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16/01/2014 | FRANCE | N°12/15072

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 18e chambre, 16 janvier 2014, 12/15072


COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE

18e Chambre



ARRÊT AU FOND

DU 16 JANVIER 2014



N°2014/















Rôle N° 12/15072







[H] [S]





C/



SCS CAP BOULANGER













































Grosse délivrée le :

à :

- Me Jean Claude GUARIGLIA, avocat au barreau de MARSEILLE
r>

- Me Pascal GASTEBOIS, avocat au barreau de PARIS



Copie certifiée conforme délivrée aux parties le :





Décision déférée à la Cour :



Jugement du Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de TOULON - section Encadrement - en date du 09 Juillet 2012, enregistré au répertoire général sous le n° 11/1506.





APPELANT



Monsieur [H] ...

COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE

18e Chambre

ARRÊT AU FOND

DU 16 JANVIER 2014

N°2014/

Rôle N° 12/15072

[H] [S]

C/

SCS CAP BOULANGER

Grosse délivrée le :

à :

- Me Jean Claude GUARIGLIA, avocat au barreau de MARSEILLE

- Me Pascal GASTEBOIS, avocat au barreau de PARIS

Copie certifiée conforme délivrée aux parties le :

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de TOULON - section Encadrement - en date du 09 Juillet 2012, enregistré au répertoire général sous le n° 11/1506.

APPELANT

Monsieur [H] [S], demeurant [Adresse 3]

comparant en personne, assisté de Me Jean Claude GUARIGLIA, avocat au barreau de MARSEILLE

INTIMEE

SCS CAP BOULANGER, demeurant [Adresse 1]

représentée par Me Pascal GASTEBOIS, avocat au barreau de PARIS ([Adresse 2])

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions de l'article 945-1 du Code de Procédure Civile, l'affaire a été débattue le 03 Décembre 2013, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Jean-Bruno MASSARD, conseiller, chargé d'instruire l'affaire.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour composée de :

Madame Gisèle BAETSLE, président

Madame Fabienne ADAM, conseiller

Monsieur Jean-Bruno MASSARD, conseiller

Greffier lors des débats : Julia DELABORDE.

Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 14 janvier 2014 et prorogé au 16 janvier 2014

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 16 janvier 2014

Signé par Mme Gisèle BAETSLE, Président et Mme Julia DELABORDE, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Dans le délai légal et par déclaration écrite régulière en la forme reçue le 1er août 2012 au greffe de la juridiction, M. [H] [S] a relevé appel du jugement rendu le 9 juillet 2012 par le conseil de prud'hommes de Toulon qui l'a débouté de sa demande tendant à voir prononcer la résiliation judiciaire du contrat de travail le liant à la société Cap Boulanger aux torts de l'employeur ainsi que de ses diverses autres demandes pécuniaires à l'encontre de ce dernier ;

Dans ses écritures déposées le 3 décembre 2013, visées par la greffière, développées oralement et auxquelles il est renvoyé pour un exposé de ses moyens et prétentions, M. [S] demande à la cour d'infirmer le jugement déféré, résilier aux torts l'employeur son contrat de travail « pour non-paiement des heures supplémentaires et repos compensateurs, non respect des seuils et plafonds relatifs à la durée du travail, à défaut dire son licenciement économique dénué de cause réelle et sérieuse », en tout cas condamner la société Cap Boulanger à lui payer 120 000 € d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ; 38 758,01 €, outre 3 875,80 € de congés payés y afférents, à titre d'indemnité compensatrice de préavis ; 74 716,85 € à titre d'indemnité légale et supra légale de licenciement ; 152 546,09 € à titre de rappel d'heures supplémentaires outre 15 254,60 € de congés payés y afférents ; 76 261,20 € à titre de dommages-intérêts pour repos compensateurs non pris, outre 7 626,12 € de congés payés y afférents ; 77 486,04 € à titre d'indemnité pour travail dissimulé ; 28 616,50 € à titre de rappel de congés de reclassement pour la période du 5/7/2013 au 5/12/2013 ; 3 000 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile, et la condamner en outre à lui «garantir un montant net mensuel de 10 363 € pour la période postérieure au 5/12/2013 et jusqu'à la fin du congé de reclassement, sous réserve que M. [S] justifie du maintien de ce congé de reclassement », ordonner enfin la rectification en conséquence des bulletins de paie et de l'attestation Pôle Emploi ;

