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20/03/2014 | FRANCE | N°11/22319

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 8e chambre c, 20 mars 2014, 11/22319


COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE

8e Chambre C



ARRÊT AU FOND

DU 20 MARS 2014



N°2014/186













Rôle N° 11/22319







[T] [E]





C/



[Q] [W]

MONSIEUR LE PROCUREUR GENERAL





































Grosse délivrée

le :

à :BADIE

TOLLINCHI

PG









Déc

ision déférée à la Cour :



Jugement du Tribunal de Commerce de MARSEILLE en date du 12 Décembre 2011 enregistré au répertoire général sous le n° 2011L00422.





APPELANT



Monsieur [T] [E]

né le [Date naissance 1] 1949 à [Localité 1] (13), demeurant [Adresse 1]

représenté par Me Sébastien BADIE de la SCP BADIE SIMON-THIBAUD JUSTON, avocat au barreau d'...

COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE

8e Chambre C

ARRÊT AU FOND

DU 20 MARS 2014

N°2014/186

Rôle N° 11/22319

[T] [E]

C/

[Q] [W]

MONSIEUR LE PROCUREUR GENERAL

Grosse délivrée

le :

à :BADIE

TOLLINCHI

PG

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Tribunal de Commerce de MARSEILLE en date du 12 Décembre 2011 enregistré au répertoire général sous le n° 2011L00422.

APPELANT

Monsieur [T] [E]

né le [Date naissance 1] 1949 à [Localité 1] (13), demeurant [Adresse 1]

représenté par Me Sébastien BADIE de la SCP BADIE SIMON-THIBAUD JUSTON, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE constitué aux lieu et place de la SCP MJ DE SAINT FERREOL ET COLETTE TOUBOUL, avoués, et plaidant par Me Jean-claude BENSA, avocat au barreau de MARSEILLE

INTIMES

Maître [Q] [W] agissant en sa qualité de liquidateur judiciaire de la SARL LES BATIMENTS DU MIDI, demeurant [Adresse 2]

représenté par Me Charles TOLLINCHI de la SCP TOLLINCHI PERRET VIGNERON, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE et plaidant par Me Bénédicte CHABAS, avocat au barreau de MARSEILLE

Monsieur LE PROCUREUR GENERAL, demeurant [Adresse 3]

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions des articles 785,786 et 910 du Code de Procédure Civile, l'affaire a été débattue le 18 Février 2014 en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant :

Monsieur Yves ROUSSEL, Président Rapporteur,

et Monsieur Pascal MATHIS, Conseiller- Rapporteur,

chargés du rapport qui en ont rendu compte dans le délibéré de la Cour composée de :

Monsieur Yves ROUSSEL, Président

Monsieur Vincent PELLEFIGUES, Conseiller

Monsieur Pascal MATHIS, Conseiller

Greffier lors des débats : Madame Valérie VIOLET.

Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 20 Mars 2014.

MINISTERE PUBLIC :

Auquel l'affaire a été régulièrement communiquée.

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 20 Mars 2014.

Rédigé par Monsieur Yves ROUSSEL, Président,

Signé par Monsieur Yves ROUSSEL, Président et Madame Valérie VIOLET, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Par jugement du 29 juin 2009, le tribunal de commerce de Marseille a ouvert le redressement judiciaire de la SARL LES BATISSEURS DU MIDI, ayant pour activité la construction et la vente de maisons individuelles.

Le 8 juillet 2009, a été prononcée sa liquidation judiciaire, Me [Q] [W] étant désigné en qualité de mandataire liquidateur et le 26 juillet 2010, le tribunal a reporté la date de cessation des paiements au 27 octobre 2008.

Par jugement en date du 12 décembre 2011, le tribunal de commerce de Marseille a, sur l'action introduite par Me [Q] [W], en sa qualité, condamné Monsieur [E] à lui payer la somme de 1 198 846,69 euros au titre de sa participation à l'insuffisance d'actif de la SARL les BATISSEURS DU MIDI, prononcé contre lui une mesure de faillite personnelle pour une durée de 10 ans, ordonné la publicité légale et statué sur les frais irrépétibles et les dépens.

Vu l'appel formé par déclaration du 30 décembre 2011 par Monsieur [E].

