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20/11/2014 | FRANCE | N°13/23866

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 1re chambre b, 20 novembre 2014, 13/23866


COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE

1re Chambre B



ARRÊT EN MATIERE DISCIPLINAIRE

DU 20 NOVEMBRE 2014

FG

N° 2014/651













Rôle N° 13/23866







[EJ] [X]





C/





MONSIEUR LE PROCUREUR GENERAL PRÈS LA COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE



PRESIDENT DE LA CHAMBRE REGIONALE DE DISCIPLINE DU CONSEIL REGIONAL DES NOTAIRES DE LA COUR D'APPEL D'AIX



















Grosse dÃ

©livrée

le :

à :



Monsieur Thierry RICARD, avocat général



Me Bernard GINEZ



Me Corine SIMONI



LE PRESIDENT DE LA CHAMBRE DE DISCIPLINE DU CONSEIL REGIONAL DES NOTAIRES DE LA COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE















Décision déférée à la Cour :


...

COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE

1re Chambre B

ARRÊT EN MATIERE DISCIPLINAIRE

DU 20 NOVEMBRE 2014

FG

N° 2014/651

Rôle N° 13/23866

[EJ] [X]

C/

MONSIEUR LE PROCUREUR GENERAL PRÈS LA COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

PRESIDENT DE LA CHAMBRE REGIONALE DE DISCIPLINE DU CONSEIL REGIONAL DES NOTAIRES DE LA COUR D'APPEL D'AIX

Grosse délivrée

le :

à :

Monsieur Thierry RICARD, avocat général

Me Bernard GINEZ

Me Corine SIMONI

LE PRESIDENT DE LA CHAMBRE DE DISCIPLINE DU CONSEIL REGIONAL DES NOTAIRES DE LA COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Tribunal de Grande Instance de GRASSE en date du

03 Décembre 2013 enregistré au répertoire général sous le n° 13/04658.

APPELANT

Monsieur [EJ] [X]

né le [Date naissance 1] 1966 à [Localité 1]

demeurant [Adresse 2]

comparant en personne,

assisté par Me SIMONI, avocat au barreau d'Aix en Provence et par Me Bernard GINEZ, avocat plaidant au barreau de NICE.

INTIME

MONSIEUR LE PROCUREUR GENERAL

PRES LA COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE

[Adresse 8]

représenté par Monsieur Thierry RICARD, avocat général.

En présence de :

LE PRESIDENT DE LA CHAMBRE REGIONALE DE DISCIPLINE DU CONSEIL REGIONAL DES NOTAIRES DE LA COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE

[Adresse 3]

représenté par Me [LR] [YY] , notaire à [Localité 2], selon pouvoir en date du 2 octobre 2014.

COMPOSITION DE LA COUR

L'affaire a été débattue en chambre du conseil le 24 octobre 2014, les parties n'ayant pas demandé la publicité des débats, devant la Cour composée de :

Monsieur François GROSJEAN, Président

Mme Danielle DEMONT-PIEROT, Conseiller

Monsieur Dominique TATOUEIX, Conseiller

qui en ont délibéré

Greffier lors des débats : Mme Dominique COSTE

Ministère Public : Monsieur Thierry RICARD, avocat général, présent uniquement lors des débats

ARRÊT

Contradictoire

Prononcé en audience publique le 20 Novembre 2014 par Monsieur François GROSJEAN, Président,

Signé par Monsieur François GROSJEAN, Président et Mme Dominique COSTE, greffier présent lors du prononcé.

Sur question du Président, Me Philippe CLERC a déclaré ne pas souhaiter la publicité des débats.

M. [N] [F], est entendu en son rapport.

Me Philippe CLERC, appelant, est entendu en ses explications.

Me [L] [J], est entendu en sa plaidoirie dans les intérêts de Me [X].

Me [LR] [YY], notaire, représentant le Président de la chambre régionale de discipline du Conseil régional des notaires de la cour d'appel d'Aix en Provence, est entendue en ses observations.

M. Thierry RICARD, avocat général, est entendu en ses réquisitions.

Me Philippe CLERC a eu la parole en dernier.

Sur quoi, les débats sont déclarés clos et l'affaire mise en délibéré, les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aurait lieu le 20 Novembre 2014.

RAPPEL DE LA PROCÉDURE, POURSUITES, AUDIENCE

Me [EJ] [M] [N] [T] [X], né le [Date naissance 1] 1966 à [Localité 1], est notaire à la résidence de [Localité 4] (Alpes Maritimes) en tant qu'associé unique de la société d'exercice libéral à responsabilité limitée Selarl Philippe CLERC, titulaire de l'office notarial, suivant arrêté du Garde des Sceaux du 2 juillet 1997. Il a prêté serment le 28 juillet 1997 devant le tribunal de grande instance de Grasse

Il a été cité le 25 juillet 2013 en audience disciplinaire devant le tribunal de grande instance de Grasse pour l'audience du 3 octobre 2013.

Par jugement en date du 3 décembre 2013, le tribunal de grande instance de Grasse a :

- ordonné la suspension provisoire de Me Philippe CLERC

- prononcé à l'encontre de Me [EJ] [X] la sanction de l'interdiction d'exercer pendant une durée de deux ans,

- désigné Me [XC] [B], notaire salarié de la Selarl Philippe CLERC en qualité d'administrateur provisoire de l'office pendant cette période,

- condamné Me [EJ] [X] aux dépens.

