La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

31/05/2018 | FRANCE | N°16/04102

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 8e chambre c, 31 mai 2018, 16/04102


COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE


8e Chambre C





ARRÊT AU FOND


DU 31 MAI 2018





N° 2018/220




















Rôle N° N° RG 16/04102 - N° Portalis DBVB-V-B7A-6G6U











Béatrice X... épouse Y...








C/





CAISSE REGIONALE DE CREDIT AGRICOLE MUTUEL PROVENCE COTE


























>




Grosse délivrée


le :


à :





Z...


ERMENEUX




















Décision déférée à la Cour :





Jugement du Tribunal de Grande Instance de DRAGUIGNAN en date du 19 Janvier 2016 enregistré au répertoire général sous le n° 2016/34.








APPELANTE





Madame Béatrice X... épouse Y...


née le [...] , demeurant [...]


...

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

8e Chambre C

ARRÊT AU FOND

DU 31 MAI 2018

N° 2018/220

Rôle N° N° RG 16/04102 - N° Portalis DBVB-V-B7A-6G6U

Béatrice X... épouse Y...

C/

CAISSE REGIONALE DE CREDIT AGRICOLE MUTUEL PROVENCE COTE

Grosse délivrée

le :

à :

Z...

ERMENEUX

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Tribunal de Grande Instance de DRAGUIGNAN en date du 19 Janvier 2016 enregistré au répertoire général sous le n° 2016/34.

APPELANTE

Madame Béatrice X... épouse Y...

née le [...] , demeurant [...]

représentée par Me Sébastien BADIE de la SCP BADIE SIMON-THIBAUD JUSTON, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE

INTIMEE

Caisse régionale de Crédit Agricole Mutuel Provence Côte d'Azur venant aux droits de la Caisse régionale de Crédit Agricole Mutuel des Alpes Maritimes, du Var et des Alpes de Haute Provence prise en la personne de son représentant légal en exercice

dont le siège est [...]

représentée par Me Agnès ERMENEUX-CHAMPLY, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

L'affaire a été débattue le 10 Avril 2018 en audience publique devant la Cour composée de:

Monsieur Dominique PONSOT, Président

Madame Cathy CESARO-PAUTROT, Conseiller

Madame Isabelle DEMARBAIX, Vice-président placé auprès du Premier Président

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Madame Valérie VIOLET.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 31 Mai 2018

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 31 Mai 2018,

Signé par Monsieur Dominique PONSOT, Président et Madame Valérie VIOLET, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

Vu le jugement du tribunal de grande instance de Draguignan du 19 janvier 2016 ayant notamment:

- déclaré irrecevable l'action introduite par Mme Béatrice X... épouse Y...,

- condamné Mme Béatrice X... épouse Y... à verser à la Caisse régionale de Crédit Agricole Provence Côte d'Azur la somme de 1.500 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

- rejeté toute autre demande,

- condamner Mme Béatrice X... épouse Y... aux dépens, distraits au profit de MeLuc A..., avocat au barreau de Draguignan ;

Vu la déclaration du 7 mars 2016 par laquelle Mme Béatrice X... épouse Y... a relevé appel de cette décision ;

Vu les dernières conclusions notifiées le 6 mars 2018 aux termes desquelles MmeBéatrice X... épouse Y... demande à la cour de :

- infirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions,

- en conséquence, déclarer sa demande recevable et bien fondée,

- dire et constater que l'offre de prêt émise par le Crédit Agricole Mutuel Provence Côte d'Azur enfreint les dispositions légales,

- en conséquence, à titre principal, prononcer la nullité de la stipulation des intérêts conventionnels, et à titre subsidiaire, prononcer la déchéance du droit aux intérêts,

- condamner la Caisse Régionale de Crédit Agricole Mutuel Provence Côte d'Azur au remboursement de l'excédent d'intérêts perçus indûment, avec intérêts au taux légal à compter de l'assignation,

- fixer le taux applicable au contrat de prêt litigieux à hauteur du taux d'intérêt légal pour la période restant à courir à compter de l'arrêt à intervenir,

- condamner la Caisse Régionale de Crédit Agricole Mutuel Provence Côte d'Azur au paiement de la somme de 10.000 euros à titre de dommages et intérêts pour manquement à ses obligations d'information, de loyauté et d'honnêteté,

- condamner la Caisse Régionale de Crédit Agricole Mutuel Provence Côte d'Azur au paiement de la somme de 3.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner la Caisse Régionale de Crédit Agricole Mutuel Provence Côte d'Azur aux dépens;