Vu les conclusions déposées et signifiées le 29 mars 2012 par Monsieur [E], par lesquelles il demande à la cour d'infirmer le jugement entrepris de constater qu'il n'a pas été convoqué en chambre du conseil contrairement aux exigences des articles R. 651-5 et R. 653-2 du code de commerce pour qu'il soit statué sur les sanctions personnelles pouvant être prononcées contre lui, de rejeter les demandes du mandataire liquidateur, subsidiairement, de ramener les condamnations prononcées contre lui à plus juste proportion et de condamner le mandataire liquidateur aux dépens distraits au profit de son avocat.

Vu les conclusions déposées et notifiées le 17 avril 2012, par lesquelles Maître [Q] [W] demande à la cour de confirmer le jugement entrepris et de condamner Monsieur [E] à lui payer la somme de 3.000 € en application des dispositions de l'article 700 Code de Procédure Civile, outre les dépens distraits au profit de son avocat.

Me [W] fait valoir que le passif antérieur définitif s'élève à 1.583.876,90 €, hors trois créances pour un total de 712 665.52 € sur lesquelles le juge commissaire ne s'est pas prononcé en raison d'instances en cours ; que l'actif a été réalisé à hauteur de 9.150,01 € ; que le dirigeant ne lui a remis aucun document comptable, si ce n'est que la SAS KALPAC et CIE qui avait une mission de représentation des comptes annuels lui a adressé les liasses fiscales 2006, 2007 et 2008 et que Monsieur [T] [E] est également gérant ou associé dans la SARL Groupe d'investisseurs et de conseils en immobilier GICI, en redressement judiciaire depuis le 11 février 2010, la SCI Le Botticelli, la SA Valindus et la SCI MICHELIS.

Vu l'avis du procureur général en date du 8 novembre 2013 qui conclut à la confirmation du jugement déféré.

Vu l'ordonnance de clôture en date du 21 janvier 2014.

SUR CE, LA COUR,

1. Monsieur [E] fait valoir qu'il appartenait au tribunal de le convoquer en chambre du conseil, conformément aux dispositions des articles R. 651-5 et R. 653-2 du code de commerce et que la décision prise de le convoquer en audience publique est contraire à la doctrine et à la jurisprudence, d'autant qu'il a demandé par voie de conclusions à être convoqué en chambre du conseil.

Mais, les articles R 651-5 et R 653-2 du Code de Commerce ne consacrent nullement le principe selon lequel dans le cadre d'une action en faillite personnelle le dirigeant doit être convoqué en chambre du conseil, la matière étant, en effet, gouvernée par l'article L 662-3 alinéa 2 du Code de Commerce qui consacre le principe des débats en audience publique dans le cadre des sanctions personnelles et patrimoniales figurant aux chapitres I et III du Titre V, sauf à ce que la personne mise en cause dans le cadre de la procédure sollicite du tribunal que les débats aient lieu en chambre du conseil.

Or, Monsieur [E] n'a pas présenté de demande en ce sens, même si, contre toute évidence, il prétend le contraire, étant observé qu'il se contredit lui-même en prétendant tout à la fois qu'il a présenté spécialement une demande de comparution en chambre du conseil et qu'une telle comparution allait de soi , au vu des textes applicables.

Le moyen sera donc écarté.

2. M. [E] fait valoir que l'analyse du tribunal sur la poursuite de l'exploitation déficitaire dans l'intérêt personnel du gérant est inexacte puisqu'il n'a jamais perçu les rémunérations dont il est fait état ; que c'est en raison de la signature de 15 contrats de construction de maisons individuelles sur plan, pour un montant total de 2 401 889,31 euros, qu'il a décidé de ne pas déclarer la cessation des paiements, laquelle est intervenue par suite de la résiliation du contrat d'assurance souscrit auprès de la compagnie QBE INSURANCE EUROPE LIMITED .

3. Me [W] fait valoir que le passif déclaré s'est élevé à la somme de 2.405.387,32 € alors que l'actif n'a pu être réalisé que pour une somme de 9150,01 €, soit une insuffisance d'actif de 2.396.237,31 € ; que Monsieur [E], a reconnu dans le cadre de la vérification des créances, le passif privilégié à hauteur de 864.905,91 € et le passif chirographaire à hauteur de 553.082,01 €, contestant le surplus des créances pour un montant de 987.399,40 €.

