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31/05/2018 | FRANCE | N°16/21370

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 4e chambre a, 31 mai 2018, 16/21370


COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE


4e Chambre A





ARRÊT AU FOND


DU 31 MAI 2018


lb


N° 2018/ 460




















Rôle N° RG 16/21370





N° Portalis DBVB-V-B7A-7UH4











Claude X... épouse Y...


Marie Y...


Cécilia Y...








C/





Philippe Z...


S... Z... épouse Z...


SCI ESCAPE







r>























Grosse délivrée


le :


à :





SCP MAGNAN PAUL MAGNAN JOSEPH





SELARL VINCENT-HAURET-MEDINA





la SELARL MATHIEU-DABOT-BONFILS




















Décision déférée à la Cour :





Sur saisine de la Cour suite à l'arrêt rendu par la Cour de Cassation en date du 17 Novembre 2016 enregistré au répe...

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

4e Chambre A

ARRÊT AU FOND

DU 31 MAI 2018

lb

N° 2018/ 460

Rôle N° RG 16/21370

N° Portalis DBVB-V-B7A-7UH4

Claude X... épouse Y...

Marie Y...

Cécilia Y...

C/

Philippe Z...

S... Z... épouse Z...

SCI ESCAPE

Grosse délivrée

le :

à :

SCP MAGNAN PAUL MAGNAN JOSEPH

SELARL VINCENT-HAURET-MEDINA

la SELARL MATHIEU-DABOT-BONFILS

Décision déférée à la Cour :

Sur saisine de la Cour suite à l'arrêt rendu par la Cour de Cassation en date du 17 Novembre 2016 enregistré au répertoire général sous le n° N15-23.140, qui a cassé et annulé l'arrêt n°220 rendu le 21 Mai 2015 par la 4ème Chambre A de la Cour d'Appel D'AIX EN PROVENCE, enregistré au répertoire général sous le n° 14/11577, sur appel d'un jugement du Tribunal de Grande Instance de GRASSE du 3 juin 2014, enregistré au répertoire général sous le n° 14/01212 .

APPELANTES

Madame Claude X... épouse Y... prise en sa qualité d'héritière de Monsieur Jean-Louis Y..., décédé le [...]

demeurant [...]

représentée par Me JOSEPH D... de la SCP MAGNAN PAUL MAGNAN JOSEPH, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE, assistée de Me Jean-Louis E..., avocat au barreau de NICE , plaidant

Madame Marie Y... prise en sa qualité d'héritière de Monsieur Jean-Louis Y..., décédé le [...]

demeurant [...]

représentée par Me JOSEPH D... de la SCP MAGNAN PAUL MAGNAN JOSEPH, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE, assistée de Me Jean-Louis E..., avocat au barreau de NICE , plaidant

Madame Cécilia Y... prise en sa qualité d'héritière de Monsieur Jean-Louis Y..., décédé le [...]

demeurant [...]

représentée par Me JOSEPH D... de la SCP MAGNAN PAUL MAGNAN JOSEPH, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE, assistée de Me Jean-Louis E..., avocat au barreau de NICE , plaidant

INTIMES

Monsieur Philippe Z...

demeurant [...]

représenté par Me Nathalie F... de la SELARL VINCENT-HAURET-MEDINA , avocat au barreau de NICE, plaidant

Madame S... G... épouse Z...

demeurant [...]

représentée par Me Nathalie F... de la SELARL VINCENT-HAURET-MEDINA , avocat au barreau de NICE, plaidant

SCI ESCAPE,

dont le siège social est [...]

représentée par la SELARL MATHIEU-DABOT-BONFILS , avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE, plaidant

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

L'affaire a été débattue le 20 Mars 2018 en audience publique. Conformément à l'article 785 du code de procédure civile, Monsieur Luc BRIAND, a fait un rapport oral de l'affaire à l'audience avant les plaidoiries.

La Cour était composée de:

Monsieur Jean-Luc PROUZAT, Président de chambre

Madame Bernadette MALGRAS, Conseiller

Monsieur Luc BRIAND, Conseiller

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Madame Danielle PANDOLFI.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 31 Mai 2018

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 31 Mai 2018,

Signé par Monsieur Jean-Luc PROUZAT, Président de chambre et Madame Danielle PANDOLFI, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

FAITS et PROCEDURE - MOYENS et PRETENTIONS DES PARTIES :

Par acte notarié dressé par Me Bernard T... , notaire, M. Philippe Z... et Mme S... G... épouse Z... ont acquis de Mme Brigitte I... un bien immobilier situé [...] , cadastré section [...] et [...].

