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19/09/2013 | FRANCE | N°08/04342

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 9e chambre b, 19 septembre 2013, 08/04342


COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE

9e Chambre B



ARRÊT AU FOND

DU 19 SEPTEMBRE 2013



N° 2013/



Rôle N° 08/04342





[M] [R]





C/



SAS TRANE













Grosse délivrée

le :



à :



Me Edouard ICHON, avocat au barreau D'AIX-EN-PROVENCE



Me Dominique TOURAILLE, avocat au barreau de PARIS







Copie certifiée conforme délivrée aux parties le :




>Décision déférée à la Cour :



Jugement du Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire d'AIX-EN-PROVENCE en date du 05 Février 2008, enregistré au répertoire général sous le n° 06/3.







APPELANTE



Madame [M] [R], demeurant [Adresse 2]



représentée par Me Edouard ICHON,...

COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE

9e Chambre B

ARRÊT AU FOND

DU 19 SEPTEMBRE 2013

N° 2013/

Rôle N° 08/04342

[M] [R]

C/

SAS TRANE

Grosse délivrée

le :

à :

Me Edouard ICHON, avocat au barreau D'AIX-EN-PROVENCE

Me Dominique TOURAILLE, avocat au barreau de PARIS

Copie certifiée conforme délivrée aux parties le :

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire d'AIX-EN-PROVENCE en date du 05 Février 2008, enregistré au répertoire général sous le n° 06/3.

APPELANTE

Madame [M] [R], demeurant [Adresse 2]

représentée par Me Edouard ICHON, avocat au barreau D'AIX-EN-PROVENCE

INTIMEE

SAS TRANE, demeurant [Adresse 1]

représentée par Me Dominique TOURAILLE, avocat au barreau de PARIS

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

L'affaire a été débattue le 19 Juin 2013 en audience publique devant la Cour composée de :

Madame Bernadette BERTHON, Président de chambre

Monsieur Philippe ASNARD, Conseiller

Madame Nathalie VAUCHERET, Conseiller

qui en ont délibéré

Greffier lors des débats : Monsieur Guy MELLE.

Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 19 Septembre 2013.

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 19 Septembre 2013.

Signé par Madame Bernadette BERTHON, Président de chambre et Monsieur Guy MELLE, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

FAITS ET PROCEDURE

[M] [R], a été engagée à compter du 6 juillet 1992 par la SAS TRANE, par contrat de travail â durée indéterminée, en qualité de comptable.

Au dernier état de la relation contractuelle, elle percevait un salaire brut mensuel de 3000 € et bénéficiait du statut cadre.

Après avoir été convoquée par lettre remise en main propre du 8 novembre 2005, à un entretien préalable portant mise à pied conservatoire fixé au 22 novembre 2005, la salariée a été licenciée pour faute lourde, par lettre recommandée du 29 novembre 2005, dans les termes suivants :

« Nous avons récemment découvert de graves dysfonctionnements au sein d'un des établissements de notre société, organisés par un certain nombre de personnes, dysfonctionnements qui caractérisent une intention manifeste de nuire à notre société. En effet, l'établissement d'[Localité 2], auquel vous appartenez, a été le théâtre d'un certain nombre de détournements de fonds au profit de salariés de cet établissement ou au profit de tiers, qui viennent récemment d'être portés à notre connaissance.

Un audit interne a été organisé dès que nous avons eu connaissance de faits suspects. Cet audit interne est toujours en cours. Cependant les éléments et faits recueillis à ce stade font clairement apparaître votre implication dans ce système organisé de détournements.

L'audit interne que nous avons organisé fait apparaître les faits suivants, auxquels vous avez activement participé

Vous avez été embauchée par notre Société en juillet 1992 en qualité de comptable. Depuis le 1er juillet 2000, vous exercez les fonctions de responsable de la comptabilité au sein de l'établissement d'[Localité 2].

A ce titre, il vous appartenait de vérifier que les écritures comptables enregistrées reflétaient la réalité, Vous disposiez en outre d'une délégation de pouvoir vous autorisant à retirer certaines sommes en espèces auprès de la banque de notre Société, la Société Générale.

Vous ne pouviez pas ne pas avoir remarqué que de nombreuses factures donnaient lieu à des versements à des tiers, en particulier que les chèques étaient dressés à un nom différent de celui figurant sur la facture. De la même façon, l'encaissement de certains chèques à l'ordre de notre Société, qui ont sans doute donné lieu à des versements en espèce, n'ont pu échapper à votre contrôle.