La société Cap Boulanger, dans ses écritures également déposées le 3 décembre 2013, visées par la greffière, développées oralement et auxquelles il est renvoyé pour un exposé de ses moyens, sollicite pour sa part la confirmation du jugement entrepris, subsidiairement la limitation à 58 576,80 € du montant de l'indemnité de licenciement sans cause réelle et sérieuse, et reconventionnellement la condamnation de M. [S] à lui rembourser 72 030,60 € au titre de la répétition de l'indu dans l'hypothèse de la résiliation judiciaire du contrat de travail, en tout cas sa condamnation à lui payer 5 000 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ;

Sur ce :

La société Cap Boulanger, principale filiale de la société holding HTM Group, et anciennement dénommée Média Saturn France, a pour objet la commercialisation de produits et services dans le domaine du multimédia et de l'électroménager ;

Selon les pièces produites, M. [H] [S] a été embauché par la société Cap Boulanger suivant contrat écrit du 8 décembre 2008 à temps complet pour une durée indéterminée en qualité de directeur de magasin stagiaire affecté à son établissement de [Localité 3] du Var, avec le statut de cadre position IV selon la convention collective des commerces et services de l'audiovisuel, de l'électronique et de l'équipement ménager, puis en qualité de directeur de ce même magasin à compter du 1er juin 2009, et en contrepartie dans le dernier état de sa collaboration d'un salaire mensuel brut moyen de 9762,28 € ;

Il a saisi le 7 novembre 2011 la juridiction prud'homale d'une demande principale de résiliation judiciaire de son contrat de travail aux torts de l'employeur pour non paiement d'heures supplémentaires, cette instance ayant abouti au jugement ici querellé ;

En cours d'instance d'appel il a été congédié pour raison économique dans le cadre d'un licenciement collectif par lettre du 3 avril 2013, avec préavis de trois mois payé mais assorti d'une dispense d'exécution, et aux motifs ainsi énoncés :

« (') Cette mesure est la conséquence de la mise en 'uvre du projet de cessation d'activité des magasins d'[Localité 2], [Localité 5], [Localité 4], [Localité 6] et [Localité 1], projet directement consécutif et lié à la réorganisation mise en 'uvre (') en 2012.

Ce projet de cessation d'activités est la conséquence des engagements auxquels l'entreprise a dû déférer lors du rachat des sociétés exploitant l'enseigne Saturn en France par HTM Group auprès de l'autorité de la Concurrence.

En effet l'opération de concentration que constituait le rachat du réseau Saturn par HTM Group a été soumise à l'avis de l'autorité de la Concurrence qui a consenti à la réalisation de l'opération à la condition impérative notamment que dans certaines zones géographiques, pour éviter des situations de distorsion de concurrence, des points de vente ne soient plus exploités par HTM Group, dont le magasin de [Localité 6].

(') Dans un premier temps l'Autorité de la concurrence a demandé à ce que la cession de fonds de commerce se fasse auprès d'un concurrent (') Toutes les possibilités de reprise ayant été épuisées, et HTM Group étant en situation d'interdiction d'exploiter du fait des engagements liés à la distorsion de concurrence, nous avons été autorisés par l'Autorité de la concurrence à en tirer les conséquences en cessant l'activité des 5 magasins Cap Boulanger dont le magasin de [Localité 6].

(') Parmi les postes supprimés figure celui de directeur que vous occupez actuellement.

