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13/05/2016 | FRANCE | N°13/21788

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 18e chambre, 13 mai 2016, 13/21788


COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE

18e Chambre



ARRÊT AU FOND

DU 13 MAI 2016



N° 2016/300













Rôle N° 13/21788





[T] [G]





C/



SAS ALCEM

























Grosse délivrée

le : 13/05/2016

à :



Me Hélène BAU, avocat au barreau de TOULON



Me Dominique IMBERT-REBOUL, avocat au barreau de TOULON



Copie cer

tifiée conforme délivrée aux parties le : 13/05/2016





Décision déférée à la Cour :



Jugement du Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de TOULON - section EN - en date du 20 Septembre 2013, enregistré au répertoire général sous le n° 12/429.







APPELANTE



Madame [T] [G], demeurant [Adresse...

COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE

18e Chambre

ARRÊT AU FOND

DU 13 MAI 2016

N° 2016/300

Rôle N° 13/21788

[T] [G]

C/

SAS ALCEM

Grosse délivrée

le : 13/05/2016

à :

Me Hélène BAU, avocat au barreau de TOULON

Me Dominique IMBERT-REBOUL, avocat au barreau de TOULON

Copie certifiée conforme délivrée aux parties le : 13/05/2016

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de TOULON - section EN - en date du 20 Septembre 2013, enregistré au répertoire général sous le n° 12/429.

APPELANTE

Madame [T] [G], demeurant [Adresse 1]

comparante en personne, assistée de Me Hélène BAU, avocat au barreau de TOULON, vestiaire : 0006

INTIMEE

SAS ALCEM, demeurant [Adresse 2]

représentée par Me Dominique IMBERT-REBOUL, avocat au barreau de TOULON substitué par Me Séverine CAUMON, avocat au barreau de TOULON

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

L'affaire a été débattue le 17 Mars 2016 en audience publique devant la Cour composée de :

Madame Chantal BARON, Présidente de chambre

Monsieur Jean-Bruno MASSARD, Conseiller

Monsieur Thierry CABALE, Conseiller qui en a rapporté

qui en ont délibéré

Greffier lors des débats : Mme Suzie BRETER.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 06 Mai 2016 puis prorogé au 13 mai 2016.

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 13 Mai 2016.

Signé par Madame Chantal BARON, Présidente de chambre et Mme Suzie BRETER, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Madame [T] [G] été embauchée à durée déterminée le 20 janvier 2010 en tant que responsable comptable par la Sas Bmti, devenue Alseamar, et la relation de travail s'est poursuivie à durée indéterminée par contrat du 30 juin 2010.

En arrêt de travail depuis le 20 janvier 2012, la salariée a été convoquée par lettre du 27 février 2012 à un entretien préalable qui a été suivi d'une lettre de licenciement pour faute grave du 28 mars 2012, dont l'avis de réception mentionne une présentation le 29 mars.

Par jugement du 20 septembre 2013, le conseil de prud'hommes de Toulon a condamné la «'Sas Bmti Alcem'» à payer à la salariée la somme de 2687,61 euros bruts à titre de dommages et intérêts pour défaut d'information sur la portabilité du régime de prévoyance, a débouté les parties de leurs autres demandes et a laissé à chaque partie la charge de ses propres dépens.

Le 04 novembre 2013, la salariée a relevé appel de ce jugement.

Aux termes de conclusions écrites reprises oralement à l'audience, l'employeur soulève in limine litis la nullité de l'acte d'appel du 31 octobre 2013, et la salariée, par des conclusions écrites reprises oralement à l'audience, réplique que la nullité pour vice de forme n'est pas encourue faute d'irrégularité et de grief.

