Or, en l'espèce, l'accident s'est produit alors que le camion toupie de la Sas Etablissement Degreane se trouvait à l'arrêt sur une voie de circulation de l'autoroute temporairement fermée à la circulation publique pour cause de chantier de travaux publics.

Le lieu de l'accident résulte suffisamment des éléments de l'enquête diligentée et des renseignements recueillis auprès des personnes concernées à l'époque.

En effet, M. [C] conducteur du camion était arrivé à destination, était en train de livrer le béton sur le chantier de l'autoroute dont la réalisation des travaux était confiée à son employeur et vérifiait la quantité de béton restant dans le malaxeur depuis l'échelle métallique d'accès lorsque celle-ci a cédé, provoquant sa chute ; le véhicule se trouvait donc sur le lieu des travaux et était lui-même immobilisé.

Dans une attestation du 10 janvier 2012 régulière en la forme au regard des dispositions de l'article 202 du code de procédure civile, le chef de chantier M. [H] certifie que 'son camion était arrêté sur le chantier de l'autoroute A 57 à hauteur du lieudit '[Localité 1]' là où se déroulaient les travaux que nous réalisions pour DEGREANE.

Je peux attester que la voie d'autoroute sur laquelle nous intervenions était fermée à la circulation comme cela est pratiqué en permanence en cas de travaux publics sur autoroute.

La voie d'autoroute en travaux était interdite à la circulation et elle était signalée conformément à la réglementation de manière à ce que les usagers de l'autoroute ne se mettent pas en danger et bien sûr que les salariés de Degraene puissent intervenir également en toute sécurité

M. [C] était bien arrêté sur le chantier à hauteur des travaux réalisés par DEGREANE et où il a effectué le déchargement du béton de la toupie.

C'est en vérifiant à la fin de cette manoeuvre de déchargement s'il restait du béton dans la toupie qu'il a chuté de l'échelle qui a cassé.

J'ai été personnellement témoin de ces faits puisque j'étais sur place au moment des faits, que j'étais monté sur la toupie par cette échelle quelques minutes avant et que j'était là lorsque M. [C] est tombé'.

Aucun élément ne permet de mettre en cause la valeur probante de ce témoignage parfaitement circonstancié émanant d'une personne témoin direct des faits.

Il n'est contredit par aucune autre donnée.

M. [H] figure expressément en qualité de témoin sur la déclaration d'accident du travail de la Sas Etablissement Degreane en date du 18 janvier 1988 qui le décrit comme suit :'à 11 H 30 autoroute A 57 [Localité 2] voulant vérifier la quantité de béton restant dans le malaxeur M. [C] a utilisé l'échelle métallique d'accès à la trappe mais arrivé pratiquement à son extrémité les soudures de fixation de l'échelle ont cédé le faisant basculer à l'arrière'.

Les conditions de mise en jeu de l'article L 455-1-1 du code de la sécurité sociale ne sont donc pas remplies.

M. [C] doit être débouté de sa demande en indemnisation complémentaire selon la loi du 5 juillet 1985, l'accident dont il a été victime demeurant soumis aux seules dispositions relatives à la législation sociale sur les accidents du travail.

Sur les demandes annexes

L'exercice d'une action en justice ne dégénère en faute pouvant donner lieu à des dommages et intérêts que si le demandeur a agi avec intention de nuire, légèreté blâmable ou a commis une erreur équivalente au dol, tous faits insuffisamment caractérisés en l'espèce ; celle de M. [C] ne peut, en l'absence de circonstances particulières, constituer un abus de droit dès lors que sa légitimité a été reconnue par la juridiction du premier degré malgré l'infirmation dont cette décision fait l'objet ; la demande de la Sas Etablissement Degreane en dommages et intérêts pour procédure abusive doit, dès lors, être rejetée.

La Sas Etablissement Degreane qui s'est abstenue délibérément de comparaître devant le tribunal, qui s'est manifestée pour la première fois en interjetant appel et en soulevant des moyens de droit conduisant au rejet des prétentions de M. [C], le laissant ainsi exposer de nombreux frais et notamment des frais d'expertise, doit supporter les entiers dépens de première instance et d'appel conformément à l'article 696 alinéa 1 du code de procédure civile.

L'équité ne commande pas de faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile au profit de l'une ou l'autre des parties.

PAR CES MOTIFS

La Cour,

- Infirme le jugement.

Statuant à nouveau et y ajoutant,

- Déboute M. [W] [C] de son action en indemnisation complémentaire à l'égard de la Sas Etablissement Degreane.

- Déboute la Sas Etablissement Degreane de sa demande en dommages et intérêts pour procédure abusive.

- Dit n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile au profit de l'une ou l'autre des parties.

- Condamne la Sas Etablissement Degreane aux entiers dépens de première instance en ce compris les frais d'expertise et d'appel.

- Dit qu'ils seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

Le greffierLe président


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : 10e chambre
Numéro d'arrêt : 11/13700
Date de la décision : 07/05/2013

Références :

Cour d'appel d'Aix-en-Provence 10, arrêt n°11/13700 : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2013-05-07;11.13700 ?
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