4. Si ces chiffres sont contestés par lui, l'existence d'une importante insuffisance d'actif est reconnue par M. [E] qui fait valoir que seules les dettes contractées avant le jugement d'ouverture doivent être prises en compte pour déterminer l'insuffisance d'actif ; que tel est ici le cas des créances produites par Pôle Emploi, l'URSSAF et les AGS CGEA et que la même observation s'impose concernant la créance de QB INSURANCE et celle de l'IRREP ou IRP VRP.

Il s'en déduit que M. [E] ne conteste pas que le passif s'élève à 1 198 846,69 euros et que l'actif a été réalisé pour une somme de 9150,01 €, ce qui donne la mesure de l'insuffisance.

4. L'exploitation de la société a été poursuivie en dépit d'un déficit important, comme en témoignent les chiffres suivants :

Exercice 2007

Chiffres d'affaires :2.351.399 €

Résultat d'exploitation : - 243.127 €

Bénéfice/perte : - 353.325 €

Capitaux propres : - 101.353€

Exercice 2008

Chiffre d'affaires : 1.575.091€

Résultat d'exploitation : - 700.890 €

Bénéfice/perte : - 705.228 €

Capitaux propres : - 705.228€

Monsieur [E] ne conteste pas qu'il n'a pas fait la déclaration de cessation des paiements dans le délai de 45 jours fixé par la loi, la date de celle-ci ayant été fixée d'abord au 29 juin 2009, puis par jugement du 26 juillet 2010, reportée au 27 octobre 2008 (pièces 9 et 10) .

La poursuite de l'exploitation déficitaire était parfaitement abusive et périlleuse, notamment parce que la société avait perdu sa garantie financière AGEMIQBE en juillet 2008 et que ses tentatives pour souscrire une nouvelle garantie ont été vaines. Elle servait l'intérêt personnel de Monsieur [E], puisque, selon le bilan, dont les chiffres mettent à néant ses allégations sur ce point, il a reçu 69.480 € en 2007 et 45.873 € en 2008.

Il n'est pas démontré que la faute de gestion ayant consisté à poursuivre l'exploitation dans de telles conditions, laquelle a contribué à l'insuffisance d'actif, n'était due qu'à l'attente de régularisation des contrats de construction de maisons individuelles, aucun élément probant n'étant produit devant la cour sur ce point.

5. Monsieur [E] détenait aussi un compte courant débiteur dans la SARL LES BATISSEURS DU MIDI de 38.734,29 € en 2006, de 230.664,87 € en 2007 et de 99.920,59€ en 2008 (pièces 15, 16 et 17), alors que le passif ne cessait d'augmenter ( 276.128 € pour l'exercice 2006, 502.532 € pour l'exercice 2007 et 545.546 € pour l'exercice 2008).

De telles opérations, que la loi qualifie de détournement d'actif, constituent également des fautes de gestion et ont contribué à l'insuffisance d'actif.

6. C'est par une juste appréciation des éléments qui viennent d'être évoqués que le tribunal de commerce de Marseille a condamné Monsieur [E] à payer la somme de 1.198.846,69 euros au titre de sa participation à l'insuffisance d'actif de la SARL les BATISSEURS DU MIDI, étant observé que le fait allégué par Monsieur [E] qu'il s'est porté caution solidaire au profit de divers créanciers de la société LES BATISSEURS DU MIDI, dont, notamment, GERVAIS MATERIAUX, le CREDIT NORD et COMATHERM, outre le fait qu'il ne justifie pas des procédures en recouvrement mises en 'uvre à son encontre, n'est pas de nature à l'exonérer de sa responsabilité pécuniaire.

7. Parfaitement justifiée, eu égard aux fautes commises par lui, la sanction de la faillite personnelle pour une durée de 10 ans, prononcée contre Monsieur [E] sera confirmée.

8. Partie perdante, M. [E] sera condamné aux dépens et à payer à l'intimé, ès qualités, la somme de 1500 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

Statuant publiquement et contradictoirement,

Rejetant tous autres moyens, exceptions et prétentions,

Confirme le jugement entrepris,

Condamne M. [E] à payer à Me [W], ès qualités, la somme de 1500 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

Le condamne aux dépens, ceux d'appel distraits au profit de la SCP TOLLINCHI, PERRET-VIGNERON, BUJOLI TOLLINCHI, avocat.

Le GreffierLe Président


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : 8e chambre c
Numéro d'arrêt : 11/22319
Date de la décision : 20/03/2014

Références :

Cour d'appel d'Aix-en-Provence 8C, arrêt n°11/22319 : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2014-03-20;11.22319 ?
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