Par déclaration de Me Corinne SIMONI, avocat au barreau d'Aix-en-Provence, en date du 12 décembre 2013, M.[EJ] [X] a relevé appel de ce jugement.

M.[EJ] [X] a été convoqué par lettre recommandée avec avis de réception reçue le 5 juin 2014 pour l'audience de la cour d'appel du 24 octobre 2014.

Interrogé sur ce point, M.[EJ] [X] n'a pas souhaité que l'audience se déroule publiquement. Les débats se sont en conséquence tenus en chambre du conseil.

M.[EJ] [X] a établi des conclusions qu'il a déposées et signifiées le 14 février 2014 par lesquelles il demande la confirmation du jugement en ce qu'il a retenu l'existence d'une gestion irréprochable de l'office notarial, et d'infirmer le jugement en toutes ses autres dispositions.

Il demande à la cour de constater l'absence de violation de ses obligations professionnelles, de constater l'exercice d'un contrôle rigoureux et suffisant de sa part pour l'ensemble des actes passés et notamment par ceux passés pour le compte de M.[HO], sa famille ou la SCP POSTILLON, constater l'absence d'implication de M.[X] dans les faits relatifs aux actes de cession de la SCI Le Koudou et des actes de cession du droit au bail par la

Sarl 3 L, décharger M.[X] des fins de poursuites disciplinaires, n'y avoir lieu à sanction disciplinaire.

A l'audience, M.[EJ] [X] a été entendu à l'appui de son recours. Me Bernard GINEZ avocat au barreau de Nice, assistant M.[X] a développé oralement ce recours.

M°[LR] [YY], notaire à [Localité 2], représentant le président de la chambre régionale de discipline, a fait part de ses observations orales.

M.l'avocat général n'a pas établi de conclusions écrites. Il a adressé le 15 octobre 2014 à la cour un 'soit-transmis' ainsi libellé : En priant la cour de bien vouloir confirmer la décision disciplinaire résultant du jugement du tribunal de grande instance de Grasse en date du 3 décembre 2013, ayant condamné Maître [EJ] [X] à la peine de deux années d'interdiction d'exercice professionnel, outre sa suspension provisoire de ses fonctions de notaire$gt;$gt;. Ce 'soit-transmis ', qui n'avait pas été adressé à Me [X], a été lu à l'audience par le président de la chambre de la cour d'appel. Le conseil de Me [X] a précisé prendre connaissance de ce 'soit-transmis' et ne former aucune observation sur l'absence de communication de celui-ci à l'avance; Me CLERC n'a pas demandé le renvoi de l'affaire.

Par la suite, et par conclusions purement orales, non précédées ni suivies d'un support papier, M.l'avocat général a requis la confirmation du jugement.

M.[EJ] [X] a eu la parole en dernier.

MOTIFS

-I) Sur la recevabilité de l'appel:

L'appel a été formé selon les formes et délai prévus aux articles 35 et 36 du décret n°73-1202 du 28 décembre 1973.

Il est recevable.

-II) l'acte de poursuite :

M.[EJ] [X] a été cité le 25 juillet 2013 à comparaître devant le tribunal de grande instance de Nice statuant en matière disciplinaire.

Cette assignation est l'acte de poursuite, à la diligence du procureur de la République près le tribunal de grande instance de Nice.

L'assignation est ainsi libellée :

Dans le cadre d'une inspection occasionnelle au niveau national de la SCP [HO] DOMENGE PUJOL THURET ALPINI BUCCERI CAFLERS et SAUVAGE, notaires associés à Nice, diligentée entre le 14 et le 18 septembre 2009 au sein de l'étude, les inspecteurs constataient de nombreuses anomalies. Ils remarquaient également que Me [EJ] [X], notaire à [Localité 4], avait reçu en son étude un nombre anormalement élevé d'actes authentiques pour le compte de Me [HO] et de sa famille et concernant notamment de nombreuses sociétés civiles immobilières ou des sociétés commerciales dans lesquelles Me [HO] avait des intérêts.

Il était ainsi décidé d'effectuer, à partir du mois de mars 2010, une inspection occasionnelle au niveau national de la Selarl Philippe CLERC.

Les investigations entreprises par les inspecteurs révélaient que [EJ] [X] avait été notaire assistant au sein de la SCP POSTILLON de septembre 1995 à mai 1996.

Employé à partir de mai 1996 comme clerc principal au sein de l'office de Me [R] [O] à [Localité 4], il devenait titulaire de cette étude en juillet 1997 moyennant le prix de 382.122 € dans le cadre de la Selarl Philippe CLERC.

L'office notarial comprenait un établissement principal [Adresse 1] et deux bureaux annexes à [Localité 6] et à [Localité 7].

Il apparaissait que le siège principal était la propriété de la SCI Les Trois de la Nartassière dont le capital divisé en 3.300 parts sociales était réparti entre Me [X], Me [U] et Me [HO], ce dernier étant nommé gérant.

La SCI précitée louait les locaux à la Selarl.

L'établissement de Saint-Vallier était la propriété de la SCI Les Trois du Préjoly constituée entre les trois mêmes associés, Me [X] étant nommé gérant.