Par des conclusions écrites reprises oralement à l'audience aux fins de réformation du jugement sauf sur le principe d'une condamnation au titre de la portabilité du régime de prévoyance, la salariée sollicite de la cour qu'elle dise que le licenciement est nul, qu'elle dise que son coefficient hiérarchique conventionnel doit être fixé à 920, qu'elle condamne l'employeur au paiement des sommes de 1080,70 euros bruts à titre de rappel de salaires, 60.000 euros nets à titre de dommages et intérêts pour licenciement nul, 13.583 euros nets à titre de dommages et intérêts pour licenciement vexatoire, 1989,27 euros nets à titre d'indemnité conventionnelle de licenciement, 13.583 euros bruts à titre d'indemnité de préavis, 1358,30 euros bruts à titre d'indemnité compensatrice de congés payés sur préavis, 13.853 euros nets à titre de dommages et intérêts pour défaut d'information sur les droits à repos compensateur obligatoire, 4600 euros nets à titre de dommages et intérêts pour absence d'information sur la portabilité du régime de prévoyance, qu'elle dise que les sommes porteront intérêts capitalisés au jour de la citation en justice, qu'elle ordonne la remise du certificat de travail, de bulletins de paye et de l'attestation Pôle Emploi conformes à l'arrêt sous astreinte de 100 euros par jour de retard à compter du 8ème jour de la notification, qu'elle se réserve le pouvoir de liquider l'astreinte, qu'elle déboute l'employeur de ses demandes et qu'elle le condamne au paiement d'une somme de 3000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.

Aux termes de conclusions écrites reprises oralement à l'audience, la Sas Alsealmar réclame la confirmation du jugement entrepris en ce qu'il a débouté la salariée de l'essentiel de ses demandes, et son infirmation en ce qu'il a fait droit à sa demande relative à la portabilité de la prévoyance et en ce qu'il l'a déboutée à sa propre demande de remboursement d'un trop-perçu d'indemnités journalières dont elle réclame le paiement à concurrence de la somme de 1489,68 euros. Elle sollicite également la condamnation de la salariée à lui payer la somme de 3000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens.

Elle soutient que le licenciement n'est pas nul et qu'il est bien fondé sur des fautes graves, et elle ne reconnaît devoir que la somme de 2687,61 euros au titre du repos compensateur obligatoire.

MOTIFS :

Sur l'exception de nullité':

In limine litis, il est soutenu qu'est nul, en application des dispositions des articles 933 et 58 du code de procédure civile, l'acte d'appel du 31 octobre 2013 à l'encontre du jugement du 20 septembre 2013 mentionnant en défense une Sas Bmti Alcem, en ce que la société intimée est la Sas Alcem, qui n'est que la société mère de la Sas Bmti, devenue Alseamar, seul employeur, quand la salariée fait valoir que la nullité pour vice de forme n'est pas encourue faute d'irrégularité et de grief à défaut de confusion sur la personne intimée par suite de la mention, dans la partie de l'acte d'appel intitulée «'nos références'», de la Sas Bmti et de l'indication du numéro de siret correspondant à cette société, à la suite d'un jugement mentionnant lui-même une «'Sas Bmti Alcem'».

En application, ensemble, des articles 58, 114 et 933 du code de procédure civile, les irrégularités de la déclaration d'appel qui affectent les mentions relatives à la dénomination et au siège social de la personne morale intimée, sont des vices de forme qui ne peuvent entraîner sa nullité qu'à la condition de justifier d'un grief.

En l'espèce, la nullité de l'acte d'appel pour vice de forme ne peut découler de la mention de la Sas Alcem comme étant la personne à convoquer, dès lors qu'il n'est pas justifié d'un grief en l'absence de confusion sur la partie intimée eu égard à la référence expresse à une «'Sas Bmti Alcem'», mentionnée en tant que seule partie en défense dans le jugement de première instance, alors que la société Alseamar, anciennement Bmti, qui n'a pas saisi la juridiction afin qu'elle rectifie les erreurs matérielles qui affectent la première page et le dispositif de son jugement quant à la dénomination de la défenderesse, a établi des conclusions écrites en tant que réelle intimée qu'elle a soutenu oralement à l'audience de la cour dont la saisine s'étend à la rectification de ces erreurs.