Leur fonds est mitoyen de celui appartenant à M. Jean-Louis Y..., cadastré section [...] , surplombant cette dernière parcelle.

L'accès aux deux propriétés depuis la voie publique, [...], se fait depuis un même chemin situé sur le fonds Y....

Ces deux propriétés sont issues d'une plus grande parcelle, appartenant initialement à M. U... , lequel l'a divisée en trois parcelles :

- les parcelles cadastrées [...] et [...] appartenant successivement à M. J...,Mme I... puis aux époux Z...,

- la parcelle cadastrée [...] appartenant à M. Y...,

- la parcelle cadastrée [...] , [...] et [...] appartenant successivement à Mme K..., à la SCI Gabian (M. L...) et la SCI Escape.

Invoquant l'existence d'une servitude de passage d'une largeur de trois mètres située en limite Ouest de la propriété de M. Y... permettant l'accès à la voie publique et celui-ci s'étant opposé à tout passage, les époux Z... ont mis en oeuvre une première procédure judiciaire les opposant à M. Y....

Par arrêt définitif du 19 décembre 2013, la cour d'appel d'Aix en Provence a dit que la parcelle cadastrée section [...] appartenant à M. Y... n'était grevée que d'une servitude de passage à pied au profit des parcelles [...] et [...] appartenant aujourd'hui aux époux Z... et a déclaré ces derniers irrecevables en leur demande de désenclavement, faute pour eux d'avoir attrait à la procédure l'ensemble des propriétaires des parcelles issues de la division du fonds d'origine ayant appartenu à M. U... .

Faisant valoir qu'à compter du 31 janvier 2014, ils ne pouvaient plus accéder à leur propriété qu'à pied et n'avaient dès lors plus un accès suffisant à la voie publique, les époux Z... ont assigné M. Y... et la SCI Escape en désenclavement.

Par jugement du 3 juin 2014, le tribunal de grande instance de Grasse a :

- constaté que le fonds des époux Z... est enclavé,

- dit et jugé que le fonds des époux Z... (parcelles [...] et [...]) bénéficiera sur le fonds appartenant à M. Y... (parcelle [...] ) d'une servitude de passage à pied ainsi qu'au moyen de tout véhicule sur un chemin d'une largeur de trois mètres longeant la propriété de M. Y... en sa limite Ouest,

- dit et jugé que, à titre d'accessoire à la servitude de passage ci-dessus, le fonds de M. Y... (parcelle [...] ) sera grevé d'une servitude de passage, d'une largeur de trois mètres, permettant l'accès en voiture à l'aire de stationnement faisant l'objet d'une servitude grevant le fonds de la SCI Escape au profit du fonds des époux Z...,

- ordonné à M. Y... de remettre aux époux Z... le code d'accès du portail et deux télécommandes à distance du portail.

Sur appel de M. Y..., la cour d'appel d'Aix-en-Provence a, par arrêt du 21 mai 2015, infirmé le jugement en toutes ses dispositions et, statuant à nouveau, rejeté la demande de désenclavement des époux Z... par le fonds de M. Y....

La cour a retenu que s'il était établi que le fonds de M. et Mme Z... était uniquement desservi par une servitude de passage à pied sur la parcelle [...] , l'auteur de ceux-ci s'était volontairement enclavé en renonçant à une servitude de passage consentie le 25 septembre 2001 sur les parcelles [...] , [...] et [...] et qu'ils ne pouvaient, dès lors, revendiquer un droit de passage en voiture sur la parcelle [...] .

Sur pourvoi des époux Z..., la Cour de cassation a, par arrêt du 17 novembre 2016, cassé et annulé cet arrêt, au motif qu'en omettant de répondre aux conclusions de M. et Mme Z... qui faisaient valoir que la servitude conventionnelle du 25 septembre 2001 ne permettait pas un passage suffisant pour assurer la desserte complète de leur fonds, la cour d'appel n'avait pas satisfait aux exigences de l'article 455 du code de procédure civile.

M. Jean-Louis Y... étant décédé le [...] , Mme Claude X... épouse Y..., Mme Marie Y... et Mme Cécilia Y..., en leurs qualités d'héritières, ont saisi la cour le 29 novembre 2016.

