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04/12/2014 | FRANCE | N°14/04802

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 3e chambre a, 04 décembre 2014, 14/04802


COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE

3e Chambre A



ARRÊT AU FOND

DU 04 DECEMBRE 2014



N° 2014/495













Rôle N° 14/04802







[Q] [F]





C/



Compagnied'Assurances SOGESSUR





















Grosse délivrée

le :

à :

Me Jean-Rémy DRUJON D'ASTROS

Me Pierre LIBERAS













Décision déférée à la Cou

r :



Jugement du Tribunal de Grande Instance d'Aix-en-Provence en date du 11 Décembre 2012 enregistré au répertoire général sous le n° 12/04046.





APPELANT



Monsieur [Q] [F]

né le [Date naissance 1] 1967 à [Localité 1], demeurant [Adresse 3]

représenté et plaidant par par Me Jean-Rémy DRUJON d'ASTROS, avocat au ba...

COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE

3e Chambre A

ARRÊT AU FOND

DU 04 DECEMBRE 2014

N° 2014/495

Rôle N° 14/04802

[Q] [F]

C/

Compagnied'Assurances SOGESSUR

Grosse délivrée

le :

à :

Me Jean-Rémy DRUJON D'ASTROS

Me Pierre LIBERAS

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Tribunal de Grande Instance d'Aix-en-Provence en date du 11 Décembre 2012 enregistré au répertoire général sous le n° 12/04046.

APPELANT

Monsieur [Q] [F]

né le [Date naissance 1] 1967 à [Localité 1], demeurant [Adresse 3]

représenté et plaidant par par Me Jean-Rémy DRUJON d'ASTROS, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE

INTIMEE

Compagnie d'Assurances SOGESSUR, demeurant [Adresse 1]

représentée Me Pierre LIBERAS, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE,

plaidant par Me Sandrine LEONCEL, avocat au barreau de MARSEILLE,

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

L'affaire a été débattue le 23 Octobre 2014 en audience publique. Conformément à l'article 785 du Code de Procédure Civile, Madame PLAKSINE, Conseiller a fait un rapport oral de l'affaire à l'audience avant les plaidoiries.

La Cour était composée de :

Madame Annie DABOSVILLE, Présidente

Madame Rose-Marie PLAKSINE, Conseiller

Monsieur Martin DELAGE, Conseiller

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Madame Jocelyne MOREL.

Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 04 Décembre 2014

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 04 Décembre 2014,

Signé par Madame Annie DABOSVILLE, Présidente et Madame Jocelyne MOREL, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

I. FAITS. PROCEDURE.

Monsieur [F] est propriétaire d'une maison située [Adresse 2]. Ses parents Monsieur et Madame [F], qui lui ont fait donation de cette maison le 9 décembre 2005, avaient souscrit une assurance multirisque habitation auprès de la SA Sogessur jusqu'au 13 décembre 2005. À compter du 13 décembre 2005, la maison a été assurée auprès de la MAIF.

Par arrêté du 7 août 2008, l'état de catastrophe naturelle a été reconnu sur la commune de [Localité 2], pour plusieurs périodes allant de 2004 à 2007, et notamment pour la période de janvier à mars 2004.

Monsieur [F] a par courrier du 26 août 2008, effectué auprès de la MAIF une déclaration de sinistre au titre de nombreuses fissures affectant sa maison depuis le premier trimestre 2004. Par courrier du 3 septembre 2008, Madame [D], compagne de Monsieur [F] a effectué une déclaration du même sinistre auprès de la SA Sogessur.

Le 18 septembre 2008, la SA Sogessur a désigné un expert. Suite au dépôt du rapport Saretec, elle a notifié à Madame [D], compagne de Monsieur [F] un refus de garantie le 6 mars 2009, les sécheresses de 2004 à 2007 n'étant selon elle pas la cause déterminante des fissures, celles-ci résultant des hétérogénéités de construction et du fait que les éléments de second oeuvre ne sont pas fondés.