L'exception de nullité de l'acte d'appel sera donc rejetée.

Sur le rappel de salaires au titre du coefficient':

La salariée, engagée en tant que cadre au coefficient 900 de la convention collective nationale de la plasturgie, réclame des rappels de salaires de 67,33 euros pour janvier 2012, 67,33 euros pour février 2012 et 946,04 euros pour mars 2012, au titre d'un engagement non-tenu par son employeur lors de pourparlers sur une rupture conventionnelle et en application du coefficient 920 correspondant à la classification retenue par l'employeur dans une fiche descriptive de poste de 2006 et attribué au directeur administratif et financier recruté le 2 janvier 2012 pour la remplacer, quand l'employeur soutient que le coefficient 920 a été octroyé à son supérieur hiérarchique embauché pour pallier aux carences de la responsable comptable et pour renforcer le service.

La fiche de description d'emploi du 15 décembre 2006, qui assimile le poste de responsable comptable à celui de «'responsable comptable administratif et financier'» associé au coefficient 920, n'a aucun caractère contractuel et la salariée ne peut s'en prévaloir pour revendiquer ce coefficient.

La facture relative au recrutement du 2 janvier mentionnant une prestation pour le recrutement d'un «'responsable comptable'» a été établie par le prestataire, tiers au contrat, de sorte qu'il ne peut s'en déduire aucune présomption pour l'application du coefficient réclamé.

Il ne se déduit d'aucun élément versé aux débat l'existence d'un engagement clair, non-équivoque et non-conditionnel de l'employeur de reconnaître à sa salariée une augmentation de salaire en adéquation avec un coefficient supérieur au coefficient contractuel.

S'il n'est pas contestable que la salariée assurait la gestion administrative et des ressources humaines , ce qui avait fait l'objet d'une demande d'élévation de coefficient au cours d'un entretien individuel d'évaluation de décembre 2011, il n'est pas moins incontestable que Monsieur [C] a été recruté à une date où le contrat de travail de la salariée n'était pas suspendu, pour être son supérieur hiérarchique, afin de renforcer le service de comptabilité et la suppléer dans la gestion des tâches en matière administrative et de ressources humaines qu'elle reconnaissait elle-même, lors de son évaluation précédente, ne pouvoir accomplir qu'au prix d'une surcharge de travail et d'un «'dépassement permanent et significatif'» de ses horaires de travail, de sorte que c'est sans la moindre discrimination et sans méconnaître la classification conventionnelle que l'employeur a positionné Monsieur [C], affecté à un poste distinct de celui de la salariée avec des responsabilités hiérarchiques supplémentaires, critère classant spécifique, au coefficient 920 de la grille des cadres qui en compte cinq échelonnés de 900 à 940.

La salariée sera donc déboutée de sa demande de rappel de salaires.

Sur la rupture du contrat de travail':

1) La salariée conteste le licenciement, en application de l'article L 1232-6 du code du travail, faute d'énonciation, dans la lettre de licenciement, de griefs précis et datés, matériellement vérifiables, quand l'employeur se réfère à la lettre de licenciement pour articuler différents griefs relatifs à l'absence de maîtrise de notions fondamentales dans l'exercice de ses fonctions qui l'a contraint à engager un responsable administratif et financier, à des faits d'insubordination par suite du refus de travailler avec son supérieur hiérarchique, outre d'accusations graves proférées auprès d'un conseiller, fils du président de la société Alcen, sur la gestion du président de la société Bmti.

La lettre de licenciement contient effectivement l'énonciation suffisamment précise et explicite des trois types de motifs matériellement vérifiables invoqués par l'employeur, peu important l'absence de datation explicite, dès lors qu'il n'existe aucune équivoque sur ce point.