Dans leurs dernières conclusions déposées par RPVA le 16 janvier 2018, les consorts Y... demandent à la cour, au visa, de l'arrêt définitif de la cour d'appel d'Aix-en-Provence du 19 décembre 2013 et des articles 682 et 684 du code civil, réformant dans toutes ses dispositions le jugement du tribunal de grande instance de Grasse du 3 juin 2014, de :

-dire et juger irrecevable et infondée l'action en désenclavement des époux Z... dirigée contre les héritiers Y..., et les en débouter,

-subsidiairement, ordonner une expertise, cette fois au contradictoire de tous les propriétaires voisins du fonds Z... afin de déterminer le passage le moins dommageable, tout en chiffrant ses conséquences en matière indemnitaire pour pallier les préjudices de toutes natures causés par ledit passage,

-encore plus subsidiairement, si la solution à travers la propriété Y... était adoptée, désigner tel expert qu'il plaira à la Cour afin de déterminer et de chiffrer les préjudices de toute nature que cette servitude causera à la propriété Y..., notamment en ce qui concerne sa valeur vénale nécessairement diminuée, les préjudices de jouissance et d'agrément consécutifs au passage de tiers en voiture sur la propriété, ainsi que la participation des demandeurs au coût des travaux d'accès réalisés par M. Y... et, dès lors, au visa de ces préjudices:

-condamner provisionnellement les intimés au paiement d'une somme de 100 000 euros à valoir sur l'indemnisation de leurs préjudices,

-en tout état de cause, condamner les époux Z... à leur rembourser le coût des travaux réalisés par M. Y... en exécution des décisions intervenues à son encontre à l'initiative de Mme I..., dans le cadre de la procédure au possessoire, initiative dont les conséquences ont été acceptées et reprises intégralement par les époux Z... qui sont devenus de ce chef les seuls débiteurs du remboursement de la somme de 4 903,60 euros,

-condamner les époux Z... au paiement d'une somme de 10 000 euros au visa de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens de première instance et d'appel, distraits au profit de la SCP Magnan , avocat.

A l'appui de leurs demandes, elles soutiennent que:

- la situation d'enclave du fonds Z... résulte d'un partage volontaire du fonds initial par l'auteur commun Mr U... , ce dernier, auteur de ce partage, ayant expressément prévu le désenclavement du fonds J... aujourd'hui Z... par une servitude de passage sur sa propre propriété,

-le bénéficiaire de ladite servitude de passage, M. J..., auteur de Z..., s'est enclavé volontairement en revendant cette servitude à celle qui la lui avait consentie conformément aux dispositions testamentaires de M. U... ,

-il n'y a, de ce fait, aucune enclave, ni au sens de l'article 684 du code civil, ni au sens de 1'article 682 du même code, le passage ayant été initialement et expressément déterminé et défini par l'auteur du partage, dont la volonté s'impose à tous, y compris au juge, dès lors que rien n'empêchait la réalisation de cet accès conventionnellement défini pour assurer la desserte de la propriété des demandeurs Z... dans les conditions voulues et déterminées par M. U... , à travers sa propre propriété, constituant l'un des trois fonds issus du partage,

-aucune cause technique ne s'opposant à cette création, seule la volonté de l'un des copartageants renonçant au bénéfice de sa servitude étant à l'origine de cette situation qui ne saurait être opposée aux héritières Y..., l'article 682 du code civil est inapplicable,

-les demandeurs Z... avaient connaissance, dès l'acquisition de leur propriété auprès de Mme I..., de la procédure initiée par M. Y... pour contester le passage en voiture revendiqué par celle-ci sur son fonds et pour faire reconnaitre les limites de la servitude existant sur sa propriété,

-les époux Z... ont expressément renoncé à tous recours de ce chef contre leur venderesse I... dont ils ont repris les droits,

-rien ne s'opposait à la réalisation du passage tel qu'il avait été prévu par M. U... au travers de sa propre propriété, devenue propriété Escape, la desserte de la propriété Z... se faisant par l'accès au parking et ensuite par l'uti1isation de la servitude à pied sur la propriété Y...,

Dans leurs dernières conclusions déposées par RPVA le 5 mars 2018, les consorts Z... demandent à la cour de:

-dire et juger mal fondé l'appel formé à l'encontre du jugement du tribunal de grande instance de Grasse du 3 juin 2014.