Les inspecteurs constataient ainsi que Me [EJ] [X] n'avait pas la majorité dans les deux SCI précitées et n'était pas gérant de celle qui louait les locaux de l'établissement principal de Mougins.

L'essentiel du contrôle portait sur les actes reçus par Me [X] pour le compte de la SCI POSTILLON et associés ou des SCI ou sociétés dans lesquelles Me [HO] était gérant ou associé (cf pages 17 à 22 du rapport d'inspection occasionnel au niveau national).

Les inspecteurs constataient que l'office de Me [X] servait de notaire instrumentaire de manière habituelle à Me [HO] et sa famille.

Ils observaient que ces actes authentiques ne généraient aucun bénéfice pour l'office, Me [X] les faisant systématiquement bénéficier de remises d'émoluments.

Ainsi l'état des remises sur émoluments établi entre le 28 juillet 2003 et le 30 avril 2010 concernait pour près de 40% des actes réalisés pour le compte de Me [HO] et de sa famille pour environ 133.000 € sur un montant de 337.000 €.

Ces montants importants expliquaient ainsi en partie la faiblesse de la rentabilité de l'office.

Les inspecteurs s'étonnaient que ces remises, qui pourraient se justifier dans l'hypothèse d'actes relatifs aux affaires familiales et privées du confrère, n'avaient plus de légitimité lorsqu'elles concernaient des SCI et des sociétés commerciales.

Les inspecteurs s'interrogeaient ainsi sur le but réel de telles pratiques qui dépassaient le cadre de la confraternité habituellement admise entre notaires.

En outre, les sondages réalisés révélaient un manque de rigueur dans le contrôle qu'aurait dû normalement exercer Me [X] à la réception de ces actes rédigés par Me [HO] ou Me [H], son associée.

Un exemple tiré de l'inspection illustre ce manque de rigueur.

Ainsi, la lecture des actes relatifs à la cession du droit au bail par la Sarl 3 L à la SCP POSTILLON et associés démontrait que Me [X] ne s'était pas interrogé sur le versement d'une commission à l'agence immobilière Sarl Rex Agency dont l'intervention n'apparaissait pas nécessaire dans le cadre de la transaction entre la Sarl 3 L agissant comme marchand de biens et la SCP POSTILLON.

De même, le notaire ne s'était pas étonné que la SCP POSTILLON soit passée par l'entremise d'un marchand de biens (la Sarl 3 L) pour louer un local voisin de l'étude appartenant à une SCI dont le gérant était Me [HO].

Me [X] ne s'était également posé aucune question sur le fait que la SCP POSTILLON payait le triple du prix payé par le marchand de biens un mois auparavant, versait un loyer trois fois supérieur au loyer initial et payait une indemnité de négociation de 15.000 €.

Les inspecteurs observaient le même montage curieux dans l'acte de vente par la SCI Frice Conew (dans laquelle Me [HO] a des intérêts à la SNC HUGO (dont le gérant statutaire est un certain [EJ] [Z], ancien employé de Me [HO]) de locaux de bureaux dans l'immeuble occupé par la SCP POSTILLON.

En effet, la Sarl 3 L intervenait également comme intermédiaire sans aucune justification et recevait une commission de 35.880 € TTC.

Les inspecteurs estimaient que ces irrégularités, qui n'auraient pas dû échapper au contrôle de Me [X], étaient contraires aux dispositions de l'article 17.1 du règlement national des notaires qui 'interdit aux notaires.....de recevoir sans y prêter une particulière attention, les actes préparés par ses confrères intervenant directement ceux-ci ou les membres de leur famille'.

De manière concomitante, le parquet de Nice faisait diligenter une enquête par l'antenne de Nice de la police judiciaire de [Localité 3] le 15 octobre 2009.

Dans le cadre de cette enquête pénale, les policiers entendaient à deux reprises Me Philippe CLERC.

Le 14 avril 2011, il admettait avoir des liens d'amitié avec [SZ] [HO] que le magistrat instructeur avait notamment mis en examen pour abus de confiance aggravé et blanchiment aggravé.

Il précisait que le domicile de ce dernier était situé à 500 mètres des locaux de son étude. Il reconnaissait que Me [HO] passait des actes qui le concernait dans son office.

Le 22 octobre 2012, les policiers l'entendaient plus particulièrement sur l'acte de vente des parts sociales de la SCI Le Koudou par [I] [S] et Mme [YA] [Q] à M.et Mme [MP] le 31 mars 2008 et qui se rapportait à une villa dénommée Solana sise au Cannet.

L'enquête avait démontré que Mme [Q] et M.[S], connaissances de Me [HO], apparaissaient comme des prête-noms de ce dernier à la signature de l'acte initial d'acquisition de ce bien immobilier en 2001, acte passé en l'étude de Me [X].

Ce dernier finissait par reconnaître que Me [HO] lui avait présenté ces deux personnes comme étant des relations.

Il admettait, de même, que Me [HO] était présent dans le cabinet de Me DELPEYROUX, avocat, pour la signature de l'acte de procuration par M.et Mme [MP] au profit de cet auxiliaire de justice, sans qu'il puisse justifier auprès des enquêteurs la présence de son confrère. Le prix de vente du bien apparaissait également anormalement bas.