2) La salariée soutient que le licenciement serait nul en application de l'article L 1226-9 du code du travail en l'absence de preuve d'une faute grave, quand l'employeur fait valoir l'inapplication de cet article faute d'accident du travail le 20 janvier 2012 en raison d'un état de fatigue préexistant et d'un défaut de malaise, et indique prouver la réalité des griefs fondant le licenciement pour faute grave.

En vertu des dispositions de l'article L.1235-1 du code du travail, en cas de litige relatif au licenciement, le juge, à qui il appartient d'apprécier la régularité de la procédure et le caractère réel et sérieux des motifs invoqués par l'employeur, forme sa conviction au vu des éléments fournis par les parties.

La lettre de licenciement fixe les limites des débats et doivent être examinés tous les griefs qui y sont énoncés, lesquels doivent être suffisamment précis, objectifs et matériellement vérifiables.

La faute grave est celle qui résulte d'un fait ou d'un ensemble de faits imputables au salarié qui constituent une violation des obligations résultant du contrat de travail ou des relations de travail d'une importance telle qu'elle rend impossible le maintien du salarié dans l'entreprise y compris pendant la durée du préavis.

L'employeur qui invoque la faute grave doit en rapporter la preuve.

Il est reproché en premier lieu à la salariée de ne pas maîtriser des notions fondamentales en tant que responsable comptable avec pour seul élément précis la sous-estimation d'environ un tiers du chiffre d'affaires intermédiaire au 31 octobre 2011 en raison du calcul du chiffre d 'affaires réel alors que l'entreprise utilisait généralement la méthode comptable de l'avancement consistant, pour mieux refléter l'activité de chaque période, à calculer le chiffre d'affaires en fonction de l'avancement des contrats, quand la salarié soutient que ses compétences, son expérience et ses évaluations attestent de sa maîtrise des tâches comptables, sociales et fiscales relevant de sa fonction qui ne s'étendait pas, à la demande du dirigeant de la société, au calcul du chiffre d'affaires à l'avancement dont il se chargeait lui-même en tant que détenteur des informations nécessaires à l'établissement du pourcentage de l'avancement des travaux.

Ce grief, qui n'est pas établi en l'absence d'éléments précis permettant de confirmer que la salariée était dans l'incapacité d'utiliser la méthode, complexe, de calcul du chiffre d'affaires à l'avancement, est relatif exclusivement à une insuffisance professionnelle et ne peut constituer une faute grave à défaut de démonstration d'une mauvaise volonté délibérée de la salariée de ne pas appliquer la méthode de l'avancement.

En deuxième lieu, l'employeur reproche à la salariée son refus de communiquer, autrement que par courrier électronique, avec son supérieur hiérarchique arrivé en janvier 2012, ainsi qu'une rétention d'éléments comptables puis une absence totale de communication ayant placé celui-ci dans l'incapacité d'exercer sa fonction tel que confirmé par son attestation et son mail du 19 janvier 2012', quand la salariée soutient que ce grief n'est pas établi dès lors que ses mails démontreraient qu'elle n'aurait pas refusé de collaborer et de communiquer avec son supérieur hiérarchique, auquel elle ne pouvait transmettre sous cette forme des identifiants sans risque professionnel et qui aurait été recruté pour la remplacer.

Le motif du recrutement d'un responsable administratif et financier, qui relève du pouvoir de direction de l'employeur, est indifférent à l'appréciation de ce grief d'insubordination qui n'est pas caractérisé dès lors que n'est pas établi le refus de la salariée de se conformer aux consignes et directives de l'employeur et de collaborer et communiquer avec son supérieur hiérarchique durant quelques jours seulement au mois de janvier 2012, ce qui ne peut résulter du témoignage de ce dernier, très subjectif quant à l'interprétation du comportement de la salariée à son égard, évoquant «'des conversations stériles'», «' un processus de défiance'» et 'un refus de communication orale, dont les seuls éléments précis se rapportent à son mail du 19 janvier 2012 où il reprochait à la salariée de ne pas lui transmettre des informations et son manque de collaboration, alors qu'aux termes de mails du même jour, la salariée lui a effectivement communiqué les données et informations compatibles avec des échanges sous cette forme, tout en se disant disponible pour lui expliquer l'utilisation la procédure d'intégration des achats et la façon de générer les paiements fournisseurs sur le logiciel dédié.