-débouter les consorts Y... de l'ensemble de leurs demandes, fins et conclusions,

-confirmer en toutes ses dispositions le jugement du tribunal de grande instance,

Y ajoutant,

-condamner in solidum les consorts Y... au paiement d'une somme de 15 000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

Subsidiairement,

-désigner tel expert qu'il plaira à la Cour, avec mission habituelle en pareille matière sur le fondement des articles 682 et suivants du code civil,

-dire et juger que l'expert désigné se verra également confier pour mission de fournir à la cour tous éléments lui permettant d'apprécier, dans le fil de l'arrêt rendu par la Cour de cassation, le caractère suffisant ou non d'un éventuel passage sur la propriété de la SCI Escape pour la desserte du fonds Z...,

-condamner in solidum les consorts Y..., sous astreinte de 500 euros par jour de retard,la dite astreinte commençant à courir 15 jours à compter de la signification de l'arrêt à intervenir, à supprimer le muret par eux édifié suite à l'arrêt de la cour d'appel d'Aix-en-Provence du 19 décembre 2013 et à procéder à la remise de l'assiette de la servitude en l'état antérieur aux travaux de décaissement effectués suite à cet arrêt,

-condamner les consorts Y... aux entiers dépens, tant de première instance que d'appel, ces derniers étant distraits au profit de la SELARL VINCENT-HAURET-MEDINA .

Par conclusions du 12 mars 2018, les consorts Y... ont demandé le rejet de ces conclusions signifiées le 5 mars 2018 ainsi que des douze pièces communiquées le même jour.

Par conclusions déposées par RPVA le 5 avril 2017, la SCI Escape demande à la courdeconfirmer le jugement déféré et, à défaut:

-constater qu'aucune servitude de passage ne peut être prise sur les parcelles [...], [...] et [...] au profit des parcelles [...] et [...] en l'état de l'accord des auteurs des actuels propriétaires de ces fonds,

-constater, au surplus, que l'établissement d'un accès à la parcelle n°13 est en pratique difficile en ce qu'il nécessite d'importants travaux de déboisement et de terrassement,

-constater que l'accès à la voie publique depuis la parcelle [...] est malaisé, qu'il convient de ne pas en augmenter le trafic,

-constater que le passage depuis la parcelle [...] est le plus court et le moins dommageable,

-statuer ce que de droit sur la demande d'établissement d'une servitude judiciaire grevant la parcelle [...] au profit des parcelles [...] et [...],

-rejeter toute demande, fin et conclusion contraire,

En tout état de cause:

-condamner M. Y... à lui payer une somme de 5000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

-condamner tout succombant aux dépens, dont distraction au profit de Me Gilles N..., avocat, sur son affirmation.

A l'appui de ses demandes, elle soutient pour l'essentiel que:

-le fonds Z... est enclavé du point de vue d'un passage en véhicule du fait de la disparition des servitudes de passage sur les fonds 13, 14 et 310 et la fin de la tolérance accordée par M. Y... pour le passage des véhicules sur son fonds

-une servitude ne peut prendre place que sur le fonds Y..., le seul physiquement possible, à plus forte raison le plus court et le moins dommageable.

Il est renvoyé, pour l'exposé complet des moyens et prétentions des parties, aux conclusions susvisées, conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile.

C'est en l'état que l'instruction a été close, par ordonnance du 6 mars 2018.

SUR CE:

Sur le rejet des conclusions des époux Z...:

Le simple fait, pour les époux Z..., de déposer le 5 mars 2018, soit la veille du prononcé de l'ordonnance de clôture, de nouvelles conclusions et pièces, mettant ainsi les autres parties dans l'impossibilité d'en prendre connaissance et, éventuellement, d'y répondre avant la clôture de l'instruction, caractérise une violation du principe du contradictoire et du droit au procès équitable, énoncés aux articles 16 du code de procédure civile et 6 § 1 de la convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; il y a donc lieu de déclarer irrecevables les conclusions de ces intimés, déposées le 5 mars 2018, ainsi que les nouvelles pièces communiquées (numérotées 59 à 70).

1. Sur la demande de désenclavement:

1.1 Sur l'état d'enclave et l'origine de celle-ci :

En l'espèce, il résulte des pièces produites aux débats que par acte du 25 septembre 2001 publié au service chargé de la publicité foncière le 8 octobre 2001, une servitude de passage a été constituée par Mme Liliane K..., héritière de M. Gaston U... suivant sa volonté testamentaire, grevant les parcelles cadastrées section [...] , [...] et [...] au profit de la propriété cadastrée section [...], numéros [...] et [...] appartenant à Hervé J... , rédigée en ces termes :

« a) une servitude de passage longeant en grande partie les limites EST et SUD de sa propriété telle que cette servitude figure sous liseré mauve et teinte violette en un plan dressé à l'échelle de 1/200ème par le cabinet ARPENTEURS GEOMETRES sis à [...] [...] et dont un exemplaire revêtu d'une mention manuscrite de Monsieur U... et de la signature de ce dernier en date du 2 novembre 2000 et demeuré annexé...

b) une servitude de passage longeant la limite OUEST de sa propriété telle que cette servitude figure sous hachures mauves et teinte verte au plan ci-après annexé.

c) une servitude de stationnement pour véhicule automobile en limite OUEST de sa propriété, telle que cette servitude de stationnement et son extension figure sous liseré mauve, hachures mauves et teinte verte audit plan ci-après annexe ».