Les acquéreurs avaient ainsi versé 963.000 € alors que l'administration fiscale, à la date du 31 mars 2008, avait estimé la valeur vénale de cette villa à la somme de 2.693.952 €.

Les vendeurs prête-noms avaient quant à eux crédité, d'une partie du montant de la cession, le compte de la Sarl Haras de Bory, société dans laquelle [SZ] [HO] était associé.

De plus, les policiers démontraient que le jour même de la vente, le 31 mars 2008, [SZ] [HO] déposait 1.060.000 € en espèces sur un compte ouvert au Crédit Agricole du Luxembourg au nom de la société bahanéenne Hatsbury dont il était le bénéficiaire économique, somme provenant de la cession des parts sociales de la SCI Le Koudou et qui constituait un dessous de table. Avec cet argent, [SZ] [HO] achetait un avion qui était ultérieurement utilisé dans un trafic de stupéfiants.

Me [X] ne pouvait ignorer le montage frauduleux tout en reconnaissant que [SZ] [HO] n'avait aucune raison de toucher cette somme importante s'il n'était pas propriétaire de la villa. Il était mis en examen par le juge d'instruction de Nice le 5 mars 2013 pour complicité de blanchiment de fraude fiscale, de trafic de stupéfiants et de complicité d'abus de confiance aggravés. Me Philippe CLERC confirmait ses déclarations faites aux enquêteurs et clamait sa bonne foi. Le magistrat instructeur le plaçait sous contrôle judiciaire avec interdiction d'exercer la profession de notaire et toute autre fonction au sein d'une étude notariale touchant à la rédaction d'actes authentiques. La chambre de l'instruction de la cour d'appel d'Aix-en-Provence confirmait le 26 mars 2013 la décision du juge d'instruction. Par jugement du 26 mars 2013, le tribunal de grande instance de Grasse désignait en qualité de suppléante Me [XC] [B], notaire salarié au sein de la Selarl Philippe CLERC.

Pour conclure, l'inspection occasionnelle au niveau national et l'information judiciaire ont mis en évidence la dépendance économique et psychologique dans laquelle se trouvait Me [EJ] [X] par rapport à [SZ] [HO], son ancien patron qui s'est servi de lui pour commettre ses turpitudes.

Ainsi, il est manifeste que Me [EJ] [X] a dressé des actes notariés rédigés par [SZ] [HO] et Me [H] son associé sans exercer de contrôle.

Il lui appartenait en effet, en tant qu'officier ministériel chargé de passer des actes authentiques, de vérifier que ces actes étaient conformes aux règles légales et ne constituaient pas des montages délictueux.

Il importe peu que ces actes aient été préparés par des notaires et aient été passés en son étude sans contrepartie financière.

L'article 17.1 du règlement national des notaires dispose en effet que le notaire doit prêter une particulière attention aux actes préparés par ses confrères et qui intéressent directement ceux-ci ou les membres de leur famille.

Me [EJ] [X] a fait preuve de complaisance coupable au bénéfice de [SZ] [HO], avec lequel il entretenait des liens d'amitié, et de [W] [H], dont le mari avait été son avocat dans le contentieux l'opposant au précédent titulaire de son office.

La multiplicité de ces actes, concernant parfois des biens ou des sociétés sis à [Localité 5] ou la région parisienne, aurait du alerter Me [EJ] [X] sur les intentions réelles de [SZ] [HO].

Il s'est ainsi rendu coupable de faits contraires à la probité, à l'honneur et à la délicatesse.

Vu l'ordonnance n°45-1418 du 28 juin 1945, notamment ses articles 2,3, 10, 32 et 33,

constater que Me [EJ] [X] a manqué à ses obligations déontologiques et s'est rendu coupable de manquements à ses obligations professionnelles, qu'il a contrevenu aux lois et règlements, commis des infractions aux règles professionnelles et des faits contraires à la probité, à l'honneur et à la délicatesse, le condamner à la peine de l'interdiction temporaire d'exercer pour une durée de deux ans la profession de notaire.$gt;$gt;.

Les pièces jointes sont au nombre de huit:

- le rapport d'inspection occasionnelle au niveau national,

- le procès verbal d'audition de M.[EJ] [X] du 14 avril 2011 (5D 6725 et suivants),

- le procès verbal d'audition de M.[EJ] [X] du 22 octobre 2010 (D12510 et suivants),

- le procès verbal de synthèse de la police judiciaire de Nice du 28 janvier 2013 (D12254),

-le procès verbal de 1ère comparution de M.[EJ] [X], mis en examen par le magistrat instructeur le 5 mars 2013),

- l'arrêt de la chambre d'instruction de la cour d'appel d'Aix-en-Provence confirmant le placement sous contrôle judiciaire de M.[EJ] [X],

- le jugement du tribunal de grande instance de Grasse du 26 mars 2013 désignant Me [XC] [B], notaire salariée, en qualité de suppléante.

-III) Analyse des faits reprochés :

-III-1) les faits résultant du rapport d'inspection occasionnelle au niveau national :

Cette inspection a été ordonnée le 9 mars 2010 par le président du conseil supérieur du notariat avec mission d'analyser l'ensemble de l'activité professionnelle de Me [EJ] [X] dans tous ses aspects juridiques et comptables, notamment l'examen des actes et dossiers que l'office a pu traiter en liaison avec Me [HO], sa société civile professionnelle de Nice, analyser la nature des liens qui ont pu se nouer entre les deux offices au cours de ces dernières années.