Par courrier du 14 septembre 2009, la MAIF a adressé une copie du rapport de son expert le cabinet Elex et indiqué à Madame [D], compagne de Monsieur [F] que la sécheresse apparaisssait comme la cause déterminante des désordres, que ceux-ci étant apparus en 2004 et dans le courant de 2005, il appartenait à la SA Sogessur d'assumer les travaux de reprise en sous-'uvre, la MAIF prenant en charge les aggravations survenues en 2006 et 2007.

Par ordonnance du 14 décembre 2010, le juge des référés a ordonné une expertise. L'expert Madame [L] a établi son rapport le 29 mars 2012.

Par jugement du 11 décembre 2012, le tribunal de grande instance d'Aix-en-Provence a déclaré la demande de Monsieur [F] irrecevable pour cause de prescription.

Par déclaration du 7 janvier 2013, Monsieur [F] a interjeté appel de ce jugement (instance n°13.214).

Par déclaration du 16 avril 2013, Monsieur [F] a interjeté une nouvelle fois appel et a conclu le 4 juin 2013 (instance n° 13.7880).

Suite à la requête de la SA Sogessur, le conseiller de la mise en état a par ordonnance du 19 décembre 2013, rejeté la demande de jonction, prononcé la caducité de l'appel du 7 janvier 2013 et déclaré irrecevable pour défaut d'intérêt à agir la déclaration d'appel du 16 avril 2013. Par arrêt du 6 mars 2014, la cour d'appel a confirmé l'ordonnance déférée sur la constatation de la caducité d'appel du 7 janvier 2013 mais l'a infirmée pour le surplus, en rejetant la fin de non-recevoir d'irrecevabilité du second appel formé le 16 avril 2013.

Le dossier a été réenrôlé le 7 mars 2014.

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Vu les dernières conclusions de Monsieur [F] du 4 juin 2014,

Vu les dernières conclusions de la SA Sogessur du 30 septembre 2014,

II.DECISION.

- SUR LA PRESCRIPTION DE L'ACTION.

La SA Sogessur oppose à Monsieur [F] la prescription biennale édictée par les dispositions de l'article L 114.1 du code des assurances. Elle soutient que le point de départ du délai est la date de l'arrêté de catastrophe naturelle, soit le 7 août 2008, que la déclaration de sinistre date du 3 septembre 2008, que la désignation de l'expert effectuée le 18 septembre 2008 a fait courir un nouveau délai, et que l'assignation du 17 novembre 2010 est intervenue plus de deux ans après cette date.

Monsieur [F] conclut à l'inopposabilité du délai de prescription biennale, les conditions générales ne rappelant pas les causes ordinaires d'interruption de la prescription, et ne reproduisant pas intégralement le texte de l'article L 114.2 du code des assurances (la lettre de l'assuré interruptive de prescription devant porter sur le règlement de l'indemnité).

Les parties s'accordent sur le texte de la clause contenue dans les conditions générales et relative à la prescription ainsi libellée : «toute action concernant votre contrat ne peut s'exercer que pendant un délai de deux ans à compter de l'événement à l'origine de cette action. Toutefois, dans le cadre de la garantie «dommages corporels de l'assuré», ce délai est porté à 10 ans lorsque les bénéficiaires sont les ayants droits de l'assuré décédé. Ce délai est interrompu par une des causes ordinaires d'interruption de la prescription ainsi que par la désignation d'expert à la suite d'un sinistre, par l'envoi de l'un de nous d'une lettre recommandée avec accusé de réception, une citation en justice (même en référé), un commandement ou une saisie signifiée à celui que l'on veut empêcher de prescrire».

Monsieur [F] soutient à tort que les causes ordinaires de prescription ne sont pas précisées, alors que le texte ci-dessus mentionne la citation en justice (même en référé), le commandement ou la saisie signifiée à celui que l'on veut empêcher de prescrire.