En outre, par acte sous seings privés du 13 décembre 2003 passé entre Hervé J... et la SCI [...], alors propriétaire du fonds cadastré section [...] , [...] et [...], M. J... a renoncé, moyennant le paiement de la somme de 10 000 euros, au bénéfice de la servitude de passage consentie le 25 septembre 2001, en conservant le bénéfice de la servitude de stationnement.

Par ailleurs, M. J... a fait publier l'acte sous seing privé du 13 janvier 1998 par lequel lui-même et M. Jean-Louis Y... étaient convenus d'une servitude de passage de trois mètres de large environ utilisable à pied ou en voiture en limite ouest du fonds Y..., pour desservir le fonds J... .

Par l'arrêt définitif du 19 décembre 2013, il a été définitivement jugé que la seule servitude de passage valablement créée sur le fonds n°319 était celle résultant de l'acte notarié de vente «de U...-Y...» en date du 13 février 1998 qui limitait la servitude à un passage à pied, et qu'elle devait prévaloir sur l'accord passé le 13 janvier 1998.

Toutefois, à la date du 13 janvier 1998, M. Hervé J... était seulement nu-propriétaire des parcelles [...] et [...], n'en ayant reçu l'usufruit que par l'acte de donation du 2 mars 1999. En outre, il était présent et signataire à l'acte notarié de vente du 13 février 1998 où seule une servitude de passage à pied a été constituée.

Pour prétendre que M. J... ne s'est pas volontairement enclavé en renonçant le 13 décembre 2003 à la servitude de passage en voiture consentie le 25 septembre 2001 sur le fonds 13, 14 et 310, les époux Z... soutiennent qu'il bénéficiait alors d'une tolérance de passage en voiture sur le fonds Y....

Ils produisent en ce sens plusieurs attestations, régulières en la forme. Ainsi M. Hervé J... témoigne que « Monsieur Y... ne s'est jamais opposé à l'exercice de la servitude de passage qu'il m'a concédé pour accéder au parking de ma villa... depuis sa création en 1998 jusqu'à la vente de la villa... ». M Christian O... indique que l'accès à la propriété J... s'effectuait par « le chemin menant à sa villa ». Enfin, M. Michel L..., ancien propriétaire des parcelles [...], [...] et [...] affirme que l'accès au parking situé sur son terrain se faisait par un chemin situé à l'ouest du fonds Y..., seul chemin permettant l'accès à ce parking.

Enfin, par une attestation ne répondant pas aux exigences de l'article 202 du code de procédure civile, M. John P... indique qu'il a toujours pu emprunter en voiture le chemin menant à la villa d'Hervé J....

Jean-Louis Y... conteste ces témoignages et se prévaut d'un constat d'huissier établi à sa demande le 15 avril 2004 mettant en évidence que les noms J... et L... figurent sur deux interphones, ainsi que sur deux boîtes aux lettres disposées à l'entrée de la propriété « [...]» correspondant aux parcelles [...], [...] et [...]. Il soutient que l'accès à l'emplacement de parking se ferait par cette propriété.

Il résulte de ces éléments que si une tolérance de passage a existé un temps au profit de M. Hervé J..., en contradiction avec le titre de servitude la limitant à un passage à pied, aucun pièce du dossier ne permet d'établir que cette tolérance, par nature précaire et révocable, aurait perduré à la date du 13 décembre 2003, lorsque M. J... a choisi de renoncer, moyennant une contrepartie financière, à la servitude de passage officiellement consentie deux ans plus tôt, alors qu'il ne s'était pas assuré de la pérennité de l'accord de M. Jean-Louis Y... pour la tolérance invoquée en contradiction avec l'obligation limitée figurant à son titre de propriété et qu'il venait de faire publier l'accord intervenu entre eux le 13 janvier 1998.