Vu les dernières conclusions notifiées le 12 mars 2018 aux termes desquelles la Caisse régionale de Crédit Agricole mutuel Provence Côte d'Azur venant aux droits de la Caisse régionale de Crédit Agricole mutuel des Alpes-Maritimes, du Var et des Alpes de Haute-Provence, demande à la cour :

- à titre principal, et in limine litis, dire et juger que l'action en déchéance des intérêts conventionnels est irrecevable comme étant prescrite,

- confirmer le jugement entrepris sur ce point,

- à titre subsidiaire, relever que le bordereau de communication de pièces de la partie appelante comporte deux pièces : « offre de prêt » et « rapport de M. B... et annexes au rapport de M. B...'', à l'exclusion de toute autre document spécialement le courrier/pièce/rapport évoqué en page 2 de l'assignation, pièce qui sera, en tout état de cause, écartée des débats, à la supposer existante, à défaut d'avoir fait l`objet d'une communication spontanée,

- dire et juger que le taux effectif global mentionné dans l'offre de prêt du 16 novembre 2007 a été calculé en respectant les dispositions du code de la consommation,

- dire et juger, en tout état de cause, que Mme X... épouse Y... ne démontre pas l'existence d'un quelconque préjudice résultant d'une mention prétendument erronée du taux effectif global, et écarter toute sanction à son encontre,

- débouter Mme X... épouse Y... de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions,

- en tout état de cause, la condamner au paiement de la somme de 5.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux dépens de l'instance, distraits au profit de la SCP Ermeneux-Arnaud- Cauchi et associés ;

SUR CE, LA COUR,

Attendu que par acte sous seing privé du 16 novembre 2007, Mme Y... épouse X... a contracté auprès de la Caisse régionale du Crédit Agricole un prêt d'un montant de 250.000 euros, au taux de 4,6000 % l'an, remboursable en 360 mois, destiné au financement de l'acquisition d'un bien immobilier ;

Que se prévalant du caractère erroné du taux effectif global, Mme Y... épouse X... a, par acte d'huissier du 24 septembre 2014, fait assigner la banque devant le tribunal de grande instance de Draguignan aux fins d'obtenir, à titre principal, l'annulation de la stipulation d'intérêts conventionnels, et à titre subsidiaire, la déchéance du droit aux intérêts ;

Que par jugement du 19 janvier 2016, le tribunal a déclaré sa demande irrecevable comme étant prescrite ;

Sur la fin de non-recevoir tirée de la prescription de l'action

Attendu que Mme Y... épouse X... fait grief au premier juge d'avoir déclaré prescrite son action ; qu'elle fait valoir sa qualité d'emprunteur non averti et précise qu'elle n'a pu déceler les erreurs affectant le taux effectif global qu'aux termes d'une analyse juridique approfondie opérée par M. Gérard B..., expert-comptable mandaté par ses soins ;

Qu'au titre des irrégularités, elle relève, en premier lieu, qu'il est mentionné à la page 2 de l'offre de prêt un coût d'assurance décès obligatoire d'un montant de 27.825 euros, soit 77,29euros, alors qu'il est également noté un taux d'assurances de 0,42 % par an, soit un coût de 1.050 euros par an (250.000 euros x 0,0042) et de 87,50 euros par mois ;

Qu'en deuxième lieu, elle affirme que le taux de période n'est pas proportionnel au taux effectif global, après avoir constaté que l'offre de prêt fait référence à un taux de période de 0,4399 % et à un taux effectif global de 5,2785 % alors que le taux de période multiplié par 12 donne un taux effectif global égal à 5,2788 % ;

Qu'en troisième lieu, elle prétend que n'ont pas été intégrés au calcul du taux effectif global les frais notariés et d'inscription d'une hypothèque conventionnelle de premier rang ainsi que le coût réel de l'assurance décès invalidité ;

Que la Caisse régionale de Crédit Agricole conclut à l'irrecevabilité de la demande comme étant prescrite, soutenant que les irrégularités alléguées, à les supposer établies, étaient décelables à la simple lecture de l'offre de prêt; qu'elle estime que l'analyse rédigée par M. B... ne peut valoir que comme simple indice et qu'elle ne saurait constituer un élément de preuve suffisant en l'absence d'autres éléments ;

Mais attendu qu'il résulte de l'article 1304 du code civil, dans sa rédaction antérieure à

celle issue de l'ordonnance n°2016-131 du 10 février 2016, et l'article 1907 du même code, ensemble l'article L. 313-2 du code de la consommation, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n°2016-301 du 25 mars 2016, et de l'article 2224 du code civil que le point de départ de la prescription quinquennale de l'action en nullité de la stipulation de l'intérêt conventionnel formée en raison d'une erreur affectant le taux effectif global court, s'agissant d'un crédit accordé à un consommateur ou à un non professionnel, à compter du jour où l'emprunteur a connu ou aurait dû connaître l'erreur affectant ledit taux, soit à la date de la convention si l'examen de sa teneur permet constater l'erreur, soit, lorsque tel n'est pas le cas, à la date de la révélation de celle-ci ;

