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27/06/2013 | FRANCE | N°12/06285

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 18e chambre, 27 juin 2013, 12/06285


COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE

18e Chambre



ARRÊT AU FOND

DU 27 JUIN 2013



N°2013/672















Rôle N° 12/06285







SNCM





C/



[J] [D]

DIRECTEUR INTERREGIONAL DE LA MER MEDITERRANEE

































Grosse délivrée le :

à :

- Me Arnaud MARGUET, avocat au barreau de PARIS



- Me Sam

uel LEBEL, avocat au barreau de NANTES



- DIRECTEUR INTERREGIONAL DE LA MER MEDITERRANEE



Copie certifiée conforme délivrée aux parties le :



Décision déférée à la Cour :



Jugement du Tribunal d'Instance de MARSEILLE en date du 13 Mars 2012, enregistré au répertoire général sous le n° 11-11-1454.





APPELANTE



...

COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE

18e Chambre

ARRÊT AU FOND

DU 27 JUIN 2013

N°2013/672

Rôle N° 12/06285

SNCM

C/

[J] [D]

DIRECTEUR INTERREGIONAL DE LA MER MEDITERRANEE

Grosse délivrée le :

à :

- Me Arnaud MARGUET, avocat au barreau de PARIS

- Me Samuel LEBEL, avocat au barreau de NANTES

- DIRECTEUR INTERREGIONAL DE LA MER MEDITERRANEE

Copie certifiée conforme délivrée aux parties le :

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Tribunal d'Instance de MARSEILLE en date du 13 Mars 2012, enregistré au répertoire général sous le n° 11-11-1454.

APPELANTE

SNCM, demeurant [Adresse 5]

représentée par Me Arnaud MARGUET, avocat au barreau de PARIS ([Adresse 2])

INTIMES

Monsieur [J] [D], demeurant [Adresse 1]

représenté par Me Samuel LEBEL, avocat au barreau de NANTES ([Adresse 4])

PARTIE INTERVENANTE

M. LE DIRECTEUR INTERREGIONAL DE LA MER MEDITERRANEE, demeurant [Adresse 3]

non comparante

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions de l'article 945-1 du Code de Procédure Civile, l'affaire a été débattue le 06 Juin 2013, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Gisèle BAETSLE, Président, chargé d'instruire l'affaire.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour composée de :

Madame Gisèle BAETSLE, Président

Madame Fabienne ADAM, Conseiller

Madame Christine LORENZINI, Conseiller

Greffier lors des débats : Mme Julia DELABORDE.

Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 27 Juin 2013

ARRÊT

Réputé contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 27 Juin 2013

Signé par Madame Gisèle BAETSLE, Président et Mme Julia DELABORDE, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

FAITS, PROCÉDURE ET MOYENS DES PARTIES

M. [D] a été embauché le 4/02/1983 par la SNCM, en qualité de lieutenant de pont.

En 2003, il était chef mécanicien.

Le 20/01/ 2004, il a été détaché à terre pour la mission de capitaine d'armement, fonction qu'il occupe jusqu'au 30/04/2007.

A partir du 1/05/2007 et jusqu'au mois de novembre 2009, il exerce les fonctions de responsable sécurité maritime ISM ISPS.

Par courrier du 6/11/2009, la SNCM informe M. [D] de son souhait de mettre un terme à son détachement à terre et de ce qu'il sera embarqué à bord du Casanova en tant que chef mécanicien classe A dès qu'il aura validé ses brevets.

Par courrier du 19/11/2009, M. [D] refuse le poste de chef mécanicien rappelant que la Direction lui avait assuré que son retour à la navigation s'effectuerait automatiquement en qualité de capitaine.

Le 30/11/2009, il est convoqué à un entretien préalable préalable au licenciement et sera licencié par courrier du 17/12/2009.

Le 31/12/2009, M. [D] conteste son licenciement.

Un protocole transactionnel est signé entre les parties le 15/01/2010 par lequel la SNCM s'engage à payer à M. [D] la somme de 18 300 € en réparation de son préjudice matériel et moral et en contrepartie de sa renonciation à l'action. Cette somme a été effectivement réglée.

