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06/02/2014 | FRANCE | N°13/00435

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 17e chambre b, 06 février 2014, 13/00435


COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE

17e Chambre B



ARRÊT SUR RENVOI DE CASSATION



ARRÊT AU FOND

DU 06 FEVRIER 2014



N° 2014/77













Rôle N° 13/00435





[O] [Q]





C/



S.A. SNCM

































Grosse délivrée

le :

à :

Me Albert HINI, avocat au barreau de MARSEILLE



Me Christian MAI

LLARD, avocat au barreau de MARSEILLE





Copie certifiée conforme délivrée aux parties le :





Décision déférée à la Cour :



Arrêt en date du 06 février 2014 prononcé sur saisine de la Cour suite à l'arrêt rendu par la Cour de Cassation en date du 06 mars 2012, qui a cassé l'arrêt rendu le 02 février 2010 par la Cour...

COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE

17e Chambre B

ARRÊT SUR RENVOI DE CASSATION

ARRÊT AU FOND

DU 06 FEVRIER 2014

N° 2014/77

Rôle N° 13/00435

[O] [Q]

C/

S.A. SNCM

Grosse délivrée

le :

à :

Me Albert HINI, avocat au barreau de MARSEILLE

Me Christian MAILLARD, avocat au barreau de MARSEILLE

Copie certifiée conforme délivrée aux parties le :

Décision déférée à la Cour :

Arrêt en date du 06 février 2014 prononcé sur saisine de la Cour suite à l'arrêt rendu par la Cour de Cassation en date du 06 mars 2012, qui a cassé l'arrêt rendu le 02 février 2010 par la Cour d'appel D'AIX-EN-PROVENCE (18ème chambre)

APPELANT

Monsieur [O] [Q], demeurant [Adresse 1]

représenté par Me Albert HINI, avocat au barreau de MARSEILLE

INTIMEE

S.A. SNCM, demeurant [Adresse 2]

représentée par Me Christian MAILLARD, avocat au barreau de MARSEILLE substitué par Me Louis LEFEVRE, avocat au barreau de MARSEILLE

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

L'affaire a été débattue le 10 Décembre 2013 en audience publique devant la Cour composée de :

Monsieur Jean-Pierre MASIA, Président de Chambre

Madame Ghislaine POIRINE, Conseiller

Madame Brigitte PELTIER, Conseiller

qui en ont délibéré

Greffier lors des débats : Madame Caroline LOGIEST.

Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 06 Février 2014.

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 06 Février 2014.

Signé par Monsieur Jean-Pierre MASIA, Président de Chambre et Madame Caroline LOGIEST, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

FAITS ET PROCEDURE

Monsieur [O] [Q], né le [Date naissance 1] 1934, a été embauché par la SNCM suivant contrat de travail maritime comme personnel navigant d'exécution du 13 juillet 1978 au 22 avril 1989 date à laquelle il a été mis d'office à la retraite.

Estimant que les conditions de sa mise à la retraite n'étaient pas réunies, il a saisi, le 9 mai 2008, l'Administrateur des Affaires Maritimes aux fins d'une éventuelle conciliation mais celle -ci n'ayant pas abouti, il a cité, le 7 octobre 2008, la SNCM devant le Tribunal d'Instance de Marseille aux fins d'obtenir le paiement de diverses sommes au titre de son licenciement nul.

Le Tribunal d'Instance l'a débouté de toutes ses demandes par jugement du 12 mars 2009 qui a été confirmé par arrêt de la Cour d'Appel d'Aix-en-Provence du 2 février 2010.

Par arrêt du 6 mars 2012, la Cour de Cassation, considérant qu'en ayant retenu que le demandeur ne justifiait pas de sa situation et plus particulièrement d'une retraite à taux plein alors qu'il appartenait à l'employeur de rapporter la preuve de ce que les conditions de la mise à la retraite étaient remplies, la Cour d'Appel avait violé les articles 1315 du code civil et L1237-5 du code du travail. L'arrêt du 12 mars 2009 a été cassé et annulé dans toutes ses dispositions, la cause et les parties étant renvoyées devant la Cour d'Appel d'Aix-en-Provence autrement composée.

C'est en cet état de la procédure que les parties ont été convoquées et que l'affaire a été plaidée.