Afin d'éviter votre licenciement pour motif économique, nous vous avons en date du 8 mars 2013 proposé les reclassements suivants :

un reclassement au poste de directeur au sein de notre établissement Boulanger de Roanne, proposition (') que vous avez refusée,

Outre ces propositions (') nous vous avons rappelé que vous aviez la possibilité de vous positionner sur un poste en bourse interne ('), bourse interne pour laquelle vous ne vous êtes pas positionné. » ;

Sur la demande de résiliation judiciaire du contrat de travail aux torts de l'employeur pour non paiement des heures supplémentaires et les demandes pécuniaires y afférentes :

Antérieure en date au licenciement intervenu, la recevabilité de cette demande n'est pas discutée et apparaît certaine ;

M. [S] soutient que son contrat de travail doit être résilié aux torts de la société Cap Boulanger pour manquement de l'employeur à son obligation de lui payer les heures supplémentaires qu'il prétend avoir effectuées habituellement et pour un montant qu'il évalue à 152 546,09 € ;

Il est constaté liminairement qu'avant la saisine de la juridiction prud'homale, sa demande n'a été précédée d'aucune mise en demeure faite à la société Cap Boulanger, ni même d'un échange de correspondance entre les parties ;

En application de l'article L. 3111-2 du Code du travail, les cadres dirigeants ne sont pas soumis aux dispositions légales en matière de durée du travail, repos et congés ;

Selon ces mêmes dispositions légales, sont considérés comme ayant la qualité de cadre dirigeant les cadres auxquels sont confiées des responsabilités dont l'importance implique une grande indépendance dans l'organisation de leur emploi du temps, qui sont habilités à prendre des décisions de façon largement autonome et qui perçoivent une rémunération se situant dans les niveaux les plus élevés des systèmes de rémunération pratiqués dans leur entreprise ou établissement ;

En l'espèce il est établi que M. [S] percevait une rémunération importante, la plus élevée de l'établissement dont il avait la direction, et aussi ' selon ses propres dires ' « en 20ème position » (sic. ses conclusions, page 16) parmi les rémunérations les plus élevées de l'ensemble du personnel salarié de l'entreprise, laquelle dispose d'un effectif du personnel voisin de 8 000 salariés répartis en 133 magasins ;

Il ressort par ailleurs des stipulations de son contrat de travail que M. [S] était cadre position IV, soit aux termes de la convention collective applicable « un emploi nécessitant les pouvoirs les plus larges, non seulement sur le plan administratif ou commercial ou technique, mais également sur le plan de la gestion, de l'organisation, de la direction de l'entreprise. Il comporte la mise en 'uvre, sous l'autorité du chef d'entreprise, de la gestion et des politiques financières et commerciales de celles-ci » ;

Selon l'article 13 de son contrat de travail, M. [S] devait effectivement recevoir une délégation de pouvoir en matière de respect de l'ensemble de la réglementation économique générale et de la réglementation du travail ;

Le fait par l'intéressé d'avoir ensuite omis de ratifier l'acte distinct de délégation qui lui a été soumis par l'employeur daté du 1er juin 2009,  n'est pas de nature à modifier l'appréciation de l'étendue de ses pouvoirs, dès lors que cette abstention unilatérale du salarié contrevient à son engagement contractuel initial ;

Ainsi il est établi par les nombreuses pièces produites qu'au sein de l'établissement dont il assurait la direction, M. [S] a effectivement usé du pouvoir qui lui était donné d'embaucher et de licencier ;

Dans ces conditions l'article 8 du contrat de travail de l'intéressé stipulant qu'en raison de « de l'importance des responsabilités inhérentes à sa fonction qui impliquent une grande indépendance dans l'organisation de son emploi du temps ('), d'autre part de son niveau élevé de rémunération, M. [S] n'est pas soumis à la réglementation sur la durée du travail » apparaît légitime, contractuellement et en fait ;

Aussi la preuve rapportée qu'en dehors des heures d'ouverture habituelle du magasin de [Localité 3] du Var, M. [S] a pu être présent sur place ou communiquer par courrier électronique pour les besoins de son activité professionnelle, doit être regardé comme le reflet de l'indépendance dont il disposait dans l'organisation de son emploi du temps, et non pas comme la démonstration de l'accomplissement d'heures supplémentaires restées non rémunérées ;

Ces constatations sont suffisantes pour en conséquence dire M. [S] mal fondé en ses demandes de rappel de salaire pour heures supplémentaires et accessoires, à l'instar par suite de sa demande d'indemnité pour travail dissimulé ;

Sa demande de résiliation judiciaire du contrat de travail aux torts de l'employeur doit dès lors être elle-même rejetée comme dénuée de tout fondement, et de ce chef le jugement entrepris confirmé ;

sur les demandes afférentes au licenciement :