Le 14/12/2009, M. [D] passait un contrat de travail avec la société STAO, faisant partie du groupe VEOLIA, au terme duquel il exerçait les fonctions de Directeur d'armement de la compagnie OCEANE.

Cependant , il saisissait le Directeur inter régional de la mer Méditerranée le 11/02/2011, afin de contester son licenciement et à la suite d'un procès verbal de non conciliation, le tribunal d'instance qui, par jugement du 13/03/2010, a :

- déclaré l'action de M. [D] recevable, annule le protocole transactionnel,

-condamné M. [D] à restituer à la SNCM la somme de 18 300 € perçue au titre de la transaction

-annulé le licenciement de M. [D].

-condamné la SNCM à payer à M. [D] la somme de 276 000 € en réparation de son licenciement abusif, celle de 20 000 € en réparation de son préjudice moral, et celle de 2500 € en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

-prononcé la compensation des sommes.

La SNCM a régulièrement fait appel de cette décision.

Reprenant oralement leurs conclusions auxquelles il convient de se référer pour l'exposé de leurs moyens, la SNCM conclut in limine litis à l'irrecevabilité des demandes de M. [D], en l'état de la transaction signée entre les parties et au fond sollicite l'infirmation de la décision entreprise et réclame le remboursement des sommes versées dans le cadre de l'exécution provisoire et l'autorisation de récupérer à son profit les sommes qu'elle a été autorisée à séquestrer par ordonnance du 25/05/2012.

Subsidiairement, au cas où la transaction serait annulée, la SNCM sollicite le remboursement de la somme perçue de 18300 €, demande que le licenciement soit déclaré justifié et de débouter M. [D] de ses demandes et en tout état de cause de la condamner au paiement de la somme de 3000 € en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

M. [D] conclut à la confirmation du jugement déféré en toutes ses dispositions et sollicite la somme de 7000 € en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

MOTIVATION

Sur la transaction :

M. [D] soutient que la procédure de licenciement est nulle puisqu'il n'y a jamais eu de rendez-vous le 9/12/2009 auquel il aurait assisté et que la nullité du licenciement doit donc être retenue ; que le protocole transactionnel a été préparé avant même la mise en place du licenciement et que la lettre de licenciement ne lui a jamais été adressée, l'enveloppe sensée la contenir étant vide ; que les lettres du 6 novembre, 19 novembre, 30 novembre et 17 décembre ont toutes été préparées à l'avance et agrafées au protocole transactionnel pour être signées en même temps que ce dernier à une date où il se trouvait en Bretagne et notamment celle du 19/11/2009 au terme de laquelle il prétendait refuser de valider ses brevets et qui en réalité a été écrite par la responsable de la SNCM et remise à la signature en même temps que le protocole d'accord, dont la signature lui a été imposée alors qu'il était en lien de subordination et dans un contexte où il était psychologiquement affaibli, ayant fait l'objet d'une 'placardisation' dans les dernières fonctions occupées auprès de la SNCM ; que s'agissant de la lettre du 31/12/2009 adressée en recommandée avec accusé de réception par ses soins à la SNCM, elle a été effectuée sous la dictée de la directeur des ressources humaines afin qu'il n'ait pas à exécuter son préavis.

Il ajoute que le 14/12/2009, la STAO dont le siège est à [Localité 2] lui indiquait 'nous avons le plaisir de vous confirmer votre mutation au sein de notre société à compter du 1er janvier 2010" ; que cela signifie qu'avant même la prétendue lettre de licenciement, il lui avait été imposé de signer une mutation en Bretagne alors que sa femme et ses enfants sont sur [Localité 1] et alors que cette mutation générait pour lui une baisse de salaire de 25%.

La SNCM de son côté maintient que la procédure est régulière ; que M. [D] a été reçu en entretien préalable ; qu'il a lui-même souhaité évoluer au sein du groupe Veolia ; qu'enfin il n'a subi aucun préjudice ayant travaillé dès le lendemain pour une autre société du groupe avec reprise de son ancienneté.