Les inspecteurs étaient Me [C] [A] [Y], notaire honoraire, et M.[L] [TX], expert comptable. L'inspection s'est déroulée au sein de l'office les 26 et 27 avril 2010.

-III-1-1) sur les remises systématiques d'émoluments au profit de Me [HO]:

L'office de Me [X] a servi de notaire instrumentaire de manière fréquente et répétitive à Me [SZ] [HO] et sa famille, sa société civile professionnelle et ses sociétés civiles immobilières.

Les actes ont été très nombreux. 85 actes ont été passés par Me [X] pour le compte de Me [HO] ou des sociétés apparentées.

Ces actes n'ont généré aucun produit pour l'office. Un état des remises sur émoluments établi entre le 28 juillet 2003 et le 30 avril 2010 concerne pour près de 40% des actes réalisés pour leur compte soit 133.000 €.

Les inspecteurs ont relevé que ces actes avec remises d'émoluments concernaient des opérations commerciales menées indirectement par Me [HO] au travers de diverses sociétés.

Ils ont notamment fait l'inventaire des actes reçus par Me [X] pour la Sarl [Adresse 9], qui a son siège à [Localité 4] au domicile personnel de Me [HO]

constituée entre Me [HO] et son épouse, et dont la gérante est gérante officiellement : Mme [K] veuve [HO], mère de M.[HO].

Me [X] a reçu , chaque fois avec remise totale d'émoluments :

-le 15 juillet 2002 un acte d'acquisition d'un appartement meublé [Adresse 9] au prix de 731.755,28 €

-le 25 septembre 2002 un acte d'acquisition d'un appartement de M.[HO] à [Localité 4] dans la résidence [Adresse 6] au prix de 68.602,06 €,

- le 15 décembre 2005 un acte d'acquisition par la SCI Barbara représentée par M°[SZ] [HO] d'un appartement et deux aires de stationnement dans la résidence [Adresse 5], au prix de 310.000 € ,

-le 26 octobre 2007 un acte d'acquisition par la Sarl [Adresse 9] représentée par M°[HO] à M.[P] d'un appartement dans l'immeuble [Adresse 7] au prix de 310.000 € + 15.000 € de commissions pour Sud invest,

-le 28 février 2008 un acte d'acquisition,

-le 28 mars 2008 un acte d'acquisition par la Sarl [Adresse 9] représentée par M°[HO] d'un appartement avec cave [Adresse 4], 645.000 €,

-le 3 juin 2008 un acte de vente par les époux [E] à la Sarl [Adresse 9] représentée par M°[W] [H] d'un appartement dans la résidence [Adresse 7] au prix de 215.000€ + 10.000 € de commission à Sud invest,

-le même jour un acte de bail pr la Sarl [Adresse 9] aux époux [E], qui d'anciens propriétaires, deviennent locataires,

-le 13 juin 2008 un acte d'acquisition

-le 7 janvier 2009 un acte de revente

- le 31 août 2009 un acte de vente à la SCI Bercaux au prix de 120.000 €, de l'appartement acquis pour 68.602,06 € le 25 septembre 2002 dans la résidence [Adresse 6].

La Sarl [Adresse 9] acquérait et revendait des biens immobiliers dans un souci spéculatif.

Cette analyse permet d'établir que les remises d'émoluments accordées systématiquement par Me [X] correspondaient à un service rendu à Me [SZ] [HO] dans le cadre des affaires que celui-ci menait, parallèlement à son activité de notaire.

Si le règlement national des notaires permet, en son article 15, la pratique de la remise d'émoluments, cette pratique ne doit pas aboutir à nuire à la société titulaire de l'office notarial.

Or les inspecteurs ont pu évaluer à 133.000 € le total des remises allouées à Me [HO] et à ses sociétés satellites.

Ce cadeau accordé à Me [HO] et à ses sociétés pose question.

L'inspection a révélé un lien de nature patrimoniale entre Me [SZ] [HO] et Me Philippe CLERC. On retrouve Me [HO] comme associé dans chacune des sociétés civiles immobilières propriétaires des locaux de [Localité 4] et de Saint Valley de Thiey.

L'office de Me [X] est installé [Adresse 1], dans un bâtiment appartenant à la SCI Les Trois de la Nartassière, composée de Me [SZ] [HO], Me [Q] [U] et Me [EJ] [X], 3.300 parts, chacun un tiers. La SCI a acquis le bien immobilier le 10 septembre 1998 pour 2.400.000 F.Il est loué à la Selarl CLERC selon un loyer mensuel de 7.721 € Ttc.

Le deuxième local, le bureau annexe de Saint Vallier de Thiey, se trouve dans bien immobilier appartenant à SCI Les Trois du Prejoly, composée de Me [SZ] [HO], Me [Q] [U] et Me [EJ] [X], 4.500 parts, chacun un tiers. La SCI a acquis le bien immobilier le 29 septembre 2004 pour 297.276 €. Il est loué à la Selarl CLERC moyennant un loyer mensuel de 4.900 € Ttc.