Il est produit au débat la décision du 11 juin 2011 de l'Autorité de la concurrence visée dans la lettre de licenciement de M. [S] relative aux conséquences du rachat de l'enseigne Saturn par la société HTM Group, holding dont la société Cap Boulanger est la principale filiale, le plan de sauvegarde de l'emploi soumis le 10 février 2012 par la société Cap Boulanger à son comité central d'entreprise, y compris le dossier économique (65 pages) analysant les effets de l'intégration des magasins Saturn dans le réseau Boulanger, l'offre de reclassement interne faite à M. [S] par lettre RAR du 8 mars 2013 et que celui-ci a déclinée telle qu'elle sera exactement décrite dans la lettre de congédiement ultérieure de l'intéressé ;

Sur le plan économique, il ressort notamment de ces éléments au 30 juin 2012 un résultat consolidé de HTM Group se traduisant par une perte de 52,7 millions d'euros, dont 43,1 millions d'euros imputables à Cap Boulanger, étant précisé que le chiffre d'affaires de l'établissement de [Localité 6] était en baisse de 52 % en 2012 par rapport à l'année précédente ;

Dans ce contexte la nécessité de la sauvegarde de l'entreprise conduisant à la cessation d'activité du magasin de [Localité 6] est avérée ;

Il est également établi que conformément à l'article L.1233-4 du Code du travail, la société Cap Boulanger a loyalement respecté son obligation de recherche de reclassement de M. [S], les offres faites à l'intéressé concernant des emplois à des fonctions analogues et avec maintien du montant de sa rémunération de base ;

Ainsi le licenciement de M. [S] apparaît fondé sur une cause réelle et sérieuse et l'intéressé doit être débouté de ses demandes indemnitaires ;

Il est constaté que lors de son congédiement M. [S] a perçu 25 695,96 € bruts d'indemnité de préavis équivalente à trois mois de salaire et 2 569,59 € bruts d'indemnité de congés payés y afférente ;

En application des L. 1233-71 et suivants du Code du travail M. [S] s'est par ailleurs vu proposé par la société Cap Boulanger un congé de reclassement qu'il a accepté et en cours d'exécution depuis le 5 juillet 2013, celui-ci percevant une allocation de reclassement mensuelle brute de 5 499,92 € conformément au plan de sauvegarde adopté le 15 février 2013 ;

A l'issue de son congé de reclassement, la société Cap Boulanger offre selon ses conclusions écrites devant la cour de régler à M. [S] 6 263,60 € d'indemnité légale de licenciement, ainsi que 26 633,16 € d'indemnité supra légale conformément au plan de sauvegarde adopté ;

Ces offres apparaissent satisfactoires et il convient d'en donner acte à la société Cap Boulanger ;

De ces chefs M. [S] doit au contraire être débouté de ses demandes plus amples faites par référence erronée à un salaire théorique incluant à tort des heures supplémentaires avérées injustifiées comme ci-avant exposé ;

En application de l'article 700 du Code de procédure, il apparaît enfin équitable en l'espèce d'allouer 2 500 € à la société Cap Boulanger ;

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant publiquement, contradictoirement, en matière prud'homale ;

Confirme le jugement entrepris ;

Y ajoutant ;

Dit le licenciement de M. [H] [S] en cours d'instance d'appel fondé sur une cause réelle et sérieuse ;

Déclare satisfactoire l'engagement de la société Cap Boulanger, à l'issue du congé de reclassement de M. [S] actuellement en cours, de payer à l'intéressé 6 263,60 € d'indemnité légale de licenciement et 26 633,16 € d'indemnité supra légale conformément au plan de sauvegarde de l'emploi adopté le 15 février 2013 ;

Dit M. [S] mal fondé en ses autres demandes plus amples ou contraires ;

Le condamne à payer 2 500 € à la société Cap Boulanger par application de l'article 700 du Code de procédure civile ;

Le condamne aux dépens.

LE GREFFIER.LE PRÉSIDENT.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : 18e chambre
Numéro d'arrêt : 12/15072
Date de la décision : 16/01/2014

Références :

Cour d'appel d'Aix-en-Provence 18, arrêt n°12/15072 : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2014-01-16;12.15072 ?
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