Il apparaît cependant surprenant que M. [D], qui avait au sein de la SNCM des fonctions importantes, ait pu accepter de signer des lettres rédigées en son nom, rédiger sous dictée une lettre qu'il postera lui-même en recommandée avec accusé de réception à la SNCM (qui n'est plus un acte passif mais positif),lire 'en diagonale' les documents qu'il signait, et dont il ne pouvait ignorer qu'ils avaient un impact important sur sa vie professionnelle.

Si ce n'est l'enveloppe sensée contenir la lettre de licenciement et dont il s'est avérée par l'ouverture à la barre en présence des parties qu'elle était vide, et sur laquelle le conseil de la SNCM ne donne aucune explication, aucun élément objectif ne vient étayer la thèse que M. [D] soutient ; qu'en effet :

-il affirme sans le démontrer que lettres et transaction ont été signées le même jour.

-la lettre du 19/11/2009 est trop personnelle à M. [D] pour que ce denier n'en soit pas l'auteur.

-pour justifier qu'il ne pouvait être présent lors de l'entretien préalable, il produit un relevé bancaire qui mentionne des paiements au 9/12/2009 à [Localité 4] par carte bancaire n° [XXXXXXXXXX01] dont il affirme qu'elle est la sienne. Or , ce même bordereau note que la date du 9/12/2009 est la date de valeur et que la date d'opération est le 8/12/2009, ce qui ne l'empêchait donc pas le 9 suivant d'être à [Localité 1].

- Par ailleurs , il a signé un contrat de travail avec la société STAO et il n'allègue pas que son consentement ait été vicié.

M. [D] plaide encore que la SNCM ne pouvait ignorer l'état de dépression qui était le sien. Or, il présente une lettre du Dr. [P] , psychiatre , en date du 18/04/2011 qui 'atteste avoir suivi M. [D] régulièrement en 2009 et avoir constaté une lente dégradation de son état psychologique dans un contexte de difficultés professionnelles ' mais qui ajoute que M. [D] a refusé tout arrêt de travail avant son départ pour [Localité 4] en janvier 2010.

En l'absence d'arrêt de travail , la SNCM n'était pas sensée connaître l'état dépressif de M. [D] qui affirme avoir été mis au placard lors de sa nomination comme responsable sûreté alors qu'il ne s'en est jamais plaint auprès de sa direction et que dans le CV joint à son courriel (pièce 13), il fait une description plutôt élogieuse de ce poste 'Garant de la politique sûreté, du maintien des normes IPS et du contrôle des sites. Participant aux audits ISM, ISPS et Qualité, internes et externes et aux cellules de crise de l'entreprise'.

Cette affirmation est par ailleurs en contradiction avec les termes de sa lettre du 18/08/2007- date à laquelle il exerce les fonctions de responsable sécurité maritime ISM ISPS- adressée au groupe Veolia qu'il ambitionne d'intégrer- dans laquelle il écrit '...j'ai par la suite, sur l'offre de la direction, choisi de rejoindre le siège de l'entreprise à [Localité 1]. L'on m'y a confié, en constante progression de responsabilité, des missions de confiance axées ...' et plus loin : ' dans le droit fil de cette progression professionnelle, j'aimerais intégrer le groupe (Veolia) auquel je crois pouvoir apporter un esprit de méthode... Compte tenu de ma situation familiale et bien que résidant dans le sud, [Localité 3] et sa région me conviendrait, je reste ouvert à toute proposition ...', ce qui signifie de surcroît que dès 2007, il envisageait de quitter la SNCM pour intégrer un groupe qui l'intéressait et qu'il était prêt à quitter [Localité 1].

Ce sont ses propres écrits que les attestations d'un ancien supérieur hiérarchique ou encore d'un ami, aussi intime soit-il, ne peuvent démentir.

Enfin, il soutient qu'en juin 2006, VEOLIA a repris la SNCM avec la volonté de supprimer les cadres trop anciens, trop insérés...

Or, la SNCM justifie qu'avec le groupe VEOLIA, elle a tout mis en oeuvre pour lui permettre d'évoluer dans le groupe ; qu'il a ainsi bénéficié d'une formation sur deux ans et qu'il a pu rejoindre une autre société du groupe dès sa sortie de la SNCM, ainsi que sa lettre du 18/08/2007 montre qu'il le souhaitait.