Les inspecteurs ont noté que : la remise des émoluments notariés à un confrère est un usage ancien assez généralisé dans la profession même s'il s'agit d'un usage non écrit. Mais on peut s'étonner à plusieurs titres de la pratique à grande échelle et sans contrepartie visible qu'en fait Me [X] envers son confrère de Nice.....l'usage de la remise se justifie pour les affaires familiales et privées du confrère (contrat de mariage, donation, achat de résidence principale et secondaire, emprunt) mais il n'est pas justifié de l'étendre systématiquement à toutes les opérations immobilières que le confrère réalise, y compris et surtout lorsqu'il le fait, non plus personnellement mais sous couvert de sociétés. Quand une dizaine de SCI sont en cause et même au moins deux Sarl avec toute la commercialité que ces dernières impliquent, on peut s'interroger sur la légitimité de telles remises qui sortent du cadre de la confraternité habituellement admise entre confrères$gt;$gt;.

La remise d'émoluments doit avoir un caractère ponctuel et ne doit pas transformer un notaire en agent gratuit d'un autre notaire pour mettre en forme des dizaines et des dizaines d'actes correspondant à ses multiples affaires financières.

Cette situation aboutissait à faire agir Me [X] comme s'il était au service de Me [HO], ce qui a porté atteinte à son indépendance, son impartialité, sa dignité d'officier public et ministériel et aux intérêts de la Selarl Philippe CLERC.

-III-1-2) le cas de la vente SCI Frice Co New / SNC Hugo 21 décembre 2007 :

La SCI Frice Co New a son siège à Nice. Elle a été constituée par un acte reçu par Me [X] entre Me [SZ] [HO], son épouse et la société Haras de Bory.

Me [SZ] [HO] en est le gérant.

Cette société avait acquis divers biens immobiliers dans l'immeuble [Adresse 7], au moyen d'un prêt de la BHE. Ces locaux étaient loués à la Sas Medicis, dont le président est M.[EJ] [Z], ancien employé de M.[HO].

Une SNC Hugo a été constituée le 18 décembre 2007 entre la Sarl Philippe Hugo et Sarl Emma Hugo, représentée par M.[EJ] [Z].

Par acte reçu par Me [X], le 21 décembre 2007, acte qui avait été préparé par Me [W] [H], associée de Me [HO], selon les initiales 'CA' pour [W] [H] y figurant, la SCI Frice Co New a vendu à la SNC Hugo les locaux au prix de 600.000 €.

A la date de l'acte il restait une inscription hypothécaire au profit de la BHE. Le montant à rembourser était de 61.791,23 €.

Par ailleurs, la société venderesse allait devoir payer un impôt sur la plus value. Celui-ci sera de 41.046 €.

Malgré l'existence d'une créance de la banque BHE et la certitude d'un impôt sur la plus value à payer, Me [X] va remettre à son ami Me [HO] dès le jour de la vente l'intégralité

du prix de vente, sans conserver la somme acquise au créancier hypothécaire et sans provisionner la somme destinée à payer l'impôt sur la plus value.

Ce faisant Me [X] mettait son office en danger en se dessaisissant de la somme acquise au créancier hypothécaire et cela dans le seul but de rendre service à Me [HO] au travers la SCI Frice Co New, alors qu'il lui avait déjà fait cadeau de ses émoluments.

En agissant ainsi, Me [X] commettait une faute dans le seul but de faciliter les intérêts de Me [HO]. Il se mettait encore au service de ce dernier au lieu de se comporter en officier ministériel rigoureux et impartial.

-III-1-3) l'affaire SCI Jemara :

La société civile Jemara est une des multiples sociétés civiles immobilières créées par Me [HO]. Ses associés sont M.[HO] et son épouse. Le gérant est M°[HO].

Dans l'immeuble [Adresse 7], dans lequel se trouve installé l'office notarial de la société civile professionnelle POSTILLON et autres, un local commercial, le lot 899, et une cave, lot 547, étaient occupés par le docteur [OW] [G], vétérinaire, au travers d'une société civile immobilière, la SCI Iesolo.

Dans sa perspective d'acquérir progressivement les lots de l'immeuble [Adresse 7] pour permettre l'extension de la surface de locaux de l'office, M.[HO] a été intéressé par l'achat de ces locaux.

L'opération s'est déroulée en quatre phases :

-phase 1 : la SCI Jemara acquiert le local et passe un bail avec le Dr [G]:

La SCI Jemara a acquis le 14 janvier 2002 de la SCI Iesolo ce local et cette cave au prix de 152.449,02 €. Le même jour la SCI Jemara, devenue propriétaire, a loué ces lots au Dr [G] par un bail le 14 janvier 2002. Le loyer annuel de ce bail SCI Jemara- GALLITRE était de 18.293 € ht soit 21.879 €ttc.

-phase 2 : Par acte de Me [B], notaire salarié de la Selarl CLERC du 23 juillet 2007, préparé par 'C.A. initiales [W] [H], associée de Me [HO], a été effectuée la cession du bail par le Dr [G] à société 3 L, Sarl au capital de 2.000 € créée à Nice le 16 mai 2006 avec pour objet l'activité de marchand de biens et de location et avec pour gérant M.[V] [PU], lequel était au service de Me [HO].

Au travers de cette société, la Sarl 3 L, M.[PU] a repris le bail de M.[G] pour 30.000 € et lui a racheté son matériel de vétérinaire pour 15.000 €.