En outre, aucun élément ne permettant d'établir que le passage en voiture aurait perduré après le 13 décembre 2003 sur le fonds Y... et la procédure engagée au possessoire dès le 8 juin 2004 par Mme Brigitte I... ayant acquis le fonds [...] et [...] de M. J... aux fins de passage en voiture sur le fonds Y... établissant qu'à cette date aucune tolérance ne lui était accordée, il ne peut qu'être considéré que l'enclave date de ce moment.

Il résulte de tout ce qui précède que M. J... a volontairement enclavé son fonds.

1.2 Sur la servitude légale de désenclavement:

Aux termes de l'article 682 du code civil: 'Le propriétaire dont les fonds sont enclavés et qui n'a sur la voie publique aucune issue, ou qu'une issue insuffisante, soit pour l'exploitation agricole, industrielle ou commerciale de sa propriété, soit pour la réalisation d'opérations de construction ou de lotissement, est fondé à réclamer sur les fonds de ses voisins un passage suffisant pour assurer la desserte complète de ses fonds, à charge d'une indemnité proportionnée au dommage qu'il peut occasionner.'

Aux termes de l'article 684 du même code: «Si l'enclave résulte de la division d'un fonds par suite d'une vente, d'un échange, d'un partage ou de tout autre contrat, le passage ne peut être demandé que sur les terrains qui ont fait l'objet de ces actes. Toutefois, dans le cas où un passage suffisant ne pourrait être établi sur les fonds divisés, l'article 682 serait applicable.»

Si l'état d'enclave permet de revendiquer un droit de passage sur l'un des fonds voisins par application des dispositions précitées, c'est à la condition que l'état d'enclave résulte de la division d'un fonds et non d'un fait volontaire du propriétaire du fonds enclavé ou de ses auteurs.

Or, ainsi qu'il a été dit, en l'espèce, l'état d'enclave résulte d'un fait volontaire de M. J..., soit la renonciation à la servitude dont il bénéficiait, étant précisé qu'il ne ressort d'aucune des pièces du dossier que la servitude conventionnelle du 25 septembre 2001 ne permettait pas un passage suffisant pour assurer la desserte complète du fonds Z... ou que la topographie des lieux ni les règles d'urbanisme n'auraient pas permis sa mise en oeuvre.

Dès lors, eu égard à cette situation d'enclave volontaire du fait de la renonciation à une servitude de passage sur les parcelles [...], [...] et [...], renonciation dont il n'est au demeurant pas établi qu'elle procèderait d'une volonté d'optimisation fiscale, et quand bien même l'accès par un véhicule automobile correspond à l'usage normal d'un fonds destiné à l'habitation, les époux Z... ne sont pas fondés à revendiquer un droit de passage sur le fonds 319.

Par suite et sans qu'il y ait lieu à ordonner l'expertise demandée à titre subsidiaire, le jugement sera infirmé en ce qu'il avait accueilli cette demande.

2. Sur les dépens et l'article 700 du code de procédure civile :

Les époux Z... succombant en leurs prétentions doivent être condamnés à payer une somme de 2 000 euros à Jean-Louis Y... au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

La demande de la SCI Escape en paiement d'une indemnité au titre de l'article 700 du code de procédure civile étant dirigée contre M. Jean-Louis Y..., qui était fondé en ses contestations, ne peut prospérer.

Les époux Z... seront condamnés aux dépens de première instance et d'appel, avec distraction pour ceux-ci.

PAR CES MOTIFS :

La cour,

Déclare irrecevables les conclusions nouvelles et les douze pièces (numérotées 59 à 70) déposées le 5 mars 2018 par les époux Z...,

Infirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions,

Statuant à nouveau,

Dit n'y avoir lieu à expertise,

Rejette la demande de désenclavement des époux Z... pour leurs parcelles cadastrées section [...] et [...] sur la commune de Vallauris par le fonds de Jean-Louis Y..., cadastré section [...] ,

Condamne les époux Z... à payer à Jean Louis Y... la somme de 2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

Rejette la demande de la SCI Escape en paiement d'une indemnité au titre de l'article 700 du code de procédure civile dirigée contre Jean Louis Y...,

Condamne les époux Z... aux dépens de première instance et d'appel qui seront distraits dans les conditions prévues par l'article 699 du code de procédure civile.

LE GREFFIER LE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : 4e chambre a
Numéro d'arrêt : 16/21370
Date de la décision : 31/05/2018

Références :

Cour d'appel d'Aix-en-Provence 4A, arrêt n°16/21370 : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2018-05-31;16.21370 ?
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