MOYENS ET PRETENTIONS DES PARTIES

Monsieur [O] [Q] demande à la cour d'infirmer le jugement, dire que sa mise à la retraite s'analyse en un licenciement sans cause réelle et sérieuse, fixer sa rémunération mensuelle moyenne à la somme de1950€ et condamner la SNCM à lui payer les sommes de:

-3900€ au titre du préavis

-390€ au titre des congés payés s'y rapportant

-2145€ au titre de l'indemnité de licenciement

-450.000€ de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse

-5000€ au titre de l'article 700 du code procédure civile

outre la remise des documents légaux sous une astreinte de 50€ par jour de retard.

Répondant tout d'abord au moyen soulevé in limine litis par l'intimée et tiré de la prescription d'un an du décret du 20 novembre 1959, l'appelant a fait valoir que ce décret avait été déclaré illégal par une décision du Conseil d'Etat du 27 novembre 2006 et que la prescription étant de trente ans, ses demandes étaient recevables. Sur le fond, il soutient que s'il remplissait la première des deux conditions cumulatives pour être mis d'office à la retraite à savoir être âgé de 55ans, en revanche, il ne remplissait pas la seconde condition à savoir bénéficier d'une retraite à taux plein, qu'ainsi, la SNCM ne pouvait pas le mettre d'office à la retraite à 55 ans, que sa mise à la retraite d'office s'analysait en un licenciement sans cause réelle et sérieuse, cette cause ne pouvant être fondée sur l'âge. Il sollicite donc de la cour l'allocation des indemnités de rupture en insistant sur l'importance de son préjudice financier puisque, selon lui, il aurait pu travailler jusqu'en 2004.

La SNCM après avoir soulevé, à titre principal et in limine litis, l'irrecevabilité des demandes en raison de la prescription d'un an prévue par le décret du 20 novembre 1959 et/ ou de cinq ans pour les demandes en paiement de salaires, sollicite à titre subsidiaire de la cour de débouter l'appelant de toutes ses prétentions et en tout état de cause les réduire à de plus justes proportions. Elle invoque en effet qu'à la date de la mise à la retraite, elle était une entreprise publique, que son personnel, qui était donc soumis à des règles spécifiques dérogatoires du droit commun, relevait de la Convention particulière du Personnel Navigant d'exécution, que la limite d'âge était de 55ans et qu'il avait été jugé à plusieurs reprises que l'article L1237-4 du code du travail ne s'appliquait pas aux entreprises publiques. Elle demande la condamnation de l'appelant à lui payer la somme de 5000€ au titre de l'article 700 du code procédure civile.

SUR CE

Sur la prescription

Le décret du 20 novembre 1959 dont l'article 11 dispose que 'toutes actions ayant trait au contrat d'engagement sont prescrites un an après le voyage terminé' a été déclaré illégal par décision du Conseil d'Etat du 27 novembre 2006.

Le contrat de travail ayant été rompu le 22 avril 1989, les demandes relatives à la qualification de la rupture, aux dommages-intérêts et à l'indemnité légale de licenciement, qui n'ont pas un caractère salarial, n'étaient pas atteintes au jour de la saisine du 9 mai 2008 de l'Administrateur des Affaires Maritimes aux fins d'une éventuelle conciliation ni au jour de la saisine du 7 octobre 2008 du Tribunal d'Instance de Marseille par la prescription trentenaire applicable aux faits de l'espèce. En revanche, l'indemnité compensatrice de préavis et les congés payés s'y rapportant ayant un caractère salarial, les demandes de ces chefs sont irrecevables car atteintes par la prescription de cinq ans.

Les demandes, sauf celles ayant trait au préavis et aux congés payés, sont donc recevables.