-phase 3 : triplement du loyer : Une fois la SCI Jemara ayant pour locataire la Sarl 3L, la SCI Jemara la procédé à une augmentation de loyer. Ce loyer a triplé en passant de 18.293 € ht ou 21.879 € ttc à 54.000 € ht ou 64.584 € ttc. M.[PU], comparse et instrument de M.[HO] n'a pas discuté cette augmentation.

-phase 4 : acte de Me [X] du 29 août 2007, à peine un mois après la cession à 3L : cession du bail à la SCP POSTILLON, également acte aux initiales 'C.A.' Corinne ALPINI, associée de la SCP POSTILLON . La Sarl 3 L a cédé le bail à société civile professionnelle POSTILLON le 29 août 2007 moyennant 98.000 €, plus une commission Rex Agency de 15.000 €. Cet acte de cession préparé par Me [H] est reçu par Me [X] au siège de l'office de la SCP POSTILLON

Grâce à ce montage, M.[HO], à la fois gérant de la SCI Jemara, commanditaire de son ami M.[PU], et dirigeant de fait de la société civile professionnelle POSTILLON , a fait reprendre par la société civile professionnelle moyennant 98.000 € et un loyer triplé un local destiné à l'office.

Cette opération a permis à M.[HO] d'être payé de tous les frais qu'il avait mis dans l'acquisition, de faire une plus value, de s'enrichir au préjudice de la société civile professionnelle POSTILLON et autres et au préjudice de ses associés, en faisant reprendre au prix fort un bail et payer un loyer surévalué à son bénéfice.

Le passage par la société 3 L a permis à la SCI Jemara, c'est à dire à Me [HO], de faire une opération financière très bénéficiaire à son profit au préjudice de la société civile professionnelle de notaires POSTILLON et autres, au préjudice des associés de Me [HO].

Les associés de Me [HO] ne pouvaient pas savoir que le droit au bail avait été acquis par la société 3L un mois avant, pour 30.000 € plus 15.000 € de reprise matériel, lorsqu'ils l'ont eux-mêmes acquis pour 98.000 € plus 15.000 € de commission un mois plus tard. Ils ne pouvaient pas savoir que le loyer avait été brusquement triplé.

Seul Me [X] avait tous les éléments d'appréciation alors que son étude avait établi le précédent acte de cession de bail.

Il n'a rien fait pour informer les associés de Me [HO] de ce montage suspect.

Par ailleurs il n'a perçu aucun émolument.

De plus, c'est lui qui, sur les fonds de son étude a fait l'avance des droits d'enregistrement de cette cession le 29 août 2007 alors que le cessionnaire ne lui a adressé un chèque correspondant que le 7 septembre 2007.

Me [X] a violé les dispositions de l'article 17.1 du règlement national des notaires en ne prêtant pas une particulière attention à cet acte préparé par un confrère et intéressant directement celui-ci. Il s'agit d'un manquement à une obligation professionnelle.

Me [X] a couvert les agissements de Me [HO] qui, grâce à un montage, s'est enrichi personnellement au profit de ses associés. Il s'agit d'une atteinte à la probité.

Me [X] a fait l'avance de droits fiscaux sur les deniers de son office au profit d'un client.

Il s'agit d'une violation d'une règle professionnelle et d'une atteinte à la probité alors qu'il a a utilisé des fonds sociaux au profit d'un client.

-III-2) les faits résultant de la procédure d'enquête pénale : l'affaire SCI Le Koudou :

Me [X] a reçu le 31 mars 2008 un acte de cession de parts de la SCI Le Koudou

entre M.[I] [S] et Mme [YA] [Q], belle-mère de Me [SZ] [HO], cédants, d'une part et M.[D] [MP], cessionnaire, d'autre part.

Me [H], notaire associée de Me [HO], représentait les cédants. Me DELPEYROUX, avocat, représentait le cessionnaire. Aucune des parties n'était présente, elles étaient toutes représentées.

La SCI Le Koudou est propriétaire d'un bien immobilier, la [Adresse 10], de 216 m² sur un terrain de 3.903 m².

La cession des parts sociales correspondait à la vente du bien immobilier, moins comptes les courants d'associés, soit un prix de 963.000 €.

Il s'est avéré que Me [SZ] [HO] était en sous main derrière les cédants et que le prix était fictif en présence d'une très importante dissimulation.

M.[D] [MP] a reconnu que le prix avait été simulé pour éviter de faire apparaître une plus value, et avoir payé un dessous de table de 1.060.000 € (715.000 € provenant d'un compte au Luxembourg et 360.000 € de Euro Suisse Audit.

Cette somme a été déposée en espèces par Me [HO] le 31 mars 2008 sur un compte ouvert au Crédit agricole du Luxembourg au nom de la société Hatsbury.

Le compte n°17751 au sein de l'office Selarl Philippe CLERC au nom de Mme [YA] [Q] a été crédité le 31 mars 2008 de 1.000 € au titre de la cession des parts et de 407.144,70 €, puis débité le 8 avril 2008, de la somme de 408.144,70 € en faveur de la société Sarl Haras de Bory, société de Mme [HO] dans laquelle M.[HO] est associé.

Le compte n°17752 au nom de M.[I] [S] a été crédité le 31 mars 2008 de 1.000€ puis de 2.000 € au titre de la cession des parts et débité le 25 juillet 2008 de 3.000 €.