En troisième lieu, il est reproché à la salariée d'avoir porté de graves accusations de falsification des chiffres d'exploitation et en particulier du chiffre d'affaires 2011 dans des proportions importantes, à l'encontre du dirigeant de la société, confirmées par Monsieur [L], conseiller et fils du président de la société mère, ainsi que par la directrice de la holding, quand la salariée ne conteste pas un contact téléphonique avec Monsieur [L], son ancien collaborateur, dont l'objet exclusif était son état de santé et son absence, sans la moindre évocation des comptes de la société, dénonçant la fragilité du témoignage de l'intéressé qui aurait eu besoin de l'appuyer par un témoignage indirect, et l'inanité de tels propos, non excessifs, non injurieux ou diffamatoires, relevant de sa liberté d'expression.

Toutefois, Monsieur [L] affirme clairement que la salariée l'a contacté «'à plusieurs reprises'» aux mois de janvier et février 2012 sur son téléphone portable pour, «'notamment'», lui faire part de ce «'qu'elle ' soupçonnait Monsieur [V] [R] d'avoir trafiqué le chiffre d'affaires 2011 de la société Bmti dans des proportions importantes'». Madame [O] confirme que Monsieur [L] lui a rapporté avoir été contacté à trois reprises par la salariée, en dernier lieu en février, et qu'il s'étonnait des accusations portées de trucage des chiffres d'exploitation et en particulier des chiffres d'affaires.

Si la salariée n'apporte aucun élément sérieux permettant de contredire le témoignage de son interlocuteur, exempt de toutes critiques objectives, la directrice juridique, qui en conforte la crédibilité, rappelle toutefois le contexte de cet entretien qui faisait suite à une mauvaise interprétation et à une incompréhension qui a amené la salariée à tenir des propos qui, s'ils sont objectivement susceptibles de nuire à Monsieur [R], fils du dirigeant de la société mère et, partant, à son employeur, ne sont pas pour autant de nature calmonieuse puisqu'ils n'étaient l'expression que d'un ressenti à un ancien proche collaborateur, comportement fautif par légèreté et imprudence de la responsable comptable qui ne rendait pas impossible son maintien dans l'entreprise et justifie ainsi son licenciement sans faute grave.

3) La salariée soutient que le licenciement serait nul pour être intervenu en période d'arrêt de travail par la faute de l'employeur et à la suite d' un accident de travail qu'elle n'a déclaré le 17 avril 2012 qu'en raison de la carence de son employeur qu'elle a sollicité le 2 avril et qui aurait dû procéder à cette déclaration dès le 20 janvier, date de son malaise survenu peu après son arrivée sur le lieu de travail à la suite du stress causé par le contexte professionnel, quand l'employeur fait valoir qu'au moment du licenciement, ni la salariée ni lui-même n'avaient considéré que le léger malaise du 20 janvier était un accident du travail, dès lors qu'il n'en avait pas les caractéristiques, s'agissant d'un malaise de fatigue tel que décrit par les collèges de la salariée qui l'ont raccompagnée, et que la première demande de déclaration de la salariée, par lettre du 2 avril, est postérieure au licenciement.

La salariée n'invoque pas explicitement la violation par l'employeur de son obligation de sécurité de résultat notamment en matière de harcèlement moral au visa des articles L 1152-1 et suivants du code du travail. En tout état de cause, en reprochant seulement à l'employeur d'être à l'origine de son malaise par le stress généré par le recrutement de Monsieur [C] et par des demandes de participation à des entretiens professionnels, elle n'établit pas la matérialité de faits précis et concordants permettant de présumer l'existence d'un harcèlement découlant de la preuve d'agissements ayant pour objet ou effet une dégradation des conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits ou à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel.