Lors de l'audit interne que nous avons diligenté, vous nous avez indiqué être informée du système de commissionnement occulte depuis votre arrivée dans notre Société, en 1992. Vous nous avez Indiqué avoir vu de nombreuses fausses factures et avoir directement participé au retrait d'espèces du compte de notre Société, sur le fondement de telles factures. Vous disposiez à cet égard d'un pouvoir pour le retrait d'espèces auprès de la banque. Vous avez d'ailleurs admis avoir été en charge de la préparation d"enveloppes ", remises aux salariés et destinées à être remises aux intervenants occultes.

Vous nous avez indiqué disposer de documents relatifs à ces agissements et être en possession d'une double comptabilité mise en place au sein de l'établissement d'[Localité 2], mais avez refusé de nous remettre une copie de ces éléments en votre possession.

En votre qualité de responsable de la comptabilité, vous ne pouviez pas ignorer la finalité des actes auxquels vous avez participé ou que vous avez couverts par votre silence, en particulier le fait que ces actes étalent contraires à l'intérêt de notre société. Lors de l'entretien vous avez admis avoir eu connaissance du système de fausses factures (vous nous avez à cet égard fourni des précisions sur les modalités pratiques de mis au coffre de ces fausses factures tous les lundis matin). Vous avez également admis avoir préparé des " enveloppes " en l'absence de votre supérieur hiérarchique.

En outre, vous avez indiqué, lorsque l'on vous a demandé de communiquer les documents en votre possession (à savoir un cahier sur lequel figure une partie des commissions versée) " je ne refuse pas de la donner, mais je ne la donne pas pour l'instant ", ce qui démontre à tout le moins votre mauvaise volonté.

Les faits qui vous sont reprochés, au regard de l'intention de nuire à notre société qui les caractérise, sont constitutifs d'une faute lourde. .. La période de mise à pied conservatoire qui a débuté le 8 novembre 2005 ne vous sera pas rémunérée ».

Contestant la régularité et la légitimité de son licenciement, la salariée a saisi le conseil des prud'hommes d'Aix-en-Provence, qui a, par jugement du 5 février 2008, jugé bien-fondé son licenciement pour faute lourde et l'a déboutée de toutes ses prétentions.

La salariée, a interjeté appel de cette décision le 5 mars 2008 .

Par un arrêt avant dire droit en date du 3 juin 2009, la cour d'appel de céans a sursis à statuer dans l'attente de l'issue de la plainte avec constitution de partie civile déposée par la SAS TRANE le 3 novembre 2005 pour abus de confiance vol faux et usage de faux, formée à l'encontre de plusieurs salariés, dont [M] [R].

Par un jugement en date du 4 septembre 2012, le tribunal correctionnel d'Aix en Provence a relaxé [M] [R] des faits de complicité d'abus de confiance pour lesquels elle était poursuivie et déboutée la SAS TRANE de sa constitution de partie civile à son encontre.

Par un arrêt en date du 12 mars 2013, la cour d'appel d'Aix-en-Provence, statuant sur l'appel de la SAS TRANE sur son action civile, a condamné la salariée, solidairement avec d'autres salariés, au paiement de la somme de 413.136,09 € en réparation du préjudice matériel de TRANE SAS, ainsi que de la somme de 15,000 € au titre de son préjudice moral et 2.000€ au titre de l'article 475-1 du code de procédure pénale .

PRETENTIONS ET MOYENS DES PARTIES

L'appelante, qui conclut à la réformation du jugement entrepris, demande dans ses dernières conclusions de :

dire que la procédure disciplinaire mise en oeuvre est irrégulière,

dire que les faits allégués à l'appui de la mise à pied et du licenciement étaient connus plus de deux mois avant la mise en oeuvre de la procédure disciplinaire, donc prescrits,

dire que la mise à pied et le licenciement constituent une double sanction des mêmes faits,

dire que sa mise à pied et son licenciement sont dépourvus de cause réelle et sérieuse et abusifs en raison de l'abus de droit dont ils procèdent,

condamner en conséquence la société TRANE à lui payer les sommes suivantes :

-6.000 € d'indemnité compensatrice de préavis,

-600 € de congés payés sur préavis,

-15.000 € d'indemnité conventionnelle de licenciement,

-1.892,31 € au titre de la privation de salaire pendant la mise à pied abusive,

-78.000 € de dommages et intérêts pour licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse,

-20.000€ de dommages et intérêts pour mise à pied et licenciement vexatoires, abus de droit,

-6000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Elle sollicite en outre, la condamnation de la société TRANE à lui délivrer, sous astreinte de 150€ par jour de retard à compter de la notification du jugement à intervenir, les documents suivants :

- bulletins de salaire rectifiés,

- attestation assedic rectifiée.