L'administration fiscale a procédé à une revalorisation du prix de la cession à 2.693.952 €.

L'importance de la dissimulation, 1.060.000 €, eu égard à un prix de 963.000 €, soit plus de la moitié du prix apparent et de 411.144,70 € en réalité effectivement payés par la comptabilité de Me [X], l'importance du redressement, 2.693.952 €, soit pour un montant de 1.730.952 € de plus que le prix apparent convenu, établissent que Me [X], notaire expérimenté, avait en sa possession les éléments révélant une importante fraude fiscale.

En fermant les yeux, et en manquant de rigueur, Me [X] a permis et couvert de son sceau une fraude, manquant à ses obligations professionnelles.

-IV) La sanction :

Le préambule du règlement national des notaires rappelle que le notaire assure la moralité et la sécurité de la vie contractuelle, retenant non seulement la sécurité mais la moralité de la vie contractuelle.

L'article 3.2.1 dudit règlement dit que le notaire doit choisir les moyens les plus appropriés pour parvenir au résultat désiré par le client mais en conformité avec la loi, rappelant ainsi l'obligation professionnelle du notaire d'agir en conformité avec la loi et de ne pas couvrir notamment une fraude fiscale.

L'article 2 de ce règlement dit que le notaire doit accomplir sa mission avec loyauté et probité et qu'il doit avoir un souci constant d'impartialité.

Me [EJ] [X] a manqué d'impartialité et agi avec une complaisance coupable avec son confrère Me [SZ] [HO], couvrant les affaires de ce dernier même au préjudice des associés de celui-ci, se mettant à son service pour signer tous les actes préparés par celui-ci sans procéder à un contrôle rigoureux de ces actes, en mépris des dispositions de l'article 17.1 du règlement national des notaires.

Il a porté atteinte à sa société d'exercice libéral, violant des règles professionnelles et manquant à la probité, en se transformant en agent gratuit de Me [HO] pour mettre en forme des dizaines et des dizaines d'actes correspondant aux multiples affaires financières de ce dernier, en se dessaisissant d'une somme acquise à un créancier hypothécaire dans le seul but de lui rendre service, en faisant l'avance de droits fiscaux sur les deniers de son office à son profit.

Me [X] a manqué à la probité exigée d'un notaire en couvrant les agissements de Me [HO] qui, grâce au montage de la SCI Jemara, s'est enrichi personnellement au détriment de ses associés.

Me [X] a manqué de loyauté envers l'Etat qui l'a nommé en fermant les yeux sur une fraude qu'il était en mesure de détecter et en couvrant du sceau de l'autorité publique un acte comportant une dissimulation et une fraude fiscale.

Ces agissements justifient une sanction d'interdiction temporaire pendant une durée de dix-huit mois.

Le tribunal a cru bon d'ajouter une mesure de suspension provisoire.

La mesure de suspension provisoire prévue à l'article 32 de l'ordonnance du 28 juin 1945 a pour objet de suspendre l'officier public ou ministériel pendant le temps de la poursuite pénale ou disciplinaire.

Cette mesure est sans objet en cette instance qui a trait au fond de la poursuite disciplinaire.

La décision disciplinaire étant exécutoire par provision, en vertu de l'article 18 du décret n°73-1202 du 28 décembre 1973, il était inutile de prononcer une suspension provisoire.

Le jugement sera confirmé sur la désignation de Me [XC] [B], notaire salarié de la Selarl Philippe CLERC en qualité d'administrateur provisoire de l'office pendant la période d'interdiction temporaire.

La procédure devant la cour d'appel est sans dépens.

PAR CES MOTIFS,

Statuant par arrêt contradictoire, prononcé en audience publique, après débats en chambre du conseil, en matière disciplinaire,

Vu l'ordonnance n° 45-1418 du 28 juin 1945 relative à discipline des notaires et de certains officiers ministériels,

Vu l'ordonnance n°45-2590 du 2 novembre 1945 relative au statut du notariat,

Vu le décret n°45-0117 du 19 décembre 1945 portant règlement d'administration publique pour l'application du statut du notariat,

Vu le règlement national des notaires,

Vu le décret n° 73-1202 du 28 décembre 1973 relatif à la discipline et au statut des officiers publics et ministériels,

Déclare recevable l'appel formé le 12 décembre 2013 par M.[EJ] [X] à l'encontre du jugement rendu le 3 décembre 2013 par le tribunal de grande instance de Grasse,

Infirme ce jugement et statuant à nouveau,

Dit Me [EJ] [X], notaire à la résidence de [Localité 4] (Alpes Maritimes) coupable de fautes disciplinaires commises entre 2001 et 2010 par manquements à la probité, manquements à la loyauté, non respect de règles professionnelles,

Prononce à son encontre une interdiction temporaire d'exercer pendant une durée de dix-huit mois,

Confirme le jugement en ce qu'il a désigné Me [XC] [B], notaire salarié de la Selarl Philippe CLERC en qualité d'administrateur provisoire de l'office pendant la période d'interdiction temporaire et mis à la charge de Me [EJ] [X] les dépens de première instance.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : 1re chambre b
Numéro d'arrêt : 13/23866
Date de la décision : 20/11/2014

Références :

Cour d'appel d'Aix-en-Provence 1B, arrêt n°13/23866 : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2014-11-20;13.23866 ?
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