Elle ne justifie pas davantage de ce que l'employeur avait connaissance, en amont du licenciement, de faits qui auraient dû le conduire à déclarer un accident du travail, puisqu'il est incontestable que la salariée l'a informé la première fois de sa volonté de déclarer un accident du travail le 2 avril 2012, soit postérieurement au licenciement, que la déclaration a été établie le 17 avril par l'employeur qui refusait de considérer que les faits portés à sa connaissance relevaient d'un accident du travail, que la salariée elle-même n'avait pas estimé, avant le 2 avril, avoir été victime d'un accident du travail le 20 janvier tel que cela ressort du contenu des avis d'arrêt de travail, exempts de toute mention sur une origine professionnelle de la maladie, que le médecin du travail qu'elle a sollicité le 24 janvier n'y fait aucunement référence, que le médecin traitant n'a pas délivré d'arrêts de travail pour accident du travail et n'évoquait qu'un malaise de type «'lipothymie'», ainsi bénin et de courte durée, et enfin que deux employés, qui confirment que la salariée, très fatiguée, s'est seulement sentie mal peu après son arrivée sur le lieu de travail, livrent des témoignages en cohérence avec les déclarations de celle-ci dans sa lettre du 1er mars 2012, puisqu'elle y mentionne un simple «'début de malaise'» survenu dès l'entrée dans les locaux «'après un trajet difficile'» et qu'elle attribuait à un stress par «'peur'» de rencontrer son directeur.

Il en résulte que le licenciement n'est pas nul et repose sur une cause réelle et sérieuse, de sorte que les demandes indemnitaires au titre d'une rupture nulle ou abusive seront rejetées..

Sur les indemnités de rupture:

En vertu des dispositions de l'article L.1234-1 du code du travail, lorsque le licenciement n'est pas motivé par une faute grave, le salarié a droit à un préavis dont la durée est calculée en fonction de l'ancienneté de services continus dont il justifie chez le même employeur.

Selon l'article L.1234-5 du code du travail, lorsque le salarié n'exécute pas le préavis, il a droit, sauf s'il a commis une faute grave, à une indemnité compensatrice.

Dès lors que l'inexécution du préavis n'a pas pour cause la suspension du contrat de travail, sinon la décision de l'employeur de priver la salariée de préavis, et que celui-ci l'a licenciée à tort pour faute grave, l'indemnité compensatrice de préavis est due, peu important dans ce cas l'arrêt-maladie à l'instant du licenciement.

C'est à bon droit que l'employeur fait observer que le montant de l'indemnité compensatrice de préavis, d'une durée de trois mois, ne peut excéder la somme de 11.279,55 euros bruts au regard des bulletins de salaire versés aux débats. C'est cette somme qui sera donc allouée à la salariée.

Par application de l'article L.3141-3 du code du travail, le salarié qui justifie avoir travaillé chez le même employeur pendant un temps équivalent à un minimum de dix jours de travail effectif a droit à un congé de deux jours et demi ouvrables par mois de travail, la durée totale du congé exigible ne pouvant excéder trente jours ouvrables.

L'article L.3141-22 du code du travail édicte que le congé annuel prévu par l'article L.3141-3 du même code ouvre droit à une indemnité égale au dixième de la rémunération brute totale perçue par le salarié au cours de la période de référence, cette indemnité ne pouvant être inférieure au montant de la rémunération qui aurait été perçue pendant la période de congé si le salarié avait continué à travailler.

L'indemnité de congés payés prévue à l'article L.3141-22 du code du travail n'est due qu'au salarié qui prend ses congés, ou s'il ne les prend pas, qui a été empêché de les prendre du fait de l'employeur pour la période de référence considérée.

Il sera donc alloué à la salariée une somme de 1127,96 euros bruts au titre de l'indemnité de congés payés afférents au préavis.