Il est en revanche fondé à faire valoir que l'envoi d'une lettre recommandée avec accusé de réception sans préciser que la lettre de l'assureur à l'assuré concerne l'action en paiement de la prime et que la lettre de l'assuré à l'assureur concerne le règlement de l'indemnité, est une mention insuffisante. La SA Sogessur ne saurait opposer que l'application d'une jurisprudence de la Cour de cassation postérieure à la souscription du contrat, est injuste, alors que la présente cour fait application du droit à la présente espèce sans se référer à une quelconque décision de la Cour de cassation.

En conséquence, le moyen de prescription invoqué par la SA Sogessur doit être déclaré inopposable, et il convient d'infirmer le jugement sur ce point.

- SUR LE FOND.

1) Le principe de la garantie.

Selon la SA Sogessur, l'expert judiciaire n'a pas clairement établi le caractère déterminant du rôle causal de la sécheresse dans la survenance des fissures affectant la villa.

Il résulte des conclusions de l'expert judiciaire Madame [L] que :

'la villa de Monsieur [F] est affectée de nombreuses fissures affectant les murs maîtres nord (pour la plupart traversantes) ainsi que le dallage intérieur (affaissement du plancher, fissures du carrelage), toutes les cloisons, les plafonds, le sous-sol,

' la sécheresse est la cause déterminante des désordres sur les murs,

' la sécheresse est la cause des mouvements affectant les dallages et les cloisons dans le salon et la cuisine, mais n'en est pas la cause à l'arrière de la maison côté nord-ouest où la sécheresse n'a été qu'aggravante,

' les premiers désordres touchant la superstructure (dallage et murs) sont imputables à la période de sécheresse reconnue pour 2004, tandis que les premières fissures des cloisons sont imputables à la deuxième période de sécheresse exceptionnelle reconnue pour 2005 ; la multiplication des fissures sur les cloisons et la propagation au plafond entre novembre 2008 et septembre 2009 puis jusqu'en février 2011, sont des conséquences des fissures apparues antérieurement en 2004/2005 : les fissures se referment par appel au vide, ce qui a pour effet l'apparition de fissures en haut des cloisons alors qu'auparavant il y avait un jour en dessous,

' les causes structurelles (fissurations thermiques, charpente, extension du bâtiment, fuite de réseau) doivent être écartées.

Ces conclusions sont motivées et doivent être retenues. Elles permettent d'établir le caractère déterminant de la sécheresse sur les désordres affectant les murs, ainsi que les dallages et les cloisons dans le salon et la cuisine. Les pourcentages proposés par l'expert en page 29 (§ 9.12) tiennent compte de ces éléments et il y a lieu de retenir la garantie de la S.A Sogessur au titre de la catastrophe naturelle.

Par ailleurs, l'aggravation des désordres constatée après 2004/2005 n'enlève pas à la sécheresse son caractère déterminant.

2) Le montant de l'indemnisation.

a) Le coût des travaux de reprise.

La vétusté est mentionnée par les conditions générales produites aux débats, et la garantie catastrophe naturelle ne stipule pas une prise en charge en valeur «à neuf». Par suite, la SA Sogessur est fondée à opposer la vétusté au titre du second oeuvre extérieur. Ce poste devra être indemnisé par une somme non de 13'600 euros HT comme chiffrée au paragraphe 4 du tableau de la page 32 du rapport d'expertise mais à une somme de 10'000 euros HT, afin de retenir la vétusté telle que résultant de l'ensemble des documents versés aux débats.

En revanche, les travaux de démolition ne sauraient faire l'objet d'aucun coefficient de vétusté.