Elle fait valoir, que le système des commissions frauduleuses, versées aux clients du Maghreb et d'Afrique noire, avait été mis en place au sein de l'agence d'Aix en Provence, par Monsieur [I] depuis de nombreuses années, que ce système était connu du siège social, qui ne pouvait l'ignorer puisque les versements des commissions, d'un montant important, apparaissaient clairement sur les relevés des comptes de la société, qu'il n'a été mis fin à ces pratiques qu'à l'arrivée du successeur de Monsieur [I], qu'elle n'avait qu'un rôle secondaire et qu'elle a toujours agi sur l'ordre de Monsieur [I] qui lui demandait de tenir une comptabilité occulte, qu'elle ignorait le caractère illicite de cette pratique, dans la mesure où la société mère en était informée.

[S] allègue avoir fait l'objet, lors de l'entretien préalable qui s'est tenu avant la date prévue dans la convocation à cet entretien, d'un véritable interrogatoire par plusieurs représentants de l'entreprise dont un avocat américain, en violation des dispositions du droit du travail et des droits de la défense.

Elle soutient encore, que sa mise à pied conservatoire était en réalité disciplinaire et que l'employeur a, par cette sanction, épuisé son pouvoir disciplinaire, ce qui rend son licenciement sans cause réelle et sérieuse.

La société intimée, conclut à la confirmation du jugement entrepris et sollicite en outre une indemnité de 10000€ sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Elle allègue, que le successeur de Monsieur [I], [B] [J], n'a été informé qu'en septembre 2005, des agissements délictueux commis par Monsieur [A], qu'il a été procédé à un audit dès le 3 octobre 2005, que les investigations des auditeurs ont mis en évidence les fraudes de Monsieur [A] , mais aussi révélé l'existence d'un système de détournement de fonds et fausses factures mis en place par l'ancien dirigeant, Monsieur [I], avec la participation de la quasi-totalité des salariés de l'établissement aixois de TRANE SAS, dont [M] [R], dont les fonctions de responsable comptable étaient stratégiques pour camoufler les détournements et permettre le versement de commissions occultes.

Elle ajoute, que ces détournements ne pouvaient être découverts par le siège social, puisque masqués par de « vraies-fausses » factures fournisseurs, destinées à justifier comptablement l'émission de chèques tirés de la société SAS TRANE, non pas au bénéfice du fournisseur correspondant à la facture, mais au bénéfice de personnes physiques ou entreprises tierces.

De même, elle allègue que les faits reprochés à [M] [R] ne sont pas prescrits, seul l'audit diligenté en octobre 2005, ayant permis de connaître l'implication et le rôle joué par la salariée.

Elle indique, que la décision de la chambre des appels correctionnels du 12 mars 2013, qui a condamnée [M] [R] sur intérêts civils, sur le seul appel de la partie civile, a autorité de la chose jugée du pénal sur le procès prud'homal .

Pour plus ample exposé, il est renvoyé aux écritures des parties déposées à l'audience et réitérées lrs des débats oraux.

SUR CE

sur la prescription

En vertu de l'article l. 1332-4 du code du travail, aucun fait fautif ne peut donner lieu à lui seul à l'engagement de poursuites disciplinaires au-delà d'un délai de deux mois à compter du jour où l'employeur en a eu connaissance, à moins que ce fait ait donné lieu dans le même délai à l'exercice de poursuites pénales.

Lorsqu'un fait fautif donnant lieu à l'engagement de poursuites disciplinaires a eu lieu, comme en l'espèce, plus de deux mois avant le déclenchement de celles-ci, il appartient à l'employeur de rapporter la preuve qu'il n'en a eu connaissance que dans les deux mois ayant précédé l'engagement de ces poursuites.

La prescription des faits disciplinaires est indépendante de la prescription pénale. En conséquence, la circonstance que la salariée ait été condamnée en appel sur l'action civile de l'employeur, n'interdit pas de rechercher si les faits qui lui sont reprochés étaient ou non prescrits au moment de l'engagement de la procédure de licenciement .

De même, seul le dispositif de l'arrêt de la chambre des appels correctionnels du 12 mars 2013 a autorité de la chose jugée, sa motivation ne liant pas la cour de céans.