Il convient dès lors de s'en tenir aux pièces du dossier et notamment les lettres dont la signature de M. [D] n'est pas contestée.

Une transaction n'est valable que pour autant que le licenciement ait été prononcé antérieurement à sa signature.

Par lettre du 31/12/2009, M. [D] conteste son licenciement. Dès lors, il est acquis qu'il en a eu connaissance avant la signature de la transaction.

La transaction, contrat par lequel les parties entendent mettre fin à une contestation née ou à prévenir une contestation à naître, ici à mettre fin au litige pouvant résulter de la rupture du contrat de travail, nécessite, pour sa validité, des concessions réciproques dont l'existence doit s'apprécier en fonction des prétentions des parties au moment de la signature de la transaction et partant, le bien-fondé des griefs invoqués par l'employeur au soutien du licenciement est un élément essentiel d'appréciation de la réalité des concessions réciproques.

Il résulte de la lettre du 31/12/2009 précitée que le licenciement a été prononcé au motif qu'il refusait d'embarquer. Il ajoute qu'il ne refuse pas d'embarquer mais qu'il est en droit d'embarquer en tant que commandant et non aux conditions de la SNCM qui constituent à ses yeux une mesure discriminatoire.

Par avenant au contrat de travail, il est indiqué que ' M. [D] est nommé capitaine d'Armement à compter du 20/01/2004. Il est détaché à terre à compter de cette date pour la durée de la mission qui lui est confiée. Son détachement à terre pourra prendre fin sur décision de la Direction Générale'.

Le 6 novembre 2009, la SNCM a informé M. [D] de sa décision de mettre fin à son détachement à terre, ce qui était prévu au contrat, et de le réaffecté sur le Casanova en qualité de chef mécanicien, qui était son poste antérieur au détachement à terre.

Si le délai de préavis de six mois n'a pas été respecté, il convient cependant de souligner que la contestation de M. [D] ne porte pas sur ce point.

En effet, dans sa lettre du 19/11/2009, il refuse d'embarquer aux conditions de la SNCM en soutenant qu'il lui avait été garanti qu'à son retour à la navigation, il aurait automatiquement un poste de commandant. A défaut d'en justifier, cet argument ne peut être retenu, de sorte que son refus constitue un motif réel et sérieux de licenciement qui lui ouvrait droit à une indemnité de licenciement que M. [D] ne revendique (son ancienneté ayant été reprise par la société STAO) et à un préavis de 4 mois auquel il a renoncé par lettre du 31/12/2009 ce qui s'explique puisqu'il avait signé quelques jours auparavant un contrat de travail avec la société STAO, autre société du groupe Veolia, groupe auprès duquel il s'était rapproché de lui-même dès 2007 ainsi qu'en témoigne sa lettre du 18/08/2007 et les différents mails produits aux débats.

M. [D] a donc été rempli de ses droits de sorte que l'indemnité de 18 300 € offerte dans l'acte de transaction constitue une concession de la part de la SNCM équivalente à celle de M. [D] de renoncer à toute action en justice.

En conséquence, la transaction n'encourt pas de nullité et rend irrecevable l'action de M. [D].

Aucun élément tiré de l'équité ou de la situation économique des parties ne justifie en la cause l'application des dispositions de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.

M. [D] qui succombe supportera les dépens.

PAR CES MOTIFS

La Cour,

Statuant publiquement,

INFIRME le jugement entrepris,

et statuant à nouveau.

VALIDE la transaction du 15/01/2010

En conséquence,

DÉCLARE M. [D] irrecevable en sa demande.

CONDAMNE M. [D] à rembourser à la SNCM le montant des sommes versées dans le cadre de l'exécution provisoire et autorise la SNCM à récupérer à son profit les sommes séquestrées en application de l'ordonnance du 25/05/2012.

DIT n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

CONDAMNE M. [D] aux dépens.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : 18e chambre
Numéro d'arrêt : 12/06285
Date de la décision : 27/06/2013

Références :

Cour d'appel d'Aix-en-Provence 18, arrêt n°12/06285 : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2013-06-27;12.06285 ?
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