En application de l'article L 1234-9 du code du travail, au regard d'un salaire brut mensuel moyen sur douze mois de 3977,41 euros, retenu à raison par l'employeur, et d'une ancienneté de 2 ans 2 mois et 11 jours invoquée par la salariée, il sera alloué à la salariée la somme de 1.747,51 euros à titre d'indemnité de licenciement.

Sur le licenciement vexatoire':

La salariée soutient qu'elle aurait été licenciée en période d'arrêt de travail pour maladie de manière abusive et vexatoire en représailles à son refus de valider une rupture conventionnelle sans apporter le moindre élément de preuve permettant d'en justifier, alors que le lien entre sa maladie et le licenciement n'est pas retenu et que les pressions de l'employeur pour obtenir une rupture conventionnelle ne sont pas davantage mises en évidence.

Sur l'absence d'information sur la portabilité du régime de prévoyance:

La salariée soutient que le seul défaut d'information incontesté sous quelque forme que ce soit suffit à caractériser le manquement de l'employeur et l'obligation de celui-ci de réparer le préjudice nécessaire qui en a découlé, quand l'employeur fait valoir qu'une responsable comptable ne pouvait ignorer cette portabilité et l'absence de preuve d'un préjudice.

En application de l'avenant n° 3 du 18 mai 2009 à l'accord national interprofessionnel du 11 janvier 2008 sur la modernisation du marché du travail et de l'article L. 932-6 du code de la sécurité sociale, l'employeur était tenu d'informer la salariée sur ses droits au maintien des couvertures complémentaires santé et prévoyance au moment de la rupture du contrat de travail.

Faute pour l'employeur de justifier du respect de cette obligation d'information sur la portabilité de l'assurance de prévoyance, il doit indemniser la salariée du préjudice qui en découle nécessairement, par l'allocation d'une somme de 500 euros à titre de dommages et intérêts.

Sur le non-respect des repos compensateurs:

La salariée se réfère aux dispositions des articles L 3121-11 et D 3171-11 du code du travail pour réclamer l'indemnisation du préjudice, non-limité à la somme de 2687,61 euros déterminée en fonction d'un protocole d'accord d'entreprise postérieur à la rupture du contrat de travail, découlant du non-respect de ses obligations en matière d'information et d'attribution de repos compensateurs par suite du dépassement du contingent annuel d'au moins 52 heures supplémentaires, alors que l'employeur ne reconnaît lui devoir que la somme de 2687,61 euros déterminée en exécution d'un protocole conclu avec les délégués du personnel le 18 juin 2012 à concurrence de 7,25 jours annuel de repos compensateurs.

En application de l'article D 3171-11 du code du travail, 'à défaut de précision conventionnelle contraire, les salariés sont informés du nombre d'heures de repos compensateur de remplacement et de contrepartie obligatoire en repos portés à leur crédit par un document annexé au bulletin de paie. Dès que ce nombre atteint sept heures, ce document comporte une mention notifiant l'ouverture du droit à repos et l'obligation de le prendre dans un délai maximum de deux mois après son ouverture'.

Le défaut d'information par l'employeur du droit au repos compensateur et la privation pour la salariée, du fait de son employeur, de l'exercice du droit au repos compensateur, entraîne l' indemnisation du préjudice subi. La salariée ne perd pas ce droit si elle n'en a pas réclamé le bénéfice en cours d'exécution du contrat conformément à l'article D 3121-14.

Dès lors qu'il est incontestable que la salariée n'a pas bénéficié de l'information sur ses droits et n'a pas été en mesure de les exercer par la faute de l'employeur, son préjudice qui en a nécessairement découlé doit être réparé par l'allocation d'une somme de 5.000 euro à titre de dommages et intérêts,

sans limitation de montant à proportion de la compensation négociée collectivement par les représentant du personnel postérieurement au licenciement.

Sur les intérêts':

Les intérêts au taux légal pour les créances de salaires courront à compter de la convocation de l'employeur devant le bureau de conciliation du conseil de prud'hommes avec capitalisation annuelle conformément aux dispositions de l'article 1154 du code civil.