La salariée, se prévaut tout d'abord du témoignage de Monsieur [I], instigateur des pratiques frauduleuses au sein de l'agence d'[Localité 2], qui fait état de ce qu'elles étaient connues de la société mère, qui précise que, pour le marché du Maghreb et de l'Afrique noire, ce système de commissions occultes a été mis en place insidieusement au fil du temps, que la tolérance de la société envers ces pratiques était telle qu'il n'avait pas été nécessaire de se livrer à des artifices comptables pour dissimuler la vérité.

De fait, les relevés de compte produite par la salariée pour les années 1994 à 2000, font apparaître sans aucune dissimulation, des virements importants versés à différents clients notamment du Maghreb.

Il est produit ensuite aux débats les témoignages [C] et [Z], qui confirment le caractère officiel des commissions versées pour certains clients, avec l'accord du directeur général de TRANE EUROPE.

La salariée, contredite sur ce point par l'employeur, soutient que l'ensemble des relevés de compte de l'agence d'[Localité 1] étaient édités à partir d'internet par le siège à [Localité 3], qui ne pouvait ignorer les mouvements sur ces comptes, que le trésorier d'[Localité 3] créditait en cas de découvert.

Par application des règles de preuve en la matière, rappelées plus haut, il appartient à l'employeur de rapporter la preuve qu'il n'a eu connaissance des relevés bancaires, qui établissent le versement des commissions litigieuses, que moins de deux mois avant la procédure disciplinaire, ce qu'il ne fait pas.

Par ailleurs, au mois de novembre 2002, [G] [Q], président de TRANE, a été destinataire d'une lettre anonyme qui met en cause Monsieur [I], en indiquant notamment : « voyez où l'argent de l'entreprise part, les magouilles financières de monsieur [I] et autres, penchez vous sur ce que l'on appelle des abus de biens sociaux, des avantages en nature.

La salariée, tire également argument de l'attestation [X], qui relate que, lors d'une réunion organisée par la direction de TRANE, qui s'est tenue en avril 2005, à laquelle étaient conviés également d'autres responsables dont Monsieur [I], et à laquelle assistait M [J], le successeur de M [I], il a été abordé les futurs changements concernant l'agence d'Aix après le départ de M [I] et notamment la question du système mis en place par ce dernier concernant les commissions occultes remises aux clients soit par virements ou en espèces ainsi que la manière dont M [I] justifiait en interne ces commissions occultes, et qui précise que ce n'est qu'en mai 2005, lors de la visite de Mr [J] à AIX, que l'entreprise a ordonné la cessation de ce système.

Ces éléments, établissent que l'employeur ne pouvait ignorer le système des commissions mis en place par Monsieur [I], dont certaines apparaissent clairement sur les relevés des comptes produits et n'ont nullement été dissimulées par de fausses factures comme le prétend l'employeur.

Par ailleurs, l'employeur ne pouvait davantage ignorer l' implication de la salariée et son rôle exact , eu égard au rôle essentiel qu'il lui prête dans ce système de détournement, qui ne pouvait, selon les indications qu'il donne, fonctionner sans elle depuis l'année 2000.

A cet égard, la lettre de licenciement indique que [M] [R] exerçait les fonctions de responsable de la comptabilité au sein de l'établissement d'[Localité 2], qu'à ce titre, il lui appartenait de vérifier que les écritures comptables enregistrées reflétaient la réalité, qu'elle disposait en outre d'une délégation de pouvoir l'autorisant à retirer certaines sommes en espèces auprès de la Société Générale, précise qu'elle ne pouvait ignorer que de nombreuses factures donnaient lieu à des versements à des tiers, en particulier que les chèques étaient dressés à un nom différent de celui figurant sur la facture et mentionne que l'encaissement de certains chèques à l'ordre de la société, qui ont sans doute donné lieu à des versements en espèce, n'ont pu échapper à son contrôle.

Au demeurant, dans ses écrits l'employeur fait encore état du rôle fondamental joué par le salarié, ses fonctions de responsable comptable étant, selon ses propres dires, stratégiques pour camoufler les détournements et permettre le versement des commissions occultes.

L'audit qui est produit aux débats, n'apporte aucun élément nouveau concernant le rôle joué par la salariée, qui aurait, selon l'employeur, été interrogée sur ce point le 10 novembre 2005 par les auditeurs, cette audition n'étant au demeurant pas produite aux débats.