Que dans le cas présent, les conditions financières et particulières de l'offre de prêt du 16 novembre 2007 sont les suivantes :

- montant : 250.000 euros,

- durée : 360 mois,

- taux d'intérêt annuel : 4,6000 % l'an,

- taux effectif global : 5,2785 % l'an,

- taux de période : 0,45 % par mois (périodicité mensuelle de 0,4399 %),

- taux effectif global tenant compte de l'anticipation maximum : 5,2373 % l'an,

- coût total du crédit est évalué à 242.891,92 euros ;

Qu'il est prévu aux conditions particulières du contrat au paragraphe «coût total du crédit» (page 2) :

- montant des intérêts : 211.380,25 euros,

- montant de l'ADI (assurance décès invalidité) : 27.825 euros,

- frais fiscaux évalués à : 0 euro,

- frais de dossier évalués à : 0 euro ;

Qu'il suffisait ainsi à Mme X... épouse Y... de se reporter à l'offre de prêt pour constater que les frais notariés et spécialement ceux liés à l'inscription d'une hypothèque conventionnelle de premier rang n'étaient pas mentionnés alors que le recours à une telle garantie était expressément indiqué en page 2 du contrat ;

Qu'il en est de même en ce qui concerne d'une part, l'absence de rapport proportionnel entre le taux effectif global annuel et le taux effectif global par période, et d'autre part, le défaut de concordance entre les stipulations contractuelles relatives au coût de l'assurance ;

Qu'en effet, Mme X... épouse Y... était en mesure, par une simple opération de multiplication par douze, de se rendre compte que le taux de période mensuelle de 0,4399 % ne permettait pas d'obtenir un taux effectif global de 5,2785 % puisque comme elle l'écrit dans ses conclusions : 0,4399 % x 12 = 5,2788 %, et non 5,2785 % comme mentionné dans l'offre ;

Qu'en outre, elle était en mesure, par une simple opération de multiplication du montant du capital emprunté par le taux d'assurance de 0,42 % indiqué dans l'offre, de constater que le montant de la prime mensuelle d'assurance était de 87,50euros (250.000 euros x 0,0042 = 1.050euros par an), et non de 77,29 euros par mois, comme noté en page 2 de l'offre de prêt, et correspondant à l'opération qu'elle effectue elle-même dans ses écritures, à savoir : 27.825euros/360 mois) ;

Que contrairement aux affirmations de Mme X... épouse Y..., ces deux opérations, relevant d'une arithmétique sommaire, ne nécessitaient pas de compétence particulière et que la simple lecture de l'offre permettait à un emprunteur, normalement diligent, de déceler la discordance entre le taux de période mensuel et le taux effectif global, sans avoir recours à un spécialiste du droit ou de la comptabilité ;

Que les irrégularités alléguées, à les supposer établies, étant décelables à la simple lecture de l'acte de prêt, c'est donc par des motifs pertinents, que la cour adopte, que le premier juge a fixé le point de départ du délai de prescription au 16 novembre 2017, date de la signature de l'offre et déclaré l'action exercée par Mme X... épouse Y... le 24 septembre 2014 se heurtait à la prescription ;

Que le jugement sera confirmé de ce chef et Mme X... épouse Y... déboutée de ses demandes ;

Sur les dépens et les frais irrépétibles

Attendu que Mme X... épouse Y..., qui succombe dans ses prétentions, doit supporter les dépens de la procédure d'appel ;

Attendu que l'équité justifie d'allouer en cause d'appel à la Caisse régionale de Crédit Agricole une indemnité au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

PAR CES MOTIFS

Statuant publiquement et contradictoirement,

CONFIRME le jugement entrepris en toutes ses dispositions,

Y ajoutant,

CONDAMNE Mme Béatrice X... épouse Y... à payer à la Caisse régionale de Crédit Agricole mutuel Provence Côte d'Azur venant aux droits de la Caisse régionale de Crédit Agricole mutuel des Alpes-Maritimes, du Var et des Alpes de Haute-Provence, la somme de 2.500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile;

REJETTE toute autre demande des parties,

CONDAMNE Mme Béatrice X... épouse Y... aux dépens d'appel, qui pourront être recouvrés conformément à l'article 699 du code de procédure civile;

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : 8e chambre c
Numéro d'arrêt : 16/04102
Date de la décision : 31/05/2018

Références :

Cour d'appel d'Aix-en-Provence 8C, arrêt n°16/04102 : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2018-05-31;16.04102 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award