Les sommes à caractère indemnitaire porteront intérêts à compter du présent arrêt.

Sur la remise des documents de rupture':

Compte tenu des développements qui précèdent, la demande tendant à la remise de bulletins de paye et de documents conformes à l'arrêt est fondée, et il y est fait droit dans les termes du dispositif, sans qu'il y ait lieu de se réserver le pouvoir de liquider l'astreinte.

Sur la demande reconventionnelle au titre du trop-perçu d'indemnités journalières':

L'employeur soutient avoir réglé à la salariée des indemnités journalières du 25 février au 31 mars 2012 tel qu'indiqué au bulletin de salaire et que celle-ci aurait reçu pour la même période des indemnités journalières de l'organisme social qui a interrompu le mécanisme de subrogation, alors que la salariée fait valoir que l'employeur a sollicité de la Cpam qu'elle cesse la subrogation le 31 mars et qu'il ressort de l'attestation de celle-ci qu'elle a pris en compte cette demande et a effectué des versements jusqu'au 18 mars.

La preuve du trop-perçu, qui incombe à l'employeur, ne ressort d'aucun élément versé aux débats dès lors qu'il ne peut se déduire des seules mentions d'un bulletin de salaire, en dehors de toute confirmation par la salariée ou par la Cpam, que des indemnités journalières auraient été réellement payées deux fois pour la période du 25 février au 31 mars 2012.

L'employeur sera donc débouté de sa demande.

Sur les frais irrépétibles :

L'équité commande de faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile au profit de la salariée, à laquelle sera allouée à ce titre la somme de 1.500 euros.

Sur les dépens:

L'employeur, partiellement succombant, sera condamné aux dépens de première instance et d'appel.

PAR CES MOTIFS:

La cour, statuant publiquement, contradictoirement, en matière prud'homale et par mise à disposition au greffe:

Réforme partiellement le jugement entrepris.

Statuant à nouveau sur le tout pour une meilleure compréhension et y ajoutant:

Rejette l'exception de nullité de l'acte d'appel.

Déboute Madame [T] [G] de sa demande de rappel de salaires au titre du coefficient.

Dit que le licenciement de Madame [T] [G] n'est pas nul et repose sur une cause réelle et sérieuse sans faute grave.

Condamne la Sas Alseamar à payer à Madame [T] [G] les sommes de :

- 11.279,55 euros bruts à titre d'indemnité compensatrice de préavis,

- 1.127,96 euros bruts au titre des congés payés subséquents,

- 1.747,51 euros à titre d'indemnité de licenciement,

- 500 euros à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice découlant du défaut d'information sur la portabilité du régime de prévoyance,

- 5.000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice découlant du non-respect par l'employeur de ses obligations en matière de repos compensateur,

- 1.500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.

Dit que les intérêts au taux légal pour les créances de salaires courront à compter de la convocation de l'employeur devant le bureau de conciliation du conseil de prud'hommes avec capitalisation annuelle conformément aux dispositions de l'article 1154 du code civil, et que les sommes à caractère indemnitaire porteront intérêts à compter du présent arrêt.

Condamne la Sas Alseamar à remettre à Madame [T] [G] des bulletins de salaire, un certificat de travail et une attestation destinée à Pôle Emploi conformes au présent arrêt, le tout, dans un délai de trois mois à compter de la notification de l'arrêt et sous astreinte de 50 euros par jour de retard passé ce délai, ce, pendant soixante jours.

Déboute les parties de leurs autres demandes.

Condamne la Sas Alseamar aux dépens de première instance et d'appel.

LE GREFFIERLA PRESIDENTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : 18e chambre
Numéro d'arrêt : 13/21788
Date de la décision : 13/05/2016

Références :

Cour d'appel d'Aix-en-Provence 18, arrêt n°13/21788 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2016-05-13;13.21788 ?
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