Sur la qualification de la rupture

Pour échapper aux règles légales applicables à la mise à la retraite de Monsieur [Q], la SNCM ne saurait invoquer le statut d'entreprise publique qui était le sien à l'époque et particulièrement la Convention Particulière du Personnel Navigant du 20 mars 1978 qui stipulait que la cessation des services s'effectuait par la limite d'âge (article 23) laquelle était fixée à 55 ans pour toutes les catégories de personnel (article 24). En effet, il résulte de l'article L 1237-4 du code du travail, dans sa rédaction alors applicable à la date des faits sous l'ancien article L122-14-12 du code du travail, que les dispositions relatives au départ à la retraite des salariés prévues par une convention collective, un accord collectif de travail ou un contrat de travail sont applicables sous réserve qu'elles ne soient pas contraires aux dispositions légales et que sont nulles et de nul effet toute disposition d'une convention collective ou d'un accord collectif de travail et toute clause d' un contrat de travail prévoyant une rupture de plein droit du contrat de travail d'un salarié en raison de son âge ou du fait qu'il serait en droit de bénéficier d'une pension de vieillesse. Ainsi, la clause conventionnelle sus-visée qui retenait, comme seule condition de mise à la retraite d'office, l'âge du salarié était inopposable à Monsieur [Q] en ce qu'elle était contraire aux dispositions légales de l'article L1237-5 du code du travail, dans sa rédaction alors applicable sous l'ancien article L122-14-13 du code du travail, qui prévoyaient qu'un âge inférieur peut être fixé pour être mis à la retraite dès lors que le salarié peut bénéficier d'une pension de vieillesse à taux plein au sens de la sécurité sociale. C'est donc à bon droit que Monsieur [Q] soutient que l'employeur ne pouvait le mettre à la retraite d'office à l'âge de 55 ans qu'à la condition de bénéficier à cette date d'une pension de vieillesse à taux plein au sens de la sécurité sociale. La preuve de ce que les conditions d'une mise à la retraite d'office étaient remplies incombant à l'employeur et la SNCM ne rapportant pas la preuve que Monsieur [Q] pouvait à la date de sa mise à la retraite d'office bénéficier d'une pension de vieillesse à taux plein au sens de la sécurité sociale alors au contraire qu'il ne bénéficiait que de 15,5 annuités lui donnant seulement droit à une pension de vieillesse à taux réduit, peu important qu'il ait perçu aussi une pension complémentaire de l'ENIM, il s'en suit que la mise à la retraite d'office de Monsieur [Q] s'analyse en un licenciement sans cause réelle et sérieuse.

A la date de la rupture de son contrat de travail, Monsieur [Q] bénéficiait d'une ancienneté de 11 ans dans une entreprise comptant plus de onze salariés, son salaire mensuel brut non sérieusement discuté s'élevait à la somme de 1950€ avec les bonifications. Après son licenciement, il a perçu une pension de retraite du régime général au taux réduit de 31% de son salaire hors bonification et une pension d'ancienneté dite à '55 ans' versée par l'ENIM s'élevant à 426,18€ en 1989 et 609,17€ en 2008 Il a cumulé ces sommes de 1990 à 1994 avec un autre emploi salarié. Ces éléments d'appréciation ainsi que les circonstances de la rupture amènent la cour à condamner la SNCM à lui payer la somme de 12000€ de dommages-intérêts.

L'indemnité légale de licenciement, non remise en cause dans son calcul, s'élève bien à la somme de 2145€

L'équité commande d'allouer à l'appelant la somme de 1500€ au titre de l'article 700 du code procédure civile.

Il sera statué sur la remise des documents légaux comme dit au dispositif mais sans qu'il ne soit nécessaire d'ordonner une astreinte.

PAR CES MOTIFS

LA COUR, statuant par décision prononcée par mise à disposition au greffe, contradictoirement et en matière prud'homale.

Reçoit Monsieur [O] [Q] en son appel.

Réforme le jugement du Tribunal d'Instance de Marseille du 11 mars 2009 en toutes ses dispositions.

Statuant à nouveau.

Reçoit Monsieur [O] [Q] en ses demandes sauf celles au titre du préavis et des congés payées sur préavis qui sont irrecevables car prescrites.

Dit que la rupture de son contrat de travail le 22 avril 1989 s'analyse en un licenciement sans cause réelle et sérieuse

Condamne la SA SNCM à payer à Monsieur [O] [Q] les sommes de

-12000€ de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.

-2145€ au titre de l'indemnité légale de licenciement.

-1500€ au titre de l'article 700 du code procédure civile.

Dit que la SA SNCM devra remettre à Monsieur [O] [Q] dans le délai de deux mois de la notification de l'arrêt, les documents légaux rectifiés et conformes.

Déboute la SA SNCM de ses demandes reconventionnelles.

Condamne la SA SNCM aux dépens de première instance et d'appel.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : 17e chambre b
Numéro d'arrêt : 13/00435
Date de la décision : 06/02/2014

Références :

Cour d'appel d'Aix-en-Provence 7B, arrêt n°13/00435 : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2014-02-06;13.00435 ?
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