Il ressort de ce qui précède, que les faits reprochés à la salariée et son implication étaient déjà connus dans toute leur ampleur et leurs tenants et aboutissants, avant même l'audit diligenté par l'employeur, qui ne contient rien de nouveau concernant l'implication de la salariée.

Les pratiques frauduleuses ayant pris fin en mai 2005, selon l'attestation [X] précitée, et le dernier acte litigieux ayant été commis à cette date, il s'ensuit que les faits étaient atteint par la prescription de deux mois en novembre 2005, date de la convocation de la salariée à l'entretien préalable.

Le licenciement, est donc sans cause réelle et sérieuse.

Tenant l'âge de la salariée, son ancienneté supérieure à deux années, le salaire qu'elle percevait au dernier état de la relation contractuelle, il lui sera alloué, selon ses calculs auxquels la cour se réfère, les sommes suivantes non utilement contestées dans leur quantum :

-6.000 € d'indemnité compensatrice de préavis, correspondant à deux mois de salaire, selon la convention collective applicable,

-600 € de congés payés sur préavis,

-15.000 € d'indemnité conventionnelle de licenciement,

-1.892,31 € au titre de la privation de salaire pendant la mise à pied conservatoire.

La salariée, peut prétendre à des dommages intérêts ne pouvant être inférieurs à 6 mois de salaire. Il convient, prenant en compte son préjudice, tel qu'il ressort du dossier, de lui octroyer la somme de 30 000€ de dommages intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Sur la procédure

Les allégations de la salariée, selon laquelle l'entretien préalable prévu pour le 22 novembre aurait en réalité eu lieu le 10 novembre 2009 et, qu'au cours de cet entretien, elle aurait subi un interrogatoire en règle, ne reposent sur aucun fondement, la salariée n'en faisant d'ailleurs nullement état dans son courrier du 10 novembre 2005 adressé à l'employeur, dans lequel elle conteste sa mise à pied conservatoire.

Il convient donc de s'en tenir aux éléments du dossier et à la lettre de convocation à l'entretien préalable, puis à la lettre de licenciement, qui établissent que la salariée a bien fait l'objet d'une mise à pied conservatoire le 8 novembre, qu'elle a été convoquée à un entretien préalable qui s'est tenu régulièrement au 22 novembre.

Au surplus, tenant les effectifs de l'entreprise et l'ancienneté de la salariée, il ne peut y avoir cumul entre les dommages intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et pour irrégularité de procédure.

La demande de dommages intérêt de ce chef, sera donc rejetée.

Sur les dommages et intérêts pour licenciement vexatoire

Aucun élément du dossier, tel qu'analysé plus haut, ne permet de retenir le caractère vexatoire de la rupture, étant relevé que la salariée n'obtient satisfaction que du fait de la prescription des faits qui li sont reprochés.

La demande de dommages intérêts de ce chef, sera également rejetée .

Sur les autres demandes

Il sera ordonné à la société TRANE de délivrer à la salariée les bulletins de salaire et attestation pôle emploi, rectifiés selon les indications du présent arrêt, sans qu'il y ait lieu à astreinte.

Succombant en appel, la société TRANE sera condamnée aux entiers dépens.

Sur l'article 700 du code de procédure civile, il sera alloué à l'appelante la somme de 1200€ au titre des frais irrépétibles exposés tant en première instance qu'en appel.

PAR CES MOTIFS

La COUR

Infirme le jugement entrepris ,

Statuant à nouveau et y ajoutant :

Dit que les faits allégués à l'appui de la mise à pied et du licenciement étaient connus plus de deux mois avant la mise en oeuvre de la procédure disciplinaire, donc prescrits,

Condamne en conséquence la société TRANE à payer à [M] [R] les sommes suivantes :

-6.000 € d'indemnité compensatrice de préavis,

-600 € de congés payés sur préavis,

-15.000 € d'indemnité conventionnelle de licenciement,

-1.892,31 € au titre de la privation de salaire pendant la mise à pied conservatoire,

-30.000 € de dommages et intérêts pour licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse,

-1200 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

Ordonne à la société TRANE de délivrer à la [M] [R] les bulletins de salaire et attestation pôle emploi, rectifiés selon les indications du présent arrêt,

Rejette les demandes plus amples ou contraires,

Condamne la société TRANE aux entiers dépens.

LE GREFFIER LE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : 9e chambre b
Numéro d'arrêt : 08/04342
Date de la décision : 19/09/2013

Références :

Cour d'appel d'Aix-en-Provence 9B, arrêt n°08/04342 : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2013-09-19;08.04342 ?
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