Et en ce qui concerne le second oeuvre intérieur, l'expert a précisé qu'il n'était pas possible de réparer la maison sans se préoccuper des dallages, que n'évaluant qu'à 40 % la prise en charge des travaux concernant le dallage et les cloisons, elle a proposé de prendre en charge des travaux établis sur une base technique fiable mais qui ne sont pas des travaux exhaustifs lesquels constitueraient une amélioration du bâti initial hors désordres dus à la sécheresse, la proposition permettant de réparer durablement l'ensemble des désordres mais de manière moins coûteuse en s'appuyant sur une méthode permettant de supporter quelques mouvements futurs du dallage (plancher et cloisons en bois). En considération de ces observations et du fait que le chiffrage tient compte d'une prise en charge réduite, cette réduction déjà opérée par l'expert doit être considérée comme incluant la vétusté contractuellement opposable par la SA Sogessur et tenant compte des pourcentages mentionnés en page 29 du rapport d'expertise.

En conséquence, il convient de condamner la SA Sogessur à payer à Monsieur [F] la somme de 142'900 - 13'600 + 10'000 = 139'300 euros HT outre la TVA en vigueur au jour de l'arrêt, la somme TTC devant être indexée sur l'indice BT 01 à cette date, l'indice de base étant celui du mois de mars 2012.

b) Le préjudice de jouissance et le coût du relogement.

Monsieur [F] a fait valoir à bon droit que les préjudices perdurent depuis de nombreuses années, et que la SA Sogessur a refusé d'intervenir de manière réitérée, faisant venir un expert dans un premier temps qui a interrompu ses vérifications, faisant venir un autre expert qui a procédé à des recherches inutiles concernant la charpente, et opposant de manière infondée la prescription biennale. Si la défenderesse n'est pas débitrice d'une garantie des dommages immatériels, en revanche elle est responsable de sa faute contractuelle consistant dans le refus infondé d'octroyer sa garantie des dommages matériels (article 1147 du code civil).

À ce titre, elle doit être condamnée à payer à Monsieur [F] les conséquences dommageables de cette inexécution, soit la somme de 3300 euros (relogement) et celle de 10'000 euros (préjudice de jouissance).

c) La demande de dommages-intérêts.

Monsieur [F] se trouve d'ores et déjà indemnisé de l'intégralité de son dommage par suite des dispositions ci-dessus. Sa demande de dommages-intérêts supplémentaires pour résistance abusive ne peut être que rejetée.

PAR CES MOTIFS

La Cour, statuant par arrêt contradictoire,

- INFIRME le jugement déféré dans toutes ses dispositions ;

- ET STATUANT à nouveau,

- DECLARE recevable l'action de Monsieur [F] ;

- DIT que la la S.A. Sogessur est tenue de garantir Monsieur [F] au titre de la catastrophe naturelle, ce pour les périodes de janvier à mars 2004 et de janvier à mars 2005 ;

- CONDAMNE la SA Sogessur à payer à Monsieur [F] les sommes de 139'300 euros HT outre la TVA en vigueur au jour de l'arrêt, la somme TTC devant être indexée sur l'indice BT 01 à cette date, l'indice de base étant celui du mois de mars 2012 (travaux de reprise) ;

- CONDAMNE la SA Sogessur à payer à Monsieur [F] les sommes de 3300 euros (relogement) et 10'000 euros (préjudice de jouissance) sur le fondement des dispositions de l'article 1147 du code civil ;

- REJETTE le surplus des demandes ;

- CONDAMNE la SA Sogessur à payer à Monsieur [F] la somme de 4000 euros au titre de l'article 700 du Code de Procédure Civile ;

- CONDAMNE la SA Sogessur aux dépens, avec application de l'article 699 du Code de Procédure Civile au bénéfice des avocats de la cause.

LA GREFFIERE LA PRESIDENTE

RMP


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : 3e chambre a
Numéro d'arrêt : 14/04802
Date de la décision : 04/12/2014

Références :

Cour d'appel d'Aix-en-Provence 3A, arrêt n°14/04802 : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2014-12-04;14.04802 ?
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